Les conseils de notre docteur Brigitte Milhau sur les sujets santé qui vous concernent dans #BonjourDrMilhau
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00:00 Sacha, aujourd'hui, un sujet qui nous concerne tous, absolument tous, même les animaux d'ailleurs.
00:08 Le passage à l'heure d'été, donc c'est prévu pour la semaine prochaine, dans la nuit du samedi
00:14 au dimanche, il va falloir, quand il sera 2h du matin, en fait, il sera 3h du matin, on va passer
00:21 à 3h du matin, donc on va perdre une heure de sommeil. Alors autant le passage comme ça sur
00:27 nos téléphones, sur tous les appareils électroniques, ça va se faire tout seul, c'est automatique,
00:32 mais autant pour nous, pour notre organisme, c'est très très compliqué. Alors ce que je comprends pas,
00:38 c'est pourquoi est-ce que c'est si compliqué alors qu'en fait c'est comme si on dormait une
00:43 heure en moins pendant une nuit, ça devrait pas être aussi dur de se réadapter ? Alors non, non,
00:49 non, non, ça n'a rien à voir avec une heure en moins de sommeil, c'est en fait... À 2h, il sera 3h ?
00:54 Oui, alors il y aura une heure en moins de sommeil, mais on va être surtout décalé de 2h par rapport
01:00 à la lumière naturelle, au soleil, à la nuit, mais à tout ce qui est naturel, on va avoir 2h de décalage.
01:05 L'heure d'hiver c'est une heure de décalage par rapport au jour normal, et l'heure d'été c'est
01:12 2h de décalage. Pour te donner un ordre d'idée, on estime quand même que notre corps met entre 8 et
01:19 20 jours à s'adapter au passage à l'heure d'été. Mais pourquoi il a besoin de s'adapter ? C'est ça
01:25 que je ne comprends pas. Qu'est-ce qui doit changer ? Qu'est-ce qui change au moment où on change d'heure ?
01:29 Je vais t'expliquer. En fait, tout va changer parce qu'en fait on va être le matin beaucoup plus
01:34 longtemps dans l'obscurité et on va être le soir beaucoup plus longtemps à la lumière, ok ? Or,
01:41 tout notre système fonctionne à partir d'un chef d'orchestre, c'est une horloge biologique si tu
01:47 veux. Réellement, on a une horloge biologique dans le cerveau. Donc ça c'est le chef d'orchestre et
01:54 en fait cette horloge va donner, comme ça il y a plusieurs musiciens qui ont chacun leur partition.
01:58 Le système digestif c'est une partition, la vigilance c'est une autre partition, la tension
02:03 artérielle c'est une autre partition, la température corporelle aussi. Il y a plein de fonctions du corps.
02:09 Et tout ça c'est synchronisé essentiellement à partir de la lumière. Je m'explique et je vais
02:16 te montrer ça en image. Tu vois quand il fait jour, les rayons lumineux vont passer à travers l'oeil,
02:24 vont aller être transmis au nerf optique et ce nerf optique est relié directement au cerveau.
02:30 Il va prévenir notre cerveau, hop hop hop, il faut se réveiller. Donc on va stopper l'hormone du
02:36 sommeil qui s'appelle la mélatonine, tu vois elle est barrée et on va stimuler au contraire toutes
02:42 les hormones de l'éveil, le cortisol, l'adrénaline, la sérotonine, tout ça. Donc voilà ce qui se
02:47 passe quand il fait jour et en revanche quand il fait nuit, donc la baisse de la lumière, la baisse
02:53 de la luminosité va cheminer pareil par le nerf optique et va aller alerter le cerveau, le prévenir,
03:00 hop hop hop, là maintenant il faut penser à dormir. Donc on va sécréter la mélatonine, l'hormone du
03:06 sommeil et on va bloquer toutes les hormones de l'éveil. Voilà ce qui se passe en sachant quand
03:10 même que ça met du temps. En fait on estime qu'il faut à peu près deux heures entre les
03:15 premières apparitions de l'obscurité et la sécrétion maximale de mélatonine pour
03:21 provoquer le sommeil. Après on n'est pas directement sur le jour et la nuit, il y a les
03:27 lumières artificielles, si on laisse la lumière allumée à la maison on va rester réveillé ? Oui mais les lumières artificielles ont beaucoup moins
03:33 d'influence sur notre cerveau que les lumières naturelles et c'est pour ça d'ailleurs qu'on dit
03:40 pas d'écran le soir etc parce qu'en revanche la lumière bleue des écrans, des téléphones, des
03:46 tablettes, elle ressemble beaucoup plus à la lumière naturelle. Donc tu vois c'est deux
03:51 choses différentes mais on est vraiment réglé sur la lumière. Si on dort c'est parce qu'il y a cette
03:58 sécrétion de mélatonine qui apparaît à l'obscurité et si on se réveille c'est parce qu'il y a la lumière du jour.
