Yves Thréard reçoit l'historien Pierre Vermeren, spécialiste du Maghreb et des sociétés arabo-berbères.
Dans cet entretien, il retrace l'origine de la passion française pour l'Afrique, dont la puissance et l'attrait persistent aujourd'hui. Selon lui, c'est en réaction à la montée de l'Allemagne en Europe dès le XIXème siècle que la France a investi sur ce continent une grande partie de ses forces intellectuelles, économiques et militaires. L'historien affirme qu'il n'y a pas une nostalgie de cette époque mais bien une histoire à clarifier et à enseigner, qui loin des polémiques serait en réalité facteur de pacification face à une mémoire chargée d'affects. Dans cette émission, Pierre Vermeren déconstruit certaines grandes idées préconçues sur l'histoire de la colonisation française en Afrique. Notamment celle d'une assimilation culturelle imposée et massive des populations locales, contredite par la réalité historique d'une école distribuée avec une extrême parcimonie à une élite restreinte. C'est plus tard, selon lui, que les gouvernements fraîchement indépendants ont créé des écoles françaises et développé la francophonie en Afrique. Il éclaire également les différences fondamentales entre les colonisations française et britannique, en décrivant la première comme « une colonisation du pauvre » qui a envoyé sur place de force des fonctionnaires et militaires, et qui n'était pas l'affaire des français mais des élites françaises. Constatant l'échec du "développementalisme" dans la région, ainsi que la détérioration des relations entre l'Algérie et la France, Pierre Vermeren croit au pouvoir de l'histoire et donne sa confiance aux nombreux intellectuels du Maghreb menant un travail de clarification historique et politique, accompagnés par des mouvements comme les Printemps arabes ou le Hirak en Algérie, preuves « de l'aspiration de ces peuples à la liberté, la dignité, l'égalité et au travail ».
Soixante ans après la vague des indépendances, l'Afrique, berceau de l'humanité, est présentée aujourd'hui comme celui de l'avenir, le continent du XXIème siècle. Pourquoi cet engouement soudain, souvent motivé par des motifs économiques ? Dans un contexte international en perpétuel mouvement, Yves Thréard s'intéresse à l'influence grandissante de l'Afrique sous tous ses aspects, en donnant à la parole à Calixthe Beyala, Oswalde Lewat, Alain Mabanckou, Boualem Sansal et Lionel Zinsou, pour des « Souvenirs et avenir d'Afrique ».
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Dans cet entretien, il retrace l'origine de la passion française pour l'Afrique, dont la puissance et l'attrait persistent aujourd'hui. Selon lui, c'est en réaction à la montée de l'Allemagne en Europe dès le XIXème siècle que la France a investi sur ce continent une grande partie de ses forces intellectuelles, économiques et militaires. L'historien affirme qu'il n'y a pas une nostalgie de cette époque mais bien une histoire à clarifier et à enseigner, qui loin des polémiques serait en réalité facteur de pacification face à une mémoire chargée d'affects. Dans cette émission, Pierre Vermeren déconstruit certaines grandes idées préconçues sur l'histoire de la colonisation française en Afrique. Notamment celle d'une assimilation culturelle imposée et massive des populations locales, contredite par la réalité historique d'une école distribuée avec une extrême parcimonie à une élite restreinte. C'est plus tard, selon lui, que les gouvernements fraîchement indépendants ont créé des écoles françaises et développé la francophonie en Afrique. Il éclaire également les différences fondamentales entre les colonisations française et britannique, en décrivant la première comme « une colonisation du pauvre » qui a envoyé sur place de force des fonctionnaires et militaires, et qui n'était pas l'affaire des français mais des élites françaises. Constatant l'échec du "développementalisme" dans la région, ainsi que la détérioration des relations entre l'Algérie et la France, Pierre Vermeren croit au pouvoir de l'histoire et donne sa confiance aux nombreux intellectuels du Maghreb menant un travail de clarification historique et politique, accompagnés par des mouvements comme les Printemps arabes ou le Hirak en Algérie, preuves « de l'aspiration de ces peuples à la liberté, la dignité, l'égalité et au travail ».
Soixante ans après la vague des indépendances, l'Afrique, berceau de l'humanité, est présentée aujourd'hui comme celui de l'avenir, le continent du XXIème siècle. Pourquoi cet engouement soudain, souvent motivé par des motifs économiques ? Dans un contexte international en perpétuel mouvement, Yves Thréard s'intéresse à l'influence grandissante de l'Afrique sous tous ses aspects, en donnant à la parole à Calixthe Beyala, Oswalde Lewat, Alain Mabanckou, Boualem Sansal et Lionel Zinsou, pour des « Souvenirs et avenir d'Afrique ».
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NewsTranscription
00:00 "Uncatchable", Alexandr Zhelanov
00:02 ...
00:26 -Pierre Wermeren, quand on est natif de Verdun,
00:29 comme vous, quand on est français, pourquoi on s'intéresse à l'Afrique ?
