État de santé - La santé numérique tiendra-t-elle ses promesses ?

  • l’année dernière
La e-santé est en pleine explosion, boostée par la crise sanitaire. Sa croissance économique est estimée à 160% entre 2019 et 2023.
Avec son développement, de belles avancées sont promises aux patients et aux soignants : une meilleure prise en charge des maladies chroniques, une réponse aux déserts médicaux, une meilleure gestion hospitalière, ou encore des diagnostics plus fiables.
Mais la e-santé est-elle vraiment cette solution miracle que l'on nous présente. ? Dans la pratique, il reste encore de nombreux progrès à faire. Tous les établissements ne sont pas toujours assez modernes ni prêts à accueillir des systèmes d'information toujours plus innovants, et il existe encore une fracture numérique, notamment chez les patients plus âgés.
La sécurité des données est, elle aussi, au coeur du développement du numérique. Les rendre accessibles aux chercheurs et aux professionnels de santé est un impératif, qui doit être conditionnée à des exigences de confidentialité.
Alors, comment dépasser ces freins ? Peut-on faire du virage numérique une opportunité pour notre système de santé ? Ou faut-il au contraire s'en méfier ? La santé numérique tiendra-t-elle ses promesses ? C'est le thème de ce numéro d'Etat de Santé

La santé figure au premier rang des préoccupations des Français et au coeur de tous les grands débats politiques et sociétaux.

L'organisation des soins, le service public hospitalier, mais aussi le mal de dos, les allergies, la bioéthique ou encore la nutrition... Sur LCP, Elizabeth Martichoux explore chaque mois un thème de santé publique.

Entre reportages, interviews de professionnels de santé, de personnalités politiques mais aussi de patients, ce rendez-vous aborde tous les maux d'une problématique de santé, ses enjeux, les avancées et les nouveaux défis pour mieux vivre demain !
Transcript
00:00 LCP Assemblée nationale, en partenariat avec MGEN Mutuelle Santé Prévoyance présente État de Santé
00:09 Générique
00:38 Dopée par la crise sanitaire, la e-santé est en pleine explosion.
00:43 Le numérique a vraiment permis de révolutionner les approches de prévention,
00:48 notamment en permettant d'avoir quelque chose de beaucoup plus personnalisé.
00:52 Parfois accusé de déshumaniser les soins, le numérique vient plutôt en soutien aux professionnels de santé.
00:59 On laisse pas seul le patient. C'est pas que ça remplace la consultation traditionnelle, classique, cardiologique, pas du tout.
01:07 Au cœur de cet enjeu, les données qu'il faut stocker, sécuriser, mais aussi mieux collecter.
01:13 Ce qui est vraiment important, c'est d'avoir suffisamment de données.
01:18 Alors, comment prendre le virage du numérique pour améliorer notre système de santé ?
01:24 La santé numérique tiendra-t-elle ses promesses ? C'est le thème de ce numéro d'État de Santé.
01:33 Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau numéro d'État de Santé.
01:37 On va parler du numérique qui est déjà omniprésent dans le quotidien de la santé.
01:41 On ne se rend pas forcément compte, mais le potentiel est gigantesque.
01:46 Bonjour, Professeur Ténier.
01:48 Bonjour, Elisabeth Martichoux.
01:49 D'abord, une définition. La e-santé, qu'est-ce que c'est ?
01:53 Est-ce que, par exemple, quand je télécharge sur mon téléphone une application santé
01:58 qui me permet de mesurer mon activité physique ou de voir quel est le rapport entre mon poids et ma taille, etc.
02:05 Vous connaissez ça par cœur. Est-ce que c'est déjà de la santé numérique ?
02:09 Le numérique va transformer profondément tous les aspects de la santé avec des applications,
02:15 avec des algorithmes à partir de données qui sont générées.
02:18 Ce qui est important pour rester dans le domaine de la santé, c'est que ces utilisations numériques soient validées,
02:24 que ce soit ce qu'on appelle des dispositifs médicaux, que ce soit des applications.
02:28 C'est la différence qu'il y a entre les outils qu'on va utiliser dans la santé et les outils dans le bien-être.
02:34 Donc, faire attention.
