Ça vous regarde - Scandale des Ehpad : un an après, rien n'a changé ?

  • l’année dernière
- Grand témoin : Mathieu Palain, journaliste et auteur de « Nos pères, nos frères, nos amis » (Les Arènes)

LE GRAND DÉBAT / Scandale des Ehpad : un an après, rien n'a changé ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

Victor Castanet, journaliste indépendant, publiait en janvier 2022 un ouvrage choc sur les conditions de vie des séniors en Ehpad dont le groupe Orpea s'occupe. Un an après, le lauréat du prix Albert Londres 2022 sort une nouvelle version « Les Fossoyeurs » (J'ai Lu), augmentée de dix chapitres, dans laquelle il raconte les coulisses de l'affaire, désormais aux mains de la justice française. Annie Vidal, députée Renaissance de Seine-Maritime, avait demandé l'ouverture d'une commission d'enquête à l'Assemblée nationale, sans succès. Finalement, de simples missions flashs ont vu le jour. La poussière est-elle toujours sous le tapis ?

Invités :
- Astrid Panosyan-Bouvet, députée Renaissance de Paris
- Jérôme Guedj, député PS de l'Essonne
- Pascal Champvert, président de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (ADPA)
- Laurent Garcia, président de l'Observatoire du grand âge

LE GRAND ENTRETIEN / Mathieu Palain : dans la tête des hommes violents...
Mathieu Palain a interviewé plusieurs dizaines de personnes - dans la rue, son entourage, les prisons - pour essayer de comprendre la mentalité des personnes condamnées mais aussi les victimes de violences conjugales. Après quelques dizaines de lignes, il s'interroge, en plein #MeToo, sur sa propre famille. Et si sa mère avait déjà été victime de violences ? Et si son propre entourage avait été coupable de violences ?

Grand témoin : Mathieu Palain, journaliste et auteur de « Nos pères, nos frères, nos amis » (Les Arènes)

BOURBON EXPRESS : Elsa Mondin-Gava, journaliste à LCP

LES AFFRANCHIS :
- Iannis Roder, professeur d'histoire-géographie en Seine-Saint-Denis
- Richard Werly, correspondant à Paris pour le média suisse Blick

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 [Musique]
00:05 [Musique]
00:07 Bonsoir et bienvenue à "Vous Regardant Direct".
00:09 Notre grand témoin ce soir, c'est le journaliste et écrivain Mathieu Palin
00:13 qui signe aux arènes une enquête absolument édifiante.
00:16 Nos pères, nos frères, nos amis dans la tête des hommes violents,
00:20 fruit de quatre années de travail sur ces hommes qui frappent leurs femmes.
00:24 C'est un texte important.
00:25 Il fait froid dans le dos et pour une fois, c'est un homme qui s'empare de ces sujets.
00:29 Les violences faites aux femmes, on va en parler.
00:31 On est ensemble pendant une heure pour décrypter l'actualité de ce mercredi 25 janvier.
00:35 Au sommaire ce soir, un an après le scandale Orpea, qu'est-ce qui a changé ?
00:40 L'implacable enquête de Victor Castaner, les Fossoyeurs, fut un électrochoc.
00:45 Sous effectifs, maltraitance, rationnement, la gestion des EHPAD a-t-elle évolué ?
00:50 A-t-on fait des progrès ?
00:51 Et quelle loi faudrait-il voter pour bien vieillir dans notre pays ?
00:55 C'est notre grand débat ce soir dans un instant avec nos invités.
00:58 Avant de retrouver à 20h15 les parties prises de nos affranchis et le Bourbon Express,
01:03 bien sûr, l'histoire du jour à l'Assemblée.
01:05 Mathieu Palin, vous êtes prêt ?
01:06 Je suis prêt.
01:07 Fab, vos regards, c'est parti.
01:08 On a tous en mémoire la déflagration.
01:22 Il y a un an, le scandale Orpea éclatait à la faveur de l'apparition d'un livre
01:26 qui choquait la France entière, des résidents privés de soins élémentaires,
01:30 le rationnement sur les couches, les repas pour maximiser les profits
01:34 et un système généralisé de détournement d'argent public.
01:38 Un an après, qu'est-ce qui a changé ?
01:40 Les problèmes ont-ils disparu ? A-t-on fait des progrès ?
01:44 Bonsoir, Astrid Panosian-Bouvet.
01:46 Merci d'être avec nous.
01:47 Vous êtes députée Renaissance de Paris et c'est vous qui portez la proposition de loi
01:51 qui sera discutée à l'Assemblée au printemps prochain, après les retraites.
01:54 C'est possible de penser après retraite.
01:57 J'en ai modestement coordonné la rédaction.
02:00 C'est une proposition de loi sur le bien vieillir ensemble.
02:03 C'est l'expression consacrée.
02:05 Bonsoir, Jérôme Gage.
02:06 Merci d'être là.
02:07 Député socialiste de l'Essonne, grand spécialiste des questions liées au grand âge.
02:11 Vous avez publié des livres et des rapports sur le sujet.
02:14 Bonsoir, Laurent Garcia.
02:15 Bonsoir.
02:16 Merci d'être avec nous.
02:17 Vous êtes le président de l'Observatoire du Grand Âge
02:19 et le tout premier lanceur d'alertes à l'origine des fausses voyeurs, de Victor Castaner.
02:24 C'est simple, sans vous, il n'y a pas ce livre.
02:26 Puisque vous étiez cet ancien cadre infirmier des Bordesseine,
02:31 on se souvient, c'est le nom de l'établissement privé Orpea,
02:34 à Neuilly-sur-Seine, vous nous en parlerez.
02:37 Bonsoir, Pascal Chanvert.
02:38 Bonsoir.
02:39 Grande figure de ces questions depuis beaucoup d'années.
02:43 Vous êtes le président de l'ADPA, l'Association des directeurs au service des personnes âgées.
02:47 Merci à tous les quatre.
02:48 Je suis sûr, Mathieu Pellin, que ce débat vous intéresse.
02:51 Vous avez un grand-père, je crois.
02:53 J'ai un grand-père de 96 ans qui vit encore chez lui.
02:56 Mais forcément, à cet âge-là, on se dit que la dépendance est possible.
03:02 C'est le débat de société qui touche au cœur de toutes les familles françaises.
03:06 On va planter le décor pour commencer.
03:08 J'appelle mon camarade et complice Stéphane Blakovski.
03:10 200 secondes pour nous dire ce qui a changé.
03:12 Le pari, voilà, il est élevé.
03:14 On l'accueille tout de suite.
03:16 Le chrono de Blako.
03:18 [Musique]
03:21 Stéphane, on se retourne pour vous accueillir.
03:24 Bonsoir à toutes et à tous.
03:26 Du haut de cet estrade.
03:28 Alors, pour commencer, Myriam, rendons à Victor ce qui appartient à Victor.
03:33 Car si, je suis ce soir sur cet estrade pour lancer un débat sur la situation dans les EHPAD, c'est grâce à lui.
03:39 Il s'appelle Victor Castanet, il a 35 ans.
03:43 L'an dernier, quasiment un an jour pour jour, il publiait "Les Fausseuilleurs".
03:46 Donc, cette enquête qui révélait les méthodes du groupe privé Orpea dans la gestion de ses 350 EHPAD en France.
03:54 Donc, vous le disiez, tout le monde s'en souvient a priori, surtout sur ce plateau.
03:58 Mais le livre avait fait un peu l'effet d'une bombe.
04:00 Donc, j'ai trouvé une image pour un peu illustrer l'impact de la déflagration.
04:04 Vous vous rendiez compte des dégâts que ça a causé.
04:06 Attention, âme sensible, s'abstenir.
04:08 Et oui, ça c'est le décrochage de l'action Orpea, vous voyez, du moment où le bouquin a été publié.
04:14 Et ça ne s'est pas vraiment arrangé par la suite.
04:17 Donc, on imagine bien que 30% des EHPAD en France étant en main de groupes privés.
04:21 Les gars ont quand même dû sentir passer le vent du boulet.
04:24 Donc, il y a sans doute une prise de conscience.
04:26 C'est ce que pense Victor Castanet qui était ce matin sur France Inter. On l'écoute.
04:30 Le secteur a pris conscience de l'ampleur de la crise et du lien de confiance qui s'était rompu à la fois avec les familles et avec les soignants, les salariés de ce secteur.
04:43 Et que donc, si ce secteur, notamment la partie lucrative, veut survivre à cette crise, il va falloir qu'elle change en profondeur.
04:51 Alors, après ce qu'on a dit, pareil, on se pose toujours la même question.
04:54 Mais bon sang, mais que fait le gouvernement ? Mais ce n'est pas possible.
04:57 Le gouvernement ne peut pas rester les bras croisés.
04:59 Qu'a-t-il fait depuis un an ? Il a eu l'idée, qui n'est pas mauvaise, après tout, de lancer une inspection dans les 7500 EHPAD de France.
05:05 Donc, très bonne initiative, Kevin.
05:07 Sauf que, en fait, pour l'instant, cette année, 20% des EHPAD ont été inspectés. Il en reste donc 80 à inspecter si on veut respecter le contrat.
05:15 Aïe, aïe, aïe, je suis désolé, mais je vais être vulgaire.
05:17 Dès qu'on parle de situation dans les EHPAD, on arrive au nerf de la guerre, l'argent.
05:21 Tout ça, une question d'argent.
05:22 Il ne faut pas imaginer des aides-soignants sadiques qui se seraient infiltrés. Non, rien à voir.
05:26 S'il y a de la maltraitance dans les EHPAD, c'est parce qu'on manque de personnel.
05:30 Et Claire Guédon, défenseuse des droits, ou défenseur, on doit dire, des droits, l'explique très bien en écoute.
05:35 Si vous n'avez pas suffisamment de personnel, de fait, vous êtes maltraitant.
05:39 Quand vous demandez à une aide-soignante de faire 15 toilettes en deux heures, mais de fait, elle devient maltraitante malgré elle.
05:46 Et c'est bien pour ça qu'il y a des difficultés de recrutement.
05:49 Les aides-soignantes, elles vont revenir, et elles le disent très clairement, si elles savent qu'elles n'auront justement plus 15 toilettes à faire en deux heures.
05:55 Bon, voilà, je suis désolé. On va en revenir à une question d'argent.
05:59 Comment on fait pour embaucher des gens ? Ça coûte de l'argent.
06:01 La FHF, c'est-à-dire la Fédération hospitalière de France des hôpitaux publics, eux, ils disent qu'il faudrait 100 000 emplois nouveaux dans les EHPAD d'ici 2030.
