Face à l'Info du 16/02/2023

  • l’année dernière
Christine Kelly et ses chroniqueurs débattent de l'actualité dans #Facealinfo

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Transcript
00:00 Bonsoir à tous, ravie de vous retrouver.
00:03 Juste avant le générique, il y avait au moins 20 personnes sur le plateau qui faisaient des photos.
00:08 J'ai même cru qu'ils allaient présenter face à l'info.
00:10 Mais ils sont là, c'est un putsch !
00:12 Non mais c'est un putsch !
00:14 Moi je les ai rencontrés comme coulisses.
00:15 Ils m'ont dit "on veut la place de Kylian, on veut la place de Kylian".
00:18 Mais ils peuvent venir.
00:18 Mais méfiez-vous !
00:19 Ils peuvent venir en direct.
00:20 On vous les invite, on peut appeler.
00:22 Nous vous défendrons.
00:23 Je partage, je partage.
00:25 On voit l'homme de droite tout de suite.
00:26 Allez, la minute info, Adrien Spiteri avant le tour complet, enfin, de l'actualité.
00:34 Cinquième journée de mobilisation contre la réforme des retraites.
00:41 Aujourd'hui, 1,3 million de personnes ont manifesté en France selon la CGT.
00:46 À Paris, 300 000 personnes se sont rassemblées selon le syndicat,
00:50 37 000 selon la préfecture.
00:52 Une mobilisation moins importante dans la capitale que samedi dernier,
00:56 où 93 000 personnes s'étaient mobilisées.
01:00 Le comité exécutif de la FFF se réunira le 28 février prochain.
01:04 Une réunion décisive pour l'avenir de Noël Le Gret.
01:08 Hier, le rapport de la mission d'audit de la Fédération française de football a été dévoilé.
01:13 Il estime que les dérives de comportement du président
01:16 sont incompatibles avec l'exercice des fonctions.
01:19 Et puis, Joe Biden boucle aujourd'hui son bilan médical de routine.
01:23 Une étape importante pour le plus vieux président jamais élu aux Etats-Unis.
01:28 À 80 ans, il a l'intention de se représenter en 2024.
01:32 La Maison-Blanche a promis de diffuser le rapport du médecin.
01:35 Au sommaire ce soir, la mobilisation dans le calme et la détermination,
01:43 des amendements retirés dans l'excitation face à l'obstruction.
01:47 La rue semble toujours donner le ton, les politiques semblent dépasser.
01:51 Est-ce une réforme lancée trop tard, dans de mauvaises conditions,
01:54 qui a déjà accordé trop de concessions, qui la rend inefficace et précaire ?
01:58 Est-ce une réforme de techno, faite par un gouvernement de techniciens,
02:02 sans véritable ministre politique ?
02:04 La technique a-t-elle remplacé la politique ?
02:07 Une réforme techno dans un incompréhensible mêli-mélo
02:11 pour un gouvernement qui jongle en solo l'édito de Mathieu Bogk-Cotto.
02:16 - Oh le bogk-cotto ! - Oh le bogk-cotto !
02:18 - Oh le bogk-cotto ! - Oh le bogk-cotto !
02:18 - Oh le bogk-cotto !
02:19 Objectif le 7 mars, les syndicats appellent maintenant à mettre la France à l'arrêt.
02:25 Le 7 mars, les débats à l'Assemblée doivent s'arrêter demain soir.
02:28 Se poursuivre au Sénat, mais tout doit être bouclé en principe le 26 mars.
02:32 Le pays risque-t-il de devenir ingouvernable si cette réforme des retraites est bloquée ?
02:37 Si elle passe, quel est là aussi le risque de blocage du pays, de chaos social ?
02:42 En quoi le risque de crise politique ne sera pas pour autant écarté ?
02:46 Quel niveau d'ingouvernabilité de la France que la réforme passe ou pas ?
02:51 L'édito de Guillaume Bigot.
02:54 L'affaire Palmade, un des passagers déclare qu'il dormait.
02:58 Le comédien, lui, dit ne se souvenir pratiquement de rien.
03:02 Les garde-à-vue sont prolongées.
03:03 Pierre Palmade pourrait être placé en détention provisoire d'ici demain, sans doute,
03:08 à la prison de Fresnes, un établissement pénitentiaire médicalisé.
03:11 Et s'il restait libre, sous contrôle judiciaire,
03:14 l'opinion publique pèse-t-elle sur le choix de ses options ?
03:17 Sur quels critères le juge décidera-t-il alors que la détention provisoire est critiquée en France ?
03:22 Avec l'usage de la drogue, le jugement de Pierre Palmade pourrait-il être altéré ?
03:28 Pourrait-il être déclaré irresponsable de ses actes, comme dans l'affaire Alimi ?
03:32 L'analyse de Charlotte Dornelas.
03:35 Pierre Palmade devra sans doute collaborer avec des enquêteurs pour l'identification de son dealer,
03:40 car quoi qu'on en dise, l'usage de la drogue est interdit par la loi.
03:43 Pourtant, combien d'artistes, décrivains comme ici, Rimbaud,
03:47 mais également Baudelaire, Sartre, Balzac, Jules Verne, Théophile Gautier,
03:51 sont pris en exemple pour justifier que l'artiste a besoin d'artifices et de drogues
03:57 pour libérer son génie créateur ?
03:59 Le génie créateur et la drogue, mythe ou réalité ?
04:03 Marc Menand raconte.
04:06 Criminalisation des réseaux de dealers, mais décriminalisation de la possession pour usage personnel.
04:13 Qu'est-ce que ce décalage entre le discours public qui condamne la drogue
04:16 et la tolérance sur sa réelle consommation ?
04:19 N'y a-t-il pas un consensus malsain pour ne rien faire de sérieux contre la drogue, au fond ?
04:24 De quoi ce consensus coupable, cette tolérance inavouable, est-elle le nom ?
04:29 Publiquement, la répression ? Convidentiellement, la banalisation ?
04:33 Qu'est-ce que cette société aux ordres et contre-ordres qui a perdu ses valeurs ?
04:37 L'édito de Mathieu Bobcotter.
04:40 Une heure pour prendre un peu de hauteur sur l'actualité avec nos mousquetaires.
04:44 On commente, on décrypte, on analyse et c'est parti !
05:00 Ils sont toujours en train de rigoler.
05:02 Ce sont les photos qui vous ont fait rire.
05:04 Mais rien ne nous fait rire.
05:06 Rien ne vous fait rire.
05:07 Ce que j'aime bien, c'est qu'on ne se prend pas aussi enrée et pourtant on fait tout sérieusement.
05:12 Dans un instant, on parlera de ce qui se passe,
05:15 on fera un tour de table sur ce qui se passe pendant l'affaire Padmath.
05:18 Pendant l'affaire Padmath, qu'est-ce qui se passe au but de Chaumont ?
05:20 Une femme découverte, découpée en morceaux, personne n'en parle.
05:24 Pourquoi cette affaire éclipse-t-elle les autres ?
05:26 On en parlera dans un instant, on fera un tour de table.
05:29 D'abord, l'actualité fraîche de ce soir.
05:32 1,3 millions manifestants en France selon la CGT.
05:35 On attend les chiffres du ministère de l'Intérieur, des chiffres en nette baisse en tout cas.
05:39 Mais la détermination est bien là.
05:41 Une réforme peut-être lancée trop tard, dans de mauvaises conditions,
05:44 avec des concessions qui la faiblissent, qui la rendent déjà presque inefficace
05:48 et surtout précaire, mais surtout une réforme incomprise.
05:52 Comment expliquer, Mathieu, l'échec patent du gouvernement à convaincre la population ?
05:56 Cette question apparemment hante le président de la République.
05:59 Une explication circule de plus en plus.
06:01 Cette réforme serait une réforme de techno.
06:03 Ce qui est assez exact, et on aura l'occasion de voir pourquoi,
06:06 mais on doit toujours garder à l'esprit que pour la Macronie, pour le pouvoir en ce moment,
06:12 l'opposition à la réforme naît inévitablement d'une incompréhension de la réforme.
06:17 Donc l'hypothèse selon laquelle on pourrait être intelligent, rationnel, raisonnable,
06:23 pas démagogue, pas extrême, pas fou,
06:25 et néanmoins s'opposer pour différentes raisons valables à la réforme
06:29 est inexistante dans le logiciel du gouvernement.
06:33 Et c'est ce qui l'empêche probablement de comprendre
06:36 une bonne partie du malaise qui se joue en ce moment.
06:38 Donc ce sont des explications en répétition sur la pédagogie, la pédagogie, la pédagogie,
06:43 on n'en sort pas, la formule est lassante,
06:45 parce que la pédagogie c'est le maître et l'élève.
06:48 C'est le maître qui explique et le bon élève qui finit par comprendre.
06:51 Et il n'y a que le concre qui ne comprend pas.
06:53 Le commun des mortels n'a pas envie de se voir assigner le rôle du concre.
06:57 Premier élément.
06:58 Deuxième élément, je crois,
07:00 pourquoi le gouvernement ne parvient pas à comprendre l'opposition?
07:04 Eh bien, c'est qu'il, je pense qu'il sous-estime la profondeur du malaise
07:08 qui est canalisé par cette réforme.
07:10 Alors, si on se contente de croire que tout ce débat
07:13 c'est seulement dû à l'incompréhension de certaines clauses
07:16 dans une réforme qui serait tout à fait détachée du reste du contexte social et politique,
07:20 c'est qu'on ne comprend pas les profondeurs d'un malaise français,
07:23 on en a souvent parlé ici,
07:24 qui s'étale sur une trentaine d'années
07:26 et qui explose à répétition et de manière toujours plus vive,
07:30 je dirais pas toujours plus violente, mais toujours plus vive et virulente.
07:32 Alors, si on ne prend pas au sérieux ce malaise social,
07:35 on ne comprend pas ce qui alimente le mécontentement
07:38 et on ne comprend pas ce qui se passe non seulement dans la rue, c'est une chose,
07:41 mais l'opposition à la réforme qui s'étend dans des secteurs de la société
07:44 qui hier encore l'appuyaient.
07:46 Et ça nous donne, c'est ce que disait Dominique Régnier dans un...
07:49 je crois que c'était dans Le Monde si je ne me trompe pas ou dans l'Ibée,
07:51 il dit très justement qu'on n'est plus dans un débat seulement
07:54 sur la réforme des retraites pour le gouvernement,
07:58 on est dans un débat sur la possibilité de gouverner.
08:00 C'est-à-dire, si on a investi tant d'énergie dans une telle réforme
08:04 et qu'il est impossible de la faire passer finalement,
08:07 et plus on la met de l'avant et plus les gens la refusent,
08:10 c'est ce qu'on pourrait appeler, on l'a dit,
08:11 la chirurgisation attendue du mandat d'Emmanuel Macron.
