Francis Huster et «Dom Juan» de Molière

  • l’année dernière
Acteur, metteur en scène, scénariste et réalisateur, Francis Huster était l’invité de Pascal Praud dans l’Heure des Pros, vendredi 17 février.  

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Transcription
00:00 Je voulais vous montrer une archive.
00:01 On aime bien vous montrer des archives.
00:03 On est en 1979.
00:05 Vous êtes encore un jeune comédien.
00:08 Vous allez jouer Don Juan à la comédie française
00:12 parce que vous êtes encore à la comédie française en 1979.
00:15 Et voyez comme vous parlez ce jour-là de Don Juan.
00:19 Et vous me direz si votre regard sur la pièce a changé.
00:23 Tout le monde a son Don Juan.
00:27 Pour les uns, le personnage est un homme mûr, 45-50 ans,
00:31 qui a des ambitions philosophiques, métaphysiques, mystiques.
00:36 Pour les autres, c'est un jeune noble, arrogant, libertin,
00:41 qui est puni et frappé par Dieu.
00:43 Si je te disais le nom de toutes celles qu'il a épousées en divers lieux,
00:47 ce serait un chapitre à durer jusqu'au soir.
00:51 La pièce s'est construite bizarrement,
00:54 puisque la première partie de l'oeuvre, les trois premiers actes,
00:58 sont très molliresques dans la tradition de Molière,
01:00 avec des personnages qui viennent se présenter,
01:03 des figures différentes, de la cocasserie, de la virtuosité technique.
01:06 Et puis, tout d'un coup, au quatrième acte et au cinquième acte,
01:10 on verse dans une pièce totalement différente, soit noire, sombre,
01:15 délicate, mystérieuse.
01:17 C'est justement à cause de cet antagonisme entre les deux parties de la pièce
01:20 que jamais les gens ne tombent d'accord sur Don Juan.
01:25 Et vous êtes tombé d'accord maintenant sur Don Juan ?
01:27 J'ai complètement changé de point de vue.
01:31 Je pense que c'est un héros, un héros du mal.
01:34 C'est-à-dire que cette ordure, vraiment, qui tue les maris
01:38 pour prendre leurs femmes, qui les baise, qui les jette, qui fout le camp,
01:41 un salopard, c'est lui, c'est ça le coup de génie de Molière,
01:45 qui va défier Dieu.
01:48 C'est le seul qui dit "Dieu n'existe pas".
01:50 Si tu existes, alors viens, viens te battre avec le pire des humains.
01:54 Et Dieu existe et le fout droit.
01:56 Et je crois qu'au fur et à mesure de notre vie,
01:59 on passe par plusieurs, nous-mêmes, par plusieurs Don Juan.
02:03 Et chez les femmes, c'est pareil aussi.
02:05 On n'est en fait jamais la même personne.
02:07 C'est ça qui est beau avec lui.
02:08 C'est qu'on finit par être soi-même.
02:11 Ça fait deux fois que vous faites référence à Dieu.
02:14 Oui.
02:15 Oui. Vous avez eu un appel ?
02:18 Je pense justement, c'est le Molière de Robert Hirsch
02:23 dans le Misanthrope.
02:25 Il me l'a confié après son décès en héritage.
02:29 Je l'avais mis en scène là-dedans, Robert.
02:31 Et pour moi, c'est le dieu Molière.
02:33 C'est-à-dire qu'il n'a pas levé la tête vers le ciel.
02:36 Il a fait que nous regarder nous.
02:38 Et vraiment, c'est tellement moderne.
02:40 Ce n'est pas du tout un classique. Il nous appartient.
02:42 Bon, sur le Panthéon, juste un mot, parce qu'on me dit
02:46 sur les entrées au Panthéon, la règle est posée depuis le début du Panthéon.
02:49 Sa création est liée à la Révolution et celles et ceux qui y entrent
02:53 doivent œuvrer à la construction de l'idéal républicain.
02:55 C'est pour cela que Victor Hugo y a admis au lendemain de sa mort en 1985.
03:00 Principe confirmé par le rapport Belaval sur la vocation du Panthéon.
03:04 Le 10 octobre 2013, au président de la République,
03:07 Philippe Belaval était alors président du Centre des monuments nationaux
03:10 et aujourd'hui, il est conseiller culture du président.
03:12 Mais c'est bien un juste combat que de vouloir défendre l'œuvre de Molière.
03:16 Évidemment, me dit ce conseiller proche d'Emmanuel Macron, sans doute.
03:21 Et durant la campagne 2022, ajoute-t-il, seule Valérie Pécresse a porté la demande d'entrée au Panthéon.
03:26 - Mais le Conseil de Paris, à l'unanimité, a voté pour l'entrée de Molière.
03:29 - Oui, mais le Conseil de Paris...
03:30 - Non mais 77% des Français interrogés sont 70 000.
03:35 La simple chose, nous ne sommes pas en République française.
03:40 Notre pays, c'est la France.
03:42 La République française est un gouvernement.
03:44 L'Empire de Napoléon et Napoléon III est un gouvernement.
03:48 La royauté est un gouvernement et la République s'honore.
03:51 - Mais même la République ne commence pas, c'est ridicule, en 1789.
03:56 Un des plus grands auteurs de la théorie politique en France qui s'appelle Jean Bodin
04:00 et qui a un livre fameux qui s'appelle "La République".
04:01 - Exactement.
04:02 - Alors je dois libérer.
04:03 - Oui.
04:04 - Libérez français, vous allez mettre...
04:05 Alors il est venu, avec quoi vous êtes venu ?
04:07 - Ah ça c'est mon Molière, le président de Molière et ça c'est celui de Robert.
04:11 Robert Ressoua, voilà.
04:12 Et venez, parce que je lui ai promis qu'il serait là pour l'entrée.
04:15 - Non mais c'est Imanche, le comédien, vous allez le mettre dans votre sacoche.
04:18 Vous pouvez taper sur les réseaux, vous tapez Robert Hirsch, "Soirée des adieux".
04:24 - Les Molières.
04:24 - Oui, puis "Soirée des adieux".
04:25 Quand il reçoit un hommage pour les Molières...
04:28 - Du président Mitterrand.
04:30 - Non, non, c'est quand il monte sur scène et qu'il reçoit un Molière, c'est exceptionnel.
04:34 La salle est debout, c'est vraiment formidable.
04:36 Et puis il y a tellement de choses sur Robert Hirsch,
04:38 mais il y a la "Soirée d'adieu" à la Comédie-Française,
04:41 avec Louis Sénier, où il joue, avec Isabelle Laliani évidemment,
04:45 où il joue la cigale et la petite fourmi.
04:49 - Simone.
04:50 - C'est exceptionnel, c'est un document exceptionnel.
04:52 Merci Francis Zuster.
04:53 - Merci.
04:54 [Musique]
04:56 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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