06:10 Le gouvernement dit, bon, peut-être que 50 000 en 2027, ça serait déjà pas mal.
06:15 On comprend que le gouvernement a des soucis, tout ça, il y a plein de budget.
06:18 Mais en même temps, l'année prochaine, il y a seulement 3 000 emplois supplémentaires prévus dans les EHPAD.
06:23 Donc, on se retourne vers le président Macron, on dit, mais monsieur Macron, c'est pas possible.
06:26 Sauf que regardez, il fait des très belles photos, Emmanuel Macron, quand il visite les EHPAD, montrer sa proximité avec les anciens.
06:32 Sauf que bon, il avait prévu une loi sur le grand âge en 2018, elle a été abandonnée, manque d'argent.
06:37 Il en avait prévu une autre en 2021, elle a été abandonnée aussi.
06:40 Donc, j'espère que celle de 2023 aura plus de succès, mais je ne veux même pas la câbler parce que, en définitive, c'était pareil pour François Hollande.
06:46 Avant lui, il faisait de très belles photos, lui aussi, dans les EHPAD.
06:49 Promesse 18 de son programme, une grande réforme sur l'indépendance, mais quand on n'a pas d'argent, on ne réforme pas la dépendance.
06:54 Et pour rendre hommage à Nicolas Sarkozy, qui faisait les mêmes photos que tout le monde, on dira qu'il était le premier, en quelque sorte, à dire,
07:00 "Attention, il faudrait faire quelque chose pour la dépendance avant que la crise de 2008 ne fasse dire, on n'a pas d'argent, on ne le fera pas."
07:06 Donc, je vais vous laisser débattre, juste avant, une illustre, beaucoup moins jolie, un petit papier un peu dégueulasse, mais en fait, c'est le chiffre qu'il faut retenir.
07:13 C'est issu d'un rapport écrit par quelqu'un qui s'appelle Dominique Libaud, un ancien directeur de la Sécu, qui nous dit qu'en fait,
07:19 il faudrait dépenser 6 milliards de plus par an à partir de 2024 et 9 milliards de plus par an à partir de 2030 pour régler les problèmes des EHPAD.
07:29 Donc, je vais vous laisser débattre, mais il est question de milliards à trouver, donc j'espère que vous penserez à nous dire où vous trouvez tous ces milliards pour aider nos anciens.
07:37 C'est sûr, 9 milliards par an, il faut se figurer les choses, à partir de 2030. Merci beaucoup, le décor est planté.
07:44 On va venir à ce qu'il faudrait faire, c'est un sujet complexe, mais j'aurais déjà qu'on parle d'Orpea, parce que ce qui a scandalisé les Français,
07:51 c'est ce qui s'est passé dans ce très très grand établissement privé d'EHPAD.
07:57 Déjà, Laurent Garcia, vous qui êtes passé par Orpea, on a entendu ce matin la nouvelle direction d'Orpea sur France Info nous dire que
08:04 tolérance zéro sur les pratiques illégales, une trentaine de personnes ont été mises à la porte, d'ailleurs pour fautes graves, il y a la justice qui est saisie.
08:14 Est-ce que tous les éléments les plus dysfonctionnels d'Orpea sont terminés ? Est-ce que le système Orpea, c'est fini ?
08:22 Alors, je ne peux pas vous dire oui ou non. Ce qui est sûr, c'est que moi, j'ai des salariés d'Orpea qui m'appellent encore et qui sont toujours en souffrance.
08:30 Donc, le système est peut-être terminé, ce système mafieux, je pense qu'il est terminé.
08:36 Après, Orpea a quand même continué à travailler avec quelques fournisseurs qu'ils avaient auparavant et avec qui ils détournaient de l'argent public.
08:45 Ces fournisseurs sont toujours là. Bourdin, qui a été remercié de chez Orpea, et quand même encore directeur général du groupe Bastide,
08:54 qui est un fournisseur de matériel médical. - Oui, c'est ça. Pour bien comprendre, c'est un système de surfacturation qui a été condamné avec des fournisseurs,
09:04 et vous nous dites qu'ils sont toujours en lien commerciaux avec Orpea. - Notamment encore deux fournisseurs qui sont toujours en lien avec le groupe Orpea.
09:11 Donc, que tout a changé, je ne crois pas. Qu'Orpea soit dans une situation difficile, j'en suis certain. Mais voilà, j'attends de voir.
09:20 - Les excédents de dotation, il y a eu d'autres établissements qui ont été pointés du doigt. Ce système Orpea, il faut bien l'expliquer, peut-être, Pascal Chanvert.
09:30 C'était l'idée qu'on a une enveloppe négociée avec la région, le département, et elle ne peut pas bouger, c'est ça ?
09:38 Et donc, les fournisseurs, en surfacturant, en faisant par exemple des couches ou des produits de santé plus élevés, les établissements pouvaient s'enrichir sur ça ?
09:49 - En gros, c'est ça. Il faut bien voir que ce qu'a très bien décrit l'an dernier Victor Castaner, c'est un système de cupides et de malhonnêtes.
09:58 Bon, juste un mot là-dessus. Ce système aussi dysfonctionnel, il n'a été possible pendant tant d'années que parce que l'ensemble du système des établissements,
10:13 mais aussi des services à domicile, l'ensemble du système des personnes âgées dysfonctionne. Si on était dans un système qui fonctionnait correctement,
10:21 la malhonnêteté, la cupidité, la restriction sur tous les moyens pour les personnes âgées, que ce soit l'alimentation, que ce soit le temps passé auprès des personnes âgées,
10:33 dans un système qui fonctionnerait, ça se serait vu tout de suite. Pourquoi le système Orpea, il a pu fonctionner si longtemps ?
10:40 Parce que tout le monde sait en France que quand on vit dans un établissement, comme le dit Claire Hédon, on n'a pas suffisamment de professionnels qui passent du temps auprès de vous.
10:49 Et c'est la même chose à domicile. Non mais je m'éloigne pas. C'est parce que le système dysfonctionne globalement que des malhonnêtes ont pu aller au bout du bout du système et détourner de l'argent.
11:01 Pour bien comprendre, parce que toujours sur Orpea, aujourd'hui, il y a cette nouvelle édition chez Gélu de Victor Castaner qui montre aussi comment ce journaliste d'investigation a été intimidé, Jérôme Guedj,
11:15 par toute une série de choses, des cabinets de conseil, par des commandes de sondage, par des établissements d'épat privé, Corian, Orpea, qui se cachaient derrière,
11:27 parfois même, il y a deux types de sondages, des sondages réels et puis des sondages truqués, plateau de Cyril Hanouna. Tout ça, ça vous surprend ou pas ?
11:36 Non, ça ne me surprend pas parce qu'on est sur des activités qui malheureusement sont devenues tellement financiarisées, c'est-à-dire que le centre de gravité de l'activité même s'est déplacé de la qualité de la prise en charge,
11:50 sur laquelle il peut y avoir des acteurs privés, enfin il y a plein d'acteurs privés dans le pays, il y a des cliniques privées, il y a des entreprises privées dans des marchés publics, etc.
12:00 Mais là, le centre de gravité s'était déplacé avec des gens qui se sont dit "ben tiens, on peut gagner beaucoup d'argent", et donc il y a eu un système, je ne suis pas sûr qu'on peut le qualifier de mafieux,
12:09 mais en tous les cas, dans lequel il y a des gens qui se sont dit "on a beaucoup d'argent à gagner là", et donc là où il y a beaucoup d'argent, après, on essaye de préserver ça,
12:17 et donc on est dans les batailles d'influence, de lobbying, de fake news, de désinformation, pour essayer de sauvegarder une image, parce qu'on voit bien qu'on est sur des acteurs pour lesquels l'image compte.
12:30 Donc derrière ça se pose la question de savoir si c'est légitime d'avoir des acteurs, non pas privés, mais des acteurs quels qu'ils soient, qui pouvaient fonctionner sans garde-fous, et le vrai problème il est là.
12:42 Et l'absence de garde-fous, et je prolonge ce que dit Pascal, c'est que quand on est dans un secteur dans lequel, malheureusement, on est tous, quand je dis "on", c'est nous la société française,
12:54 responsable d'avoir organisé une insuffisance de moyens qu'on a décidé de donner, ben on ne veut pas aller contrôler forcément des acteurs, parce qu'on va forcément exciper les difficultés,
13:06 qui sont celles de tous les EHPAD, qu'ils soient publics, associatifs ou privés, qui est que la collectivité nationale ne donne pas suffisamment de moyens.
13:14 Donc ceci explique un peu cela, c'est le prolongement de la crise hors PA, mais pour terminer sur hors PA, actuellement il y a des gens qui veulent nettoyer les écuries d'Augias, j'espère qu'ils le font avec rigueur.
13:26 Il faut d'abord qu'ils soldent l'argent qui a été détourné, ils ont mis un peu de temps à rembourser et à débattre, y compris du montant des choses qui a été détourné,
13:33 et puis moi, il y a un point sur lequel j'attire notre attention collectivement, c'est que l'État a porté plainte, les collectivités, les départements ont porté plainte,
13:40 qu'il y a bien un moment, il va falloir aussi que la justice passe. Donc depuis un an, il y a des procédures judiciaires qui sont ouvertes, mais je constate que pour l'instant,
13:48 elles n'ont pas encore abouti, on a commencé à documenter à partir du travail de Victor Castaner, des inspections qui ont été faites, mais à un moment, il faudra bien aussi que la justice passe,
13:57 parce que c'est une caisse de résonance dans le débat public et aussi une manière de dire que des gens doivent être sanctionnés.
14:04 - Oui, bien sûr, mais la justice, voilà, elle prend du temps dans notre pays.
14:08 Dernier élément nouveau dans l'enquête de Victor Castaner, puis ensuite on arrive sur ce qu'il faudrait faire, ce sont ses élus.
14:15 Alors, il y a Jean-Louis Borloo, qui est épinglé dans le livre, qui, je dis "aurait prévenu Corian", c'est ce qu'affirme Victor Castaner, lui, dément,
14:24 et puis il y a cette députée de la majorité, Astrid Panosian-Bouvet, Anne Hividal, qui signe une tribune dans la presse juste après le scandale pour réclamer une commission d'enquête à l'Assemblée.
14:33 Ses collègues dans la majorité la critiquent pour ne pas dire, font pression sur elle pour que, eh bien, cette commission n'ait pas lieu. Écoutez-la.
14:40 J'ai considéré que je devais signer cette tribune, que je pouvais signer cette tribune, parce que j'étais convaincue que c'était le meilleur moyen pour aller chercher la vérité.