08:14 Alors là, c'est l'explication du jour, à tout le moins des derniers jours,
08:17 réforme de techno.
08:19 Et c'est très exact.
08:20 Une réforme de techno, pourquoi?
08:22 Parce qu'il y a une absence de lisibilité politique,
08:23 on ne comprend pas le plan d'ensemble de cette réforme.
08:27 Je ne dis pas qu'il n'y a pas de logique dans la réforme,
08:30 du point de vue du commun des mortels,
08:31 qui n'est pas un spécialiste en droit de la retraite,
08:33 il regarde ça et il dit je ne comprends pas ce dont il est question.
08:37 D'abord, pourrait-on dire, parce que les porteurs de la réforme
08:40 sont eux-mêmes, ont le profil techno.
08:42 Ce n'est pas faire un jour à Mme Borne que dire
08:45 qu'elle a un profil techno en politique,
08:47 je pense que c'est même ce pour quoi on la célébrait au début,
08:49 en disant pour être capable de mener ce pays tiraillé,
08:52 il nous faut une technocrate plutôt froide
08:54 qui va être capable justement de gouverner sans passion.
08:56 Le problème, c'est quand on gouverne sans passion,
08:58 on gouverne sans les hommes.
09:00 Olivier Dussopt, qui n'est pas un homme sans qualité,
09:02 mais qui n'est pas un ministre très politique,
09:04 c'est un ministre technicien, un ministre technique
09:06 et qui est débordé lui aussi par la vague de passion
09:09 soulevée par la retraite.
09:11 Quant à Olivier Véran, qui est le ministre,
09:13 le porte-parole du gouvernement en bien des égards,
09:16 on pourrait dire que le porte-parole est victime de problèmes.
09:18 Aujourd'hui, plusieurs ne le croient plus.
09:20 Quand on regarde ça, c'est un problème,
09:22 c'est que sa crédibilité, lorsqu'il parle, plusieurs se disent...
09:24 Vous connaissez, c'est une vieille formule,
09:26 lorsque le vieil Véran vous regarde, il dit la vérité,
09:29 lorsqu'il remue les narines, il dit la vérité,
09:30 lorsqu'il bouge les oreilles, il dit la vérité,
09:32 c'est lorsqu'il remue les lèvres qu'il ment.
09:33 Alors, je ne dis pas que c'est vrai, on s'entend,
09:37 mais je dis que c'est le sentiment porté par plusieurs.
09:40 Et là, effectivement, plus on cherche à comprendre le projet,
09:44 moins c'est clair. Est-ce qu'il y a la fameuse question,
09:46 les 1200 euros? Est-ce qu'il y a, oui ou non,
09:49 une forme de minimum vieillesse de 1200 euros?
09:52 Oui ou non? Théoriquement, cette réponse devrait trouver
09:56 une réponse plutôt facile.
09:59 Oui ou non? Réponse, je ne sais pas.
10:01 Ensuite, c'est 64 ans, oui ou non?
10:05 Je ne sais pas.
10:06 Donc là, on est devant une série de points d'interrogation
10:10 où il devrait y avoir une forme de réponse plutôt simple.
10:14 Qu'on ajoute une chose.
10:15 Donc, la vision d'ensemble n'est pas là.
10:16 Et là, on se dit que là, je reprends la question
10:18 du gouvernement, qu'il n'est pas mauvais,
10:20 mais est-il possible si on n'est pas capable
10:21 d'imposer cette réforme?
10:23 Peu importe ce qu'on en pense.
10:24 Est-ce que ça veut dire que la France est devenue,
10:26 comme d'autres pays occidentaux, ingouvernable?
10:29 Est-ce qu'il est possible de faire des réformes d'envergure
10:31 quelles qu'elles soient?
10:32 Et là, il faut voir, effectivement,
10:33 le mastodonte technocratique que l'on nomme,
10:36 avec quelques poésies, le modèle social français.
10:38 Ce mastodonte technocratique, mais qui existe
10:41 dans tous les autres pays occidentaux,
10:42 c'est une question de quantité ensuite,
10:44 mais ce modèle s'est développé un peu partout.
10:46 Qu'est-ce qui se passe?
10:47 On dit souvent qu'il faut moins de lois.
10:48 Il y a tellement de lois.
10:49 Il y a cette formule, vous connaissez,
10:51 "Nul n'est censé ignorer la loi."
10:52 Oui, d'accord, mais quand on voit ce qu'est devenue
10:54 la loi aujourd'hui, vous m'expliquerez
10:55 qui peut la connaître si ce n'est pas
10:56 une espèce d'avocat omniscient.
10:58 Donc, moins de lois, on n'y parvient pas.
11:00 La simplification administrative,
11:01 on se dit que ça, au moins, ça va être possible.
11:03 Eh bien non, ce n'est pas possible.
11:04 C'est de plus en plus compliqué administrativement.
11:06 La maîtrise des dépenses publiques,
11:08 c'est devenu qui y croit véritablement?
11:10 Et la décision politique est empêchée
11:12 par tous les contre-pouvoirs qu'on a pu inventer
11:13 depuis 30 ans, apparemment pour renforcer
11:15 le pouvoir du citoyen, mais dans les faits
11:17 qu'il dépolitise et qu'il vide de sa substance le collectif.
11:20 Soit dit en passant.
11:21 Donc là, les réformes sont de plus en plus difficiles
11:23 et ajouter une chose à ça, ajouter une chose à ça,
11:25 ça ne touche pas que les retraites.
11:26 Le débat sur l'immigration qui s'en vient,
11:28 on le prend par la petite, petite, petite dimension
11:30 de la question des métiers sous tension.
11:33 Donc, un problème immense existentiel
11:35 est réduit à sa part la plus mineure.
11:37 Prenez tout ça ensemble et vous comprenez
11:38 que derrière cette crise de la réforme des retraites
11:40 et la question des technos, eh bien oui,
11:41 on est devant un projet qui a perdu sa dimension politique
11:44 et qui est devenu un millimélo technocratique.
11:46 - Revenons sur la classe politique.
11:48 Est-ce qu'une autre classe politique plus douée,
11:51 par exemple, pourrait mieux faire?
11:52 - Ah bien, je pense que c'est la question de base.
11:56 Qu'est-ce qu'un techno?
11:57 C'est quelqu'un qui réduit l'activité politique
11:59 à une forme de technique apparemment rationnelle
12:02 où il n'y aurait qu'une seule politique possible,
12:04 la sienne.
12:05 La politique, normalement, c'est accepter
12:07 qu'il y a une divergence de valeurs,
12:08 divergence de philosophie,
12:09 et on va néanmoins prendre des décisions
12:11 en tenant compte de la vision de chacun
12:12 tout en sachant qu'une vision va primer sur l'autre.
12:15 Le techno dit laisser de côté les valeurs,
12:17 laisser de côté les passions,
12:18 laisser de côté l'imaginaire,
12:20 laisser de côté la culture,
12:21 je traiterais la société comme une mécanique à réparer.
12:24 Mais c'est la meilleure manière de ne jamais gouverner.
12:27 Et là, c'est à ce moment-là qu'on peut s'intéresser,
12:29 vous l'avez posé la question,
12:30 à la qualité de la classe politique.
12:32 Alors, je me tourne ici vers une figure
12:33 qui n'est pas, qu'on soupçonne rarement d'extrémisme,
12:36 Franz-Olivier Gisbert,
12:37 qui écrit en ce moment son histoire intime
12:39 de la Ve République, un ouvrage passionnant,
12:41 tome 1, tome 2.
12:42 Et qu'est-ce qu'on voit quand on lit ça?
12:44 Mais c'est la perte de qualité,
12:46 ou à tout le moins la perte de substance
12:48 de la classe politique sur une, deux ou trois générations.
12:51 Je nomme quelques figures et je cherche l'équivalent aujourd'hui.
12:54 Pour une génération, on peut penser à Pierre Mesmer,
12:57 Alexandre Sanguinetti, Jacques Chabandelma,
12:59 une grande figure du gaullisme.
13:00 Ensuite, plus récemment, des figures qu'on a connues,
13:03 Philippe Séguin, Charles Pasqua, Jean-Pierre Chevènement.
13:06 On pourrait dire qu'on soit d'accord ou non avec eux,
13:08 il y avait chez eux une forme de vie,
13:09 une sorte de côté grouillant de l'existence.
13:11 On était devant des figures lourdes, des figures tragiques,
13:13 des figures capables de décider, des personnages.
13:16 Aujourd'hui, c'est un peu moins ça.
13:19 C'est-à-dire, on est moins justement...
13:21 En fait, si on lit bien Gisbert, il a tout à fait raison,
13:23 on est devant des hommes politiques infiniment moins vivants
13:25 et truculents, et infiniment moins cultivés.
13:28 Et ça, c'est un problème, être moins cultivé,
13:30 parce que la culture permet de mieux gouverner.
13:33 Et ce qu'on a, c'est une forme d'aseptisation de la vie politique.
13:35 Le seul qui a parti au monde d'hier,
13:36 et le problème, c'est qu'il n'est heureux que dans l'opposition histrionique,
13:39 c'est Jean-Luc Mélenchon.
13:40 Alors, quoi qu'il en soit, la classe politique d'aujourd'hui,
13:43 plutôt inculte, inculte, j'entends par là,
13:45 elle maîtrise ses dossiers, elle connaît ses chiffres,
13:46 elle connaît ses communiqués de presse.
13:48 Mais la culture qui permet de comprendre l'âme d'un peuple,
13:51 qui permet de savoir comment gouverner un peuple,
13:52 qui permet de savoir comment le rejoindre,
13:54 comment l'interpeller, elle n'est pas là.
13:56 L'histoire qui permet de savoir comment ce peuple,
13:58 dans l'histoire, a réagi si on lui a posé tel type de réforme,
14:01 tel type de décision, la connaissance historique est tombée.
14:04 Alors, si vous avez cette espèce de perte de la culture,
14:06 et en plus, vous avez une définition très réduite de l'être humain,
14:08 une petite créature économique limitée,
14:11 qui n'a pas de besoin profond, un besoin de sécurité,
14:13 un besoin de symbole, un besoin d'identité, un besoin de culture.
14:16 Mais si vous ne savez pas à qui vous adresser,
14:17 vous ne voyez pas un peuple, vous voyez une société.
14:19 Vous ne voyez pas une société, vous voyez une collection d'individus,
14:21 essayez de réformer ensuite, ça ne fonctionne pas.
14:24 - Dernière question.
