FIERTÉ.E.S TÉMOINS DE JEHOVAH

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00:00 quand on quitte les témoins de Jehova, que ce soit volontaire ou non.
00:03 On coupe tout contact avec nos proches et les amis qu'on avait dans cette communauté.
00:07 Ma mère était assez effondrée, comme si j'étais mort,
00:10 comme si elle savait que son fils n'allait pas aller avec elle au paradis.
00:13 Je m'appelle Guillaume, je suis homosexuel,
00:15 et je suis fier d'être sorti de la communauté des témoins de Jehova.
00:19 C'est une communauté religieuse à dérive sectaire,
00:22 c'est vraiment une communauté qui se met à l'écart du monde,
00:25 c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de restrictions,
00:28 et l'homosexualité est formellement interdite et impensable.
00:32 Les restrictions, il y en avait pas mal.
00:34 Pas d'anniversaire, pas de Noël, aucune fête, en fait.
00:38 Pas d'amitié avec d'autres personnes de l'autre sexe,
00:41 pas de relation sexuelle avant le mariage, beaucoup de choses.
00:44 Mes parents étaient témoins de Jehova, donc je suis né dans la communauté religieuse.
00:47 J'ai grandi dans cette communauté jusqu'à mes 18-19 ans.
00:50 Au début, on s'en rend pas vraiment compte,
00:52 c'est-à-dire que quand on est jeune, on suit les parents, on veut les rendre fiers.
00:55 Pendant l'adolescence, du coup, j'ai beaucoup fait semblant,
00:58 parce qu'on a peur, on a peur de ce qu'on est, mine de rien,
01:00 parce qu'on nous apprend depuis tout petit que c'est mal
01:03 et que c'est quelque chose qui sera puni par Dieu.
01:07 Et c'est vrai que quand on est jeune, à cet âge-là,
01:10 on fait attention au regard des autres,
01:13 et c'est vrai que je me suis beaucoup menti à moi-même,
01:15 et je faisais semblant clairement aux yeux de tout le monde et auprès de mes parents,
01:18 parce que j'avais pas envie de me retrouver tout seul à la rue.
01:21 Clairement, c'était une pensée qui m'effrayait beaucoup.
01:24 Quand on est jeune et on sait, au fond, qui on est,
01:27 on ne l'assume pas tout de suite dans cette communauté,
01:30 parce qu'on a peur de se retrouver sans rien.
01:32 Il y a beaucoup d'anecdotes que je pourrais citer de moments où j'ai fait semblant.
01:36 Les hommes sont en costume, cravate et derbis,
01:38 donc c'était vraiment pas un style qui, moi, me correspondait.
01:41 Pas du tout.
01:42 Les femmes n'ont pas le droit, par exemple, de porter de pantalons.
01:44 Et c'est vrai que plus je grandissais et plus j'avais envie de tenues qui me ressemblaient,
01:49 donc un petit peu plus moulants, des choses un petit peu plus mode,
01:52 et c'est vrai que je me restreignais énormément,
01:54 parce que je n'avais pas envie qu'on se dise, rien qu'en me voyant,
01:57 que j'étais gay ou que mon orientation sexuelle était bien visible.
02:01 Puis aussi, quand on est jeune, on est adolescent,
02:04 on parle un petit peu des filles, etc.
02:06 Donc, avec les amis que j'avais dans cette religion,
02:09 c'est vrai que je faisais semblant en disant que,
02:12 oui, je pouvais être potentiellement attiré par telle ou telle fille,
02:16 alors qu'en vrai, pas du tout.
02:18 Mais c'était juste pour qu'on ne remarque pas qui j'étais vraiment au fond.
02:22 Alors moi, le regard des autres était extrêmement important avant.
02:25 Même à l'école, je refusais de dire que j'étais gay.
02:28 Donc c'était "non, non, non, je ne suis pas gay, j'aime les filles",
02:31 parce que j'avais peur que même les camarades puissent en parler à mes parents,
02:35 qui après en parlaient à la communauté.
02:36 Et on a toujours cette crainte, au fond, quand on est petit,
02:39 quand on est jeune, de se retrouver tout seul à la rue,
02:41 et moi, c'était vraiment quelque chose qui me faisait très peur.
02:44 Spirituellement parlant, si je peux dire ça comme ça,
02:46 j'avais très peur parce que, depuis tout petit, on nous inculque que c'est mal,
02:50 que c'est le péché et qu'on ira en enfer,
02:52 que les homosexuels iront en enfer,
02:53 que toute personne ayant des relations sexuelles
02:55 avec des personnes du même sexe iront en enfer.