14:54 Certains de mes collègues m'ont effectivement envoyé des messages me disant que ma signature était inopportune, que je ne rendais pas service au candidat Macron,
15:07 et qu'à ce titre, je n'avais plus ma place dans le groupe.
15:11 Moi, je ne pense pas que cette commission aurait fait du tort à Emmanuel Macron. Cette commission aurait eu pour moi l'avantage de faire éclater la vérité, et faire éclater la vérité, c'est toujours profitable à un président de la République.
15:25 Voilà, des propos recueillis par Marco Pomier, Astrid Panosian-Bouvet, vous qui venez d'arriver à l'Assemblée depuis 2017, depuis 2022, pardon. Comment vous réagissez ?
15:34 Depuis 2022. On dit souvent que le courage est la première des vertus, mais qu'elle est la moins partagée.
15:39 Et voilà, moi, je veux saluer le courage...
15:42 C'est grave quand même, parce que les Français qui entendent ça, qui vont lire ça, vont vraiment s'inquiéter.
15:46 Je veux saluer le courage de Victor Castaner, malgré toutes les intimidations dont, effectivement, il témoigne dans cette nouvelle édition.
15:52 Je veux saluer le courage de Laurent Garcia et des salariés, qui parfois, leur risquaient péril, ou parfois sont revenus sur des histoires anciennes dont ils n'arrivaient pas à sortir et qui les faisaient souffrir.
16:03 Une commission d'enquête, elle avait toute sa place à l'Assemblée nationale.
16:06 Je veux aussi saluer le courage d'Anne Vidal, qui a demandé une commission d'enquête, parce que c'est ce qu'il faut. Il ne faut pas avoir peur de la vérité.
16:16 À partir du moment où on commence à avoir peur de la vérité, c'est mauvais signe, à la fois pour une institution ou pour une organisation.
16:22 Et là, effectivement, on a besoin, politiquement, mais même en tant que société, de savoir comment ça a été rendu possible.
16:30 -Quand elle dit "en fait, ça n'aurait pas forcément déstabilisé le président candidat à l'époque".
16:34 -Bien au contraire, elle avait totalement raison. On a besoin de savoir précisément comment cela a été possible et en tirer les enseignements.
16:42 -Alors, je voudrais qu'on les entende, ces familles, et puis je vous donne la parole juste après.
16:46 Témoignage qui montre bien qu'il reste beaucoup à faire, y compris dans les EHPAD publics.
16:50 Isabelle Jardilier témoigne des conditions dans lesquelles a vécu sa mère.
16:53 C'était la veille de la sortie des Fossoyeurs, il y a un an, en janvier 2022.
16:58 Elle alertait l'Agence régionale de santé et dénonçait un système de maltraitance.
17:02 Verbatim signé Hélène Bonduelle.
17:04 En plaçant Janine, 84 ans, en EHPAD en 2016, Isabelle n'imaginait pas que sa mère vivrait un calvaire au quotidien.
17:21 -La première chose qu'elle a vécu très très difficilement, c'est de n'avoir qu'une douche par semaine.
17:26 Et ça, c'est sur le papier, parce que plusieurs fois j'ai dû intervenir, puisqu'elle restait 15 jours sans douche.
17:33 La deuxième chose qu'elle a très très mal vécue, c'était l'obligation de porter des protections, que le personnel appelle couches.
17:40 Moi, ce qui me choque, ce terme me choque personnellement.
17:44 Donc elle est obligée d'en porter la nuit, parce qu'il n'y avait pas assez de personnel pour venir l'accompagner aux toilettes.
17:52 Moi, j'appelle ça de la maltraitance "ordinaire". Je mets des guillemets à cette ordinaire-là, parce que c'est tout sauf ordinaire.
17:59 Mais c'est de la maltraitance quotidienne, quoi, oui.
18:02 Des repas mal adaptés, des douleurs non traitées pendant des mois, un manque de soins.
18:08 Isabelle n'a cessé d'alerter la direction.
18:12 Quand je faisais remonter les choses, dans un premier temps, la situation pouvait s'améliorer pour ma mère.
18:18 Mais les améliorations étaient toujours de très très courte durée.
18:22 Et je savais pertinemment que si ça s'améliorait pour elle, ça se détériorait pour d'autres.
18:29 Pourquoi ?
18:30 Parce qu'il n'y avait pas assez de personnel pour s'occuper de l'ensemble des résidents des résidentes.
18:35 Un manque de personnel, criant dans cette épave publique du centre de la France.
18:40 Alors quand le scandale orpéa éclate il y a un an, Isabelle, qui vient de signaler à l'ARS les conditions de soins de sa mère, n'est pas étonnée.
18:50 Je me suis dit, en fait, c'est pas mieux dans le public, mais on n'en parle pas, parce qu'on n'imagine pas qu'il y a cette maltraitance ordinaire.
19:00 Il y a une véritable atteinte aux droits fondamentaux des personnes âgées.
19:04 Jeannine confie même à sa fille avoir l'impression d'être en prison, d'être abandonnée.
19:11 Ma mère à plusieurs reprises me disait, elle se plaignait, puis elle me disait "dis rien, dis rien, parce que ça va me retomber dessus".
19:17 Voilà, il y a vraiment une peur, et des résidents, des résidentes, et des familles.
19:21 D'ailleurs le personnel avait interdiction de parler aux familles.
19:24 Jeannine est décédée le 10 novembre dernier.
19:28 La veille, l'ARS était enfin venue inspecter l'établissement.
19:33 Isabelle a porté plainte pour maltraitance auprès du procureur de la République,
19:38 et elle continue de se battre aux côtés d'un collectif qui milite pour vieillir dans la dignité.
19:45 On nous parle de cette fameuse loi de fin de vie, mais bon, mourir dans la dignité c'est bien,
19:49 mais je pense qu'il faut commencer par vieillir dans la dignité, donc il faut des moyens.
19:53 Alors les moyens, d'abord, comment on peut les trouver dans ce quinquennat ?
19:58 Pascal Chauvert, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ça y est,
20:01 tout le secteur est dans la prise de conscience ?
20:04 D'ailleurs, il y a une forme de rupture avec les familles, on le voit,
20:07 et avec les acteurs, les soignants dans les établissements,
20:11 et qu'il va falloir réparer. Vous, qu'est-ce que vous attendez, précisément ?
20:15 -Le secteur n'est pas dans la prise de conscience depuis le livre de Victor Castaner.
20:19 Moi, vous savez, ça fait 35 ans que je travaille dans les établissements,
20:23 les services à domicile pour personnes âgées,
20:25 ça fait 35 ans que je dénonce le manque de personnel,
20:28 et pas moi tout seul, avec l'association que je préside,
20:31 la DEPA, mais aussi avec l'ensemble des organisations professionnelles.
20:34 Tout à l'heure, on a parlé de la Fédération hospitalière de France.
20:37 Donc nous, nous ne découvrons rien, ces maltraitances au quotidien,
20:41 nous les connaissons, mais nous avons fait paraître l'an dernier une plateforme
20:45 disant "arrêtons de maltraiter les personnes âgées
20:48 et les professionnels qui les accompagnent".
20:51 Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que pendant des années,
20:53 nous étions nous-mêmes maltraités par les pouvoirs publics.
20:56 Je me souviens d'un des responsables de la DEPA,
20:59 auquel un responsable de département a dit "écoutez, vos histoires de qualité,
21:03 vous gardez ça pour vos colloques, ici, on parle de choses sérieuses,
21:06 c'est-à-dire de finances, donc nous n'avons pas les moyens
21:09 de vous donner les finances que vous demandez, donc vous ne les aurez pas,
21:13 donc vous bossez et vous arrêtez vos plaisanteries".
21:15 C'est comme ça que, depuis des années et des années,
21:19 les pouvoirs publics, Etat et département, ont toujours réglé
21:23 la situation du manque de moyens, c'est en demandant à des professionnels
21:27 de s'adapter à des situations dans lesquelles la variable...
21:30 -Le premier responsable, c'est l'Etat.
21:32 -Dans lesquelles la variable d'ajustement,
21:34 ça a toujours été la qualité de vie des personnes âgées.
21:37 Le premier responsable, c'est l'Etat et les départements.
21:41 Et je dirais, les présidents de la République,
21:44 on aurait pu parler de Jacques Chirac,
21:46 il était président du temps de la canicule,
21:48 il avait eu un discours fort,
21:50 ensuite Nicolas Sarkozy, ensuite François Hollande,
21:54 ensuite Emmanuel Macron.
21:56 Le problème, c'est qu'ils ne sont, ni les uns ni les autres,
21:59 jamais allés au bout de leurs engagements.
22:01 -Comme si nos anciens, c'était toujours la dernière des priorités.
22:05 -C'est l'agisme. -Je pense que l'agisme...
22:07 -Juste un mot là-dessus, c'est la discrimination par l'âge,
22:10 et dans une société agiste, c'est toujours le dossier,
22:14 après tous les autres, il y a toujours quelque chose
22:17 de plus important, et ça aboutit à la situation qu'on connaît.
22:21 -Astrid Panouzian-Bouvet, déjà, les contrôles,
22:24 parce que pour pouvoir employer,
22:26 ramener des effectifs, rendre attractifs,
22:29 il faut voir ce qui se passe.
22:31 L'Etat a les moyens de ces contrôles,
22:33 on n'en est même pas à la moitié des établissements.
22:36 -Je veux dire une chose,
22:38 les chocs d'émotion, ils n'ont pas commencé
22:41 avec l'affaire Kassani.
22:43 Il faut se rappeler du choc autour de la canicule, en 2003,
22:46 il faut se rappeler du choc de la première vague Covid aussi,
22:50 qui a marqué les familles et les professionnels de santé.
22:53 Donc oui, moi, je souscris à ce qu'il y a eu.
22:56 -Mais malgré tout, on a l'impression
22:58 qu'on n'a pas les moyens de réparer.
23:00 -C'est insurré qu'on n'a pas...
23:02 D'abord, qu'on n'a peut-être pas voulu voir.
23:05 Et c'est vrai qu'en France aussi, on a fait ce choix,
23:08 et vous qui travaillez dans votre domicile,
23:10 vous avez vu, par rapport à d'autres pays,
23:12 notamment en Europe du Nord, un choix d'hébergement en EHPAD
23:15 plutôt que le choix du domicile,
23:17 qui est pourtant le choix plébiscité par les familles
23:20 tant que c'est possible.
23:21 Donc il y a un sujet aussi collectif, je pense,
23:24 à un moment donné, un choix de société
23:26 de ne pas vouloir voir les problèmes qui fâchent.