14:25 Pourtant, cette réforme pourrait bien finir par passer,
14:29 tout simplement, malgré la contestation,
14:31 malgré l'opposition de la rue,
14:33 malgré la faiblesse de ceux qui la portent.
14:35 - Oui, mais ce que je disais plus tôt, c'est l'effet machine.
14:38 C'est une forme d'effet machine.
14:39 La société fonctionne toute seule, mais sans décision politique.
14:42 Mais là, ça nous ramène au problème de la technocratie.
14:44 L'immense problème de la technocratie,
14:45 c'est pourquoi on reconnaît un pouvoir spontané ou technocrate ?
14:48 Parce qu'on dit, bon, il manque de charisme, c'est vrai.
14:50 Il manque d'envergure, c'est vrai.
14:52 Ils ne comprennent pas l'histoire, c'est vrai.
14:53 Mais ils sont compétents.
14:54 Ils sont compétents et devant leur compétence indéniable,
14:56 nous nous effacerons.
14:58 Qui, aujourd'hui, regardant la classe politique
15:00 telle qu'elle se présente à nous, est émerveillé,
15:02 illuminé par la qualité de la compétence technocratique
15:06 de ceux qui sont devant nous ?
15:07 On a la technocratie sans la compétence.
15:10 Qu'est-ce que ça veut dire ?
15:10 C'est on a l'arrogance dans sa nudité comptable.
15:14 Alors, quand on a ça devant soi,
15:16 on peut se dire qu'on pousse à la crise.
15:17 On pousse à la crise, pourquoi ?
15:18 Parce qu'elle a toujours refusé les débats politiques,
15:20 elle a toujours refusé la substance.
15:21 Elle finit par nous revenir, mais dans une forme
15:23 beaucoup plus radicale.
15:24 Reste à voir comment Emmanuel Macron va chercher
15:26 à reprendre tout ça.
15:27 Est-ce que lui, Emmanuel Macron, quittera
15:29 le domaine de la technocratie pour faire de la politique ?
15:31 On verra.
15:33 - Pagaille à l'Assemblée nationale.
15:35 Certains veulent le retrait de Millier d'allemandement,
15:37 d'autres souhaitent les maintenir.
15:39 La contestation populaire, elle est bien lancée
15:42 et bien ancrée.
15:43 Le pays, Guillaume Bigot, risque-t-il de devenir
15:46 ingouvernable, comme le disait justement
15:49 Mathieu Bocote il y a quelques instants ?
15:50 Ou si cette réforme des retraites est bloquée
15:53 au Parlement ?
15:54 - On sait que le parti qui peut faire la bascule,
15:56 c'est LR en réalité.
15:58 Et LR, effectivement, vous avez vu, a voté
16:00 contre l'article 2 avec LFI, avec le RN.
16:03 Donc ça ressemble à une sorte de répétition
16:06 générale d'une motion de censure.
16:07 Dire oui, le gouvernement pourrait finalement tomber.
16:09 Moi, je pense que non.
16:10 Je pense que les apparences sont vraiment trompeuses.
16:14 Pourquoi ? Parce qu'il recule mieux.
16:15 C'est une petite manœuvre politicienne.
16:16 Il recule mieux sur l'article 2, index des seniors,
16:19 faire plaisir aux entreprises, pour mieux sauter
16:22 sur l'article 7, qui est le cœur de la réforme,
16:24 c'est-à-dire de passer de 62 à 64 ans.
16:26 En fait, ils sont tout à fait pour cette réforme.
16:28 Et là, qu'est-ce qu'ils font ?
16:29 Ils se rappellent au bon souvenir du gouvernement,
16:32 de la majorité. Ils disent "on existe,
16:34 on ne compte pas pour rien".
16:36 D'ailleurs, ils ont déjà obtenu des concessions importantes.
16:38 Ironie de l'histoire, eux qui voulaient vraiment
16:40 une réforme paramétrique pour économiser des sous,
16:42 toutes leurs concessions ont quasiment vidé
16:44 de sa substance les effets bénéfiques sur le budget.
16:47 Moi, je pense qu'ils vont voter cette réforme.
16:49 Et donc, cette réforme risque d'être adoptée
16:51 fortement pour trois raisons.
16:53 La première raison, c'est que sinon,
16:55 LR va s'écrouler sous sa propre incohérence.
16:58 LR hurlait à la mort pour qu'il y ait une réforme
17:00 à 65 ans minimum.
17:01 Hurlait à la mort pour qu'il y ait une réforme paramétrique.
17:04 Ils disaient que le plus important, c'était le budget.
17:06 Et maintenant, ils ne voudraient pas une réforme paramétrique
17:07 à 64 ans. D'accord ?
17:09 Ensuite, c'est une question de survie pour eux, évidemment.
17:12 Et je pense que dans leur tête, il y a l'idée
17:14 de penser le coup d'après, c'est-à-dire,
17:16 ils savent que le président Macron ne peut pas
17:18 se représenter.
17:19 Et donc, ils pensent soit qu'il y a quelqu'un
17:21 dans leur rang qui sera Macron compatible
17:23 ou Renaissance compatible, ou alors même
17:25 qu'il y a aujourd'hui des traîtres,
17:26 des abominables traîtres qui s'appellent
17:28 Darmanin, Le Maire, etc.
17:30 Ce sont des LR qui ont tourné Kazakh
17:31 pour aller chez Renaissance.
17:32 Mais peut-être seront-ils demain des avant-gardistes.
17:34 Qui sait ? Qui sait ?
17:36 En tout cas, il y a un rapprochement,
17:37 évidemment, qui se dessine.
17:39 Et surtout, ils ont très peur de la dissolution.
17:41 Le président de la République l'a dit,
17:42 je dissoudrai dans la minute.
17:44 Et là, pour le coup, c'est Renaissance
17:46 qui va leur faire ce coup de la dissolution.
17:48 C'est eux qui risquent d'être à la fois
17:49 à l'Assemblée nationale, mais LR sera
17:51 bel et bien dissous.
17:52 L'ironie de l'histoire, c'est que ce parti
17:54 qui se réclame des mannes du gaullisme,
17:56 de l'héritage général de Gaulle,
17:58 se comporte exactement comme ce que
17:59 le général de Gaulle appelait les politiciens,
18:02 c'est-à-dire vraiment des gens qui n'avancent
18:04 que pour leur boutique.
18:05 Le général de Gaulle, d'ailleurs,
18:06 pendant toute la Quatrième République,
18:08 a été empêché de revenir aux affaires
18:10 parce qu'il y avait des petits partis comme ça,
18:12 des petits partis d'appoints,
18:13 des petites forces d'appoints.
18:14 C'était les apparentements,
18:15 ce qui veut dire qu'une minorité de gens
18:17 arrivaient à bloquer le pouvoir.
18:18 Et effectivement, voilà, LR,
18:21 ça devient les apparentements d'aujourd'hui.
18:24 Pourquoi le président de la République
18:26 ne peut pas ou ne veut pas reculer
18:29 face à cette crise ?
18:31 Je pense qu'il y a plein de raisons.
18:32 On peut essayer de les regrouper par paquet.
18:35 Il y a au moins trois paquets de raisons.
18:36 Il y a d'abord des raisons, je pense,
18:38 qui sont des raisons personnelles et nationales.
18:39 Je vais passer vite parce que je pense
18:41 que tout le monde les a plus ou moins en tête.
18:42 Il veut tenir ses promesses de campagne,
18:43 évidemment.
18:44 Il se pose la question de savoir,
18:46 et il a raison, s'il cède là-dessus,
18:47 ce qui restera de son pouvoir
18:48 de président de la République
18:49 pendant le reste de son mandat.
18:51 Et enfin, il y a la question de son bilan,
18:53 de son leg, deux mandats pour rien.
18:54 Ça devient compliqué.
18:56 Et projeter d'ailleurs la France
18:58 dans une réforme comme les retraites
18:59 ou l'euthanasie, bonjour le symbole
19:01 sur la projection dans l'avenir.
19:02 Donc, il ne resterait pas grand-chose.
19:03 Il y a des raisons, à mon avis,
19:04 qui sont plutôt européennes
19:06 et qui sont celles-là inavouables.
19:07 Bien sûr, il y a la question des taux d'intérêt
19:09 qui risquent de flamber,
19:10 donc il doit donner des gages au marché.
19:12 Ça, il ne peut pas le dire à l'opinion publique,
19:13 mais il y pense très fort.
19:14 Et probablement, le président Macron,
19:16 ça n'a pas l'air de s'intéresser
19:17 que très moyennement à la France.
19:19 Pense-t-il à la France comme un tremplin
19:21 pour un destin européen ?
19:22 Là, il pourra faire l'histoire,
19:23 l'histoire des techno, d'ailleurs.
19:25 Enfin, troisième raison,
19:28 elle est plus institutionnelle.
19:29 Il ne faut pas oublier que le président
19:29 de la République, il est gardien
19:31 de la Constitution.
19:32 Et donc, il se pose une question
19:33 qui n'est pas fausse.
19:34 Que restera-t-il de la démocratie
19:36 représentative si un président
19:37 légalement élu ne peut pas mettre
19:39 en œuvre son programme ?
19:40 Et que restera-t-il d'ailleurs
19:41 du pouvoir de l'Assemblée nationale
19:43 et du Sénat qui ont des mandats
19:44 absolument légaux et réguliers
19:46 si, effectivement, une majorité
19:49 à la présidence et une majorité
19:50 au Parlement est entravée par la rue ?
19:52 Et je pense, pour l'ensemble
19:54 de ces raisons, on peut se dire,
19:55 sans vraiment prendre trop de risques,
19:58 que le président ne va pas hésiter
19:59 une seule seconde à utiliser
20:00 les deux armes que lui donne
20:01 la Constitution.
20:02 D'abord, l'article 47.1,
20:04 si ce n'est pas plié en 50 jours,
20:05 il va forcer l'application
20:06 par ordonnance de sa réforme.
20:08 Et deuxième arme, eh bien,
20:09 si jamais même ça bloquait
20:11 en haut de là du raisonnable,
20:12 il y aurait la dissolution,
20:13 je l'ai déjà évoqué.
20:15 Mais ces deux armes,
20:16 elles ne sont pas sans danger.
20:17 Je pense que le président le sait.
20:19 On avait, souvenez-vous,
20:20 avant l'élection présidentielle,
20:21 évoqué ici même la possibilité
20:23 que le président Macron soit réélu.
20:25 Il ne fallait pas être grand clair
20:27 pour ça, mais par contre,
20:28 qu'il puisse ne pas avoir
20:29 de majorité à l'Assemblée.
20:30 C'est effectivement ce qui s'est passé.
20:31 Néanmoins, il y a une majorité
20:32 relative, on va dire.