00:32 -J'ai pas de passé africain dans ma famille,
00:35 ni d'une manière ni de l'autre,
00:37 contrairement à la plupart de mes collègues
00:40 qui travaillaient sur l'Afrique, mais voilà,
00:42 vous savez, j'ai rencontré à Nancy, qui était la ville de Lyothée,
00:46 dans mon lycée de classe prépa, des étudiants marocains
00:49 qui étaient là comme une forme d'héritage,
00:52 et on a sympathisé, et l'histoire a commencé ainsi.
00:55 -Lyothée, qui était la grande figure
00:57 française au Maroc. -Ah oui.
00:59 -Comment vous expliquez, il y en a beaucoup
01:01 qui sont passionnés par l'Afrique,
01:03 cette passion française pour l'Afrique ? C'est dû à quoi ?
01:06 -Vous savez, il faut remonter au début du 19e siècle.
01:10 La France était tournée vers l'Europe.
01:13 Elle a fait des guerres en Europe, et puis elle a perdu ses guerres
01:17 à partir de 1814-1815.
01:19 Ensuite, elle a assisté à la montée de l'Allemagne,
01:22 la Prusse, puis de l'Allemagne.
01:24 Elle s'est tournée vers l'Afrique, et elle a investi toutes ses forces,
01:29 qu'elles soient politiques, militaires, religieuses,
01:32 intellectuelles, une grande partie de ces forces
01:34 ont été investies vers l'Afrique.
01:36 Deux siècles après, on en est toujours là.
01:39 Entre-temps, il y a eu le retour de bâtons
01:41 de la décolonisation et la construction européenne,
01:44 mais on voit bien que la puissance et l'attrait de l'Afrique persistent.
01:48 -Pensez que sa grandeur était là ?
01:50 Il y a eu une certaine nostalgie de cette période ?
01:53 -De cette période coloniale ? -Oui.
01:55 -C'est difficile à dire, non, parce que la page a été tournée.
01:59 Aujourd'hui, on regarde plutôt ça comme un choix
02:01 qui était inadapté ou qui a attiré beaucoup de problèmes
02:05 à la France, à la Ve République.
02:07 Elle est née dans un contexte effroyable.
02:09 Je crois pas qu'il y ait de la nostalgie,
02:11 mais il y a une histoire. -Une histoire.
02:14 Vous vous connaissez bien,
02:15 parce que vous y avez vécu, vous y avez enseigné l'Afrique du Nord.
02:19 Vous êtes passé par l'Egypte, le Maroc, la Tunisie.
02:22 Il y a plusieurs Afriques. Cette Afrique,
02:24 que vous connaissez très bien,
02:26 est assez lointaine de l'Afrique subsaharienne,
02:29 de l'Afrique noire. -Ah oui.
02:31 Bon, il y a même, dans l'Afrique du Nord,
02:34 il y a même l'Egypte, qui à elle seule...
02:36 -On parle du Machrake, pas du Maghreb.
02:38 -Qui constitue un monde à part.
02:40 Même la vallée du Nil, à soi seule, c'est un monde.
02:43 Et puis, il y a l'Afrique du Nord, arabo-berbère,
02:46 de la Libye jusqu'au Maroc. C'est une île, en arabe,
02:49 c'est l'île du Maghreb, en arabe.
02:51 -Oui. -Les Berbères l'appellent Tamazra.
02:55 C'est un monde, en soi, qui est entre la Méditerranée
02:58 et l'océan Saharien.
03:00 Elle est coupée du reste.
03:01 Les liens ont toujours existé, ils sont permanents
03:04 avec le sud subsaharien et avec l'Europe, la Méditerranée,
03:08 mais en soi, ça constitue un monde à part.
03:10 -Et les relations entre les deux, elles ont été marquées
03:13 par ce qu'on appelle la traite orientale,
03:16 c'est-à-dire l'esclavagisme qui était pratiqué
03:19 par les Arabes avant, justement, la traite occidentale.
03:21 De cette traite, on n'en parle quasiment jamais.
03:24 Comment vous expliquez ça ?
03:26 -Il y avait cinq grandes routes qui reliaient
03:28 l'Afrique subsaharienne à l'Afrique du Nord
03:31 et à la Méditerranée. -Oui.
03:33 -Certaines passaient effectivement par l'Afrique du Nord,
03:38 par le Maroc actuel, l'Algérie, la Libye.
03:40 Les routes se terminaient dans les grandes capitales
03:43 et ensuite, les marchandises, les hommes, les humains,
03:46 ils repartaient dans l'Empire ottoman vers Istanbul
03:49 ou restaient sur place.
03:51 Si vous voulez, c'est une histoire dont on parle peu
03:54 parce que la plupart des descendants
03:56 ont disparu, en réalité.
03:58 La plupart des hommes ont été castrés.
04:01 Donc, contrairement aux Etats-Unis,
04:03 il n'y a pas de descendance,
04:05 donc il n'y a pas de peuple afro-descendant
04:09 de cette histoire, en fait.