23:29 Et donc ça va passer par des contrôles, naturellement,
23:32 et il y a des engagements, des choses qui ont été prises.
23:35 Monsieur Combes disait aujourd'hui
23:37 qu'il y avait 400 contrôles qui avaient été faits.
23:39 Et que l'objectif, c'est d'arriver à un contrôle tous les deux ans.
23:43 En Allemagne, ils ont un contrôle tous les ans,
23:45 donc on peut faire mieux.
23:46 Mais c'est vrai qu'on part de 20 ans, voire de 7 ans, tous les 7 ans.
23:49 Donc oui, mais c'est pas suffisant.
23:51 C'est pas simplement par le contrôle.
23:53 Il faut mettre en place un véritable processus d'amélioration continu
23:57 avec la sanction derrière, mais aussi avec, effectivement,
24:00 des moyens qui permettent un meilleur taux d'encadrement.
24:03 Et puis des choses qu'il faut aussi sanctuariser dans le droit.
24:06 Je pense qu'une des choses qui sont remontées régulièrement
24:09 auprès de la défenseure des droits, c'est la question du droit de visite.
24:12 Ça, c'est vraiment quelque chose qu'il faut rétablir dans la loi.
24:15 Préciser le rôle de la personne de confiance...
24:18 -Ca tombe sous le sens que le droit de visite existe.
24:21 Il n'est pas garanti. -Oui, mais ça fait partie...
24:23 -C'était 46 % ? -46 % des remontées
24:25 faites à la défenseure des droits, c'était sur le droit de visite.
24:28 Donc cette proposition de loi, dont madame Annie Vidal
24:31 sera rapporteure avec madame Monique Iborra,
24:33 elle va sanctuariser ce droit de visite
24:35 comme elle va préciser le rôle de la personne de confiance.
24:38 C'est certainement pas la solution à tout.
24:41 Je ne dis pas que c'est la solution à tout.
24:43 Il nous faut une loi grand âge.
24:45 Mais en attendant, on essaie de répondre à quelques sujets du quotidien.
24:49 Il y a ces sujets-là et les indicateurs qualité,
24:51 pour pouvoir aussi faire du libre choix
24:54 autour des indicateurs qualité.
24:56 -Il y a une plateforme qui signale les maltraitances aussi,
24:59 qui a été mise en place par le gouvernement.
25:01 Jérôme Guedj, ça fait des années que vous dites
25:04 qu'il va falloir trouver des dizaines de milliards.
25:06 On était à 10 milliards, en gros, par an, à l'horizon 2030.
25:09 Où on les trouve ?
25:11 Jusqu'à présent, aucun gouvernement de droite comme de gauche
25:14 ne les a trouvés et ne s'est lancé dans cette référence.
25:16 -Pour les raisons que rappelait Pascal Chanvert,
25:18 c'est qu'il y a cet agisme latent dans la société.
25:21 C'est pour ça que je pense qu'il y a une responsabilité collective
25:24 de la société, dont l'Etat et les collectivités locales
25:28 sont, d'une certaine manière, le bras armé.
25:31 Sauf qu'il y a des moments où il faut que l'avant-garde soit éclairée
25:35 et qu'on soit capable de prendre les bonnes décisions.
25:38 Ce qui est très paradoxal, Astrid le rappelait,
25:41 au gré des différentes crises, la canicule, le Covid,
25:44 ou l'affaire Horpère, il y a ce prurit émotionnel,
25:48 et après, c'est business à joujouel, ça retombe.
25:51 Je vous prends un seul exemple, on parlait des contrôles.
25:54 C'est bien, on peut en faire, mais je reviens sur ce que je disais.
25:57 Si on fait des contrôles, mais qu'on constate
26:00 que de toute façon, les situations sont problématiques
26:03 parce qu'il n'y a pas assez de moyens,
26:06 Stéphane Blakoski le rappelait, de personnel dans les EHPAD,
26:09 on a le même type de problème dans les services à domicile,
26:12 y compris en termes de rémunération.
26:14 Je vous prends un exemple, c'est révélateur.
26:16 Je veux jeter la pierre à personne,
26:18 même si on prend ses responsabilités.
26:20 L'année dernière, c'était Brigitte Bourguignon,
26:22 la ministre chargée des Personnes âgées.
26:24 Devant une commission d'enquête parlementaire,
26:26 au Sénat, cette fois-ci, ou une audition parlementaire,
26:28 elle annonce le renforcement des contrôles
26:30 et elle dit maintenant, dans la transparence,
26:32 on va publier des indicateurs de transparence très clairs
26:35 pour que les gens puissent savoir ce qui se passe dans les EHPAD
26:37 quand ils choisissent un EHPAD.
26:39 Elle annonce 10 critères.
26:41 Parmi ces 10 critères, il y en a 5 qui sont très importants
26:43 parce que ça dit le taux d'encadrement,
26:45 c'est-à-dire combien il y a de personnel dans l'EHPAD,
26:47 ça dit le taux de rotation du personnel,
26:49 si les gens partent au bout de 6 mois, ça veut dire qu'ils s'y sont bien,
26:52 ça dit le taux d'absentéisme,
26:54 et puis il y en avait un autre, c'était le budget journalier par report.
26:57 - Quels sont les résultats de ces critères ?
26:59 - Elle annonce 10 critères, elle fait un communiqué de presse,
27:01 la ministre, le 31 décembre dernier,
27:04 l'arrêté prend des critères,
27:07 et n'en prend que 5,
27:09 qui sont, on va dire, très homéopathiques.
27:11 C'est la superficie des chambres,
27:13 savoir s'il y a un lit ou deux lits,
27:15 savoir si on peut bénéficier de l'aide sociale dans l'établissement.
27:19 - Pourquoi ?
27:21 - Et franchement,
27:23 je pense que c'est parce que
27:25 si on mettait ces critères en transparence,
27:28 on mesurerait le cœur du problème,
27:31 qui est celui dont il faut parler,
27:33 qu'à un moment donné, on n'échappera pas
27:35 à dégager des moyens financiers dans notre société.
27:37 Et tout ça est consensuel.
27:39 Le rapport Libo, en effet, il a dit 6 milliards,
27:41 alors bien sûr, c'est des sommes qui font peur,
27:43 mais derrière, c'est pas de l'argent pour les personnes âgées,
27:46 c'est de l'argent pour créer des emplois,
27:48 et uniquement des emplois,
27:50 des emplois dans les territoires,
27:52 des emplois en zone rurale,
27:54 à domicile...
27:56 - Moins tout le monde à pièces, pour une fois, ça fait plaisir.
27:58 - On a le consensus sur le diagnostic,
28:00 et là où il y a un désaccord,
28:02 sur lequel tout le monde s'est fracassé,
28:04 c'est d'aller chercher 6 ou 9 milliards d'euros.
28:06 Même la Cour des comptes, qui n'est pas un repère de gauchistes,
28:08 qui d'habitude dit qu'il faut baisser la dépense publique,
28:10 même là, ils disent maintenant
28:12 qu'il faut l'augmenter d'un milliard par an.
28:14 Et on ne le fait pas. Dans le dernier PLFSS,
28:16 on a fait la moitié du chemin. C'est bien, je le prends.
28:18 Mais à un moment donné, il va falloir aller chercher l'argent,
28:20 et c'est le partage, c'est la solidarité,
28:22 c'est la sécurité sociale...
28:24 - Le témoin du terrain et de l'intérieur.
28:26 Si on avait ces milliards,
28:28 et si on arrivait à rendre attractifs à nouveau ces emplois,
28:30 parce qu'aujourd'hui, personne ne peut recruter.
28:32 - Je ne veux même pas vous parler de ces milliards.
28:34 Je suis agacé en ce moment.
28:36 Le véritable faux soyeur, c'est l'Etat.
28:38 Ce n'est pas le livre de Victor Castaner, c'est l'Etat.
28:40 Parce que que fait l'Etat à l'heure actuelle ?
28:42 Il fait le conseil national de la refondation,
28:44 la fabrique du bien vieillir.
28:46 On donne aux noces à ronger, aux associations, aux familles,
28:48 et au total, on ne fait rien.
28:50 Entre 2018 et 2022, 7 rapports,
28:52 plus de plusieurs centaines de préconisations,
28:54 et l'Etat n'en tient pas compte.
28:56 Le véritable faux soyeur, à l'heure actuelle,
28:58 c'est l'Etat.
29:00 Il ne fait rien.
29:02 Et quand on a contrôlé quelque chose qui va mal,
29:04 ben oui, ça ira mal, forcément.
29:06 Venez contrôler n'importe quelle EHPAD,
29:08 ça va mal.
29:10 Et obliger des salariés à mettre des croix dans des cases
29:12 au lieu de s'occuper des résidents,
29:14 ça ne peut pas fonctionner non plus.
29:16 Donc oui, on est en colère, là.
29:18 On est en colère parce que j'ai l'impression,
29:20 et je vais être vulgaire, on se fout littéralement
29:22 de notre gueule, en fait.
29:24 On en est là, on se moque de nous.
29:26 Alors, des contrôles, l'ARS va nous contrôler,
29:28 l'ARS nous finance aussi.
29:30 Comment un financeur peut nous contrôler ?
29:32 Il faut une autorité administrative interdépendante
29:34 comme le CGLPL pour contrôler les EHPAD,
29:36 il le faut.
29:38 Le président m'a dit non.
29:40 - Deux questions, là.
29:42 D'abord, le contrôleur et le contrôler,
29:44 est-ce qu'ils contrôlent alors qu'ils financent,
29:46 on le sait, avec le département ?
29:48 C'est un problème, ça.
29:50 - Alors, moi, j'entends la proposition de Laurent Garcia
29:52 d'avoir un contrôleur dédié,
29:54 comme les instances, les endroits privés,
29:56 privatifs de liberté.
29:58 Et j'entends ce sujet de conflit d'intérêt potentiel
30:00 entre le contrôleur et le contrôlé.
30:02 Moi, ce que je souhaite, d'abord,
30:04 c'est qu'il y ait des contrôles réguliers,
30:06 une efficacité du contrôle
30:08 qui soit suivie de résultats.
30:10 Voilà, c'est ça que je souhaite.
30:12 Et le fait qu'on veuille aujourd'hui
30:14 augmenter ces contrôles,
30:16 voilà, avec une fréquence tous les deux ans,
30:18 c'est une bonne chose.
30:20 Mais encore faut-il que ce soit...
30:22 - C'est Laurent Garcia qui est faux soyeur.
30:24 - Encore faut-il que ce soit suivi de résultats.
30:26 - Mais on ne peut pas contrôler quelque chose qui va mal.