20:33 Après dissolution, il pourrait
20:34 ne pas avoir de majorité du tout.
20:36 Et donc, on se retrouverait face
20:37 à la fameuse chambre introuvable
20:38 du 19e siècle, crise du 16 mai 1877
20:41 pour les experts.
20:42 Et puis, les ordonnances,
20:44 c'est pareil, ça peut être
20:44 les trois glorieuses de 1830.
20:46 Là, s'il agit par ordonnance,
20:47 ça peut aussi rappeler
20:48 de mauvais souvenirs.
20:48 Mais grosso modo, ces armes-là,
20:50 elles ont une fonction dissuasive.
20:52 Je pense que le danger n'est pas là.
20:54 Il va y avoir, à mon avis,
20:56 un accord trouvé à l'Assemblée nationale.
20:58 Cette réforme va passer,
20:59 mais on peut se poser la question
21:00 du décalage entre la République
21:03 des représentants et la République réelle.
21:05 Je vous entends bien.
21:06 Cette réforme a donc de fortes chances
21:08 de passer.
21:09 Et le risque de blocage,
21:11 de chaos social,
21:13 est-ce que ça, c'est un risque
21:15 qui est à écarter ou pas ?
21:18 Alors, peut-être sur le chaos social,
21:20 oui, parce que les syndicats
21:21 sont légalistes, on va dire,
21:22 et que je ne les vois pas.
21:23 Je ne vois pas les centrales syndicales,
21:25 si vous voulez, appeler à la grande grève
21:27 une fois que la loi sera passée.
21:28 Ça serait vraiment anti-républicain.
21:30 Il n'y a guère que Jean-Luc Mélenchon,
21:31 d'ailleurs, pour continuer
21:32 à croire au grand soir.
21:33 Les syndicats sont plus malins.
21:34 Ils n'appellent pas à la grève générale.
21:36 Pardonnez-moi de vous interrompre,
21:37 mais même avant que passe la loi,
21:39 ils peuvent...
21:39 Alors, avant que passe la loi,
21:40 ça, c'est la carte qu'ils vont jouer.
21:42 Là, il n'y a pas de problème.
21:42 Ça, ils vont jouer cette carte-là.
21:44 Bien sûr, ils vont mettre
21:44 la pression maximale,
21:46 mais les syndicats sentent bien
21:47 qu'en fait, les Français sont mobilisés
21:50 à condition que ça n'empoisonne
21:51 pas trop leur vie quotidienne,
21:52 d'une part, c'est tout le paradoxe.
21:53 Et deuxièmement, ils sont mobilisés
21:55 moins sur un sujet de justice collective
21:58 que d'éviter une injustice individuelle.
22:00 Et tout le problème de la crise
22:01 des retraites de cette réforme est là.
22:03 C'est-à-dire que ce que n'ont pas compris
22:04 les technos, ce qu'on n'a pas compris
22:06 la classe politique,
22:07 c'est qu'en fait, dans un...
22:08 Dans une France où les gens ne croient
22:09 plus d'ailleurs au christianisme
22:11 ou à la vie après la mort,
22:12 ils ne croient plus non plus
22:14 à la révolution,
22:14 ils ne croient plus à l'Europe,
22:16 ils ne croient plus à la gauche,
22:17 ils ne croient plus à la droite,
22:17 ils votent de moins en moins.
22:18 Qu'est-ce que c'est que cette retraite ?
22:19 C'est une espèce de paradis
22:20 qu'on met dans la poche.
22:21 C'est-à-dire, c'est cultiver son jardin.
22:23 C'est un petit truc à soi, un petit horizon.
22:25 Voilà, c'est l'horizon
22:26 qu'on ne peut pas atteindre.
22:27 Et donc, il ne fallait surtout pas
22:28 aller sur ce terrain-là.
22:30 En fait, là, ils ne veulent pas
22:31 les Français s'intéresser trop
22:32 à la politique, mais ils ne veulent pas
22:33 non plus que la politique
22:34 s'intéresse à eux et vienne leur casser
22:36 les pieds jusque dans leur jardin.
22:37 C'était vraiment l'horizon
22:39 à ne pas dépasser 62 ans, à mon avis.
22:41 Et en tout cas, si cette réforme passe,
22:43 alors là, la colère va monter d'un cran.
22:45 C'est vrai que c'est une colère rentrée,
22:47 mais ça va monter d'un cran.
22:49 Après la fracture sociale
22:50 qui s'est jamais refermée,
22:52 après le car share qu'on n'a jamais passé,
22:55 après la finance qui finalement
22:56 n'était l'ennemi de personne,
22:58 après les résultats du référendum
23:00 qu'on a mis à la poubelle,
23:01 après le grand débat
23:02 qu'on a mis aux oubliettes.
23:03 Alors là, s'ils imposent une réforme
23:05 contre deux tiers du peuple français,
23:07 je peux vous assurer
23:08 que c'est un vieux peuple politique
23:09 et que ça va faire très, très mal.
23:11 En réalité, on peut trouver finalement
23:13 cette réforme des retraites,
23:14 elle veut dire beaucoup plus
23:16 que la simple réforme des retraites.
23:17 On le sait, c'est la France périphérique
23:19 contre la France centrale.
23:20 C'est les carrières longues
23:21 contre les carrières courtes.
23:22 C'est la France qui vote
23:22 contre celle qui ne vote pas.
23:24 Mais je peux identifier facilement
23:26 cette équation de l'ingouvernabilité.
23:28 Qu'est-ce que c'est
23:28 l'équation de l'ingouvernabilité ?
23:29 C'est très simple.
23:30 Le vote est les filles,
23:31 plus le vote est reine,
23:33 plus l'abstention.
23:34 Et là, vous retombez sur quasiment
23:35 les deux tiers du corps électoral.
23:37 Alors normalement,
23:38 n'importe quel chef démocratique,
23:39 n'importe quel élu,
23:41 même un petit chef,
23:42 sait qu'on ne peut pas aller
23:44 contre les deux tiers des gens
23:45 qu'on dirige au nom des gens qu'on dirige.
23:47 Ça pose un problème.
23:48 Ça pose un problème d'erreur système.
23:50 Oui, on peut le faire.
23:51 Quand on a une légitimité énorme,
23:52 qu'on s'appelle Nelson Mandela
23:53 sur un sujet symbolique,
23:55 on peut imposer
23:56 une Coupe du monde du rugby.
23:57 Oui, quand on s'appelle Mitterrand
23:58 et qu'on a les 100 jours
24:00 et qu'on vient d'être élu,
24:00 on peut imposer la peine de mort
24:02 au peuple français.
24:03 Mais c'est sur un point symbolique,
24:04 quand on a une légitimité énorme,
24:06 quand on est un technocrate isolé,
24:08 faire ça, c'est suicidaire.
24:10 Même Alexandre le Grand,
24:12 je ne parle pas d'un technocrate,
24:13 je parle d'un des plus grands conquérants
24:14 de l'histoire de l'humanité.
24:15 Il a amené ses combattants
24:17 jusqu'aux Ganges.
24:18 Il a vaincu le monde entier.
24:20 Et vous savez quoi ?
24:20 Les cavaliers ont fait grève un matin.
24:22 Ils ont dit "on en a marre,
24:22 ça fait plus de trois ans
24:23 qu'on est loin de chez nous,
24:24 on doit rentrer chez nous".
24:25 Alexandre le Grand a dit
24:27 "comme je suis leur chef, je les suis".
24:29 Certains petits personnages
24:30 feraient bien d'en tirer
24:32 un peu quelques profits.
24:33 Je reçois un SMS à l'instant,
24:37 Guillaume Bigot au sommet de son art.
24:40 Oui, contrairement à d'autres.
24:43 Il ne lâche rien, Guillaume Bigot.
24:46 On va marquer une pause.
24:47 Dans un instant,
24:48 on va revenir sur l'actualité
24:51 au niveau de l'affaire Pierre Palmade.
24:53 Et si, et si, et si,
24:55 Pierre Palmade était jugé irresponsable.
24:57 À tout de suite.
24:58 Beaucoup d'actualités ce soir.
25:04 On commence par l'info avec Adrien Spiteri.
25:07 50 000 manifestants à Albi,
25:12 selon la CGT.
25:14 10 000 selon la préfecture de police.
25:16 Pour cette cinquième journée,
25:17 de mobilisation contre la réforme des retraites.
25:20 Tous les leaders syndicaux
25:22 étaient présents sur place aujourd'hui.
25:24 À Paris, 37 000 personnes
25:26 se sont mobilisées selon la préfecture.
25:28 300 000 selon la CGT.
25:31 L'enquête se poursuit dans l'affaire Pierre Palmade.
25:33 La garde à vue de l'humoriste
25:34 est prolongée de 24 heures
25:36 à l'hôpital de Melun.
25:37 Les deux passagers présumés du véhicule
25:39 sont, eux, entendus à l'hôtel de police de la ville.
25:42 Ils sont soupçonnés d'être impliqués
25:44 dans un grave accident de voiture.
25:46 Trois personnes ont été grièvement blessées.
25:49 Pour rappel, une mère a perdu son enfant dans ce drame.
25:52 Et puis, c'est une mesure inédite en Europe.
25:54 Le Parlement espagnol a voté ce jeudi
25:56 une loi créant un congé menstruel.
25:59 Il concerne les femmes souffrant de règles douloureuses.
26:02 Les députés ont également adopté un texte
26:04 permettant de changer de genre dès l'âge de 16 ans.
26:07 Oui, non.
26:09 Dans l'affaire Pierre Palmade,
26:10 alors que le petit garçon de 6 ans
26:12 serait a priori sorti du coma
26:14 et qui serait dans l'impossibilité de s'alimenter,
26:17 la garde à vue de Pierre Palmade est prolongée.
26:19 Il a déclaré ne se souvenir pratiquement de rien.
26:22 Mais une question se pose.
26:23 Pourrait-il échapper ou non à la détention provisoire ?
26:27 L'avocat des victimes a expliqué qu'elle ne comprendrait pas
26:30 qu'il ne parte pas en prison.
26:33 Est-ce possible de le voir ressortir
26:36 ou plutôt, oui, libre de sa garde à vue, Charlotte ?
26:40 Alors, c'est possible.
26:41 Et dans un monde où Pierre Palmade ne serait pas Pierre Palmade,
26:46 ce serait même probable qu'il ressorte libre de sa détention.
26:49 Et en l'occurrence, sa notoriété et le tour pris par cette affaire,
26:53 notamment la place à la fois dans l'opinion,
26:56 l'émotion que ça a généré,
26:58 pourrait peser en l'occurrence en sa défaveur,
27:00 c'est-à-dire en faveur d'un placement en détention provisoire.