02:35 Vous êtes, si je puis dire, un peu le krach de l'innovation technologique et du numérique en santé, Professeur Ténier.
02:41 Vous êtes directeur de Paris Santé Campus, vous êtes anesthésiste de formation.
02:46 On va regarder tout de suite votre portrait. On se retrouve juste après.
02:51 Professeur d'anesthésie-réanimation, Antoine Ténier est le directeur général de Paris Santé Campus,
02:57 un tout nouveau centre de recherche et d'innovation autour du numérique en santé.
03:02 Passionné par l'entrepreneuriat et le numérique, il fonde Illumins en 2015,
03:08 un laboratoire universitaire utilisant des outils de simulation pour la formation des futurs médecins.
03:15 En 2016, il devient conseiller santé pour le gouvernement, puis conseiller Covid-19 au plus fort de la crise.
03:23 En avril 2021, Antoine Ténier est choisi par le gouvernement pour prendre la direction de Paris Santé Campus,
03:30 un projet de campus de santé numérique qui s'installera sur le site de l'ancien hôpital d'instruction des armées du Val-de-Grâce
03:37 et qui veut développer l'innovation numérique autour des grands enjeux de santé,
03:41 avec les patients, les professionnels de santé et la société.
03:45 Est-ce que c'est en tout état de cause une révolution pour le monde de la santé numérique ?
03:56 C'est une évolution qui va amener dans certains domaines des révolutions, de fiabilité, de facilité,
04:02 ou parfois d'analyse que le cerveau humain ou les capacités de la santé numérique
04:08 ne pouvaient pas faire et qui vont vraiment passer dans une échelle nouvelle avec l'utilisation de ces outils numériques.
04:15 Est-ce qu'on peut dire, professeur, que le Covid-19 a été un accélérateur de l'inclusion du numérique dans nos vies,
04:25 et même au-delà, dans tous les domaines de la santé ?
04:28 Alors oui, c'est tout à fait juste. Il y avait une dynamique qui était naissante depuis quelques années auparavant.
04:34 La maturité des outils était naissante et surtout les usages qu'on en faisait étaient naissants.
04:39 Le Covid, pour les raisons qu'on connaît, a été un accélérateur très fort,
04:43 à la fois par exemple avec les outils de télémédecine, mais aussi sur la constitution de bases de données spécifiques,
04:49 notamment par exemple le système SIDEP qui a permis d'analyser tous les résultats de tests de PCR en France,
04:55 quotidiennement et sur l'ensemble du territoire. C'est tout à fait inédit.
04:58 Il y a beaucoup d'autres exemples.
05:00 Pour mesurer l'évolution, l'explosion de la e-santé en France, regardez, on se retrouve après.
05:07 Le Covid a donné un grand coup d'accélérateur à la e-santé.
05:16 Et c'est bien parti pour durer.
05:18 Même après les confinements, les Français sont restés connectés à leurs médecins.
05:22 Le nombre de téléconsultations est passé de 80 000 en 2019.
05:27 à 9,4 millions en 2021.
05:30 La e-santé est en pleine explosion.
05:33 Son potentiel économique est estimé à 235 milliards d'euros en 2023.
05:38 C'est 160% de plus qu'en 2019.
05:42 Mais le développement du numérique en santé est inégal.
05:46 Il existe toujours une fracture numérique.
05:48 17% de la population est touchée par l'électronisme.
05:52 Elle ne peut pas être détectée par un système de calculs.
05:55 Elle n'utilise toujours pas Internet.
05:58 Soit parce qu'elle n'y a pas accès, soit parce qu'elle ne sait pas utiliser les outils.
06:03 De plus, la e-santé concerne surtout les villes.
06:07 Alors qu'elle pourrait être un vecteur de lutte contre les déserts médicaux.
06:11 7 téléconsultations de médecine générale sur 10 sont faites par des patients des grands pôles urbains.
06:18 Alors, généraliser l'usage de la e-santé, c'est l'un des grands objectifs du Ségur du numérique en santé
06:24 et du programme Innovation santé 2030.
06:27 Ainsi, l'État a investi 2 milliards d'euros dans la santé connectée
06:31 et a lancé fin 2022 l'Agence de l'innovation en santé,
06:35 une structure qui a pour vocation de coordonner la recherche et l'innovation en santé,
06:39 notamment dans le numérique.