30:28 En fait, tant qu'on n'aura pas de budget,
30:30 ça ira mal.
30:32 - Ce n'est pas les contrôles qui vont suffire.
30:34 C'est exactement ce que je suis en train de dire.
30:36 - Qu'est-ce que vous en dîtes ?
30:38 - Il faut du moyen.
30:40 - On sent vraiment presque la colère.
30:42 - Je sens de la colère de la part de Laurent Garcia.
30:44 Et il a raison d'être en colère.
30:46 Il est lanceur d'alerte de cet ouvrage
30:48 qui a permis aussi de prendre conscience,
30:50 en tout cas dans l'opinion publique,
30:52 de ce qui se passait.
30:54 Et je pense qu'on fait le constat ici
30:56 et pas mal de députés également de la majorité
30:58 qu'il va falloir à un moment donné dégager des moyens.
31:00 Voilà, il y a un consensus autour de ces 10 milliards
31:02 tels qu'ils sont aujourd'hui.
31:04 - À un moment donné, il était même question
31:06 que la réforme des retraites puisse financer...
31:08 - C'était dit. - C'était évoqué.
31:10 - Là, on va parvenir sur les retraites.
31:12 Mais l'objectif, c'est plutôt le financement
31:14 des systèmes de retraite et de la pérennisation.
31:16 - Mais vous vous rendez compte...
31:18 - Il y a un vrai sujet autour de dégager des recettes
31:20 aujourd'hui pour financer le grand âge.
31:22 - Mais où on en est en ce moment avec le gouvernement,
31:24 c'est qu'au moment où je vous parle, quand même,
31:28 Combes est avec Sarah Salmane sur le TPMP.
31:32 Moi, je suis désolé, ça m'inquiète.
31:34 - Les messieurs ont écrit la nounasse sur C8.
31:36 - C'est hyper inquiétant.
31:38 On en est là, à l'heure actuelle.
31:40 Le gouvernement ne fait rien.
31:42 - Il ne fait pas que rien.
31:44 - Il ne vend du rêve.
31:46 - Il y a quand même eu de l'argent mis sur la table
31:48 avec le Ségur, qui a pu aussi bénéficier
31:50 au personnel de l'EHPAD.
31:52 En termes de salaire net, mais ce n'est pas assez.
31:54 Ce n'est pas assez d'abord parce que ça ne concerne pas
31:56 l'ensemble des personnes travaillant à domicile
31:58 pour le secteur lucratif.
32:00 Ensuite, parce que ce ne sera pas suffisant.
32:04 - On parle de taux d'encadrement,
32:06 de recrutement, de valorisation de ces métiers,
32:08 d'attractivité de ces métiers.
32:10 - Justement, pour terminer ce débat qui s'achève,
32:12 comment on revalorise ?
32:14 Est-ce que le salaire, c'est suffisant
32:16 pour faire revenir du personnel soignant dans les EHPAD ?
32:20 Il n'est plus attractif, ce métier-là.
32:22 - Je voudrais revenir sur l'affaire des contrôles.
32:24 Entendez ce que Laurent Garcia et moi,
32:26 qui sommes des professionnels de terrain, vous disons.
32:28 Il y a dans la proposition de loi sur laquelle vous travaillez
32:30 plein de choses extrêmement intéressantes
32:32 pour améliorer la citoyenneté.
32:34 Et comme vous l'avez dit, des choses au quotidien.
32:36 Et nous travaillerons avec vous pour enrichir ces propositions.
32:40 Mais il faut que vous compreniez, madame la députée,
32:42 monsieur le député, que les contrôles,
32:44 comme le dit Laurent Garcia,
32:46 dans un secteur qui dysfonctionne,
32:48 ça ne débouchera sur rien.
32:50 - Oui, je vous dis...
32:52 - Non, mais attendez, non, pardon.
32:54 Non, non, ma nuance est la suivante.
32:56 C'est que ça ne débouchera sur rien
32:58 et en attendant, ça donne du travail supplémentaire
33:00 à tous les professionnels.
33:02 Ça veut dire que les infirmières, les aides-soignants,
33:04 les cadres de santé, au lieu de passer du temps
33:06 auprès des personnes âgées,
33:08 ils vont remplir des documents dans le cadre du contrôle.
33:10 Donc les contrôles, ça va à l'inverse de ce qu'il faut faire.
33:14 Quand on aura le 8 pour 10,
33:16 que manifestement vous prenez tous les deux,
33:18 que demande la défenseure des droits,
33:20 à ce moment-là, quand on aura des moyens
33:22 comme nos voisins européens,
33:24 que vous, parlementaires,
33:26 que des inspections indépendantes
33:28 vont nous contrôler, ça, ce sera normal.
33:30 - Ecoutez, la loi d'antage...
33:32 - Mais tant qu'il n'y a pas le 8 pour 10,
33:34 - Expliquez le 8 pour 10 en deux mots.
33:36 - Le 8 professionnel pour 10 personnes âgées
33:39 et 30 euros de financement pour les services à domicile.
33:42 Tant qu'on n'aura pas ça,
33:44 c'est-à-dire tant qu'on n'a pas les moyens de fonctionner,
33:46 je voudrais que vous compreniez,
33:48 mesdames et messieurs les parlementaires,
33:50 que vous nous donnez du boulot en plus
33:52 et que donc ça accroît les difficultés du secteur.
33:54 Le contrôle, c'est pas un pas en avance,
33:56 c'est un pas en arrière.
33:58 - Pascal, il faut une loi d'antage.
34:00 - Oui, la question, c'est quand ?
34:02 - Elle n'est toujours pas à l'ordre du jour.
34:04 Et la vraie question, c'est celle des moyens.
34:07 On l'a déjà dit.
34:09 Et dans cette société, si on décide,
34:11 il y a des priorités budgétaires.
34:13 Et mon problème, il est là.
34:15 Ce n'est pas la priorité budgétaire,
34:17 en tous les cas, du mandat en cours.
34:19 Parce qu'on est capable de baisser des impôts
34:21 pour certaines catégories de la population
34:23 et de ne pas utiliser l'argent qu'on aurait pu garder
34:25 pour les retraites.
34:27 C'est un vrai choix politique et un choix de société.
34:29 - Merci beaucoup.
34:31 On verra si cette loi de grand âge est au rendez-vous
34:33 de ce quinquennat, ce dernier quinquennat
34:35 d'Emmanuel Macron.
34:37 On vous réinvitera à ce moment-là.
34:39 Merci pour vos analyses.
34:41 Vous avez été assez timide, Mathieu Palin.
34:43 - Je ne précise pas assez le sujet pour couper les experts.
34:45 - Dans une dizaine de minutes,
34:47 on va retrouver nos affranchis pour leur parti.
34:49 Ils sont fin prêt en coulisses.
34:51 Le regard de Richard Verli sur l'Europe.
34:53 Pourquoi la livraison des charlots
34:55 aux Ukrainiens est-ce si stratégique ?
34:57 Les histoires d'école de Yanis Roder,
34:59 plaidoyer pour un enseignement laïque
35:01 du fait religieux.
35:03 Et Bourbon Express, l'histoire du jour à l'Assemblée,
35:05 une histoire de temps de parole sur les retraites.
35:07 Mais d'abord, on se plonge avec vous
35:09 dans la tête des hommes violents.
35:11 C'est une enquête, je le disais, qui est glaçante.
35:13 Vous nous faites entendre une parole très rare,
35:15 celle des bourreaux,
35:17 celle qui n'arrive pas à dire tout simplement
35:19 "Je frappe, je frappe ma femme".
35:21 Et on va comprendre pourquoi ces 4 ans de travail
35:23 dans des groupes de parole, on voit tout cela
35:25 juste après l'invitation de Thibault Hénocq.
35:27 Si on vous invite, Mathieu Palin,
35:29 c'est que 220 000 femmes au moins
35:31 sont violentées chaque année par leurs conjoints.
35:33 Et que de ce chiffre,
35:35 vous avez tiré une dérangeante équation.
35:37 220 000 victimes, ce sont 220 000 bourreaux,
35:39 220 000 hommes violents qui nous entourent,
35:41 des hommes qui sont nos pères,
35:43 nos frères, nos amis,
35:45 comme le titre de votre dernier livre.
35:47 Des hommes comme les autres,
35:49 et pourtant différents,
35:51 et que vous avez tenté de comprendre.
35:53 Mathieu Palin,
35:55 vous êtes journaliste et écrivain.
35:57 Après vous être longtemps rêvé professeur de PS,
35:59 vous avez troqué le jogging-basket
36:01 des cités de l'Essonne où vous avez grandi
36:03 pour la plume avec laquelle
36:05 vous avez conquis le tout Paris.
36:07 Dès votre deuxième roman, en 2021,
36:09 vous obtenez le prix Interallié
36:11 pour l'histoire de Thoumani Koulibaly,
36:13 sprinter français à la double vie de cambrioleur
36:15 que vous allez rencontrer pendant 2 ans en prison.
36:17 - La question que je venais chercher,
36:19 moi, en allant rencontrer Thoumani,
36:21 c'était plutôt la question de la vie.
36:23 Et moi, en allant rencontrer Thoumani,
36:25 c'était pourquoi un mec aussi talentueux
36:27 a tout gâché ?
36:29 Un peu comme dans un roman d'Agatha Christie,
36:31 on cherche le coupable.
36:33 Et les êtres humains sont en général un peu plus complexes
36:35 et des coupables, il y en a plusieurs.
36:37 - Cette fascination pour l'origine du mal
36:39 est le premier point commun entre vos livres.
36:41 Le second est cette envie d'aller à la rencontre de l'autre,
36:43 de faire entendre sa voix.
36:45 Pour votre dernier ouvrage,
36:47 vous vous êtes donc rendu pendant 4 ans
36:49 dans des groupes de paroles
36:51 qui ne sont pas légales.
36:53 Vous en rapportez des propos glaçants.
36:55 Dès le début, un point vous frappe.
36:57 - Le déni est tel que,
36:59 plutôt que de dire "je frappe ma femme",
37:01 on trouve un milliard de justifications
37:03 pour justement ne pas le dire.
37:05 - Ce déni, Mathieu Palin,
37:07 vous vous en rendez compte,
37:09 repose aussi sur le fait que ces hommes
37:11 estiment leur agression légitime.
37:13 - Elle m'a provoqué.
37:15 - Elle parle mal.
37:17 - Elle n'avait pas fait à manger.
37:19 - Elle cherche le contact physique
37:21 pour pouvoir dire ensuite qu'elle s'est fait taper dessus.
37:23 - Des hommes qui se vivent comme des victimes,
37:25 et qui ont souvent un problème,
37:27 constatez-vous, avec la masculinité.