27:04 On va voir pourquoi.
27:05 Alors, juste une précision.
27:06 Tout le monde espère,
27:08 surtout les plateaux partout dans le commentaire public,
27:11 tout le monde espère que la justice sera la même pour lui
27:14 que pour tous les autres.
27:15 Je pense que tous les gens qui disent ça n'ont pas conscience
27:17 de ce qu'est la justice, en l'occurrence, pour tous les autres.
27:20 C'est-à-dire qu'évidemment, quand on dit
27:22 "on espère qu'il va y avoir la même justice que tout le monde",
27:24 on espère une réponse ferme et sévère.
27:27 Or, il se trouve que sur ces questions-là,
27:29 il y a pour mille et une raisons, pour des raisons de procédure,
27:32 pour des raisons de droit pénal, pour des raisons de place en prison,
27:35 pour des raisons de délai de jugement,
27:39 il n'y a pas nécessité de détention provisoire d'une part.
27:42 Et vous savez, il y a toute la question des peines,
27:44 des peines prononcées, puis exécutées, puis aménagées.
27:47 Donc là, en l'occurrence, quand on dit
27:49 "on espère qu'il aura la même justice que tout le monde",
27:51 je pense que dans la tête de tout le monde,
27:52 ça veut dire "on espère qu'il aura une justice
27:53 beaucoup plus ferme que d'habitude".
27:55 Je ferme la parenthèse,
27:57 mais ça me semble important de le rappeler.
28:00 La détention provisoire,
28:02 pourquoi est-ce que je dis que c'est possible qu'ils ressortent libres ?
28:05 Même si dans le cas de Pierre Parlimat,
28:06 c'est un peu plus compliqué, on va le voir.
28:08 Quand est-ce que la détention provisoire est décidée ?
28:13 Elle est décidée dans des conditions extrêmement précises
28:15 qui s'imposent aux juges, et notamment aux juges des libertés,
28:18 puisque vous savez que maintenant,
28:19 il y a le juge d'instruction ou le procureur
28:22 qui peut décider de la détention provisoire.
28:24 Il doit dans ce cas-là saisir le juge de la détention et de la liberté
28:28 qui examine le dossier et qui place en détention provisoire ou pas,
28:31 qui renouvelle la détention provisoire ou pas.
28:33 Vous pouvez être mis dans le cadre d'une information judiciaire
28:35 si il y a un juge d'instruction,
28:37 dans le cadre d'une comparution immédiate,
28:38 si jamais il y a un petit délai avant votre comparution,
28:41 vous pouvez être placé en détention provisoire.
28:42 Une comparution à délai différé, dans un délai assez court,
28:46 et sur reconnaissance préalable de culpabilité.
28:49 Si c'est un délit, vous avez quatre mois de détention provisoire
28:52 et ensuite, ça peut être réexaminé deux fois, prolongé par le juge.
28:56 Si c'est criminel, vous avez un an de détention provisoire possible,
29:00 reconductible pour un an de plus en attendant le délai du jugement.
29:05 Pour reconduire une détention provisoire,
29:07 il faut un débat contradictoire devant le juge des libertés
29:10 et ensuite, selon la décision du juge,
29:11 vous pouvez faire appel de la prolongation de votre détention provisoire.
29:15 Tout ça pour vous dire que ce n'est pas du tout,
29:17 c'est vraiment l'exception, la détention provisoire, de manière générale.
29:21 Ensuite, concrètement, elle peut être encourue pour plusieurs raisons.
29:24 D'abord, ça n'a rien à voir avec la peine encourue.
29:25 J'entends tout le monde dire qu'il pourrait être placé en détention provisoire
29:27 parce qu'il encourt entre sept et dix ans de prison.
29:29 Ça n'a rien à voir avec ça.
29:31 Il encourt en effet entre sept et dix ans de prison.
29:34 Mais si vous êtes mis en examen et que vous encourez une peine criminelle
29:39 ou une peine correctionnelle égale ou supérieure à trois ans,
29:42 et non pas sept à dix ans,
29:44 vous pouvez être placé en détention provisoire.
29:46 Quand est-ce que vous l'êtes ?
29:47 S'il y a un risque de fuite en attendant votre procès,
29:50 c'est-à-dire un risque d'échapper à la justice,
29:52 s'il y a un risque de pression sur témoin,
29:55 s'il y a un risque de réitération du crime,
29:57 c'est-à-dire que ce n'est pas une fois,
29:59 mais simplement vous êtes un tueur en série,
30:00 on va vous placer en détention provisoire
30:02 pour éviter que le jour où on vous remet libre en attendant le procès,
30:05 vous fassiez d'autres victimes.
30:06 Et s'il y a un danger pour le mis en cause,
30:09 c'est-à-dire que la détention provisoire peut être décidée
30:11 pour protéger le mis en cause lui-même,
30:13 soit de lui-même, soit d'un risque de vengeance.
30:17 Dans le cas de Pierre Palmade, l'avocat des victimes, en effet,
30:21 a exprimé que l'absence de détention provisoire
30:24 serait incompréhensible pour la famille.
30:25 Il a évoqué deux choses.
30:27 Il a dit qu'il y a un risque de concertation frauduleuse avec les témoins.
30:31 Alors, cet argument-là est tombé
30:33 depuis que les deux personnes qui étaient en fuite
30:36 ont été placées en garde à vue.
30:38 Donc, il ne peut plus y avoir de concertation frauduleuse.
30:41 En clair, c'est-à-dire qu'ils se mettent d'accord sur une version
30:43 qui n'est pas la vérité en parlant tous les trois ensemble.
30:46 Et deuxièmement, il a évoqué les conséquences
30:49 pour les victimes de cet accident.
30:50 Il a dit, voilà, mes clients, en l'occurrence, ont leur vie dévastée.
30:53 Cette femme a perdu son enfant.
30:55 Le petit sort du coma, mais il est défiguré.
30:58 Le conducteur a des multiples fractures.
31:00 Il devra prendre des médicaments toute sa vie.
31:02 Il a dit, en raison de ces conséquences-là,
31:04 la famille ne pourrait pas comprendre
31:06 l'absence de détention provisoire.
31:08 Mais là, j'analyse la chose très froidement, en droit,
31:13 c'est une réponse qui va plus vite que la justice.
31:16 C'est-à-dire que la détention provisoire n'est pas une peine
31:19 en fonction de l'acte puisqu'il n'y a pas encore eu le jugement.
31:22 Donc, c'est deux choses différentes.
31:23 Je comprends très bien ce que dit l'avocat.
31:24 Je comprends très bien que la famille ne puisse pas supporter
31:27 que Pierre Palmade puisse ressortir libre.
31:30 On veut la prémission avant le jugement.
31:31 Mais voilà, exactement.
31:33 Et la question qui se pose, c'est qu'il dit
31:36 les victimes ne pourraient pas comprendre la décision de justice,
31:38 mais les victimes, souvent, ne sont pas du tout en mesure
31:41 de comprendre les décisions de justice.
31:42 On le dit suffisamment souvent pour le comprendre
31:44 dans ce cas précis.
31:46 Et le juge d'instruction, lui, contrairement à l'avocat
31:49 ou à nous tous en réalité, aux familles et à nous tous,
31:52 lui doit composer avec la loi et seulement,
31:54 évidemment, avec la loi.
31:56 Et en l'occurrence, si on examine ce cas précis,
31:59 la libération ne poserait pas de problème
32:01 sur la conservation des preuves ou indices,
32:03 puisque les perquisitions ont déjà eu lieu.
32:05 Elle ne poserait pas de problème sur la question
32:06 de la concertation frauduleuse, puisque les deux personnes,
32:09 enfin, les deux potentiels complices sont aujourd'hui
32:12 en garde à vue.
32:13 Le risque de fuite est faible, puisqu'il y a des garanties
32:16 de représentation.
32:16 On sait où il habite.
32:18 On sait ce qu'il fait de sa vie.
32:20 Le risque de récidive, la récidive, c'est très précis.
32:23 C'est exactement la même chose.
32:25 Donc, le risque de récidive que demain,
32:26 Pierre Palmade reprenne de la cocaïne et reprenne le volant
32:29 est assez faible aujourd'hui.
32:31 Donc, dans l'état actuel de ce qu'on sait,
32:33 la détention provisoire pourrait être décidée
32:35 pour une raison, en réalité, c'est pour le protéger lui-même
32:38 d'un éventuel risque suicidaire ou alors d'une volonté de vengeance,
32:41 précisément parce qu'il a pris tellement de place
32:44 et en plus, il est connu que le risque de vengeance
32:47 est accru par rapport, là en l'occurrence, à sa notoriété.
32:50 Donc, dans un dossier "normal", la détention provisoire
32:54 serait objectivement difficilement envisageable.
32:57 C'est-à-dire que, dans la réalité, pour les 700 morts
33:00 qu'il y a sur la route dans ces conditions-là,
33:01 la détention provisoire doit être assez rarement prononcée.
33:05 Et là, en l'occurrence, se pose la question,
33:07 d'autant plus que d'habitude, se pose la question
33:09 de l'éternel nombre de places en prison.
33:11 Une détention provisoire, c'est une place en prison qui est prise.
33:14 Donc, même les juges de la détention et de la liberté
33:17 doivent composer aussi avec cette question-là.
33:20 Mais évidemment, s'il y a libération à la sortie de la garde à vue
33:24 au lieu de la détention provisoire,
33:25 c'est une libération de ce qu'on appelle sous-contrainte.
33:27 Un contrôle judiciaire, c'est évidemment des personnes
33:29 qui ne sont pas relâchées comme si de rien n'était dans la nature.
33:32 - On entend souvent que la France est mauvaise élève
33:34 de la détention provisoire.
33:36 Le Conseil de l'Europe, la Cour européenne des droits de l'homme
33:39 s'inquiètent régulièrement du recours à la détention provisoire.
33:42 Pourquoi cette inquiétude ?
33:43 - On parle de personnes, la détention provisoire,
33:45 on parle de personnes qui n'ont pas été jugées
33:48 ou qui attendent le réexamen d'une condamnation antérieure.
33:51 C'est-à-dire que vous faites appel et vous restez en détention
33:54 qu'on appelle provisoire.
33:55 Vous avez été condamné, mais vous faites appel
33:56 de cette condamnation.
33:58 En attendant l'examen, vous êtes en détention provisoire
34:02 puisque vous savez, ça suspend la condamnation.
34:04 Ou alors, en cas de révocation du contrôle judiciaire,
34:06 vous êtes placé sous contrôle judiciaire,
34:08 vous ne respectez pas vos obligations,
34:10 vous pouvez être placé en détention provisoire.