02:57 Donc c'est vrai que, dès que mes attirances ont commencé à apparaître,
03:01 je priais beaucoup.
03:02 Je priais Dieu pour que ça s'arrête, parce que je savais que c'était mal
03:05 et je voulais qu'il me soigne.
03:06 Je voulais vraiment plus du tout avoir ces attirances-là
03:10 et retrouver le droit chemin, si je peux dire.
03:13 Et ça a été très dur, parce qu'on demande, en fait,
03:17 à être tout l'inverse de qui on est vraiment.
03:19 Et c'était très dur psychologiquement parlant.
03:22 Je demandais à Dieu qu'il me soigne,
03:24 que je sois comme telle ou telle personne
03:27 et que je puisse fonder une famille et être heureux avec une femme et des enfants,
03:31 une vie de famille classique dans cette communauté.
03:34 Alors mes parents ne se sont jamais doutés.
03:38 Jusqu'au moment où je leur ai annoncé,
03:40 ils m'ont affirmé qu'ils se doutaient, depuis quelques mois,
03:43 quelques années, de quelques petites choses,
03:45 mais pendant très longtemps, ils n'avaient pas du tout cerné la situation.
03:49 J'ai fait mon coming-out quand j'avais 18 ans.
03:51 Je leur ai annoncé que j'étais bisexuel, parce que je me cherchais encore,
03:55 et que, pour moi, ça dédramatiserait un petit peu la situation.
04:00 Et mon coming-out homosexuel, je l'ai fait bien plus tard.
04:05 J'avais besoin de le dire, parce que j'en avais marre de mentir.
04:08 Et c'était quelque chose qui me rongeait et qui rongeait ma santé également.
04:12 Donc j'avais besoin de me libérer de ce poids.
04:13 Je l'ai annoncé à mon père en premier.
04:16 Et ça a été compliqué.
04:19 Il a été à la fois compréhensif, dans le sens où il me disait clairement
04:23 que beaucoup de jeunes vivaient ce genre de choses,
04:27 et que c'est quelque chose qui pouvait passer avec l'âge.
04:32 C'était pas forcément ce que je voulais entendre,
04:34 mais j'ai pris l'information,
04:36 parce que son côté bienveillant pour cette information,
04:39 je me suis dit "ça va, tout se passe bien, je vais pas me retrouver à la rue,
04:43 je peux continuer à vivre chez eux".
04:45 Donc je me suis pas rendu compte tout de suite
04:47 que c'était pas forcément la réponse que j'attendais.
04:49 Ma maman était très surprise aussi.
04:51 Elle m'a dit qu'elle m'accompagnerait, qu'elle serait là pour moi, etc.
04:54 Et par la suite, il y a eu des choses qui ont fait que je me suis dit
04:57 "OK, non, il faut que je parte", suite à mon coming out.
05:00 Et j'ai été reçu par des représentants de la religion,
05:04 de ce qu'on appelle notre congrégation, de la ville.
05:07 Et j'ai été reçu par ce qu'on appelle des anciens.
05:10 Alors c'était des phrases assez...
05:14 Pour le moment, je suis encore un petit peu choqué de ce qu'on m'a dit,
05:17 mais c'était clairement "on va être là pour toi, on va te suivre,
05:21 essaie de peut-être t'intéresser à une fille de la congrégation,
05:25 peut-être que tu vas te rendre compte qu'elle est très intéressante
05:28 et que peut-être tu pourras la fréquenter un jour, etc."
05:31 On essayait de me faire revenir sur le droit chemin
05:33 et de me dire "concentre-toi sur les filles et tu vas voir que ça fonctionne".
05:37 On me disait de faire attention à tout, donc faire attention à mes fréquentations,
05:41 faire attention à ce que je regarde sur Internet,
05:43 faire attention à ce que je regarde sur Instagram, sur les réseaux sociaux.
05:46 Donc en fait, c'est vraiment... On matrixe et on nous met des œillères
05:50 et on doit suivre ce mouvement.
05:52 À ce moment-là, je me suis dit "OK, Guillaume, c'est pas sain du tout.
05:56 T'étais déjà pas bien, ta santé n'était pas forcément incroyable,
05:59 psychologiquement, c'était compliqué", et là, je me suis dit "vite, faut que tu partes".