37:29 - Je vais te montrer c'est quoi un homme.
37:31 - J'ai voulu montrer
37:33 que c'était moi le plus fort, et j'ai gagné.
37:35 - Un complexe de domination
37:37 mis à mal, qui se retrouve en miroir
37:39 dans l'image qu'ils ont des femmes.
37:41 - Depuis qu'elles ont le droit de vote,
37:43 le droit de porter des minijupes,
37:45 on n'a plus aucun droit, nous, les hommes.
37:47 - La liberté à ta femme, c'est pas bon.
37:49 Pourtant, les psychologues que vous interrogez
37:51 l'affirment, la rédemption est possible.
37:53 Elle arrive quand le langage parvient
37:55 à remplacer les coups.
37:57 Alors Mathieu Palin,
37:59 une question pour finir.
38:01 Vous qui avez écouté tous ces hommes,
38:03 qu'est-ce qui vous en distingue ?
38:05 Où se situe-t-elle, cette origine du mal ?
38:07 - Réponse, Mathieu Palin.
38:11 - Qu'est-ce qui me distingue de ces hommes ?
38:13 J'ai envie de répondre pas grand-chose.
38:15 Ce que j'ai réalisé en étant sur place avec eux,
38:17 en passant du temps avec eux,
38:19 parce que c'est des groupes de parole,
38:21 certains ont duré plus de six mois,
38:23 c'est qu'en fait, on avait plus ou moins
38:25 suivi les mêmes voies
38:27 en se disant "Devenir un homme, c'est ça".
38:29 Et il y a le rapport
38:31 du Haut Conseil pour l'égalité
38:33 qui est sorti cette semaine.
38:35 - C'est la journée nationale
38:37 contre le sexisme.
38:39 - Quand j'y ai jeté un oeil,
38:41 j'ai reconnu beaucoup de conclusions
38:43 que j'avais eues
38:45 au contact de ces hommes-là.
38:47 La violence,
38:49 et la violence dans le couple,
38:51 elle est aussi liée
38:53 à l'incapacité pour les mecs,
38:55 pour les hommes, de parler,
38:57 de régler un conflit autrement
38:59 que par les points,
39:01 de voir l'autre
39:03 non pas comme son égal,
39:05 mais comme un adversaire,
39:07 comme quelqu'un qu'on doit dominer.
39:09 Et ça, je pense que c'est très masculin
39:11 dans des clichés stéréotypes de genre
39:13 et dans des clichés de virilité.
39:15 - Et puisque vous en parlez,
39:17 c'est énorme, 23 % des hommes
39:19 entre 25 et 34 ans,
39:21 c'est l'enquête que vous mentionnez,
39:23 celle du Haut Conseil à l'égalité,
39:25 considère qu'il faut parfois être violent
39:27 pour se faire respecter.
39:29 Vous l'avez constaté, vous,
39:31 chez les plus jeunes hommes,
39:33 finalement, dans la jeunesse,
39:35 une espèce d'insupportabilité
39:37 de l'émancipation de la femme,
39:39 finalement.
39:41 Les gonzesses vont prendre notre place,
39:43 c'est ça qu'ils vous disent.
39:45 - Il y avait ce discours-là qui était, je pense,
39:47 très lié au mouvement #MeToo aussi,
39:49 parce que c'est une micro-partie du problème.
39:51 Les hommes que j'ai rencontrés sont des hommes
39:53 qui ont été condamnés par la justice,
39:55 qui déjà font partie d'exception,
39:57 parce que l'immense majorité des hommes violents
39:59 ne rencontrent pas la justice.
40:01 Seulement une femme sur cinq porte plainte,
40:03 et toutes les plaintes n'aboutissent pas
40:05 à une condamnation.
40:07 Ils sont vraiment victimes
40:09 d'un mouvement mondial qui les dépasse,
40:11 presque comme s'ils avaient un gros nuage noir
40:13 au-dessus de la tête, qui serait le mouvement #MeToo.
40:15 - Ils le vivent comme une forme d'agression.
40:17 - Complètement.
40:19 Et ils lisent leur condamnation
40:21 comme étant la preuve
40:23 d'un retournement de la situation
40:25 des femmes qui sont maintenant au pouvoir
40:27 et qui l'utilisent pour se venger.
40:29 Et ça, cette distorsion de la réalité,
40:31 elle était très, très forte.
40:33 - Comment ça se passe, ces groupes de paroles ?
40:35 C'est un peu l'atmosphère...
40:37 On n'est pas du tout chez les alcooliques anonymes,
40:39 comme on peut les imaginer dans les films.
40:41 - Moi, c'est ce que je pensais aussi.
40:43 Je pensais arriver dans un groupe
40:45 avec 12 personnes assises en cercle,
40:47 et que chacun commence en se disant
40:49 "Bonjour, je m'appelle Mathieu, j'ai 34 ans,
40:51 "et je frappe ma femme."
40:53 C'était un peu un fantasme de journaliste
40:55 d'aller là-bas et d'entendre cette phrase
40:57 que j'avais l'impression d'avoir jamais entendue.
40:59 Et en fonction de qui, aussi,
41:01 est sélectionné dans le groupe,
41:03 puisque ce sont des hommes suivis par la justice,
41:05 et des profils, ce qu'on appelle,
41:07 ce que les animatrices appelaient
41:09 des "leaders négatifs",
41:11 le premier qui parle et qui dit
41:13 "Moi, j'ai rien à faire là, je suis pas comme vous,
41:15 "ma femme, c'est une menteuse,
41:17 "et je devrais pas être là,
41:19 "je suis victime d'une erreur judiciaire."
41:21 Il donne un peu le "là".
41:23 Là, on a un effet de groupe, avec des mecs qui vont dire
41:25 "Mais moi non plus, j'ai rien à faire là,
41:27 "et les femmes ont repris le pouvoir."
41:29 Je sais que dans certains groupes,
41:31 il y a des...
41:33 Le premier qui parle dit
41:35 "J'ai été condamné deux fois,
41:37 "j'aimerais m'en sortir,
41:39 "je sais pas pourquoi, je répète sans cesse
41:41 "cet même passage à l'axe,
41:43 "cette même violence."
41:45 Et là, ça donne autre chose.
41:47 -Ce qu'il faut dire, et l'enquête le montre bien,
41:49 parce que vous vous mettez en scène aussi,
41:51 vous racontez à vos proches, c'est que ça peut être
41:53 tout le monde. C'est loin d'être des monstres.
41:55 Ce sont nos pères, nos frères
41:57 et nos amis.
41:59 Vous en parlez à vos proches,
42:01 vous en parlez avec votre compagne,
42:03 avec votre sœur et avec votre mère,
42:05 et vous découvrez quelque chose
42:07 qu'elle ne vous avait jamais dit.
42:09 -Qu'elle avait jamais dit à personne.
42:11 Le tout début de cette enquête,
42:13 c'est d'avoir le constat que je suis journaliste,
42:15 je suis un homme,
42:17 et ça fait dix ans que je travaille
42:19 et que j'ai jamais écrit une seule ligne
42:21 sur la question des violences faites aux femmes,
42:23 que ce soit le harcèlement, le viol...
42:25 -Vous étiez passé à côté du sujet.
42:27 -Je me suis fait mettre à côté.
42:29 Et quand le mouvement #MeToo est arrivé
42:31 et que toutes ces femmes ont dit "moi aussi,
42:33 j'ai vécu une agression, moi aussi",
42:35 je me suis dit "est-ce que vraiment,
42:37 c'est un mouvement d'ampleur à ce niveau-là ?"
42:39 Et donc j'ai appelé ma mère.
42:41 Et elle m'a confié.
42:43 D'abord, elle m'a dit "non, moi, j'étais institutrice,
42:45 donc dans un milieu plutôt féminin,
42:47 j'ai pas eu affaire à la domination des hommes".
42:49 Et puis après, elle m'a rappelé en me disant
42:51 "en fait, il m'est revenu une histoire,
42:53 et en effet, elle avait été agressée à 17 ans
42:55 par le père de famille chez qui elle faisait du babysitting,
42:57 qui avait essayé de la violer".
42:59 Et elle me disait "je sais pas comment j'ai réussi à m'en sortir,
43:01 mais c'est vrai",
43:03 et c'était quelque chose qu'elle n'avait jamais raconté.
43:05 -On retrouve dans tous ces témoignages
43:07 la même forme de déni systématique,
43:09 c'est-à-dire au fond,
43:11 "c'est pas moi le coupable,
43:13 je suis la victime",
43:15 systématiquement.
43:17 Est-ce que,
43:19 à la faveur des psys que vous avez rencontrés
43:21 dans ces groupes de parole,
43:23 la rédemption est possible ?
43:25 Comment on arrive à basculer vers les mots ?
43:27 Et sortir de cet emprisonnement mental
43:29 qui fait qu'on n'arrive pas du tout
43:31 à se vivre autrement
43:33 que comme une victime ?
43:35 -Il y a un mot qu'on prononce maintenant,
43:37 qui est le mot "déconstruction".
43:39 Je pense que c'est un mot qui est important,
43:41 parce que c'est vrai que certains de ces hommes
43:43 arrivent dans le groupe,
43:45 ils ont déjà 60 ou 65 ans,
43:47 il paraît plus que compliqué
43:49 de se dire "bon, maintenant,
43:51 tout ce que vous avez appris jusqu'à présent,
43:53 tous vos comportements, tout ce que vous avez accumulé,
43:55 l'histoire de vos parents,
43:57 ce modèle ultra-viril de votre père,
43:59 tout ça, maintenant, vous le mettez à la poubelle
44:01 et vous essayez de changer".
44:03 C'est compliqué, c'est extrêmement compliqué,
44:05 c'est pour ça que la justice
44:07 essaie de se focaliser maintenant
44:09 dans ces groupes de parole sur des jeunes
44:11 qui sont déjà passés à l'âge,
44:13 des jeunes de 18, 19 ans, il y en a,
44:15 malheureusement, et des jeunes parents
44:17 qui, peut-être, vont changer
44:19 en sachant qu'eux-mêmes
44:21 ont eu ce comportement violent
44:23 parce qu'ils ont eu un père violent
44:25 et peut-être que là, en regardant leurs enfants
44:27 qui ont 3, 4, 5, 6 ans,
44:29 ils peuvent se dire "il faut que je change,
44:31 parce que j'ai pas envie que ma fille aussi
44:33 se retrouve dans cette situation,
44:35 que mon fils se retrouve dans cette situation".
44:37 - Donc c'est possible.
44:39 - C'est peut-être possible.
