• l’année dernière
Laure Lavalette, députée "Rassemblement National" du Var.
Elle s'est révélée au grand public comme porte-parole de Marine le Pen pendant la présidentielle, mais l'engagement de Laure Lavalette remonte aux années 90. Ce qui la caractérise? De l'énergie à revendre et une foi inébranlable.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 Elle s'est révélée au grand public pendant la campagne présidentielle
00:03 comme porte-parole de Marine Le Pen,
00:05 mais son engagement remonte aux années 90.
00:08 Mon invité a de l'énergie à revendre
00:11 et une foi inébranlable.
00:13 (Générique)
00:16 ---
00:28 -Bonjour, Laure Lavallette. -Bonjour, Clément.
00:31 -Vous êtes catholique. Vous en parlez ouvertement.
00:34 Cette foi tient une place importante dans votre vie.
00:36 Lors de la dernière rentrée parlementaire,
00:39 vous avez assisté, comme d'autres députés,
00:41 à cette messe consacrée aux parlementaires
00:44 en la basilique Sainte-Claude-Tilde,
00:46 et à cette occasion, vous avez dressé un parallèle
00:49 entre l'engagement politique et la charité.
00:51 Vous avez expliqué que la quête du bien commun,
00:54 c'est aussi une sorte de charité suprême.
00:56 Donc, la recherche du bien commun, c'est la charité
00:59 que l'on doit à son peuple.
01:01 Est-ce que vous seriez engagée en politique
01:04 si vous n'aviez pas eu cette foi, cette foi catholique ?
01:07 -Ah, sûrement. Après, c'est difficile de savoir,
01:09 car je suis catholique depuis longtemps,
01:12 dans une famille catholique.
01:13 Oui, car quand j'étais déléguée de classe en 4e,
01:16 vous imaginez bien que ce n'était pas du tout ma foi
01:19 liée à ma foi.
01:20 -Vous faites quand même un lien,
01:22 quand vous parlez de cette forme de charité.
01:24 -J'y ai réfléchi, je pense qu'il y a une forme de charité.
01:28 Il y a une forme de sacerdoce aussi,
01:30 quand on voit le temps que ça prend.
01:32 C'est un engagement plein et entier
01:34 qui engage aussi, finalement, sa famille,
01:36 ce qui n'est pas toujours très simple.
01:38 Donc oui, je pense qu'il y a une forme de charité,
01:41 la recherche du bien commun,
01:43 puisque quand on s'engage en politique,
01:45 tous amoureux du bien commun,
01:47 même mes adversaires politiques
01:49 sont amoureux du bien commun,
01:51 même si nous ne partageons pas la même définition
01:54 de la religion.
01:55 Après, vous savez, la foi dans ma vie,
01:57 j'étais à la messe de rentrée,
01:59 je n'y suis pas retournée depuis,
02:01 c'est trop tôt le mercredi.
02:03 -Toutes les religions portent un regard sur la société,
02:06 ce qui les amène parfois à intervenir
02:08 dans le débat public.
02:09 Le 9 octobre 2022, c'était à l'occasion
02:11 de la messe de canonisation d'un évêque italien.
02:14 Le pape François a pris la parole. On va réécouter un extrait.
02:17 -L'exclusion des migrants...
02:19 -L'exclusion des migrants...
02:21 -Est criminelle.
02:23 -Est criminelle.
02:24 -Li fait mourir...
02:26 -Cela les fait mourir devant nous.
02:29 Et cela fait aujourd'hui, de la Méditerranée,
02:33 le plus grand cimetière du monde.
02:35 L'exclusion des migrants...
02:38 -Est schifossa.
02:39 -Est dégoûtante.
02:40 -Est pécaminossa.
02:42 -C'est un péché.
02:43 -Est criminel. -C'est criminel.
02:45 -En tant qu'élu du Rassemblement national,
02:47 vous défendez une politique migratoire restrictive
02:50 et en tant que catholique, vous avez le pape François
02:53 qui vous appelle, qui vous enjoint d'accueillir
02:56 et de venir en aide aux migrants.
02:58 Comment est-ce que vous conciliez les deux,
03:01 votre foi et vos convictions politiques ?
03:03 -Il y a deux tableaux.
03:05 Quand le pape François nous exhorte à une charité personnelle,
03:08 je pense qu'il est dans son rôle.
03:10 Après, à la hauteur... -Il s'adresse...
