L'avocat du lycéen de 16 ans, accusé d'avoir mortellement poignardé sa professeure d'espagnol à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques), fait le point sur l'enquête en cours et sur l'expertise médicale de son client.
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00:00 un diagnostic qu'il qualifie d'un peu trop péremptoire, un petit peu trop rapide,
00:03 selon lui les experts au cours d'une unique audition n'ont pas pu prendre en compte
00:08 tous les éléments du dossier, à savoir qui ont été effeuillés par le procureur,
00:13 à savoir des faits de harcèlement, notamment, je rejoins tout de suite,
00:16 Maître, vous avez quelque peu mis en cause l'expertise psychiatrique
00:21 entre guillemets qui a été réalisée auprès de votre client lors de son audition ?
00:24 À mon sens, l'examen psychiatrique qui est diligenté en garde à vue,
00:28 et c'est le code de procédure pénale qui le prévoit ainsi, ne peut être qu'un avis.
00:32 Ce n'est pas une expertise au sens classique du terme.
00:34 Une expertise, c'est un travail de fond, c'est un travail de décortiquage,
00:38 c'est un travail de confrontation d'un dossier médical avec un sujet,
00:43 et c'est la mise en perspective avec les faits.
00:45 Là, nous sommes dans un dossier où l'expert requis en garde à vue
00:50 s'est affranchi de la mission habituelle.
00:52 En règle générale, on demande s'il y a une nécessité immédiate d'internement,
00:56 ce qu'on appelle l'hospitalisation d'office,
00:58 ou éventuellement, on demande si la personne est en mesure de se maintenir en garde à vue.
01:03 Ce sont les seules questions posées.
01:05 Là, je suis ébahi de constater que 24 heures après le drame,
01:09 vous avez un expert qui s'autorise à dire qu'à son avis,
01:12 il n'y a aucune pathologie psychiatrique
01:14 et qu'il n'y a a priori pas de cause atténuante ou exclusive de responsabilité.
01:19 Ce n'est pas sérieux. Ce gamin était pris en charge depuis plusieurs semaines.
01:25 Il a fait une tentative de suicide dont la gravité n'a pas été mésestimée.
01:31 Je pense que ça mérite tout de même, et je sais que le juge d'instruction le fera,
01:35 qu'on fasse un travail d'expertat digne de ce nom,
01:38 confié à des pédopsychiatres qui nous diront ce qu'il faut penser des racines de ce drame.
01:45 L'expertise psychiatrique, ça ne se fait pas dans le temps d'une garde à vue.
01:49 C'est quelque chose de beaucoup plus précis, de beaucoup plus rigoureux.
01:54 Le procureur de la République n'a eu entre ses mains que des indications.
01:57 Ça ne reste que des indications.
01:59 Ce n'est pas la vie définitive que ce dossier mérite.
02:02 Il y a quand même, entre guillemets, un bassin de population
02:06 qui est aujourd'hui profondément cloué par ce deuil.
02:09 Et ça justifie dès lors que, ne serait-ce que par respect pour eux,
02:13 on ne tire aujourd'hui de conclusions pérentoires et hâtives
02:15 sur la foi d'un embryon d'examen.
02:18 Justement, depuis la déclaration du procureur,
02:20 on a entendu beaucoup de choses sur le profil du client.
02:22 D'un côté, de votre client, que c'était un élève très sérieux.
02:26 Et à côté de ça, qu'il avait des problèmes psychiatriques.
02:28 Comment est-ce que vous, je vais vous poser la question,
02:29 vous l'avez senti, comment est-ce que vous le décririez ?
02:33 Je l'ai écouté avec attention.
02:36 J'ai surtout pu constater qu'il n'y a aucune prédisposition particulière à la violence.
02:45 Et pourtant, ce qui lui est reproché est un acte d'une extraordinaire violence.
02:51 Ce sont les psychiatres qui seront en mesure de décortiquer les semaines et les mois
02:57 qui ont précédé ce que l'on sait,
03:00 sans dévoiler et sans porter atteinte au secret de l'instruction.
03:06 Je constate quand même que la narration qu'il fait des faits
03:12 l'amène par moment à parler de lui à la troisième personne du singulier.
03:17 Est-il véritablement l'auteur de son récit ?
03:21 J'ai de grands points d'interrogation.
03:25 Chacun d'entre nous parle à la première personne du singulier, pas à la troisième.
03:29 Y a-t-il une dissociation de personnalité ?
03:31 Y a-t-il des éléments qui peuvent, sur ce point,
03:35 expliquer les racines de ce geste, de ce drame ?
03:38 J'en suis intimement convaincu, mais encore une fois,
03:41 par égard pour la victime, pour ses proches,
03:44 attendons que la justice fasse sereinement son œuvre.
03:47 Ce sera bien assez tôt pour en tirer ensuite des conclusions.
03:51 Mais dans un dossier de cette nature,
03:54 l'hypothèse majeure est celle, à mon sens,
03:56 d'une hypothèse de nature psychiatrique.
04:00 Le procureur qui a donné beaucoup d'éléments
04:05 sur la personnalité du spectre au milieu de sa garde à vue.
04:08 Selon vous, trop d'éléments ?
04:10 Le procureur de la République a estimé devoir porter ces éléments
04:14 à la connaissance de tous.
04:18 Je n'ai pas de jugement à apporter.
04:20 Pour peu que les éléments dévoilés soient exacts,
04:23 ce qui, pour l'essentiel, est le cas.
04:27 Cette affaire, elle est d'autant plus douloureuse qu'incompréhensible.
04:33 Nous avons un sujet très jeune,
04:35 sans aucune espèce de prédisposition particulière à la violence,
04:39 inconnue des radars, et qui, pour autant,
04:42 avec un fond de personnalité qui trahit une tentative de suicide,
04:48 sans doute un fond de dépression récurrent,
04:53 est passé à commettre un geste dont l'immensité dépasse tout le monde.
04:59 Ceux qui le connaissent n'imaginaient pas un instant cette aptitude.
05:06 Il a d'évidence réglé un conflit avec lui-même.
05:11 Je ne dis pas avec la professeure, avec lui-même.
05:14 Pour le reste, quelles sont les conséquences scientifiques
05:19 qu'il faut tirer de cela ?
05:20 Laisser aux experts le soin de se prononcer.
05:22 Avec lui-même et le procureur qui a donc parlé,
05:25 au cours de sa conférence de presse,
05:27 également d'un conflit avec un autre camarade
05:28 qui aurait pu avoir un lien avec cette histoire.
05:30 C'est quelque chose qu'il vous a confirmé, votre client ?
05:33 Je n'ai pas à corroborer ces propos-là.
05:36 Je laisse aux policiers le soin de vérifier
05:40 et aux experts le soin d'apprécier.
05:42 Encore une fois, les motivations mises en avant
05:46 sont tellement incompréhensibles pour ses proches
05:50 que seule la psychiatrie aura, je suppose,
05:55 des ressorts, des grilles de lecture
05:58 qui permettront de décrypter ce drame.
06:02 Merci beaucoup, Maître.
06:03 Merci beaucoup pour cette intervention.
06:04 Comme Maître l'a expliqué,
06:06 maintenant c'est le temps de l'instruction,
06:07 de mise en examen.
06:09 Le principal suspect qui a donc été mis en examen
06:11 pour des chefs d'assassinat placés en détention provisoire
06:13 selon les réquisitions du parquet
06:15 dans un endroit qui, à cette heure, reste encore inconnu.