44:41 - Les psychologues que vous interrogez restent optimistes.
44:43 Ce qui est intéressant aussi, c'est le rapport à la mère
44:45 chez ces détenus
44:47 ou anciens détenus
44:49 pour violences conjugales.
44:51 On est vraiment dans un schéma "la maman est la putain".
44:53 En gros, la mère qui m'a nourrie intouchable
44:55 et la femme avec qui je vis,
44:57 elle mérite les coups.
44:59 On en est encore là.
45:01 - Pour certains, en tout cas, c'est Liliane Daligan,
45:03 qui est une experte, psychiatre,
45:05 experte auprès de la Cour d'Appel de Lyon,
45:07 qui a expertisé plus de 700 hommes violents,
45:09 qui repère
45:11 des similitudes dans certains comportements
45:13 et qui dit que, en fait,
45:15 le manipulateur pervers narcissique
45:17 qui jouit de sa violence
45:19 et du mal qu'il fait,
45:21 il existe, mais elle n'en a pas rencontré beaucoup.
45:23 Par contre, des immatures
45:25 qui voient leur femme
45:27 comme étant toujours
45:29 en comparaison avec leur propre mère
45:31 et donc leur mère, une demi-déesse,
45:33 ils pourraient tout faire pour elle,
45:35 ils pourraient tuer,
45:37 et leur femme, qui fait jamais
45:39 assez bien, qui est toujours
45:41 à la traîne.
45:43 Donc, ce rapport-là d'adversité,
45:45 c'est quelque chose qu'elle a beaucoup observé
45:47 et c'est pour ça qu'elle parle
45:49 d'immaturité chez ces hommes violents,
45:51 d'incapacité à régler un conflit
45:53 autrement que par la violence.
45:55 - Il vous a changé, vous-même,
45:57 Mathieu Palin, ce livre ?
45:59 Vous dites, au fond, "Je me suis intéressée
46:01 "à des sujets masculins jusqu'à présent."
46:03 C'est vrai que vous êtes hantée par la question de la prison,
46:05 la question de l'ambiguïté aussi,
46:07 du mal,
46:09 avec, on se souvient,
46:11 Coulibaly, ce coureur
46:13 qui a passé beaucoup d'années en prison,
46:15 mais qui apparemment va mieux,
46:17 et va reprendre le sport.
46:19 Mais ça vous a bouleversé,
46:21 ça vous a traversé, vous, personnellement ?
46:23 Qu'est-ce que vous en tirez, vous, à titre personnel,
46:25 de tous ces témoignages ?
46:27 - En passant beaucoup de temps sur le terrain,
46:29 j'ai réalisé que, finalement, la violence conjugale
46:31 n'est pas toujours cette autre
46:33 qui ne nous ressemble pas,
46:35 qui est moins intelligent que nous,
46:37 moins éduqué, un peu plus bas de plafond,
46:39 et qui frappe sa femme simplement
46:41 parce qu'il ne sait pas quoi faire, et qu'il rentre du boulot,
46:43 et qu'il a toujours fait ça.
46:45 - Ça peut être le voisin, le boulanger, vous en parlez.
46:47 - Oui. - Le patron.
46:49 - Et d'ailleurs, c'est ce que je ressentais sur le terrain,
46:51 et quand on regarde les chiffres, on voit que
46:53 on n'a pas
46:55 500 ou 700 ou 800 000
46:57 ou 1 million de monstres dans ce pays,
46:59 et les chiffres sont assez éloquents.
47:01 - Oui, 220 000, vous utilisez ce chiffre.
47:03 Ça fait 220 000 pour un pays.
47:05 - Le chiffre de ce qu'on a repéré.
47:07 Sachant qu'il y a un chiffre noir
47:09 qui est probablement
47:11 quatre fois plus important que celui-là.
47:13 - Et ça peut être parfois
47:15 des politiques. On va terminer avec
47:17 cette image. Adrien Catenance,
47:19 vous le savez, qui a réintégré son siège
47:21 de député à l'Assemblée nationale,
47:23 qui ne siège plus dans la France insoumise,
47:25 qui a été condamné pour violences conjugales.
47:27 Vous trouvez que la manière dont les partis politiques
47:29 gèrent ces sujets
47:31 de violences sexuelles et sexistes
47:33 est à la hauteur, ou il y a encore beaucoup de boulot ?
47:35 - Il y a beaucoup de boulot,
47:37 déjà parce que je l'ai entendu sur BFM TV
47:39 tenter de se défendre,
47:41 et je reconnaissais exactement les mêmes paroles
47:43 que les hommes qui étaient assis autour de moi.
47:45 - Je suis victime d'une manipulation.
47:47 - Oui, et puis en fait, avec cette idée
47:49 de puissance financière aussi, tout ce que j'ai payé,
47:51 c'est beaucoup des choses que j'ai entendues.
47:53 Et bon, la différence,
47:55 c'est que les hommes avec qui j'ai passé beaucoup de temps
47:57 ne sont pas élus de la République.
47:59 Donc le devoir d'exemplarité, ils ne l'ont pas,
48:01 ils essayent déjà de gérer leur propre vie.
48:03 Là, on a quelqu'un qui a été condamné
48:05 à une petite peine avec sursis,
48:07 qui ne l'a pas encore faite, et qui a réintégré...
48:09 Moi, je ne suis pas...
48:11 Mon avis compte...
48:13 N'engage que moi, donc c'est seulement mon avis,
48:15 mais c'est vrai que sur ces questions-là,
48:17 on a besoin d'avancer, et de tous,
48:19 collectivement, se sentir concernés,
48:21 et ça commence aussi, bien entendu,
48:23 par les politiques.
48:25 - Et ça s'appelle "Nos pères, nos frères, nos amis
48:27 dans la tête des hommes violents".
48:29 Voilà, ça ne laisse pas indemne,
48:31 c'est ce que j'ai écrit. Je le conseille à tous.
48:33 Allez, c'est l'heure d'accueillir nos affranchis
48:35 pour leur parti pris. On les accueille tout de suite.
48:37 Rentrez, les amis.
48:39 Richard Verli, installez-vous.
48:41 Vous allez nous parler ce soir
48:43 des livraisons des chars,
48:45 les fameux chars Léopard 2,
48:47 en Ukraine, les chars allemands,
48:49 mais aussi américains et britanniques.
48:51 Et puis, Yanis Roder, bonsoir.
48:53 Vous êtes notre enseignant dans cette émission,
48:55 membre du Conseil sur la laïcité.
48:57 Vous allez nous parler du faire du jeu.
48:59 On ne s'insigne très peu dans nos établissements laïcs,
49:01 mais on commence, comme chaque soir, par Bourbon Express.
49:03 L'histoire du jour à l'Assemblée nous est racontée
49:05 par Elsa Mondingava.
49:07 Une histoire de temps de parole sur les retraites.
49:09 - Exactement. Je vais vous poser une question
49:11 presque philosophique.
49:13 73 heures de débat sont-elles suffisantes
49:15 pour discuter d'une réforme des retraites ?
49:17 Je ne vous donne pas 73 heures pour y réfléchir.
49:19 On va essayer de faire ça en quelques minutes.
49:21 Alors, ce matin, la présidente de l'Assemblée nationale,
49:23 Yael Broun-Pivet, a adressé ses voeux
49:25 à la presse. Elle l'a redit.
49:27 Rassurée, il y aura du temps pour débattre
49:29 ici à l'Assemblée. Il y en aura même
49:31 plus que pour les précédentes réformes des retraites.
49:33 Écoutez.
49:35 - Nous sommes à 73 heures de séance
49:39 versus 2014, 45 heures
49:41 et versus 2010, 65 heures.
49:43 Nous aurons le temps de débattre
49:45 et mon objectif, effectivement, en tant que présidente
49:47 de l'Assemblée nationale, c'est que nous allions
49:49 au bout du texte. Maintenant,
49:51 à nouveau, si nous ne devions pas
49:53 avoir de vote, ce serait
49:55 en toute probabilité
49:57 parce qu'il y aurait de l'obstruction.
49:59 Donc, je n'en serais pas responsable,
50:01 ni le gouvernement, évidemment.
50:03 - Alors, elle a raison, la présidente
50:05 de l'Assemblée nationale, sauf qu'à l'époque,
50:07 en 2010 ou en 2014, la situation
50:09 n'était pas du tout, du tout la même.
50:11 Je vous parle d'une époque où il n'y avait
50:13 que la droite et la gauche à l'Assemblée.
50:15 Elle est un peu de centriste, un peu de communiste,
50:17 mais en 2010, la droite avait la majorité absolue,
50:19 2014, c'était la gauche,
50:21 et donc, c'est donc des réformes qui ont été adoptées
50:23 plus facilement. Voilà donc l'argument
50:25 du moment du gouvernement, en deux temps.
50:27 Il y a 73 heures, c'est beaucoup.
50:29 Et si à la fin, on n'a pas le temps de voter,
50:31 ce sera la faute des oppositions, puisque
50:33 je vous le rappelle, en ayant choisi un projet de loi
50:35 de finances rectificative, il y a des délais
50:37 contraints, 50 jours en tout,
50:39 20 jours en première lecture à l'Assemblée,
50:41 vendredi 17 à minuit, que le texte soit
50:43 fini ou pas, il part au Sénat.
50:45 - Alors, quelle est la stratégie de l'opposition ?
50:47 La nupe a promis un mur d'amendement,
50:49 c'est toujours le cas ou pas ? - Alors, ça tombe
50:51 bien justement, parce que cet après-midi, place du
50:53 Palais-Bourbon, juste devant l'Assemblée nationale,
50:55 il y avait un point presse des syndicats,
50:57 il y avait Laurent Berger de la CFDT,
50:59 il y avait Philippe Martinez
51:01 de la CGT, mais nous, eh bien, on cherchait
51:03 surtout des députés de gauche, on en a trouvé
51:05 évidemment dans les parages. Depuis plusieurs
51:07 jours, ils semblent s'interroger sur la bonne
51:09 méthode, sur leur stratégie, ben, on leur a posé
51:11 la question. - Est-ce que
51:13 vous, vous voulez aller jusqu'au vote, jusqu'au
51:15 vote final et compter, clairement, ceux qui sont
51:17 pour, ceux qui sont contre à l'Assemblée ? - En tout cas,
51:19 on veut que le débat ait lieu sur
51:21 le point clé, qui est l'article 7,
51:23 et l'article 7, c'est le rallongement
51:25 de 2 ans, et on ne veut pas que le gouvernement
51:27 utilise le faible temps de parole,
51:29 pour ne pas pouvoir discuter du coeur de la
51:31 réforme, qui est de la contre-réforme,
51:33 qui est cet article 7 sur le report
51:35 de 2 ans. - Vous, vous ne ferez pas d'obstruction ?