03:12 -A la hauteur d'une nation, d'un pays,
03:15 il faut rendre à César ce qui lui appartient.
03:17 Ce n'est pas vraiment de son fait.
03:19 Il s'immisce un peu dans la souveraineté des pays.
03:22 C'est le peuple français qui doit décider
03:25 de sa politique migratoire.
03:26 C'est la raison pour laquelle nous voulions un référendum.
03:30 Je dirais au pape François que saint Augustin en parlait déjà.
03:33 Il disait que comme on ne peut pas s'occuper de tout le monde,
03:36 il faut s'occuper de celui qui est le plus proche,
03:39 comme lié par un sort avec vous,
03:41 que ce soit le plus proche par les circonstances,
03:44 par le lieu ou par le temps.
03:45 Quand on voit la situation de la France,
03:48 les gens dont on doit s'occuper en premier,
03:50 ce sont les Français.
03:52 -Je le déplore, parce qu'effectivement,
03:54 j'ai eu à me positionner sur l'océan Viking,
03:57 vous savez, qui a abordé exactement dans le corps militaire à Toulon.
04:00 La question se pose.
04:02 Je pense qu'il faut secourir ces migrants qui sont en mer.
04:05 Il faut surtout faire en sorte
04:07 qu'ils ne prennent plus des risques inconsidérés
04:09 en prenant la mer et qu'il faut mettre fin à ces ONG
04:12 qui sont complices des passeurs.
04:14 Je reprends les mots du cardinal Sarah,
04:16 qui dit que c'est là-bas qu'il faut les aider,
04:19 parce que chacun a vocation à s'épanouir
04:21 et à faire son travail.
04:22 -Le pape n'a pas affaire de politique ?
04:24 -Non, je pense pas.
04:26 Par contre, c'est son rôle de nous exhorter
04:28 à une charité individuelle,
04:30 et celle-là, je ne la remets pas du tout en cause.
04:33 D'ailleurs, je vais vous dire, je me suis émue
04:35 du sort des enfants mineurs qui sont arrivés de l'océan Viking,
04:39 que la protection de l'enfance a mis dans un hôtel,
04:42 et au bout de 48 heures, tous les enfants avaient disparu.
04:45 Une fois qu'ils étaient sur notre sol,
04:47 j'en ai parlé au président du Conseil départemental,
04:50 il y a un autre sujet où l'Église est intervenue
04:52 dans le champ politique, et vous l'avez suivi,
04:55 c'est l'opposition au mariage pour tous.
04:57 Quelle est la différence entre la question des migrants
05:00 et la question du mariage pour tous ?
05:03 Est-ce que l'intervention de l'Église est plus légitime ?
05:06 -Elle est très différente.
05:07 Je pense que l'Église...
05:09 J'ai pas souvenir, pour avoir été dans les manifs,
05:12 c'était pas une procession.
05:13 Il y avait vraiment des gens.
05:15 -L'évêque de Toulon, par exemple, a appelé à la mobilisation
05:19 pour faire un peu de bire.
05:20 -Que les évêques, que les papes parlent, c'est très bien.
05:23 Après, je pense que c'est aux politiques
05:25 d'en faire ce qu'ils veulent.
05:27 Là, c'est très différent par rapport à la politique migratoire.
05:31 Je pensais que c'était un changement de civilisation
05:34 qui n'allait pas dans la mesure où...
05:37 Je pense que le mariage n'est pas là pour célébrer l'amour,
05:40 mais qu'il est là pour célébrer la fondation d'une famille
05:43 avec une descendance, une natalité aussi,
05:46 qui permet au pays de bien vivre.
05:48 C'est important pour chaque enfant de savoir qu'il a un père et une mère
05:52 et que c'est de lui mentir que de dire qu'il a deux papas ou deux mamans.
05:55 Il y a forcément une gamète du sexe différent.
05:58 -On va parler de votre engagement au Front national.
06:01 Vous êtes engagée autour de l'âge de 15 ans.
06:03 -Oui, j'ai eu une carte de façon anecdotique à 16 ans.
06:06 -Qu'est-ce qui a déclenché cet engagement ?
06:09 -Mon papa s'était déjà présenté. Il fait déjà deux élections.
06:12 -Votre père Jean-Philippe Lavalette s'est présenté deux fois
06:15 aux élections législatives.