04:10 Bien sûr, certaines personnes ont fait souche,
04:13 notamment les femmes,
04:15 qui sont rentrées, je dirais, dans la société,
04:19 mais c'est occulté, notamment parce qu'il n'y a pas de témoins.
04:23 Ceux qui en parlent, ce sont parfois les Africains eux-mêmes,
04:27 notamment les Sénégalais, qui ont écrit là-dessus.
04:30 Des travaux ont été faits à Charenta Diop.
04:32 -Grands historiens sénégalais. -Au Maghreb, au Maroc,
04:35 en Algérie, en Tunisie,
04:37 il y a aussi des historiens qui s'y sont intéressés,
04:40 notamment au Maroc, mais ça reste quand même un sujet complexe
04:44 parce qu'au fond, tout ça a été effacé et gommé
04:46 par la période coloniale et par les rapports avec l'Europe
04:49 et la France en particulier.
04:51 -Néanmoins, il y a encore des subsistances
04:54 de cette forme d'esclavagisme,
04:56 même si ce n'est pas tout à fait la même chose,
04:58 notamment en Mauritanie, où il y a encore
05:01 ce genre de pratiques qui sont visibles.
05:04 -En Mauritanie, dans d'autres pays du Sahel,
05:07 aussi en Arabie saoudite,
05:08 ces pays n'ont jamais rompu officiellement...
05:11 -Oui, ils ont rompu avec l'esclavagisme,
05:13 notamment sous la pression des Britanniques,
05:16 des Français ou internationale.
05:18 Le problème, c'est que la colonisation a été le vecteur
05:21 qui a mis fin à l'esclavage. -La colonisation européenne.
05:24 -Elle a mis fin à cela.
05:25 Ca n'est pas venu de l'intérieur des sociétés.
05:28 Il n'y a pas eu un mouvement, comme il y a eu en Europe,
05:31 un mouvement libéral qui s'est construit contre l'esclavagisme.
05:35 Au contraire, il a été imposé par les Européens de l'extérieur.
05:38 Il y a eu des mouvements de "violence coloniale".
05:41 Donc, vous voyez comment le bien peut recouvrir le mal ou l'inverse.
05:45 A la fin, on n'en parle pas beaucoup,
05:47 mais ça reste puissant,
05:48 car cette traite a été plus importante
05:50 que la traite des Atlantiques. -Plus meurtrière.
05:53 -Et elle a duré plus de 1 000 ans, 12 ou 13 siècles.
05:56 C'est considérable.
05:57 -Vous êtes d'accord avec cela ?
05:59 Il n'y a pas un devoir de mémoire, il y a un droit à l'histoire.
06:03 -Oui, l'esclavagisme est un très bon exemple
06:05 pour parler de l'histoire,
06:07 car il n'y a plus de mémoire.
06:09 Qui se rappelle avoir eu des parents, des grands-parents,
06:12 des grands-parents esclaves ? On le sait.
06:14 Mais l'histoire est là aussi pour rappeler les faits,
06:17 pour faire justice, faire oeuvre de vérité.
06:20 La mémoire, c'est très affectif.
06:22 Aujourd'hui, on prend nos relations sur le Maghreb
06:25 sur le mode de la mémoire,
06:26 mais je pense qu'on s'en sortira en écrivant l'histoire.
06:30 Elle est largement écrite, heureusement.
06:32 On essaie d'y contribuer.
06:33 Mais je pense que c'est ça qui permettra
06:36 d'avoir des relations saines,
06:37 parce que tant qu'on est dans le contentieux,
06:40 dans l'affectif, dans le revanchard,
06:42 dans la tension liée à toutes les pulsions
06:45 et les passions humaines,
06:46 on est dans une logique d'affrontement.
06:49 L'histoire, à mon avis, est un facteur de paix et de pacification.
06:52 -Est-ce qu'en Afrique, c'est une grosse question,
06:55 est-ce que les Etats se vivent comme des nations ?
06:58 -Certains. Il y a des très vieilles nations,
07:02 la Tunisie, le Maroc, l'Ethiopie, l'Egypte.
07:06 Dans ces pays très anciens,
07:09 il n'y a pas vraiment de problème.
07:11 Dans un certain nombre d'autres qui ont eu une histoire très forte
07:15 au XXe siècle, que ce soit l'Algérie ou le Sénégal,
07:18 je pense qu'il n'y a pas de problème non plus.
07:21 Il y en a d'autres.
07:23 Il y a 50 Etats africains.
07:25 En revanche, on voit bien, pour prendre le cas de la Libye,
07:28 qui n'est pas très éloignée,
07:30 la question de l'Etat ne fait pas la nation.
07:34 Ca vient de loin, puisque les Kadhafis
07:37 et ses prédécesseurs n'ont jamais construit une nation.
07:41 Donc, elles n'existent pas. C'est ce qu'on appelle les Etats faillis.
07:45 Il y en a d'autres, notamment au Sahel.