06:41 Vous disiez tout à l'heure que vous avez été anesthésiste réanimateur.
06:49 Vous, qu'est-ce que ça a changé, le numérique, dans le fond ?
06:52 Alors, le numérique, ce qui m'intéresse, c'est la possibilité d'améliorer
06:56 ce que nous allons pouvoir faire au quotidien pour nos patients.
06:59 Mieux partager de l'information entre professionnels de santé,
07:02 mieux expliquer les pathologies à des patients, mieux suivre à distance,
07:07 mieux diagnostiquer avec des outils, notamment d'intelligence artificielle, par exemple.
07:12 Donc, c'est la façon dont ça va permettre d'améliorer notre système de santé.
07:16 Ça n'est que du progrès, professeur, le numérique en santé ?
07:19 Alors, comme tous les éléments de progrès, il y a des enjeux d'appropriation,
07:23 d'usage et puis de compréhension de la valeur ajoutée dans nos pratiques aujourd'hui.
07:28 Et puis, la caractéristique aussi passionnante de la santé,
07:31 c'est qu'on est confronté en permanence à des questions éthiques,
07:34 notamment quand on a des innovations.
07:36 Et donc, la question qui est associée, évidemment, au progrès,
07:39 associée à ces innovations, c'est comment est-ce qu'on va faire en sorte
07:42 qu'elle n'amène que du progrès et qu'on permette de donner toutes les garanties
07:45 aux patients et aux professionnels de santé.
07:47 Alors, pour les patients, évidemment, c'est un rapport tout à fait transformé,
07:51 révolutionnaire avec la médecine et d'abord avec son médecin.
07:55 Je parlais de la téléconsultation.
07:57 On va regarder le reportage, si vous voulez bien, d'Alexia Leperon.
08:00 Oui, il y a une autonomisation des patients,
08:03 mais il y a certaines limites aussi qu'on touche de très près au reportage.
08:08 [Musique]
08:12 Doctolib, Care, Médecins directs ou encore l'iPhone.
08:16 L'utilisation des applications santé a explosé depuis le Covid.
08:21 25% de téléchargements en plus entre 2019 et 2021.
08:26 Exemple avec Vivoptim Solutions.
08:29 Créée pour les clients de Mutuelle, l'application propose un accompagnement
08:33 de santé en ligne, mais qui n'est pas uniquement digital.
08:37 Derrière l'écran se cachent des professionnels de santé bien réels,
08:41 physiquement présents au siège de l'application.
08:46 Allô ? Je vous appelle pour une consultation, un bilan nutritionnel.
08:52 Océane est diététicienne pour Vivoptim Solutions.
08:57 Aujourd'hui, elle aide une patiente qui souhaite perdre du poids.
09:01 Je ne vais pas vous interdire de manger ce petit carré de chocolat,
09:05 il n'y a pas de souci. Par contre, prenez le temps de le déguster
09:09 pour éviter d'avoir envie d'en consommer un autre.
09:12 Oui, c'est vrai, d'en reprendre un. Je le mange très vite.
09:16 Le but, c'est de pouvoir changer les comportements, améliorer leur santé
09:19 lorsqu'il y a un problème, lorsqu'il y a une pathologie.
09:22 Et quand il n'y en a pas, c'est du coup limiter l'apparition
09:25 d'une pathologie potentielle.
09:28 Derrière cette vision, il y a Virginie Femerie, directrice générale.
09:33 Pour elle, les applications de e-santé ont transformé la prise en charge des patients.
09:39 Le numérique a vraiment permis de révolutionner les approches de prévention,
09:44 notamment en permettant d'avoir quelque chose de beaucoup plus personnalisé.
09:48 Et c'est notamment par le biais de la donnée que les plateformes numériques
09:52 permettent de collecter et qu'on peut ensuite traiter,
09:56 d'avoir ce meilleur ciblage, cette meilleure personnalisation des approches.
10:01 Grâce à cette personnalisation, certaines applications permettent aussi
10:06 de surveiller la santé des patients atteints de maladies chroniques.
10:10 Comme Satelia, une application de télésuivi.
10:14 Parmi ses utilisateurs, il y a Nicole, insuffisante cardiaque.
