Claudio von Planta : "La moto est une manière amusante de découvrir le monde"

  • il y a 2 ans
Claudio von Planta, caméraman de "Long Way", évoque ces émissions britanniques autour d'un road trip à moto qui ont incité une nouvelle génération de motards à prendre la route.
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00:29 Dans cette édition d'interview, nous sommes avec le réalisateur suisse Claudio Vanplanta,
00:34 qui est peut-être plus connu pour avoir tourné la série "Long Way Up - Down and Round".
00:39 Pouvez-vous nous dire comment c'était de travailler avec Ewan McGregor et Charlie Borman sur cette émission ?
00:45 Eh bien, c'est une expérience très cool. Cela s'est fait totalement par hasard.
00:51 La première série a débuté en 2004. C'était il y a 18 ans. J'étais encore un bébé.
00:58 Quel a été le plus grand défi à relever en tournant cette série ?
01:02 L'endurance. Je n'étais pas du tout habitué à ce genre de long périple à moto.
01:09 Cet aspect était nouveau pour moi parce que j'avais fait de la moto toute ma vie depuis l'adolescence,
01:14 mais seulement dans les villes, car c'est un bon moyen de se faufiler dans le trafic.
01:22 Donc tout d'un coup, je me suis retrouvé dans ces longues aventures à faire des centaines de kilomètres par jour,
01:28 en dehors des routes parfois. C'était une échelle différente en termes d'endurance.
01:36 Je crois que vous avez eu un petit problème au début de la première série car votre permis avait expiré.
01:43 Pouvez-vous nous en parler ?
01:46 C'est juste une blague. Il y a toujours des contre-temps dans la vie.
01:50 Mais c'était très drôle. J'ai eu mon permis moto en Suisse quand j'avais 18 ans.
01:58 J'ai aussi eu le permis poids-lourd. En fait, j'ai tout passé, les permis poids-lourd, voiture, moto et même les grosses motos.
02:06 Mais quand je me suis retrouvé au Royaume-Uni en 1990, ils m'ont obligé, trois ans plus tard,
02:12 à changer le permis Suisse en permis britannique. Dans ce pays, ils ne reconnaissaient pas celui pour les grosses motos.
02:24 Ils m'ont seulement donné un permis jusqu'à 125 cm3 et j'étais trop fainéant pour contester.
02:30 Et aussi parce que je n'avais qu'un petit scooter comme une Vespa.
02:38 Quand cette aventure de Long Way Round s'est présentée totalement par hasard, en fait, ils m'ont appelé.
02:43 Ils avaient besoin d'un gars qui pouvait filmer et faire de la moto. J'ai dit oui, je sais faire de la moto.
02:48 Mais ensuite, j'ai vérifié et j'ai réalisé que mon permis ne convenait pas.
02:54 Vous avez dû le repasser ?
02:57 J'ai dû le repasser. Je n'avais pas le temps de faire valoir mon permis Suisse.
03:01 La seule option était de repasser l'examen au Royaume-Uni.
03:04 J'étais assez confiant, ça ne me semblait pas être un gros problème.
03:08 Je n'avais pas à faire la théorie, uniquement l'examen pratique et me déplacer avec la grosse moto.
03:14 Mais évidemment, j'ai échoué parce que je n'ai pas regardé les angles morts.
03:19 Et donc, ils m'ont recalé et j'ai pensé, c'est fini, je ne serai certainement pas le gars qui filmera l'émission.
03:30 Mais les producteurs se sont dit que ce n'était pas un problème vu mon expérience et ils m'ont quand même gardé.
03:35 J'imagine qu'une ambiance de camaraderie régnait lors du tournage de l'émission.
03:39 Les participants vous faisaient des blagues ?
03:43 J'ai lu quelque part qu'ils allaient sur les marchés locaux et que tous les matins, vous aviez un nouvel objet accroché à votre moto.
03:49 Oui, c'était lors de la dernière série.
03:51 Lors de la dernière série ?
03:53 Oui, lors du tournage de Long Way Up. L'ambiance était très sympa en Amérique du Sud.
03:59 On y trouve toutes sortes de petits souvenirs.
04:02 Ils ont des petits bouts de laine qu'ils mettent sur les lamas et ils aiment aussi leurs chapeaux traditionnels.
04:13 Et donc, les gars ont décoré ma Harley.
04:16 Avec le temps, elle a commencé à avoir un look de hippie. C'était vraiment cool.
04:23 J'avais même un lama accroché. Ils l'appelaient le lama hurleur parce qu'il était comme ça.
04:30 C'était comme à Noël. Chaque jour, j'avais quelque chose de nouveau et c'était très drôle.
04:38 Comment vous êtes-vous lancé dans la réalisation de films ?
04:41 Je crois que vous avez commencé à faire des films en 1985 et à l'époque, vous faisiez plutôt des documentaires.
04:47 Vous travaillez alors dans de nombreuses zones de guerre.
04:50 Je m'étais toujours intéressé à la politique.
04:54 Et vous savez, comme je viens d'un pays sûr comme la Suisse, j'avais envie d'en savoir plus sur ce qui se passe dans les endroits où il y a des conflits.
05:05 Et j'ai eu une bonne formation militaire avec mon service en Suisse.
05:09 Vous savez, tout le monde doit faire son service militaire.
05:12 J'étais dans les forces spéciales et les troupes de montagne entraînées à la guérilla.