06:17 Il a fait une désacréation en 1972. -Ah, trop drôle.
06:20 Oui, c'est ça.
06:21 -Avant cela, il faisait partie du mouvement d'extrême droite
06:24 Ordre nouveau. -Oui, c'était un autre contexte.
06:28 Quand on dit ça maintenant, vous dites "extrême droite",
06:31 c'était un moment, j'allais dire, en mai 68,
06:35 où tout était quand même très exacerbé,
06:38 mais il a toujours eu à coeur de préserver la souveraineté de son pays.
06:42 -Vous avez aussi eu un engagement syndical
06:45 à la fac de droit de Bordeaux.
06:47 Vous y avez présidé la section du Renouveau étudiant,
06:50 qui, à l'époque, était un syndicat proche du Front national.
06:53 Récemment, l'hebdomadaire L'Express a révélé
06:56 que ces années d'engagement syndical étudiant
06:58 ont été marquées par des actions violentes
07:01 sur le campus de Bordeaux.
07:02 La presse régionale de l'époque s'en est fait l'écho
07:05 à plusieurs reprises, relatant des incidents violents
07:09 impliquant votre syndicat, évoquant des expéditions punitives
07:12 menées par des personnes liées à votre syndicat,
07:15 parfois des membres de votre syndicat,
07:17 avec des marteaux, des battes de baseball,
07:20 des gaz lacrymogènes.
07:21 Est-ce un passé que vous assumez ?
07:23 -Il faut remettre les choses dans leur contexte.
07:26 C'était dans les années 97, je pense, 96,
07:28 où les facs, il y avait de la violence sur les facs,
07:31 à tel point que les renseignements territoriaux
07:34 faisaient un peu un focus sur ce moment-là,
07:36 car ils disaient que c'était révélateur des tensions
07:39 que l'on trouvait dans la société.
07:41 Il y avait le local de l'UNEF à côté d'une autre,
07:44 et c'était un peu tendu.
07:46 Je pense que ce...
07:47 Cet article du stagiaire de l'Express
07:49 essaie de me faire passer pour un skinhead.
07:52 Je trouve que personne ne l'est dupe.
07:54 -En 1998, cet engagement politique s'est concrétisé
07:57 par votre première candidature à une élection.
08:00 -Vous avez sorti le dossier. Voilà, c'est ça.
08:02 -Voilà, en affiche. Vous aviez 22 ans.
08:04 Vous étiez étudiante.
08:06 Ca vous a valu des remarques ?
08:08 -Non, ça m'a valu de planter mon année, par contre.
08:11 Coller des affiches et faire les marchés,
08:13 "Globalement, vous êtes moins sur votre TD."
08:16 Non, ça m'a pas valu de remarques.
08:18 Je crois que j'étais la femme...
08:20 Je pense que j'étais la plus jeune de France.
08:22 Je sais plus si c'est au sein du FN ou de tous les candidats.
08:26 C'était une sacrée expérience.
08:27 C'était à Bèges, fièvre de Noël, ma mère,
08:30 où j'ai quand même fait 10,33 %, ce qui était assez fou.
08:33 C'était une belle expérience militante.
08:36 -Dans ce parcours politique, juste après ou peu après,
08:40 il y a eu une sorte d'écart, une forme d'infidélité
08:42 au Front national, à l'époque, c'était le FN.
08:45 Vous avez quitté le FN pour suivre Bruno Maigret au MNR.
08:48 Pourquoi ?
08:49 -En fait, je pense qu'on avait envie de dédiabolisation, un peu.
08:53 On avait envie...
08:54 On était un peu lassés des provocations
08:56 que pouvait avoir Jean-Marie Le Pen
08:58 quand vous passiez vos nuits à coller,
09:01 que le lendemain matin, il faisait une grosse bourde à la radio.
09:04 Vous disiez que ça n'avait pas de sens.
09:06 -C'était l'idée de l'union des droites.
09:08 -C'était surtout cette idée de dédiabolisation,
09:11 qu'on allait gagner, qu'on voulait le pouvoir.
09:14 Avec un peu de recul, je me dis qu'effectivement,
09:16 il n'est pas un charisme de malade.
09:18 Ce qui est assez marrant, c'est de se dire
09:21 que ce que j'avais cherché au MNR, c'est Marine Le Pen
09:24 qui me l'a offert avec sa vision du RN.