10:21 À 78 ans, elle se connecte régulièrement.
10:25 Ainsi, tous les lundis, c'est la même routine.
10:29 Alors là, c'était 45,6 ans ce matin, je crois.
10:41 Alors, est-ce que je tousse ? Pas du tout.
10:50 Je ne me sens pas essoufflée.
10:54 Les chevilles ne sont pas gonflées.
10:59 Je ne me sens pas du tout fatiguée.
11:03 Chevaline. Terminé.
11:07 Voilà.
11:09 Ça me permet de voir l'évolution de ma maladie
11:14 et de gérer un peu, de savoir où j'en suis.
11:18 C'est rassurant parce qu'on ne se sent pas tout seul.
11:23 Mais pas de chance ce jour-là.
11:26 Nicole réalise qu'elle vient de se tromper dans l'une de ses réponses.
11:31 J'ai mis 45,800 et c'est 46,800 et 46,600.
11:43 - Mais ce n'est pas possible de revenir en arrière ?
11:45 - Non. J'essaie, mais ça ne marche pas.
11:49 Contacter nous, ils nous disent, mais je ne sais pas qui il faut que je contacte.
11:54 Alors elle admet, avec le numérique, il lui manque quand même un peu de contact humain.
11:59 Dans les questions, on demande, on répond presque par oui et par non.
12:05 Il n'y a pas de dialogue possible.
12:10 Pourtant, il existe bien.
12:12 Car ses réponses sont envoyées à l'hôpital de Bois-Gibert, où elle est suivie.
12:17 Et ici, il y a un professionnel chargé de surveiller son état de santé, à distance.
12:23 Dès qu'un patient communique des réponses préoccupantes, l'alerte est donnée au cardiologue.
12:29 - Par exemple, pour ces patients, on voit bien que la dernière semaine, il a un score assez élevé.
12:35 Et son poids, vraiment, il est déstabilisé.
12:39 Là, actuellement, il a gagné 6,5 kg.
12:42 Effectivement, on prend contact directement avec lui, lui expliquer, lui poser des questions.
12:48 Et lui proposer des modifications, effectivement, thérapeutiques, de son traitement en substance cardiaque.
12:55 On ne laisse pas seul le patient.
12:57 Ce n'est pas que ça remplace la consultation traditionnelle, classique, cardiologique. Pas du tout.
13:03 C'est qu'entre une consultation cardiologique et la prochaine, qui est d'habitude, c'est dans 3 à 6 mois,
13:08 même dans un an, sur les patients qui sont vraiment stables.
13:11 Entre ces temps-là, le patient, il est vraiment surveillé.
13:15 Si avec le numérique, le patient devient acteur de sa santé, il y a donc toujours une équipe médicale derrière lui.
13:22 La Haute Autorité de Santé souligne les bénéfices de ces outils sur la qualité de vie des patients.
13:28 La télésurveillance sera bientôt prise en charge par la Sécurité sociale.
13:37 - Professeur, évidemment, c'est évident, la valeur ajoutée pour le patient.
13:43 Mais aussi, il y a cette accusation de déshumanisation qui a été formulée dans le reportage.
13:49 Elle existe ? Le risque existe ou pas ?
13:52 - Le risque, il existe, évidemment.
13:55 Néanmoins, cet outil, ce qui m'intéresse, c'est qu'il va permettre d'amener un élément d'intermédiation
14:00 entre le patient et son professionnel de santé.
14:04 Et surtout, et c'est bien dit dans le reportage, il va permettre de faire ce qu'un professionnel de santé ne faisait pas auparavant,
14:10 c'est-à-dire suivre de façon parfois pluricotidienne un patient
14:14 et pouvoir détecter plus précocement des éventuelles complications, des alertes, etc.
14:19 Et puis d'aller chercher le patient ou de l'appeler quand on voit qu'il y a des anomalies,
14:24 ce qu'on n'avait pas forcément auparavant avec des patients qui arrivaient aux urgences
14:28 au moment où ils pouvaient plus rester à la maison, etc.
14:30 - Est-ce que c'est délirant, professeur, d'imaginer que dans certains cabinets, il y ait de main des médecins robots ?