05:17 Donc, je n'avais pas peur de me trouver dans des endroits où les gens tirent.
05:22 Je ne pensais pas que ma formation était particulièrement spéciale, car les Suisses, que savent-ils véritablement de la guerre ?
05:29 Ils n'en ont pas connu depuis longtemps.
05:32 Mais quand je me suis retrouvé en Afghanistan, c'est là que j'ai commencé mon métier, je me suis dit, je peux essayer de faire un petit reportage.
05:41 C'était en 1985.
05:46 Et quand j'étais là-bas avec les Mujaheddin afghans, j'ai soudain réalisé que ma formation en Suisse était vraiment top.
05:52 Cruciale.
05:53 Excellente.
05:54 J'avais surtout appris quels sont les effets des armes.
05:59 Je connaissais les armes d'infanterie, les mitrailleuses, les grenades, les mines, les mortiers.
06:06 Je savais ce que ça faisait et ça vous aide à évaluer la situation et à savoir où et quand vous mettre à l'abri.
06:12 Quand évacuer.
06:14 C'est essentiel dans les endroits comme ça.
06:17 C'est à partir de là que j'ai commencé à travailler sur des terrains de conflits qui étaient compliqués.
06:23 Et c'est probablement l'une des raisons pour lesquelles j'ai été engagé dans l'émission Long Way.
06:28 Parce qu'ils avaient besoin d'un gars qui puisse tout faire par lui-même, car il n'avait qu'une seule troisième moto.
06:35 Ils ne pouvaient pas avoir d'équipe et c'est probablement pour cela qu'ils m'ont recruté.
06:40 Vous avez aussi fini dans une prison à l'étranger.
06:44 Cela a été évoqué dans l'un des épisodes de l'émission.
06:47 Pourriez-vous nous en dire plus ? Comment êtes-vous arrivé là ?
06:51 C'est simplement arrivé.
06:55 C'est une sorte de risque professionnel.
06:57 En tant que réalisateur de documentaires, quand vous finissez en prison, vous savez que vous êtes sur une bonne histoire.
07:04 Car quelqu'un veut vous empêcher de la couvrir.
07:07 Mais cette histoire de prison, c'était simplement embêtant.
07:10 C'était à la suite de l'un des voyages que j'ai fait en Afghanistan.
07:14 Pour aller là-bas, il fallait d'abord que j'aille au Pakistan avec un visa touristique de trois mois.
07:21 Une fois au Pakistan, je suis entré en contact avec des Moudjahidines dans l'un des camps de réfugiés de Peshawar.
07:29 Ensuite, il faut rejoindre l'Afghanistan à pied, ce qui prend énormément de temps.
07:34 Quand je suis revenu au Pakistan, mon visa avait expiré.
07:38 Malheureusement, j'ai été intercepté à un poste de contrôle de la police dans la province de la frontière du Nord-Ouest.
07:44 De toute manière, vous n'êtes pas censé vous trouver en tant qu'étranger.
07:49 C'est la première chose. Vous êtes un étranger dans un endroit où vous ne devriez pas être.
07:53 Deuxièmement, mon visa avait expiré.
07:56 Le policier sur place voulait obtenir un pot de vin.
07:59 Je devais verser une commission en guise d'amende, mais je n'avais pas d'argent liquide.
08:03 Il nous a gardé en cellule pour la nuit. J'étais avec un Français à ce moment-là.
08:07 Il nous a dit à tous les deux d'appeler nos ambassades pour régler ce problème d'argent.
08:14 Résultat, mon collègue français était dehors le lendemain.
08:18 Moi, j'ai appelé l'ambassade de Suisse et ils m'ont dit "Oui, mais c'est illégal.
08:23 Vous auriez dû savoir que vous ne pouviez pas voyager dans un pays avec un visa expiré.
08:27 C'est contraire à la loi, on ne peut rien faire."
08:30 Finalement, l'officier de police était tellement en colère qu'il m'a envoyé à la prison centrale de Rawalpindi.
08:36 Et vous savez, une fois que vous êtes dans le système, pour en sortir, cela vous prend un certain temps.
08:42 Combien de temps ?
08:44 Un mois. Il m'a fallu un mois.
08:47 Vous êtes ici à Dubaï parce que vous parrainez son festival du film de moto.
08:53 C'est une communauté très spécifique. Pourquoi des événements comme celui-ci sont-ils importants ?
08:59 Oui, c'est très agréable de voir que partout dans le monde,
09:03 il y a des gens qui se réunissent autour de cette passion commune pour la moto.
09:09 Ici, je n'ai pas vraiment fait de moto, mais ce que j'ai entendu dire,
09:15 c'est que c'est vraiment très bien de rouler dans le désert, pour le tout terrain,
09:19 et il doit y avoir toutes sortes de courses ici. Donc c'est impressionnant.
09:22 Il y a une communauté dynamique ici.
09:27 Tout d'un coup, je réalise que de nombreuses personnes ont été inspirées par l'émission Long Way Round.
09:33 C'est ce qui les a poussées à passer leur permis, à s'acheter une moto,
09:38 et à partir à la découverte du monde.
09:41 Car oui, c'est une manière amusante de découvrir le monde.
09:47 Claudio Von Planta, merci beaucoup d'avoir été avec nous. C'était un plaisir de vous rencontrer.
09:52 Merci beaucoup.
09:57 ♪ ♪ ♪

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