09:26 -Vous avez fait une pause dans votre engagement politique
09:30 pour fonder votre famille. Vous avez eu cinq enfants,
09:33 dont une fille qui est trisomique.
09:35 Vous êtes très engagée sur les questions de handicap.
09:38 Vous pensez, vous, en tant que députée,
09:40 avoir l'espoir de pouvoir améliorer les politiques publiques ?
09:43 -J'aimerais.
09:45 Je pense que ce qui a pas mal marqué mon engagement,
09:48 quand Marine me demande d'être porte-parole
09:50 en charge du handicap, j'accepte tout de suite.
09:53 Ce qui a bien marché, c'est que je partage le quotidien des Français.
09:57 Quand vous avez cinq enfants, une petite fille handicapée,
10:00 vous savez qu'à six mois d'attente,
10:02 dans les dossiers à la maison départementale,
10:04 vous savez que Parcoursup, c'est de la daube.
10:07 Parler aux gens de ce qui les concerne et de le vivre vous-même,
10:10 je pense que ça vous enracine.
10:12 Je pense que c'est ce qui a fait, pas le succès,
10:15 mais le fait que les Français m'aiment bien,
10:17 que je rencontre sur les marchés,
10:19 aiment cette proximité que j'ai avec eux.
10:22 Si je pouvais améliorer les choses pour le handicap,
10:24 ce serait une bonne chose.
10:26 -Pour revenir à cette question du handicap,
10:28 vous avez dit que l'engagement était une forme de sacerdoce.
10:32 Comment est-ce qu'on gère cela quand on a un enfant
10:35 qui a forcément besoin d'un peu plus de temps et d'attention ?
10:38 -C'est pas très simple. C'est une vraie question.
10:41 La chance que j'ai, c'est qu'elle est relativement autonome,
10:44 donc c'est quand même plus simple.
10:46 On se rend compte qu'on est aidant.
10:48 Les frères et sœurs mettent plus la main à la pâte.
10:51 C'est moi qui l'ai amenée le matin.
10:53 Ils ont pris le relais assez naturellement.
10:56 Je n'hésite pas à me faire aider quand j'en ai besoin.
10:59 Mais c'est une vraie question.
11:00 Ca veut dire que beaucoup de gens sont aidants
11:03 sans s'en apercevoir. Je ne me suis jamais dit aidante.
11:06 J'ai jamais dit que mes enfants étaient aidants.
11:09 D'avoir été extrait de ma famille, ça fait 3 jours que je suis à Paris,
11:13 on s'aperçoit que la famille est un maillon fondamental.
11:16 C'est 11 millions d'aidants déclarés.
11:18 Comme moi, certains ne savent pas qu'ils le sont.
11:21 -C'est l'heure de notre quiz. Je vous explique le principe.
11:24 -Vous commencez une phrase. -Exactement.
11:26 Je commence une phrase. C'est à vous de la compléter.
11:29 Vous êtes porte-parole du groupe RN à l'Assemblée.
11:33 Qu'est-ce qui se crée pour être une bonne porte-parole ?
11:36 -Rester naturelle, rester un peu insolente,
11:38 beaucoup travailler
11:40 et surtout continuer à aimer les Français.
11:42 -En arrivant à l'Assemblée,
11:44 je ne m'attendais pas à ce que...
11:47 -Ce soit aussi exaltant et aussi passionnant.
11:50 -Au lieu du positif. Il n'y a pas eu de mauvaise surprise ?
11:53 -Non. Je découvrais.
11:54 C'est une chance folle d'être dans cette maison magnifique.
11:58 Ca honore. Ca oblige d'être là et de représenter les Français.
12:01 C'est une grande joie.
12:03 -J'aurais réussi mon mandat si...
12:05 -Si... Vous savez quoi ?
12:06 J'ai déjà l'impression d'y être arrivée.
12:09 J'ai porté la cause d'Emma, jeune fille polyhandicapée,
12:12 sur ma circonscription,
12:14 qui avait été mise à la porte de son établissement
12:17 comme 17 autres familles, et d'avoir pu parler d'Emma
12:20 directement au ministre Combes en commission affaires sociales.
12:23 Même si ça s'arrête, je ne regrette pas d'être venue pour Emma.
12:27 -Merci, Laure Lavalette, d'être venue.
12:30 -Merci, Clément Mecq.
12:31 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
12:35 ...
12:48 [SILENCE]

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