14:36 - Ce qu'on voit aujourd'hui et qui est très intéressant et qui vous donne une petite idée vers là où on va,
14:42 c'est qu'il y a une partie des consultations qui sont des questions répétitives,
14:47 d'informations standardisées, que le patient peut faire sans le professionnel de santé.
14:53 - C'est ce qu'on a vu dans le reportage, d'une certaine façon.
14:55 - Absolument, et donc une partie de la consultation peut être numérisée et automatisée.
15:01 Et puis le professionnel de santé, quand il voit le patient, va avoir ces informations qui seront recueillies
15:07 et va pouvoir ensuite dédier vraiment du temps pour d'autres aspects,
15:12 notamment des aspects relationnels ou des aspects d'examen clinique,
15:16 et économiser du temps dans la recherche des informations.
15:20 Et puis demain, c'est l'outil qui va aller chercher lui-même de l'information,
15:24 le patient n'aura plus besoin de la rentrer.
15:26 - Comment il va la chercher ?
15:28 - On a maintenant quelques outils qui permettent par exemple de prendre les constantes vitales à partir d'une caméra.
15:33 - On prend une température ?
15:35 - La fréquence cardiaque en tout cas, ou la presse artérielle.
15:38 - Ça existe déjà ?
15:39 - Ce sont des outils qui sont là aussi du domaine de la recherche, mais qui commencent à être utilisés.
15:43 - Pour le suivi de maladies chroniques, ce serait évidemment formidable, ça par exemple.
15:46 - Absolument.
15:47 - Alors l'e-santé, vous y avez fait allusion évidemment tout à l'heure,
15:51 l'intelligence artificielle aussi en plein développement dans tous les compartiments du jeu,
15:56 et dans la santé, pour la santé, Alexia Leperon, pour État de santé,
16:02 est allée voir ce qui est fait en imagerie cérébrale.
16:06 Reportage.
16:07 - On l'imaginait il y a peu encore, prête à remplacer les radiologues.
16:16 Mais aujourd'hui, l'intelligence artificielle a été reléguée au rôle d'assistant du médecin.
16:23 Dans ce service d'imagerie, l'intelligence artificielle a fait son entrée en 2021
16:29 dans la prise en charge des AVC.
16:32 Lorsqu'un patient est touché, l'IRM permet de voir quelle zone du cerveau reste encore sauvable.
16:39 C'est là que l'intelligence artificielle, que l'on surnomme l'IA, intervient.
16:46 - Vous voyez ici en vert, toute la zone qui n'est pas encore infarcie,
16:52 qui est la zone sauvable, que l'on appelle la zone de pénombre.
16:56 Elle est en souffrance, mais elle n'est pas encore perdue pour le cerveau du patient.
17:02 Ça veut dire que si rien n'est fait, l'ensemble du cerveau,
17:08 la partie rouge qui est déjà perdue et la partie verte qui est encore sauvable,
17:13 si rien n'est fait d'un point de vue thérapeutique, toute cette portion ici, verte, sauvable,
17:18 va se transformer en 24 heures environ en partie rouge non sauvable.
17:25 Ce que nous apporte l'IA, c'est la capacité de répondre dans un temps très court à deux questions.
17:32 Premièrement, y a-t-il une zone à sauver ?
17:35 Elle est visuelle, il nous la montre ici, sans qu'on ait besoin de lancer les post-traitements
17:39 parfois complexes de la perfusion.
17:41 Et deuxièmement, est-ce qu'on est dans les critères de recommandation en termes de volume
17:45 pour le choix du traitement ?
17:48 Pour autant, si l'intelligence artificielle est capable de réaliser certaines tâches plus rapidement,
17:55 on ne peut pas compter uniquement sur elle, car elle peut se tromper.
18:02 Exemple avec un autre patient.
18:10 Cette fois, on est toujours face à une lésion qui est visible en séquence de diffusion,
18:16 qui pourrait s'appréhender comme un accident vasculaire cérébral ischémique.
18:21 Et d'ailleurs, l'IA va fonctionner dessus comme si c'était un AVC ischémique.
18:26 Or, dans le cas de cette patiente, ce n'est pas un AVC ischémique,
18:31 ça mime cliniquement et en imagerie un AVC ischémique, c'est ce qu'on appelle un stroke mimics.