07:47 Le Soudan a éclaté il y a quelques années.
07:49 On voit bien qu'il y a des Etats de la bande sahélienne
07:53 qui sont fragiles. Il y a deux processus différents.
07:56 Il y a l'Etat, qui est parfois quasiment disparu.
07:59 Aujourd'hui, en Libye, on ne sait pas s'il y a deux Etats.
08:02 -Le Syrénaï, la Tripolitaine. -Et dans le Sud,
08:04 qui est à moitié autonome, ça fait trois.
08:07 Et puis, la question de la nation.
08:09 Pour qu'il y ait une nation, il faut une aventure collective,
08:12 durable, dont on est la mémoire, l'histoire,
08:15 qui a été écrite, enseignée.
08:17 Une nation, ça se forge.
08:18 Quand ça dure depuis plus de 3 000 ans,
08:21 comme la Chine, c'est facile.
08:23 Quand c'est très récent et qu'on n'a pas mis les outils
08:26 et que l'Etat est très faible et ne peut pas inculquer cette histoire,
08:30 la nation n'existe pas.
08:31 L'Afrique est partagée entre les deux.
08:33 -Souvent, on entend, notamment, les Africains,
08:36 qui disent, à cette conférence de Berlin,
08:39 qui a eu lieu à la fin du 19e siècle,
08:42 en 1885, à la demande de Bismarck,
08:45 que les Européens se sont partagés l'Afrique.
08:47 Ils disent que les Européens ont fait des frontières
08:51 tout à fait artificielles. Il y a une part de vérité.
08:54 -Oui, bien sûr, quand on voit ces frontières au Cordeau.
08:57 Il n'y a pas eu de recherche de cohérence
08:59 à l'intérieur même de l'ensemble, par exemple, colonial français.
09:03 On aurait pu imaginer qu'il y ait des rassemblements
09:06 qui soient faits sur des bases,
09:08 par exemple, liées à l'environnement,
09:11 à la nature, aux reliefs...
09:14 Non, ça a été généralement fait sur d'autres bases.
09:17 Autour d'une capitale, on a tiré un cercle...
09:20 -Administratif. -Très administratif,
09:22 très militaire, très bureaucratique.
09:24 Le principe fondateur de l'OUA, à l'indépendance de l'Afrique,
09:27 ça a été... -L'Unité africaine.
09:29 -Devenue Union africaine, c'est qu'on ne touche pas aux frontières,
09:33 sinon, on rentre dans une guerre sans fin.
09:36 C'est un principe qu'on peut entendre,
09:38 sauf que certaines frontières ont bougé.
09:40 -Soudan du Sud, Soudan du Nord. -Absolument.
09:43 L'Erythrée, aussi, ça a été un précédent,
09:45 qui est sorti de l'Ethiopie.
09:47 Ca veut dire que le principe est plus fragile qu'il n'y paraissait.
09:51 Ca reste un principe auquel un certain nombre d'Etats
09:54 sont extrêmement attachés, mais évidemment,
09:57 ça ne correspond pas vraiment à des réalités culturelles,
10:00 voire religieuses, voire ethniques,
10:02 d'où le fait que seul l'Etat peut éventuellement construire
10:06 une nation, que ce soit par la guerre ou par le football,
10:09 mais c'est pas toujours facile.
10:11 -On oppose souvent les colonisations les unes avec les autres,
10:15 sans remonter à la colonisation arabe,
10:17 mais la colonisation britannique et la colonisation française.
10:21 Il y a de réelles différences dans ces colonisations.
10:24 Une colonisation qui est plutôt "civilisatrice"
10:27 chez les Français,
10:28 elle est beaucoup plus commerciale chez les Britanniques.
10:32 -On peut le dire comme ça,
10:33 on peut le dire comme ça,
10:35 encore que, regardez la puissance de la langue anglaise
10:38 dans les anciennes colonies anglaises.
10:41 -Elle est très forte. -Elle est très forte.
10:43 -Kenya, Ouganda... -Elle n'est pas contestée
10:46 comme la francophonie.
10:47 On se demande qui a assimilé.
10:49 L'assimilation à la française, c'est une assimilation
10:52 de certains territoires, notamment de l'Algérie,
10:55 des communes du Sénégal.
10:57 C'était pas une assimilation à la culture des peuples,
11:00 puisque l'école a été distribuée avec une extrême parcimonie.
11:04 C'était l'assimilation d'une partie des élites.
11:06 Pour le reste, le mode de gouvernement,
11:09 il a été inventé en Algérie au XIXe siècle,
11:11 il était exactement identique à ce que les Anglais
11:15 appellent "indirect rule", c'est-à-dire qu'on va gouverner
11:18 avec très peu de moyens humains, matériels,
11:21 par le biais des élites traditionnelles
11:24 avec lesquelles on s'entend, soit après la guerre,
11:27 soit par la négociation immédiatement,
11:29 avec un échange de bons procédés,
11:31 des terres, des impôts, des femmes,
11:35 des fonctions, des médailles, etc.