34:12 Mais donc, la culpabilité de la personne
34:14 qui est en détention provisoire,
34:16 elle n'est pas établie en droit.
34:18 Aucun tribunal n'a déclaré coupable la personne
34:22 qui est en détention provisoire,
34:23 puisque c'est en attente de son procès.
34:25 Donc, on sent bien la schizophrénie en réalité.
34:27 C'est-à-dire qu'on est tous arc-boutés en permanent
34:30 dans les lois publiques.
34:30 On dit tout le temps, il y a la présomption d'innocence.
34:33 La détention provisoire nous rappelle qu'il y a en réalité,
34:36 dans le processus judiciaire,
34:37 une présomption de culpabilité dans bien des cas.
34:40 Évidemment qu'il y a une présomption d'innocence
34:41 dans le discours, parce que sinon,
34:43 vous êtes accusé en diffamation.
34:44 Mais quand vous placez quelqu'un en détention provisoire,
34:46 elle n'est pas encore condamnée,
34:47 mais vous avez suffisamment d'éléments matériels
34:50 pour avoir, en l'occurrence,
34:52 agir en fonction d'une présomption de culpabilité
34:54 sur la personne.
34:55 Et je note d'ailleurs qu'on fait souvent des commentaires
35:01 sur la manière dont on traite les affaires judiciaires.
35:04 Je note que dans ce cas-là,
35:05 la présomption d'innocence n'a pas du tout de place,
35:08 ni dans le discours, ni dans la manière
35:11 dont les gens ont de s'exprimer,
35:12 que ce soit médiatiquement, politiquement,
35:14 absolument personne.
35:15 C'est donc la raison pour laquelle le rejet idéologique,
35:18 en l'occurrence de la détention provisoire, est réel.
35:21 Mais parce qu'on nous dit que ce sont des personnes
35:23 présumées innocentes qui sont finalement placées
35:25 en détention provisoire,
35:27 il faut quand même noter que le temps passé
35:29 en détention provisoire est soustrait
35:31 au moment où vous avez une peine qui est prononcée.
35:33 Vous avez passé un an en détention provisoire
35:35 et vous êtes condamné à quatre ans,
35:37 vous ne ferez que trois ans de prison.
35:38 En réalité, vous en faites moins pour toutes les raisons
35:40 dont on a parlé.
35:42 Mais il faut bien comprendre qu'on ne fait pas de la prison
35:43 pour rien, sauf si vous êtes déclaré innocent au procès,
35:46 ce qui est assez rare.
35:47 En France, on a à peu près 29% des détenus
35:49 qui sont en détention provisoire.
35:50 Donc on nous dit souvent que la France est un très mauvais
35:53 élève de la détention provisoire.
35:54 En réalité, c'est moins par rapport à l'immense majorité
35:58 des pays européens.
35:59 On a moins en proportion de gens en détention provisoire.
36:02 Ce qui inquiète souvent, c'est la question du délai
36:04 des détentions provisoires.
36:05 Même si c'est restreint dans le temps,
36:06 il y a des gens qui passent beaucoup de temps
36:08 en détention provisoire et on juge que c'est injuste,
36:10 puisqu'ils ne sont pas encore jugés coupables.
36:13 Mais c'est un chiffre à expliquer comment ?
36:15 Par des tribunaux absolument débordés
36:17 et des délais d'audiencement complètement démons.
36:20 Il faut comprendre une chose, c'est que quand le mis en cause
36:23 est placé en détention provisoire,
36:25 le procès en général arrive beaucoup plus vite,
36:27 précisément en raison des délais.
36:29 Et là, qu'est-ce qu'on trouve dans ce petit sujet ?
36:32 On trouve tous les gens, vous savez,
36:33 qui étaient en détention provisoire,
36:35 qui n'ont pas réussi à être jugés dans les délais
36:37 et le juge est obligé, en vertu de la loi,
36:39 de les remettre dehors.
36:40 Et vous avez l'affaire Siem.
36:42 Mais comment ça ? Il était en détention provisoire
36:44 et puis il n'était pas encore jugé, mais il était dehors.
36:46 Eh bien, il était dehors précisément parce que la détention
36:48 provisoire est limitée dans le temps
36:51 et que les délais d'audiencement sont complètement dingues.
36:53 Et c'est ça qui inquiète, vous avez raison,
36:55 régulièrement, notamment la CEDH.
36:58 Mais il faut comprendre que les délais sont pires
37:00 quand il n'y a pas de détention provisoire.
37:01 Et là, je parle évidemment pour les victimes
37:04 et donc pour la société tout entière.
37:05 Excellente analyse.
37:07 Une autre question, Charlotte Capitale,
37:09 qui se pose avec l'usage de la drogue.
37:11 C'est celle de l'altération possible du jugement
37:14 au moment des faits.
37:15 Est-il envisageable que Pierre Palmade
37:17 soit reconnu irresponsable de ses actes
37:20 et par là, éviter de passer devant un tribunal ?
37:22 On se souvient effectivement de l'émotion
37:24 qui avait été suscitée par l'absence de procès
37:27 dans l'affaire Halimi.
37:29 Oui, alors je me suis repenché exactement sur les choses.
37:34 Vraiment, dans l'affaire de Pierre Palmade,
37:35 c'est extrêmement peu probable pour une raison simple.
37:37 C'est que dans l'affaire Halimi, ce qu'avaient expliqué les experts,
37:40 c'est que les effets de la drogue,
37:43 en l'occurrence dans l'affaire Halimi,
37:45 le meurtrier avait pris énormément de cannabis,
37:50 ce qui avait déclenché chez lui un épisode schizophrénique.
37:53 Et donc, il avait dit "je ne tue pas Madame Halimi,
37:55 mais Satan lui-même".
37:56 Et donc, les experts ont jugé que le déclenchement,
38:00 qu'en gros, son irresponsabilité,
38:02 elle est liée à la schizophrénie et non pas au cannabis,
38:05 et non pas à la prise de cannabis.
38:06 Évidemment, les avocats, notamment de Madame Halimi,
38:09 avaient expliqué que l'épisode schizophrénique
38:12 étant déclenché par le cannabis qu'il avait pris
38:15 en responsabilité, c'était insupportable.
38:17 Mais il se trouve qu'en effet, le droit n'était pas du tout précis
38:20 sur cette question-là,
38:22 et que l'irresponsabilité était liée à la schizophrénie,
38:24 et que la question de la drogue n'intervenait pas.
38:26 Il n'y avait aucune précision sur ce terrain-là.
38:29 En l'occurrence, il est différent,
38:30 et c'est ce qu'expliquaient les experts,
38:33 de prendre de la drogue et d'avoir des conséquences
38:36 qui sont prévisibles.
38:37 C'est le cas de Pierre Palma, vous prenez de la drogue et le volant,
38:40 vous savez très bien qu'il y a des conséquences,
38:43 on va dire, sur la conduite, sur les réflexes,
38:45 au moment de prendre de la drogue ou de l'alcool d'ailleurs.
38:48 Alors qu'avaient expliqué les experts dans l'affaire Halimi,
38:51 quand vous prenez du cannabis,
38:52 vous n'imaginez pas devenir schizophrène,
38:54 ce n'est pas automatique.
38:56 Maintenant, j'explique simplement ce qu'avaient dit les experts,
38:58 là je ne me prononce pas en l'occurrence sur cette chose,
39:01 et par ailleurs l'affaire Halimi avait déclenché un changement dans la loi,
39:05 sur deux points précis.
39:06 Un, vous n'avez plus...
39:07 En gros, la loi avait précisé deux exceptions
39:10 à l'irresponsabilité pénale liée à la drogue.
39:12 Un, il n'y a plus d'irresponsabilité
39:15 si l'abolition temporaire du discernement
39:17 résulte de la consommation pour...
39:20 pour...
39:22 comment dire...
39:23 aider au passage criminel.
39:25 En gros, l'exemple c'était les terroristes,
39:26 vous savez, qui prennent du Cap Tagon pour se donner du courage,
39:29 en l'occurrence pour aller commettre leurs actes.
39:31 C'était ça le premier exemple.
39:32 Et la deuxième exception,
39:34 c'est la possibilité de réprimer la consommation des produits psychoactifs
39:39 si la personne savait que cela pouvait la conduire aux violences
39:42 ou à l'homicide dont elle est déclarée irresponsable.
39:45 Donc même si vous êtes déclaré irresponsable
39:47 dans l'acte que vous avez commis,
39:49 vous pouvez désormais être condamné
39:51 pour la prise de psychotropes qui vous a conduit à produire cet acte.
39:54 Donc clairement, dans le cas de Pierre Palma,
39:56 l'irresponsabilité, ça me paraît...
39:57 Je ne veux pas...
39:58 Je n'ai pas de boule de cristal
39:59 et je ne suis pas expert en l'occurrence devant la justice,
40:01 mais je pense franchement qu'en vertu de tout ça,
40:03 ça me paraît assez improbable.
40:04 Merci beaucoup pour cette analyse sur les questions que tout le monde se pose.
40:08 Dans un instant, on se dira,
40:09 on fera un tour de table sur "Pendant ce temps-là",
40:11 au but Chaumont, une femme découpée en morceaux
40:13 en plein cœur de Paris.
40:15 Personne n'en parle et on en parlera.
40:17 Pierre Palma devra sans doute collaborer avec les enquêteurs
40:20 pour identifier son dealer.
40:22 Quoi qu'on en dise, l'usage de la drogue est interdit par la loi.
40:25 Pourtant, marmonnant, combien d'artistes, d'écrivains
40:28 comme Rimbaud, Baudelaire, Sartre, Balzac, Jules Verne, Théophile Gauthier
40:32 sont pris en exemple pour justifier
40:35 que l'artiste a besoin de drogue, d'artifice
40:38 pour libérer son génie créateur.
40:41 Le génie créateur et la drogue, mythe ou réalité ?
40:45 Ça tient beaucoup du mythe,
40:46 mais ça permet à tous les médiocres de se dire
40:50 "Si j'ose la petite substance, mon talent se révélera.
40:54 Si au quotidien, je ne m'exprime pas,
40:58 c'est parce que le bouillonnement est obstrué.
41:01 En revanche, si je fais en sorte que le bouchon saute,
41:04 le génie sera révélé, c'est extraordinaire."
41:08 Alors, on est vraiment effectivement dans l'imposture intellectuelle.
41:14 Tant et si bien qu'aujourd'hui, vous en avez certains qui disent
41:16 "En 15 jours, j'ai écrit un livre, quel exploit !"
41:19 C'est-à-dire, moi ce qui m'intéresse,
41:21 Flaubert, il était là, il gommait, il reprenait, ça durait des années.
41:27 Saint-Exupéry disait "Je n'écris pas, je gomme".