51:37 - Il n'y aura pas d'obstruction, il y aura une opposition
51:39 très ferme, mais qui doit permettre
51:41 d'examiner le coeur
51:43 de la réforme, qui est cet article 7 sur
51:45 le report d'âge. - Vous l'avez entendu,
51:47 à gauche, elle va se concentrer sur l'article
51:49 majeur, le 7, le report de l'âge légal
51:51 de 62 à 64 ans,
51:53 quitte à, finalement, retirer les amendements
51:55 avant, faire avancer le débat le plus
51:57 possible. Ils veulent un vote là-dessus,
51:59 ils ne veulent pas forcément
52:01 un vote sur tout le texte, c'est assez subtil.
52:03 Écoutez Pierre Darréville, un député communiste.
52:05 - La majorité vous dit
52:07 si vous voulez un vote, c'est
52:09 entre vos mains. - Oui,
52:11 on verra comment les choses se déroulent,
52:13 on verra comment les choses se déroulent, mais
52:15 d'abord, moi, ce que je demande, c'est le retrait du texte.
52:17 Vous voyez, on est loin du vote pour l'instant. - Est-ce que la gauche
52:19 a peur d'un vote qu'elle
52:21 pourrait perdre, et le gouvernement dirait
52:23 "Cette réforme est passée à l'Assemblée". On dirait que
52:25 vous faites tout pour ne pas aller jusqu'au vote.
52:27 - Non, ce texte est illégitime.
52:29 Donc, on pense qu'il faut le retirer, c'est d'ailleurs
52:31 ce que demandent les organisations syndicales.
52:33 Moi, depuis le début, c'est ce que je dis, ça n'est pas sérieux
52:35 d'aller à un texte avec toutes les organisations
52:37 syndicales qui sont opposées,
52:39 15 à 30% d'opinions favorables
52:41 dans les enquêtes, c'est pas sérieux.
52:43 - Voilà, on comprend que la gauche, elle veut
52:45 faire durer le débat ici, à l'Assemblée,
52:47 pour faire durer la contestation là-bas,
52:49 dans la rue. Le but pour l'instant, c'est pas
52:51 que le texte soit rejeté, c'est qu'il
52:53 soit retiré par le gouvernement
52:55 sous la pression de l'opinion publique. - Évidemment, on va suivre
52:57 ça de très près sur LCP, ce feuilleton
52:59 des retraites. Richard,
53:01 livraison de char "Léopard 2"
53:03 par l'Allemagne
53:05 à l'Ukraine, c'était un long
53:07 suspense, ça y est, c'est enfin décidé,
53:09 ça peut tout changer ou pas forcément sur le front ?
53:11 - Alors, vous connaissez peut-être, Myriam,
53:13 la formule terrible du général américain MacArthur,
53:15 lorsqu'il commandait les forces durant la guerre de Corée,
53:17 il disait que les guerres, au fond,
53:19 se résumaient à quatre mots,
53:21 trop peu, trop tard. Eh bien,
53:23 cet anniversaire de la guerre de Corée, il est intéressant,
53:25 c'est le 27 juillet 1953
53:27 que la péninsule s'est retrouvée divisée,
53:29 vous savez, l'exemple, il est souvent cité,
53:31 il faut juste rappeler que le long de la zone démilitarisée,
53:33 aujourd'hui encore, 70 ans plus tard,
53:35 il y a énormément de troupes américaines.
53:37 Mais revenons d'abord au "trop peu",
53:39 parce que de quoi parle-t-on ?
53:41 On parle de 14 chars Léopard, une trentaine de chars M1 Abrams,
53:43 probablement plusieurs dizaines d'autres chars
53:45 en provenance d'autres pays européens,
53:47 au total, une centaine.
53:49 Est-ce que cela peut faire vraiment la différence
53:51 face à l'armée russe, qui ne l'oublions pas,
53:53 c'est de plus en plus solidement retranché.
53:55 Alors, c'est quand même peu probable,
53:57 on est plus vers une consolidation
53:59 des lignes actuelles,
54:01 et à partir de ce moment-là, se pose une question,
54:03 est-ce que garantir aux Ukrainiens du matériel lourd,
54:05 ce n'est pas, au fond, surtout
54:07 dissuader les Russes de tenter, eux,
54:09 de repartir à l'offensive,
54:11 c'est-à-dire figer la situation ?
54:13 - Vous êtes plutôt pessimiste.
54:15 Trop peu, vous avez dit, et trop tard aussi, pourquoi ?
54:17 - Il faut poser la question,
54:19 parce que cela fait des mois, rappelons-le,
54:21 que l'Ukraine réclame ce matériel lourd
54:23 et ses blindés. Alors, pourquoi avoir attendu
54:25 le premier anniversaire du conflit ?
54:27 On y arrive, ce sera, rappelons-le, le 24 février.
54:29 Alors, on connaît les difficultés
54:31 du chancelier allemand Scholz avec son propre parti,
54:33 le Parti social-démocrate,
54:35 qui est encore très pacifiste
54:37 au sein de sa coalition.
54:39 On sait aussi que les gouvernements européens
54:41 attendaient l'hiver, ils redoutaient les coupures énergétiques.
54:43 Bref, on a quand même l'impression
54:45 que ce calendrier de livraison des Léopards,
54:47 il ne répond pas seulement à une logique militaire.
54:49 On note aussi qu'Emmanuel Macron n'y a pas encore
54:51 ajouté les chars français Leclerc.
54:53 On sait que le commandant en chef américain
54:55 Mark Millais n'arrête pas de dire que l'Ukraine
54:57 ne pourra sans doute pas regagner les terrains perdus.
54:59 On peut donc se poser la question,
55:01 les Léopards, les Challengers, les Abrams,
55:03 tout cela, est-ce que ce n'est pas
55:05 avant tout pour servir de bouclier
55:07 et donc, quelque part, sauver la face ?
55:09 - Ah oui, vous le voyez plutôt en défensif
55:11 qu'en offensif. Bon, on enchaîne.
55:13 Notons-nous des contes. Yanis,
55:15 histoire d'école, vous revenez
55:17 d'un cours particulier que vous avez donné
55:19 à des élèves de Terminal.
55:21 Vous leur avez parlé d'origine de l'antisémitisme
55:23 et vous avez constaté qu'alors qu'en matière
55:25 de fait religieux, personne ne connaît rien.
55:27 - Alors bon, en réalité, je ne suis pas surpris,
55:29 Myriam, j'ai des élèves tous les jours
55:31 en face de moi et c'est vrai que les élèves
55:33 ne savent généralement pas que Jésus
55:35 était juif, que l'Évangile selon
55:37 Saint Jean, c'est un passage du Nouveau Testament
55:39 ou encore que le prophète de l'Islam,
55:41 Mahomet, est le sceau des prophètes,
55:43 c'est-à-dire celui qui scelle la prophétie.
55:45 - C'est un problème, franchement, moi, personnellement,
55:47 je ne savais pas tout ça, non plus.
55:49 - Alors, deux choses me posent problème
55:51 en réalité, Myriam. La première, c'est que sans la culture
55:53 religieuse, à ne pas confondre avec la
55:55 croyance, sans la culture religieuse, donc,
55:57 beaucoup de choses dans la culture, mais aussi
55:59 dans ce que disent les religions, nous échappent.
56:01 Connaître, c'est se donner
56:03 les moyens d'analyser, de comprendre, mais aussi
56:05 de ne pas essentialiser.
56:07 La deuxième raison, Myriam, c'est
56:09 l'absence de réponse de l'institution scolaire
56:11 en réalité, et ça, c'est un peu l'arlésienne.
56:13 En 2002, vous aviez déjà le rapport
56:15 de Bré qui insistait sur la nécessité d'un enseignement
56:17 des faits religieux. Rien n'a été mis en place
56:19 si ce n'est l'étude historique
56:21 de la naissance des trois monothéismes,
56:23 mais sans s'intéresser ni aux messages,
56:25 ni aux ambitions de ceux-ci.
56:27 En 2018, le Conseil des sages
56:29 de la laïcité produisait une note sur la nécessité
56:31 de cet enseignement. Elle est consultable
56:33 sur le site du Conseil des sages, où
56:35 elle dort tranquillement, sans être dérangée par personne.
56:37 - Alors, qu'est-ce que vous préconisez ?
56:39 C'est-à-dire, enseigner le fait religieux,
56:41 comment précisément, sans enseigner
56:43 la pratique religieuse ?
56:45 - C'est cela, en fait, Myriam. Il faut un enseignement
56:47 laïque des faits religieux, qui offrirait
56:49 une culture commune et partagée,
56:51 tout en posant un regard scientifique
56:53 sur les religions, avec la mise en perspective qui est nécessaire.
56:55 Au-delà, il permettrait d'outiller les enseignants
56:57 pour faire face aux contestations
56:59 des enseignements au nom des croyances.
57:01 Enfin, cela éviterait que le doute
57:03 s'installe, parfois dans des esprits adolescents
57:05 qui ne comprennent pas, par exemple,
57:07 la haine antisémite, mais qui,
57:09 sans explication, si vous voulez, peuvent finir
57:11 par se dire, aidés par des gens malveillants,
57:13 qu'il n'y a pas de fumée sans feu,
57:15 si vous voulez. Eh bien, non,
57:17 il n'y a pas de raison objective à la haine antisémite,
57:19 mais il y a une longue construction
57:21 historique, qui est allée donc
57:23 chercher du côté de l'histoire
57:25 des religions, comprendre les phénomènes,
57:27 c'est se donner les moyens de les combattre.
57:29 -Vous avez fait de l'histoire des religions,
57:31 du fait religieux à l'école ? -Non, pas du tout.
57:33 -Ca manque, c'est vrai que ça permettrait
57:35 de mieux comprendre l'autre, déjà.
57:37 -La haine, oui, c'est aussi
57:39 la méconnaissance de l'autre.
57:41 -On verra ce que ça donne. On va retourner
57:43 le rapport du Haut Conseil
57:45 de la laïcité, qui est remisé
57:47 dans un tiroir. Merci,
57:49 les Affranchis, merci aussi d'avoir été concis.
57:51 Merci, Elisabeth Mondagava.
57:53 A demain, si vous le voulez bien, très belle soirée
57:55 sur LCP. Lisez
57:57 nos frères, nos pères,
57:59 nos amis, dans le bon ordre.
58:01 C'est aux arènes, et c'est signé
58:03 Mathieu Palin. Très belle soirée, à demain.
58:05 ...

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