11:37 Et donc, cette base-là, si vous voulez,
11:40 n'a pas préparé les peuples de la région
11:42 à une véritable forme d'assimilation,
11:44 enfin, en tout cas, d'acculturation.
11:47 C'est par la suite, c'est les gouvernements indépendants
11:50 qui ont créé l'école à la française
11:52 et qui ont diffusé la francophonie en Afrique.
11:54 -Contrairement à tout ce qu'on peut lire et dire...
11:57 -Y compris au Maroc, en Algérie. -Vous dites,
12:00 vous remettez en question ce qui est préjugé,
12:03 qui circule, quoi.
12:04 -Oui, parce qu'on dit, on a appris aux Africains,
12:07 nos ancêtres, les Gaulois,
12:08 mais 2 % des Africains ont entendu ça.
12:11 Les autres, ils n'ont jamais allé à l'école,
12:13 donc ils n'ont pas entendu ça.
12:15 Et les gouvernements aux indépendances,
12:17 qui, eux, ont été séduits par le modèle,
12:20 ils voulaient diriger le modèle au lieu de le laisser
12:23 aux mains des Français, qui étaient peu nombreux,
12:26 l'indépendance, leur a confié le pouvoir.
12:28 La première chose qui a été faite,
12:30 dans la quasi-totalité des pays,
12:32 c'était de créer un système scolaire francophone
12:35 très proche, pour ne pas dire identique,
12:37 au système qui avait été mis en place
12:40 sous la colonisation,
12:41 avec, bien sûr, une africanisation, parfois,
12:44 de l'histoire et de la géographie.
12:46 Et donc, oui, la francophonie, c'est un phénomène
12:49 qui est post-colonial, en réalité, en Afrique.
12:52 Mais on ne le sait plus, aujourd'hui.
12:54 Trois générations après, tout est oublié.
12:56 -Comment vous expliquez que... On a l'impression
12:59 que le Commonwealth, qui réunit les anciennes nations,
13:02 les anciennes colonies britanniques,
13:05 a plus de corps que, justement, la francophonie,
13:08 qui n'a jamais eu une place énorme
13:10 dans les relations internationales.
13:12 -Vous savez, la France coloniale est passée après l'Angleterre.
13:15 Ou alors, elle a perdu ses principaux florons
13:19 au XVIIIe siècle.
13:20 Je pense à l'Inde et je pense à l'Amérique du Nord,
13:24 notamment au Canada.
13:25 Donc, elle est passée après,
13:27 elle s'est appropriée des territoires
13:29 délaissés par les Britanniques,
13:31 et qui étaient des territoires soit sous-peuplés,
13:34 soit très pauvres. Je pense aux Sahara, par exemple,
13:37 aux Sahel. Bien sûr, il y avait des peuples,
13:40 des nations, des villes, mais en réalité,
13:42 c'était des territoires très pauvres.
13:44 De surcroît, la France a investi très peu de moyens humains,
13:48 car la colonisation est contemporaine
13:50 de la transition démographique.
13:52 Personne n'a jamais été envoyé aux colonies.
13:55 On a fait une colonisation du pauvre.
13:57 -Personne ne voulait y aller. -Oui.
13:59 On a envoyé des fonctionnaires et des militaires de force,
14:02 quelques religieux, évidemment,
14:04 mais personne ne s'est installé en Indochine, en Afrique.
14:08 Notre colonie de "peuplement",
14:10 avec un million d'habitants à la fin,
14:12 vous comparez ça au Canada, à l'Australie...
14:15 -Un million d'Européens. -Un million d'Européens,
14:18 dont une majorité était d'origine algérienne,
14:20 notamment les Juifs algériens, ou européenne, espagnol, italien.
14:24 À la fin, il y a 400 000 Français d'origine
14:27 qui sont installés en Algérie,
14:29 quelques 100 000, à peine, au Maroc et en Tunisie,
14:32 et quelques dizaines de milliers.
14:34 Ca n'a pas été l'affaire des Français,
14:36 c'était l'affaire du milieu commercial,
14:38 politique et militaire français,
14:40 et les Français ont découvert les colonies,
14:43 non pas en s'y rendant, contrairement aux Britanniques,
14:46 qui s'y rendaient en bateau par millions,
14:49 notamment les marins, mais quand les troupes coloniales
14:52 ont débarqué en France en 1914.
14:54 C'est pas l'histoire telle qu'on l'a...
14:56 -Le tirailleur sénégalais. -Absolument.
14:59 -On a l'impression, si vous voulez,
15:01 que tout ça n'est pas su, n'est pas connu.
15:03 C'est un défi entre une vision tout à fait irénique,
15:06 écrite beaucoup par les Français,
15:08 ou une vision de remise en question,
15:11 et qui, aujourd'hui, d'ailleurs, va loin,
15:13 parce qu'on parle de la woke culture,
15:15 de cette négation de l'histoire, d'ailleurs.
