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À partir de l'histoire vraie et horrifiante de Maureen Kearney, Jean-Paul Salomé construit un film dossier bien équilibré entre thriller politique imparable et film post #MeToo. Pour nos deux critiques Marie Sauvion et Samuel Douhaire, Isabelle Huppert est fascinante .
Transcription
00:00 La syndicaliste, c'est la rencontre plutôt bien balancée
00:03 entre un scandale d'État et un fait divers pré-MeToo.
00:06 [Musique]
00:10 Vous avez des ennemis ?
00:11 Depuis un an, je travaille sur un dossier sensible chez Arriba.
00:15 Vous pouvez nous en dire plus ?
00:17 Il négocie avec des chinois dans le dos de curieux moments.
00:19 Vous avez des preuves ?
00:20 Il veut devenir numéro un mondial du nucléaire.
00:24 Si vous balancez ça, vous allez prendre des coups.
00:26 Excusez-moi pour le retard, vous, vous n'êtes pas convaincu.
00:28 Vos questions à la direction, vous gérez mien auprès du ministre.
00:31 Vous vous prenez pour qui ?
00:32 Faites attention.
00:33 La syndicaliste, c'est l'histoire de Maureen Kierney,
00:36 une déléguée syndicale au comité de groupe d'Arriba.
00:40 Une syndicaliste qui avait été informée par un mystérieux corbeau
00:45 d'une possible transfert de technologies nucléaires
00:48 entre la France et la Chine au détriment d'Arriba
00:51 et au profit d'EDF qui voulait s'implanter dans le nucléaire.
00:56 Et elle a été agressée chez elle en décembre 2012.
00:59 [Musique]
01:02 [Cris]
01:04 Anne Kierney, à part vos empreintes et celles de vos proches,
01:07 on n'a rien trouvé.
01:08 Mais j'étais violée.
01:09 Vous pensez qu'elle pourrait avoir tout inventé ?
01:10 Moi, des agressions sans trace d'agresseur, j'en connais pas.
01:12 Et la cicatrice, alors, qui me l'a faite ?
01:14 Le film de Jean-Paul Salomé se base sur des faits réels
01:18 en prenant les vrais noms des protagonistes,
01:20 que ce soit Anne Lauvergeon, Arnaud Montebourg, par exemple.
01:25 Il y a des rencontres dans des lieux comme ça, inattendus,
01:29 des coups de fil anonymes, des menaces,
01:30 des gens qui suivent en voiture,
01:32 une scène de trouille dans un parking.
01:34 On est vraiment là dans le thriller classique, on va dire,
01:39 en tout cas le film dossier qui bâtit comme ça
01:41 une atmosphère de paranoïa,
01:43 qui n'est pas non plus d'une tension insoutenable,
01:46 on ne va pas se mentir.
01:47 C'est une histoire complètement folle
01:49 que le film raconte de manière très très rigoureuse,
01:51 presque journalistique,
01:52 en s'appuyant donc sur ce livre de la journaliste Caroline Michel-Naguir,
01:57 mais avec aussi une bonne part de fiction.
01:59 Et c'est ce qui est très réussi dans le film de Jean-Paul Salomé,
02:01 c'est-à-dire qu'on retrouve vraiment le charme
02:03 et l'intérêt des films dossiers.
02:05 C'était un genre de cinéma très dynamique
02:07 dans les années 70 en France,
02:09 sous l'impulsion de Kostak-Avras.
02:11 C'est un film engagé,
02:12 mais c'est un film qui n'oublie pas
02:15 qu'il fait de la fiction
02:16 et qu'il s'agit de capter l'attention du spectateur.
02:30 Isabelle Huppert compose quelque chose de très intéressant,
02:34 c'est-à-dire un personnage de femme
02:37 qui est à la fois habituée au rapport de force,
02:40 pas du genre à ployer,
02:41 une bosseuse, une fonceuse,
02:43 une lanceuse d'alerte qui n'a peur de rien,
02:45 ni des coups de fil anonymes, etc.
02:47 Et ce qui est très très fort avec Isabelle Huppert,
02:48 c'est qu'elle est capable, dans la même scène,
02:50 de montrer vraiment une assurance folle,
02:52 une espèce d'effondrement de ses certitudes soudain,
02:56 qui est vraiment le signe d'une très très grande actrice.
02:58 Après, il se produit quelque chose dans le film
03:02 qui est très intéressant,
03:03 c'est évidemment, et on est obligé d'en parler,
03:05 la manière dont elle est filmée,
03:08 dont elle apparaît à l'écran,
03:09 c'est-à-dire fantomatique,
03:12 entourée d'un halo blanc,
03:13 la lumière a été travaillée.
03:15 On se dit que peut-être les images ont été retravaillées aussi numériquement
03:20 après le tournage,
03:21 pour la simple raison qu'Isabelle Huppert a
03:24 une vingtaine d'années de plus que le personnage, on va dire.
03:27 C'est à la fois une bonne nouvelle pour ses fans,
03:31 parce qu'elle poursuit une carrière vraiment extraordinaire,
03:34 et à nul autre pareil,
03:36 et puis c'est à la fois une bonne nouvelle pour le féminisme,
03:39 parce que ça veut dire que si une femme de 70 ans peut tout jouer,
03:42 on a tourné une page pas très glorieuse de l'histoire du cinéma.
03:45 Isabelle Huppert, elle compose quelque chose,
03:47 et elle le compose entièrement,
03:48 elle le compose avec son talent d'actrice,
03:50 elle le compose avec son corps,
03:52 et elle le compose avec les moyens que le cinéma
03:55 met aujourd'hui à sa disposition,
03:57 les moyens techniques, les moyens de lumière,
03:59 et les moyens de retouches, éventuellement.
04:01 Ça crée quand même une sorte de décalage
04:04 entre elle et les acteurs qui l'entourent,
04:07 qui provoque une certaine fascination
04:10 à l'égard de cet objet filmique pas si courant
04:13 qu'est La Syndicaliste.
04:14
04:17 Je n'ai pas menti.
04:18

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