41:31 Aujourd'hui, vous avez des gens qui disent
41:32 "Oh, formidable, en 15 jours, j'ai écrit un livre".
41:35 On ne dit pas comment, mais on suggère bien qu'on ne dormait pas
41:38 et que par conséquent, on avait utilisé quelques succès d'année.
41:43 L'opération commence avec quoi ?
41:45 Avec la volonté d'un pays d'anéantir un autre grâce à la drogue.
41:51 Et c'est quoi ? C'est l'opium.
41:53 L'Angleterre qui essaie de tournebouler à la drogue le peuple chinois.
42:00 Et que font-ils ?
42:02 Eh bien, pour importer ce qu'ils souhaitent de la Chine,
42:05 ils ont des plantations d'opium, ils veulent payer avec l'opium.
42:11 Ce qui fait que très rapidement, tout le monde se retrouve dans les fumeries
42:16 et ce peuple est véritablement dans la léthargie,
42:21 dans les vapes et le gouvernement chinois ne veut plus qu'il y ait ça.
42:27 Les empereurs disent "il faut arrêter cette hémorragie, le peuple se sera détruit".
42:33 Oublions ce qui se passe pour eux, il y aura la guerre de l'opium,
42:36 mais vous avez quelques marins qui reviennent en France,
42:39 en particulier à Toulon, et ils ont découvert ça,
42:43 et ils ont senti qu'il y avait sans doute quelque chose à distribuer
42:48 et peut-être gagner un peu d'argent, mais surtout, il y a une sorte de folie.
42:52 Cette capacité à échapper à soi-même.
42:55 Et ça va toucher quelques populations,
42:58 qui sont les populations de l'effervescence intellectuelle.
43:02 Il y aura le club des achichins.
43:06 Les achichins, vous les avez cités, entre autres, il y a Théophile Gautier,
43:10 il y a Balzac, il y a Baudelaire,
43:13 et on essaie de se dire que c'était là qu'ils se retrouvaient
43:17 et qu'ensuite, le jaillissement les prenait.
43:21 Mais ce n'est pas du tout ça la réalité.
43:23 Ils ont tenté une expérience,
43:26 une sorte de mode qui fut très transitoire.
43:29 Ce club ne dura pas et Baudelaire n'y est allé que deux fois,
43:32 Théophile Gautier, qui était pratiquement à l'origine,
43:35 qu'a-t-il écrit Théophile Gautier ?
43:36 Il a dit "le vrai littérateur n'a besoin que de ses rêves naturels
43:42 et n'aime pas que ses pensées subissent l'influence d'un stimulant".
43:49 Voilà la vérité.
43:51 Et donc, si certains ont continué dans cette veine,
43:56 on peut penser aussi bien...
43:58 Il y a eu Malraux, c'est vrai, il y a eu Cocteau,
44:02 il y a eu ces gens qui ont été jusqu'à la destruction, n'oublions pas.
44:06 Musset, lui, c'est avec l'alcool, à 46 ans,
44:08 mais il y a tous les autres, sans parler ceux d'avant de la drogue.
44:12 C'est-à-dire que quand on regarde une bibliothèque,
44:14 qu'est-ce qu'il y a dans une bibliothèque ?
44:16 Eh bien, depuis l'Antiquité, les volumes des philosophes,
44:21 prenaient-ils de la drogue ?
44:23 Que nenni, épicure de la drogue !
44:25 Mais bon, il était là avec son petit grain,
44:27 il s'enchantait d'un rien.
44:29 Et les autres, ils n'étaient pas en train de chercher des substances.
44:33 Voltaire...
44:34 Ah, Voltaire, on en parlera dimanche.
44:36 Dimanche 11h, allez, on fait ça.
44:38 On va faire le grand dessin.
44:39 Le glaçage produit.
44:40 Non mais c'est intéressant de voir qu'il y avait cette partie
44:43 où il y avait tous les grands qui écrivaient avec leur propre génie.
44:47 Mais bien évidemment.
44:48 Voltaire, Molière, Saint-Germain...
44:49 Voilà, Racine, Montesquieu et autres.
44:52 Et Voltaire ne buvait que du chocolat.
44:55 Parce qu'en plus, il était là, toujours, très, très...
45:00 Dans cette obsession de la mort, il disait "je me meurs, je me meurs, je me meurs".
45:05 Il n'était pas question de toucher à quoi que ce soit.
45:09 Et puis regardez, pour moi, le plus grand créateur,
45:13 oublions ses positions politiques, mais celui qui a fait flamber le verbe,
45:17 celui qui a donné à notre langue une amplitude tout en la violent, c'est qui ?
45:22 C'est Céline.
45:23 Céline ne buvait que de l'eau.
45:26 Alors, c'est son...
45:28 Tout ce...
45:31 Ce prosélysme pour faire en sorte que les uns et les autres
45:35 aient le goût à se tourner la tête.
45:37 Et puis, si on fait un parallèle avec le sport, c'est quoi ?
45:40 C'est quoi utiliser la drogue ?
45:43 Alors, c'est le sportif qui prend sa petite seringue
45:48 et qui gagne le Tour de France.
45:50 Mais quand on apprend qu'il a gagné le Tour de France, c'est l'opprobre.
45:53 Il est en dehors de la société.
45:55 N'oubliez pas ce que l'on a vu au moment de Lewis,
46:00 Carl Lewis et autres, et son Canadien qui remporte...
46:04 - Ben Johnson. - Ben Johnson.
46:06 Il passe de la gloire au lendemain, l'opprobre,
46:09 il ne s'en est jamais relevé.
46:12 Et les performances, on les trouve indignes.
46:15 Donc, il nous faut aujourd'hui revenir à la juste mesure
46:19 et dire aux jeunes générations qui ont ces tentations,
46:22 alors qu'ils sont un peu perdus, qu'ils se sentent...
46:26 presque sous l'étouffoir de considérations morales ou générationnelles.
46:34 Ce n'est pas avec la drogue qu'ils se libéreront,
46:36 et là, on revient à ce que j'ai dit hier, c'est grâce à la liberté.
46:40 La liberté, c'est le libre esprit, ça se travaille,
46:43 et c'est par la cesse que l'on devient un grand écrivain.
46:46 - Et dans un instant, avec vous, Mathieu,
46:49 on va justement parler de ce paradoxe entre la criminalisation
46:53 des réseaux de dealers et la décriminalisation justement
46:55 de la possession pour son usage personnel.
46:58 Justement, un paradoxe dans lequel s'engouffre aujourd'hui notre société.
47:03 Pendant ce temps-là, au but de Chaumont, à Paris,
47:05 au plein cœur de Paris, ne pas oublier cette femme,
47:08 Asya, 46 ans, mère de trois enfants, retrouvée sciée, découpée en morceaux.
47:14 Son mari aurait attendu six jours pour signaler sa disparition.
47:17 L'affaire Palma jette un voile et efface,
47:20 et fait oublier justement ces faits divers, tragiques, sordides,
47:23 justement, qu'est l'histoire de cette femme.
47:26 Comment expliquer justement qu'un drame tel que celui-ci
47:31 puisse être éclipsé à ce point ?
47:34 - Peut-être parce que l'affaire Palma, c'est vraiment une boîte à fantasmes
47:37 absolument insensée, quoi.
47:39 C'est-à-dire qu'il y a à la fois la présence de la drogue,
47:42 il y a la présence de la notoriété,
47:44 il y a la présence d'une sexualité déviante avec les chemsex,
47:47 là, je ne sais pas trop quoi, ces drogues complètement dingues.
47:49 Il y a cette souffrance inouïe de cette famille absolument insensée.
47:54 Et puis cet effet de révélation, on a l'impression de révéler
47:57 la vérité d'un personnage qui était extrêmement connu des gens,
48:00 mais finalement, on ne savait pas à quel point il était complètement déjanté.
48:04 Et il y a donc une...
48:06 Voilà, on se projette, tout le monde se projette dans cette histoire.
48:09 Là, c'est quelque chose...
48:11 L'affaire début de Chemont, c'est atroce,
48:13 mais c'est sidérant, c'est atroce, mais on ne comprend rien, en fait.
48:17 C'est totalement incompréhensible, cette affaire.
48:19 - Et il y a ces trois enfants qui sont là dans la souffrance de l'absence de leur mère.
48:22 Et il y a ce petit garçon de 6 ans dans l'infirmier à Palma
48:25 qui s'est réveillé aujourd'hui du coma a priori,
48:30 qui aura des difficultés toujours à manger.
48:32 Comment une affaire comme celle-ci puisse écarter ce corps
48:37 découvert en plein Paris, dans la capitale française,
48:39 dans un parc très fréquenté?
48:41 - La pire palmadisation de l'actualité cette semaine,
48:44 c'est que c'est un capteur symbolique.
48:45 C'est-à-dire que c'est tout...
48:47 Parce que, attends, ça crée aussi une éclipse médiatique.
48:50 Et ça permet de poser toute une série de questions
48:52 qui autrement sont dispersées.
48:54 Donc la question de la drogue, la question de la déchéance d'un personnage.
48:59 Guillaume l'a dit, il a des pratiques sexuelles un peu étranges.
49:02 Tout ça mis ensemble dans un personnage,
49:04 et ça permet à chacun, le commun des mortels,
49:06 qui normalement, ces débats-là sont dispersés,
49:08 sont lointains, sont abstraits,
49:09 mais là, ça permet de les incarner concrètement dans une vie.
49:12 Puis ça devient l'occasion d'un débat de société,
49:14 d'une réflexion de société plus large.
49:15 Cela dit, cela dit que ça éclipse complètement l'actualité,
49:19 que ça fait en sorte que le réel disparaisse.
49:22 Ça en dit beaucoup. C'est un trouble aussi de la société médiatique.
49:24 C'est-à-dire, quelquefois, on décide qu'un événement
49:26 est le seul événement qui compte.
49:27 C'est comme si cette semaine, le pape était mort,
49:29 on l'aurait peut-être oublié.
49:30 S'il y avait eu une évasion dans un autre pays que l'Ukraine,
49:33 on en aurait moins parlé que de l'affaire Palmade.
49:35 Quelquefois, c'est comme si le réel était éclipsé pour une semaine,
49:37 et nous y reviendrons la semaine d'après.
49:39 Mais le réel continue de se dérouler,
49:40 simplement qu'il n'est plus digne de l'attention médiatique.
49:43 Il y a un effet trou noir, il fait hyper bol.
49:45 Tu as tout à fait raison.
49:47 Oui, et puis c'est vrai que je n'ajoute pas un mot à ce qui a été dit,
49:51 mais en plus, dans l'affaire de cette femme,
49:53 il y a à la fois la sidération de se dire,
49:55 en effet, ça arrive au plein cœur de Paris.