06:03 À partir de 18-19 ans, j'ai commencé à travailler, donc j'ai pas fait d'études,
06:06 et pour m'en sortir, je savais que j'avais besoin d'un salaire,
06:09 en fait, tout simplement.
06:11 Donc j'ai commencé à travailler sur Paris.
06:13 Au bout de deux mois et demi, j'ai annoncé à mes parents que j'allais quitter la famille,
06:17 que j'allais quitter la religion et que j'allais prendre mon appartement.
06:21 Du coup, au moment où je suis parti de la religion,
06:24 j'ai remis une lettre aux représentants de la religion, les anciens,
06:29 pour dire que je ne souhaitais pas continuer.
06:32 On a la possibilité de les rencontrer, mais j'avais pas envie.
06:35 J'avais juste envie de me débarrasser de tout ça, clairement, c'est le mot.
06:38 Et du coup, c'est annoncé publiquement au sein de la congrégation,
06:43 aux yeux de tous.
06:45 On a précisé que Guillaume Frémont ne faisait plus partie de la communauté.
06:49 Et du coup, c'est à ce moment-là où, généralement, on reçoit des "laces messages",
06:54 si je peux dire ça, pour nous dire "j'espère que tu reviendras dans le droit chemin",
06:59 "j'espère que tout se passera bien et que Dieu te protégera",
07:03 et après, plus rien.
07:05 C'est vraiment comme si, du jour au lendemain,
07:08 on devait effacer Guillaume de la tête de tous ses amis et de tous ses proches.
07:13 Alors, quand on quitte les témoins de Jéhovah, que ce soit volontaire ou non,
07:17 c'est une excommunication, c'est ce qu'on appelle une excommunication,
07:21 et on coupe tout contact avec nos proches et les amis qu'on avait dans cette communauté.
07:26 C'est-à-dire qu'on est vraiment rejetés, clairement.
07:29 Je savais que j'allais avoir des contacts très minimes avec eux,
07:33 c'est-à-dire que, vu que j'étais à l'encontre des principes
07:36 qu'eux avaient dans leur vie de tous les jours,
07:38 je savais qu'il y avait quelque chose qui allait se casser.
07:42 Mais j'avais pas peur, parce que je savais qu'au fond,
07:46 même si j'étais tout seul, j'avais mes sœurs qui étaient là pour me soutenir,
07:49 que j'adore, et je savais que je pouvais compter sur elles
07:53 et que je pouvais reconstruire ma vie comme moi, je le voulais.
07:57 Ma mère était assez effondrée, comme si j'étais mort,
08:00 comme si elle savait que son fils n'allait pas aller avec elle au paradis.
08:03 Ça a été assez perturbant, parce qu'on a toujours cette vision de décevoir,
08:08 et mine de rien, ça nous touche.
08:09 C'était un renouveau.
08:10 Donc j'ai refait ma vie à zéro,
08:13 et c'est comme si c'était un autre Guillaume, qui était de zéro à 18 ans.
08:16 Et là, je suis le nouveau Guillaume depuis cet âge-là.
08:19 Et bien sûr, c'est quand même des moments qui seront gravés en moi à tout jamais,
08:23 parce que c'est quand même marquant,
08:25 mais j'ai recommencé ma vie et j'en suis fier.
08:27 Depuis ce jour, depuis mon premier déménagement à 19 ans,
08:30 les contacts sont extrêmement minimes,
08:33 et je m'en porte très bien.
08:34 Quand je dis "minime", c'est que c'est un message limite par an.
08:40 C'est vraiment le strict minimum.
08:42 Le fait que je parte de cette religion, ça a cassé quelque chose.
08:45 Je sais que mes parents ne rencontreront jamais mes futurs copains,
08:49 ne viendront jamais à mon mariage plus tard,
08:51 ne seront pas là pour m'entourer, pour mes nouveaux travails, etc.
08:54 Je sais que je suis livre à moi-même,
08:57 mais je l'accepte.
08:58 C'est vraiment une page du livre que j'ai totalement arrachée
09:02 et que j'ai voulu jeter volontairement,
09:04 parce que ça m'apportait beaucoup plus de malheur
09:07 et de stress et d'angoisse qu'autre chose.
09:09 Je me suis dit "C'est pas grave, ta nouvelle vie te correspond,
09:11 commence le chapitre à ce moment-là".
09:13 Alors moi, je suis très fier de mon parcours.
09:15 Je suis très fier de moi et je suis très fier de ce que je suis devenu
09:18 et des projets que je vais réaliser, donc je suis fier.