15:18 On réécrit l'histoire sans la connaître vraiment.
15:21 -Oui, on en fait un programme idéologique,
15:24 un objet de lutte idéologique, en réalité.
15:26 -C'est grave, ça, non ?
15:28 -C'est grave du point de vue de l'histoire
15:31 et des historiens, parce que,
15:33 la politique et l'idéologie, c'est pas l'histoire.
15:35 -C'est aussi un apprentissage de la haine.
15:38 -Bien sûr, mais c'est le rôle de l'idéologie.
15:41 C'est le rôle aussi de la politique,
15:43 de mettre en scène, de scénariser des conflits imaginaires.
15:46 On voit bien que le discours idéologique,
15:49 il met du sel sur les plaies, il raconte des choses fausses.
15:52 On est aux prises, sur l'histoire de la colonisation et de l'Afrique,
15:56 à tout un tas de mensonges extrêmement grossiers.
15:59 Est-ce que les gens les disent parce qu'ils ne font plus d'histoire,
16:03 parce qu'ils ne se battent pas,
16:04 parce qu'ils s'en tiennent à des discours caricaturaux ?
16:08 Ou bien, est-ce que c'est un combat politique et idéologique,
16:11 ou est-ce que c'est de l'ignorance ?
16:13 Quoi qu'il en soit, on gagnerait à enseigner ces choses-là.
16:17 En France, on a beaucoup de mal à enseigner cette histoire,
16:20 parce qu'on pense qu'elle est polémique,
16:22 alors que moi, je pense qu'elle est pacificatrice.
16:25 -Il y a un sujet qui est extrêmement polémique,
16:28 c'est le face-à-face franco-algérien,
16:31 entre les deux parties de la Méditerranée,
16:33 de façon apaisée. C'est infernal, cette histoire.
16:36 -Elle est devenue infernale, elle ne l'était pas.
16:39 -Ah bon ? -Dans les années 60-70,
16:41 la relation était apaisée. Les Algériens...
16:43 -Juste après l'indépendance, alors. -Oui.
16:46 Dans les décennies, y compris de la part de Boumédienne.
16:49 Boumédienne n'était pas...
16:50 -Il était le 2e président algérien, après Ben Bella.
16:54 -Ils avaient gagné la guerre.
16:55 Les gens qui ont gagné la guerre sont en général assez contents.
16:59 -D'autant plus que cette guerre paraissait infaisable
17:02 et surtout ingagnable.
17:03 Au bout de 8 ans d'une guerre extrêmement dure...
17:06 -54-62. -54-62, elle a été gagnée.
17:10 Quand on regarde les actualités, qu'on lit les discours, les textes,
17:14 etc., des années 60-70,
17:16 il y avait la fierté d'avoir gagné cette égalité
17:19 qui avait été réclamée si longtemps aux Français,
17:22 car ils avaient professé l'égalité sans la donner.
17:25 La décolonisation en Algérie,
17:27 puisque c'était la France, juridiquement parlant,
17:29 depuis 1848, l'idée, c'était d'obtenir l'égalité.
17:32 Finalement, l'indépendance a offert l'égalité
17:36 étatique, intellectuelle, légale dignité, etc.
17:41 Pourquoi est-ce que les choses ont vrillé, ont tourné ?
17:45 Justement, parce qu'on est dans la mémoire,
17:47 on est dans le refoulement,
17:49 on est dans la mémoire qui saigne, comme Alistaira.
17:52 On a fabriqué...
17:53 Et puis, on est aussi dans les lendemains
17:56 de la guerre civile algérienne des années 90,
17:58 qui a durci les positions et qui a fait réviser
18:01 les élites algériennes, notamment gouvernementales,
18:04 ont complètement révisé leurs positions.
18:06 Une partie des élites intellectuelles
18:09 françaises se sont saisies de cette histoire.
18:11 C'est la guerre occultée, la guerre civile algérienne
18:14 des années 90. Il n'y a pas de livres,
18:17 pas d'histoires, pas d'images. -Sur la période 1990.
18:20 -Les années 90. -Une guerre civile interne.
18:22 -Une guerre civile très dure entre l'armée algérienne,
18:26 l'armée islamiste, et finalement, en sortant de ça,
18:28 Bouteflika a remis sur le devant de la scène la guerre d'Algérie.
18:32 On a fait un objet de polémique avec la France,
18:35 ce que ce n'était pas dans les années d'après-guerre.
18:38 C'est ça, le grand paradoxe. -Si on revient à la colonisation,
18:41 juste avant cette indépendance de 1962,
18:44 est-ce que Charles de Gaulle, qui a jamais cru
18:46 au fait que la France pouvait coexister avec l'Algérie,
18:49 qui n'était pas un protectorat,
18:51 mais une colonie avec trois départements,
18:54 Algiers, Constantine, -Assimilée au territoire national.
18:57 -Exactement, comme si on était dans le Gers ou l'autre.