18:36 Mais en fait, c'est une autre pathologie.
18:40 Les IA n'ont jamais 100% raison, ça n'existe pas.
18:45 On utilise vraiment l'IA comme une aide au diagnostic,
18:50 mais une aide qui ne doit pas remplacer l'expertise ni la connaissance humaine
18:55 sur laquelle est basée la médecine depuis des années.
18:59 Pourquoi l'intelligence artificielle peut-elle confondre des pathologies
19:04 que le médecin humain reconnaît tout de suite ?
19:07 Les logiciels d'intelligence artificielle sont basés sur une technologie appelée Deep Learning,
19:12 qui a connu un essor fulgurant dans les années 2010.
19:16 À la manière du cerveau humain, la machine va être capable d'apprendre par elle-même.
19:21 Pour cela, l'algorithme est formé à analyser des milliers d'images de patients.
19:28 À Paris, c'est sur ce type d'algorithme que travaille une équipe de l'Institut du cerveau.
19:34 Menée par cette chercheuse, il tente de développer une intelligence artificielle
19:39 pour diagnostiquer des maladies neurodégénératives.
19:44 Si on veut faire en sorte qu'un algorithme puisse différencier
19:49 les images de sujets sains d'images de patients,
19:53 on va pas arrêter de lui montrer des images de sujets sains en lui disant "ça c'est un sujet sain",
19:58 des images de patients en lui disant "ça c'est l'image de quelqu'un qui a une pathologie".
20:04 Et au fur et à mesure, l'algorithme va être capable de faire la différence
20:08 entre des images de sujets sains, des images de patients,
20:11 et quand on lui présentera l'image d'un sujet inconnu,
20:16 il sera capable de nous dire si c'est l'image d'un sujet sain ou d'un patient.
20:20 Au cœur de cet apprentissage, il y a donc ces milliers d'images IRM de sujets.
20:25 Ce sont les données, la clé de voûte de l'intelligence artificielle.
20:30 Ce qui est vraiment important, c'est d'avoir suffisamment de données
20:36 et de données représentatives du cadre d'application.
20:42 Si un algorithme a été entraîné qu'avec les images par exemple d'hommes âgés de 60 ans en bonne santé,
20:53 ils ne vont pas être capables d'avoir de bonnes prédictions
20:57 sur les images de femmes de 30 ans en mauvaise santé.
21:02 Aujourd'hui, l'accès aux données est donc le prérequis impératif
21:06 pour la conception d'intelligence artificielle performante et fiable.
21:11 Mais de nombreuses questions éthiques et législatives entourent l'accès aux bases de données de santé,
21:17 ce qui peut rendre leur utilisation par les chercheurs plus compliquée.
21:22 Qu'est-ce que l'application de l'imagerie artificielle fait de plus qu'une imagerie d'IRM ?
21:35 De façon très simple, je peux vous dire par exemple que l'œil humain est capable de détecter 11 niveaux de gris,
21:42 puisque les images sont en noir et blanc, sur l'IRM, alors que la machine peut en détecter plus de 1000.
21:49 Donc c'est une analyse qui est beaucoup plus précise.
21:51 Infiniment plus précise.
21:52 Deuxième, c'est qu'elle peut le faire plus rapidement.
21:54 C'est-à-dire que c'est presque immédiat ?
21:56 C'est immédiat et puis surtout c'est des centaines et des centaines d'examens qu'on va pouvoir analyser très rapidement.
22:02 Donc plus c'est rapide, plus on intervient rapidement et plus on sauve le malade.
22:05 Exactement. Et dans le cerveau ou dans le cœur, quand on manque d'oxygène, le temps est un facteur clé pour sauver les patients.
22:13 On a le même exemple dans le cancer, où on est capable maintenant de diagnostiquer l'origine de cancer
22:18 qui était auparavant d'origine indéterminée et de patients qu'on va pouvoir traiter avec des pronostics qui vont profondément changer.
22:24 Il y a évidemment une question majeure quand on parle de numérique, c'est le traitement des données.
22:29 Tout ça, vous l'avez dit, c'est fondé sur une grande quantité de données qu'on est capable d'analyser avec des résultats qui sont très positifs pour le patient.