49:57 Et puis, cette fois-ci, c'est une femme.
49:59 Et puis, ça nous rappelle la petite Lola, où c'était une petite fille.
50:02 Mais bon, c'est quand même...
50:04 C'était dans le même quartier.
50:05 Ce genre d'horreur revient quand même beaucoup plus régulièrement
50:08 que ce qu'on pourrait imaginer à Paris.
50:11 Mais on ne sait tellement rien de rien.
50:12 On sait simplement qu'en effet, son mari a mis six mois à signaler sa disparition,
50:17 ce qu'on trouve tout étrange.
50:19 Mais globalement, il y a un énorme mystère qui plane sur cette affaire.
50:22 Donc, à la fois, il y a la sidération,
50:24 l'horreur absolue,
50:26 et puis, je ne sais pas, l'imagination aussi,
50:31 pour aller expliquer cette horreur en plein Paris.
50:33 Mais en effet, Pierre Palmade,
50:34 c'est tellement l'occasion de parler de mille sujets qui sont liés à cette affaire
50:39 que ça semble plus facile, on va dire, de disserter sur la première histoire
50:45 que sur la deuxième aujourd'hui.
50:46 Le sordide, il est malheureusement omniprésent.
50:50 Tous les jours, il y a des horreurs.
50:52 Elles n'émergent pas, ou éventuellement dans un journal local.
50:56 Et puis, vous savez, dans une conférence de rédaction le matin,
50:59 on est là, on se rend compte, t'as quoi, toi, dans ta rubrique,
51:02 puisque chacun, il y a celui qui a des faits divers.
51:04 Et il y a les jours où il n'y a rien.
51:06 Alors, on va se jeter sur un événement
51:08 parce qu'il faut bien produire de l'information.
51:11 - On n'est pas... - Et ça monte, ça monte.
51:12 - C'est pas ça aujourd'hui.
51:13 - Non, mais c'est pas ça.
51:14 J'essaie de montrer.
51:16 Et après, n'oubliez pas, quand Johnny Hallyday meurt,
51:19 on ne parlait plus que de ça.
51:22 Pendant des semaines, il pouvait se manifester quoi que ce soit.
51:27 C'était écrasé, c'était sous la chape.
51:29 Alors malheureusement, parce qu'il y a des curiosités,
51:33 que nous sommes à l'affût de ce que le public attend,
51:36 eh bien, parfois, on se laisse aller à une sorte de putasserie.
51:41 On essaie de répondre à l'attente de ce public.
51:44 Et je crois que tous les trois, ils nous ont bien expliqué
51:47 pourquoi il y avait cette attente du grand public.
51:50 - En tout cas, pensez à la famille de cette femme et ses enfants, effectivement.
51:56 On va revenir sur le prolongement de votre chronique
51:59 il y a quelques instants sur les gros paradoxes de la drogue.
52:02 Ça vaut le coup de s'intéresser, Mathieu Bocoté,
52:04 surtout, j'aime bien votre regard en tant que sociologue,
52:06 de l'écart entre son interdiction et la grande tolérance qui l'entoure.
52:11 Et surtout de la banalisation de sa consommation
52:13 et peut-être aussi du mal-être dont sa consommation est le symptôme.
52:17 Sommes-nous dans l'effondrement des interdits?
52:19 - C'est intéressant parce que d'un côté, effectivement,
52:22 et on le dit, on le redit, la norme publique, elle est très claire.
52:25 La norme publique, c'est, et aujourd'hui plus que jamais,
52:27 la drogue, c'est mal.
52:28 Globalement, il y a un discours très, très répressif symboliquement
52:32 en disant que c'est de la dégénérescence, c'est mal, il ne faut pas toucher à ça.
52:35 Et soit dit en passant, sur le plan juridique en France,
52:37 si on fait le portrait des législations sur la drogue,
52:40 la France a une législation assez marquée,
52:42 contrairement à d'autres pays qui sont dans la voie de la décriminalisation,
52:45 d'une forme de tolérance.
52:46 De l'autre côté, on le voit, il y a l'écart avec le fait
52:49 que c'est une pratique banalisée.
52:51 Je pense qu'on mentirait si on disait pas qu'on connaît pas des gens
52:53 qui d'une manière ou de l'autre prennent de la marijuana,
52:55 prennent, faites la liste des substances disponibles.
52:58 Donc, il y a l'écart entre d'un côté, d'un côté, une norme forte,
53:02 et de l'autre côté, une pratique incroyablement banalisée.
53:05 Alors, la question qu'on peut se demander, c'est que vaut une loi
53:08 qui est invalidée par les mœurs?
53:09 Est-ce qu'il vaut la peine de maintenir une loi
53:11 si dans les faits, plus personne ne la respecte?
53:14 Est-ce que ça ne vient pas confirmer cette idée que le droit,
53:16 la loi, c'est secondaire, on peut s'en passer,
53:18 nul ne le respecte, on s'en fiche?
53:20 Ou est-ce que le maintien de la loi ne vient pas néanmoins
53:24 conserver la trace d'un interdit symbolique au cœur de la société,
53:28 en disant au moins c'est interdit?
53:29 Donc, sachez que si vous transgressez ça,
53:32 vous êtes néanmoins à l'extérieur du périmètre
53:34 de ce que la société juge acceptable.
53:37 Donc, c'est les deux positions se défendre, c'est ça qui est particulier.
53:39 Et je suis du parti qui croit qu'on doit maintenir la loi
53:42 pour être capable d'avoir, de maintenir la possibilité mentale
53:45 de la transgression, parce que si on fait tomber les codes de transgression,
53:48 on va vouloir toujours transgresser encore plus loin.
53:51 Si ce n'est pas le cannabis, ce sera la cocaïne,
53:52 si ce n'est pas la cocaïne, ça peut toujours aller plus loin.
53:54 Puis on a parlé souvent ici des addictions,
53:56 de toutes les transgressions débiles qui existent aujourd'hui,
53:58 qui culminent dans la pornographie et tout ça,
54:01 c'est quand même assez tragique.
54:02 Ensuite, il faut voir que dans plusieurs pays,
54:04 justement, la France, je ne dirais pas figure d'exception,
54:07 mais dans le monde occidental, aujourd'hui,
54:08 il y a une tendance lourde à la décriminalisation.
54:11 Au Canada, c'est un exemple, c'est la grande réalisation de Justin Trudeau,
54:15 c'est non seulement la décriminalisation, mais la légalisation.
54:17 Si vous êtes dans une province canadienne, la vente de…
54:20 - Pas de la cocaïne, mais bon.
54:22 - Non, non, non, bien sûr, le cannabis.
54:23 Mais certains disent, mais pourquoi pas,
54:25 ensuite, si c'est le premier pas, pourquoi pas les suivants.
54:28 Donc, chez nous, imaginez, vous avez au Québec, au Canada,
54:31 vous avez des sociétés publiques, donc vous pouvez procurer votre cannabis.
54:36 C'est organisé par l'État.
54:38 Est-ce que par ailleurs, ça a entraîné une augmentation significative
54:42 de la consommation?
54:43 Pas nécessairement, ça vaut la peine de le dire.
54:45 Ensuite, il y a un autre élément, en France, le parti de la légalisation
54:48 est de plus en plus vocal, de plus en plus sonore.
54:50 Le Conseil économique et social, tout récemment, plaidait justement
54:53 pour un chemin, un accompagnement vers le cannabis récréatif,
54:58 comme si c'était finalement un progrès de société.
55:00 - Dernière question, cet appel n'a-t-il pas le mérite d'ouvrir un débat
55:04 dans la mesure où les dispositions juridiques actuelles
55:07 ne freinent pas la diffusion des drogues, et notamment de la cocaïne?
55:10 - Je pense que sur cette question-là, il faut aborder ce qu'on appelle
55:14 le mal-être qui est derrière ça.
55:16 Pourquoi on se porte autant vers de tels stimulants
55:18 des dépendances des substances?
55:20 C'est qu'il y a un mal-être.
55:21 Je vais citer l'écrivain québécois Carl Bergeron qui dit
55:23 « le monde moderne ne se consomme pas à froid ».
55:25 Il ne se consomme pas à froid, donc on a besoin finalement de substances
55:28 pour être capable d'affronter un monde désymbolisé, déculturé, dépolitisé.
55:32 Et là, c'est à ce moment-là qu'on doit penser ce que j'appellerais
55:34 le continuum des substances.
55:35 Donc, depuis les années 90, il y a eu une hausse significative
55:38 de la consommation des antidépresseurs, par exemple.
55:40 Une hausse significative aussi de la marijuana.
55:43 Une hausse significative de la cocaïne.
55:45 Alors, est-ce que certaines substances sont légales?
55:48 D'autres ne le sont pas.
55:49 Mais dans les faits, il y a un continuum des substances
55:51 qui se dévoilent à travers cela.
55:53 J'ai tendance à croire, quant à moi, que plus une société se désymbolise,
55:56 plus elle se déconstruit symboliquement, plus elle se perd.
55:59 Autrement dit, si vous n'avez pas de régulation culturelle
56:02 et symbolique des émotions, vous aurez à l'horizon
56:04 une régulation pharmaceutique des émotions,
56:06 telle est notre situation aujourd'hui.
56:08 Merci beaucoup à tous pour vos analyses ce soir.
56:13 Dimanche 11h, le grand destin de Voltaire sur CNews.
56:17 Tout de suite, Mathieu Dewez pour l'actualité,
56:19 avant Pascal Praud pour l'heure des produits.
56:21 Ils étaient 1,3 million de manifestants en France, selon la CGT.
56:28 C'est le chiffre le plus faible depuis le début de la mobilisation,
56:31 le 19 janvier.
56:32 À l'issue de cette cinquième journée de manifestation
56:35 contre la réforme des retraites, le syndicat annonce
56:37 300 000 personnes à Paris.
56:39 La préfecture de police dénombre de son côté 37 000 manifestants
56:43 dans la capitale.
56:44 Et dans ce contexte, Jean-Luc Mélenchon veut passer
56:46 à l'étape supérieure.
56:47 Présent dans le cortège montpellierain,
56:49 le chef de file des Insoumis appelle à tout bloquer le 7 mars.
56:53 Selon lui, les manifestations à répétition ont atteint leur limite.
56:57 Enfin, plus de 5 ans après le scandale du lait contaminé,
57:00 le groupe Lactalis est mis en examen pour tromperie aggravée
57:03 et blessures involontaires.
57:04 Plus d'une cinquantaine de nourrissons avaient été atteints
57:07 de salmonellose fin 2017, après avoir consommé un produit pour enfants.
57:11 ...