19:00 Est-ce qu'il n'avait pas raison,
19:02 général de Gaulle, en disant que c'est injouable,
19:05 on ne peut pas coexister, on ne peut pas cohabiter ?
19:08 C'est pas possible.
19:09 -Au XIXe siècle, on a fabriqué un mensonge,
19:12 notamment la IIIe République.
19:13 Elle a dit "On assimile l'Algérie, mais sans son peuple."
19:17 Et ça, ça a été payé à... -C'était l'urbain,
19:19 un des inspirateurs de Napoléon III,
19:21 qui, lui, était pour exactement ce que vous dites.
19:24 -Méthys Antillais. -Méthys Antillais, oui.
19:27 -Effectivement, conseiller de Napoléon III.
19:29 -L'Urianide, oui. -Et de la politique
19:31 du Royaume arabe de Napoléon III, bien sûr.
19:34 Mais on a fabriqué ce mensonge,
19:36 et il a fallu un siècle pour en sortir.
19:38 De Gaulle a décidé d'en sortir, mais le mensonge était total.
19:41 Vous dites d'un côté aux Français "l'Algérie, c'est la France",
19:45 c'est comme l'Auvergne, le Gers ou la Bretagne,
19:48 et de l'autre, il y a...
19:49 Effectivement, il y a une population française
19:52 qui vit selon les lois de la France,
19:54 mais à côté, dans les montagnes,
19:56 dans les hauts plateaux, dans les petits coins,
19:59 il y a un peuple de plusieurs millions de personnes
20:02 qui, certes, sont français,
20:03 mais qui sont sujets français,
20:05 qui n'ont pas la citoyenneté française,
20:08 qui vont plus ou moins à l'école, et moins que plus,
20:11 qui n'ont pas vraiment de secteur économique.
20:13 L'industrialisation de l'Algérie a commencé
20:16 pendant la guerre d'Algérie. C'est un problème.
20:19 La scolarisation a commencé après la Deuxième Guerre mondiale.
20:22 Il y a eu plus d'investissements en Algérie
20:25 pendant la guerre d'Algérie que pendant la période coloniale.
20:28 Au dernier moment, on se dit, enfin, De Gaulle se dit,
20:31 avant de partir, il faut donner les moyens à ce pays de vivre
20:35 et de ne pas sombrer dans le communisme
20:37 et dans l'hostilité à la France.
20:39 Mais le problème, c'est la Troisième République
20:42 qui a fabriqué ça. -Et puis, les islamistes
20:44 sont arrivés. Là, l'islamisme, c'est une espèce d'idéologie
20:48 qui a complètement changé la donne
20:49 et les rapports entre l'Occident et les pays arabes.
20:52 -Oui, il vient de loin. Il a été inventé en Égypte
20:55 à la fin du 19e siècle dans une forme plutôt libérale
20:58 que les Français ont appelée la salafia ou la réforme,
21:01 par comparaison aux protestants.
21:03 Et puis, il y a eu une radicalisation
21:05 qui s'est faite à la fois par les Saoudiens,
21:08 par les Wahhabis de Saoudien,
21:10 et par les frères musulmans en Égypte.
21:12 Vous voyez, donc, tout ça remonte au début du 20e siècle.
21:16 Et ça a maturé, ça a cuit,
21:20 ça a confit
21:23 dans les sociétés, notamment d'Afrique du Nord
21:27 et du Moyen-Orient.
21:28 Eux, ils le présentent comme la décolonisation culturelle.
21:32 Les Etats ont obtenu l'indépendance
21:34 et la décolonisation politique,
21:36 et nous, on va pratiquer la décolonisation culturelle.
21:39 C'est comme ça qu'on a vendu l'islamisme aux Français,
21:42 en disant que c'était une reconquête identitaire.
21:45 On voit bien en Algérie, la reconquête identitaire,
21:47 d'abord, elle se tourne contre leurs dirigeants,
21:50 d'où la guerre civile algérienne,
21:52 qui a été le premier djihad contemporain.
21:54 On en a eu en Syrie, en Irak,
21:56 on en a eu d'autres au Moyen-Orient.
21:58 On voit bien qu'il y a une tentative de prise du pouvoir
22:01 par un islam politique extrêmement intolérant,
22:04 qui n'est pas neuf dans l'histoire.
22:06 On a eu des précédents historiques
22:08 qui est à la fois éradicateur,
22:11 révisionniste, et puis surtout,
22:13 qui veut n'avoir qu'une tête,
22:15 il ne veut plus le refus des minorités,
22:18 de toute diversité,
22:19 de tout processus démocratique,
22:21 et installer directement le règne de Dieu sur Terre.
22:25 C'est ce que Saïd El Khottab appelait la hakimiyya,
22:27 c'est-à-dire qu'il n'y a pas besoin de gouvernement,
22:30 pas besoin d'Etat, Dieu gouverne directement sur Terre,
22:34 les hommes individuellement.