22:39 Mais ces données sont les nôtres. Il y a des barrières, en particulier en France.
22:42 Jusqu'où doit-on aller dans l'analyse des données, dans finalement l'utilisation des données qui dépendent aussi du patient ?
22:51 On a la capacité aujourd'hui de générer de plus en plus de données,
22:55 c'est-à-dire de pouvoir ensuite analyser de plus en plus de paramètres de fonctionnement,
23:01 à la fois pour mieux comprendre notre état de santé, mais aussi avec la potentialité de réutiliser ces données
23:08 pour générer des progrès comme l'intelligence artificielle ou comme d'autres algorithmes.
23:13 Ce qui est très important aujourd'hui, c'est de donner les règles et le cadre de confiance
23:18 pour pouvoir utiliser de façon sécurisée ces données, garantir qu'elles vont être destinées à améliorer le fonctionnement du système de santé,
23:27 à améliorer la détection de certaines pathologies, etc.
23:30 C'est un bien commun.
23:31 Et à le faire dans un cadre souverain.
23:32 Au service de l'intérêt général.
23:34 C'est la question que vous avez souhaitée poser à un parlementaire, comme c'est la règle dans cette émission.
23:38 Comment peut-on favoriser l'utilisation des données de santé ?
23:43 Philippe Latombe est député MoDem de Vendée. Il vous répond.
23:48 Pour ça, il faut qu'on ait un cadre clair de conservation des données de santé et d'utilisation des données de santé à terme.
23:58 Ça nécessite aussi de protéger ces données de façon importante.
24:02 Donc, il faut qu'il y ait des couches de cybersécurité qui soient suffisantes pour que nos concitoyens aient confiance
24:07 et soient en capacité de penser qu'elles sont bien gardées et qu'elles sont utilisées à bon escient.
24:11 Et ensuite, il faudra expliquer pourquoi est-ce qu'on a besoin de ces données.
24:16 Et que ce n'est pas simplement pour la personne tout de suite, mais ça peut être aussi pour des recherches de plus long terme.
24:23 Voilà donc pour la réponse politique à ce stade.
24:29 Vous êtes, vous, favorable à quoi ?
24:31 Alors, je pense qu'il y a plusieurs éléments importants.
24:33 Le premier sur ce sujet-là, c'est la confiance.
24:35 Faire en sorte qu'on puisse expliquer ce qu'on fait avec les données.
24:38 Le deuxième élément, c'est qu'on a besoin de ces données pour pouvoir faire progresser notre système de santé.
24:43 Tous les autres pays dans le monde ont commencé à exploiter ces données.
24:47 C'est le cas également en France.
24:48 Simplement, il faut qu'on puisse aller à une vitesse supérieure.
24:51 On est en retard ?
24:52 On n'est pas en retard parce qu'on a une expertise médicale qui est très forte, qui est basée sur notre héritage également.
24:58 Simplement, on voit qu'on a besoin d'accéder plus rapidement à ces données
25:02 et développer des grands entrepôts de données, là aussi dans des conditions sécurisées.
25:06 Et puis, le troisième élément qui revient aux questions de confiance également, c'est informer et éduquer sur la donnée.
25:13 C'est d'ailleurs ce que dit le député.
25:14 Absolument, et c'est un élément complexe.
25:16 Mais il faut bien que tout le monde comprenne qu'aujourd'hui, quand on utilise un smartphone,
25:21 quand on utilise des réseaux sociaux, on va, sans forcément le savoir et sans forcément avoir donné son consentement,
25:28 envoyer beaucoup, beaucoup, beaucoup de données à des grandes entreprises étrangères
25:32 qui vont les utiliser et qui parfois vous connaissent mieux que vous-même.
25:35 Merci beaucoup, professeur Tenier. On sait que vous vous y employez, en tout cas.
25:39 Merci à vous.
25:40 Pour faire en sorte que tout soit accompagné avec l'argent nécessaire si besoin.
25:45 Merci beaucoup.
25:46 Merci.
25:47 Et à très vite pour un nouveau numéro d'État de santé.
25:49 [Musique]
26:02 LCP Assemblée nationale, en partenariat avec MGEN Mutuelle Santé-Prévoyance, vous a présenté État de santé.

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