22:35 Quand il y a des élections,
22:37 c'est rare que les islamistes aient plus d'un tiers des voix,
22:40 mais ils ont réussi, à partir de ce tiers,
22:43 à renverser un certain nombre de sociétés.
22:45 -C'est dû au fait qu'il n'y ait plus d'hommes forts ?
22:48 Par exemple, Nasser, dans les années 50,
22:50 qui sort d'un rendez-vous avec les frères musulmans en Égypte,
22:55 et les frères musulmans lui demandent
22:57 d'imposer le voile partout dans la société.
23:00 C'est pas très bien daté,
23:01 mais je crois que c'est un peu avant le pouvoir,
23:04 au début des années 50,
23:06 et il est mort de rire,
23:07 ce qu'il faut dire, en disant
23:09 "ce qu'ils m'ont demandé, c'est que vous portiez le voile."
23:13 Il refuse, il veut pas du tout.
23:14 Nasser, Grand Bonhomme, Bourguiba,
23:16 c'était des gens qui étaient des nationalistes
23:19 très opposés à la colonisation,
23:21 mais qui étaient pas du tout dans la religion.
23:24 -Si vous voulez, ces grandes figures
23:26 du milieu du XXe siècle,
23:27 ils ont eu leur popularité
23:30 parce qu'ils ont obtenu l'indépendance,
23:32 parce qu'ils ont eu un discours modernisateur,
23:36 parce qu'ils ont voulu créer des nations modernes,
23:39 promettre l'école, le développement à tous.
23:42 Le problème, c'est qu'ils ont entraîné derrière eux leur peuple,
23:45 avec une passion incroyable, dans le cas de Nasser.
23:48 Les promesses du régime nasserien n'ont pas été tenues.
23:51 Il avait les moyens de développer l'Egypte,
23:54 mais il voulait faire la guerre.
23:56 Il a fait la guerre au Yémen, à Israël,
23:58 il l'a subie, puis il en a fait une seconde,
24:00 même si sa date était à ce moment-là.
24:03 L'Egypte s'est construite comme un appareil militaire,
24:06 c'était la grande faiblesse de ces pays.
24:08 Bourguiba n'a pas sombré dans le militarisme,
24:11 il s'en méfiait, mais c'était le pays le plus pauvre de la région,
24:15 qui n'avait pas de ressources,
24:16 et lui aussi n'a pas eu les moyens de faire cette politique,
24:20 même s'il a empêché l'explosion démographique,
24:22 comme en Egypte, voire en Algérie.
24:25 Donc, voilà, c'est cette malheureuse situation,
24:29 de l'échec du développementalisme.
24:32 L'Union soviétique, les Etats-Unis, les Occidentaux,
24:35 tout le monde voulait le développement,
24:38 et le développement n'a pas eu lieu,
24:40 donc c'est une situation, une impasse.
24:42 -Et on est dans cette impasse.
24:44 -On en sortira, parce qu'il y a beaucoup d'intellectuels
24:47 dans la région, en Tunisie, en Egypte,
24:49 qui se battent, au Maroc aussi, en Algérie,
24:52 qui font un travail tout à fait remarquable
24:55 de clarification idéologique, religieuse, politique,
24:58 qui font le bilan du XXe siècle.
25:00 Le problème, c'est qu'il y a une temporalité décalée
25:03 entre les masses, entre ce qu'enseignent l'école
25:06 et ce que pensent certains penseurs.
25:08 -Il faut du temps pour que ces idées règnent.
25:11 -Le mouvement irak en Algérie,
25:13 finalement, il a débouché sur une impasse.
25:15 C'est toujours le FNL qui est au pouvoir.
25:18 -C'est exactement ce qui s'est passé
25:20 avec les printemps arabes en 2011,
25:22 ça s'est passé en Algérie plus récemment.
25:25 L'aspiration des peuples est là.
25:27 L'aspiration à la liberté, à la dignité,
25:29 à l'égalité au travail.
25:31 Mais évidemment, on est dans une période très difficile,
25:34 et la gravation de la situation économique internationale
25:37 va pour rien dans le...
25:39 Finalement, le fait que ces difficultés soient entretenues.
25:42 -J'ai une question à vous poser.
25:44 Si vous aviez un livre de littérature africaine
25:47 à recommander, ça serait lequel ?
25:49 -Je pense à la saga de Mouloud Mamri.
25:54 -Oui.
25:55 -Euh...
25:57 "L'opium et le bâton" et d'autres,
25:59 qui sont... "La colline oubliée",
26:02 qui sont remarquables,
26:04 parce qu'ils écrivent l'histoire des Algériens,
26:07 mais ils écrivent aussi notre histoire.
26:09 C'est très bien écrit.
26:11 C'est pas traduit, puisqu'il est écrit directement en français.
26:15 Il a souvent un avantage.
26:16 Il a un très beau style, et surtout, c'est de la grande littérature.
26:20 -Alors, lisez Mouloud Mamri.
26:22 Merci, Pierre Vermeerhen. -Merci.
26:25 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
26:28 ...