04:02 D'ailleurs le matin il faut ouvrir les volets à fond pour être bien réveillé. Et alors ce décalage, ce
04:07 changement d'heure, ça a quoi comme conséquence du coup pour la santé ? Tu dis que l'organisme a du
04:12 mal à se recaler, est-ce que ça va entraîner des choses sur la santé ? Alors ça va entraîner
04:17 plusieurs choses parce qu'en fait si notre horloge, le chef d'orchestre, le métronome, celui qui
04:21 décide, si lui il s'adapte assez vite, en revanche tous les petits musiciens, celui qui s'occupe de la
04:27 digestion, celui qui s'occupe de la tension artérielle, celui qui s'occupe de l'appareil urinaire,
04:32 celui qui s'occupe de la température corporelle, ils mettent plus de temps à s'adapter. Donc tu risques
04:36 d'avoir des problèmes de digestion, des problèmes de sommeil bien sûr puisque tu auras perdu un peu
04:41 de sommeil, des problèmes de l'humeur aussi, des problèmes de la vigilance. On sait que la petite
04:46 partition qui s'occupe de notre vigilance, elle est programmée pour une certaine heure. Mais donc là
04:51 comme ça va être perturbé, on va être moins vigilant. Et puis surtout des études ont montré
04:55 qu'on avait une augmentation pratiquement de 4% des accidents du travail suite au changement,
05:01 au passage à l'heure d'été. On a une augmentation de 5% des infarctus du myocarde. Et quoi parce que
05:09 notre organisme est déréglé ? Oui parce que la tension est complètement déréglée, parce que
05:13 les artères, il y a des spasmes des artères, il y a le stress aussi. Donc ça a un vrai impact sur la santé alors ?
05:19 5% des infarctus mais 24% de consultations en plus aux urgences pour douleurs cardiaques,
05:29 pour douleurs dans la poitrine, le lundi matin qui suit le passage à l'heure d'été. Ensuite une
05:36 augmentation des accidents de la route, là aussi donc après la semaine après le passage à l'heure
05:42 d'été, on a une augmentation de 5% des accidents, 6% des accidents mortels de la route. Donc tu
05:51 vois c'est pas des petits impacts. Et est-ce qu'on est tous touchés de la même façon par ce
05:57 changement d'heure ? Est-ce qu'on est tous aussi sensibles au changement d'heure ou est-ce qu'il y a des
06:00 gens ou des profils qui sont plus sensibles que d'autres ? Alors il y a toujours des profils qui
06:04 sont plus sensibles que d'autres. Il y en a qui vont s'habituer. Oui on réagit pas tous pareil, il y en a qui s'adaptent plus vite.
06:08 Comme au décalage horaire par exemple. On va dire que les jeunes s'habitueront souvent beaucoup plus vite que
06:13 les autres. Mais surtout ceux qui seront les plus touchés ce sont les personnes âgées. Parce
06:20 qu'en fait les personnes âgées elles sont réglées comme du papier à musique tu vois. Elles
06:25 prennent leurs médicaments tous les jours. Les médicaments tous les jours à la même heure.
06:30 Notamment les personnes qui prennent des médicaments pour la tension artérielle. On sait très bien que
06:35 celle-ci elle augmente dans la journée mais elle baisse dans la nuit. Donc là ce décalage il va
06:40 falloir le rattraper. Ça tout change. Et donc elles sont tellement habituées à prendre
06:46 les médicaments à la même heure, se déjeuner, dîner à la même heure, se coucher à la même heure, qu'elles vont
06:51 être les plus perturbées. Ensuite les bébés c'est pareil. Les bébés ou les enfants ils sont vraiment
06:56 rythmés en fonction de la luminosité tu vois et de l'obscurité bien sûr. Donc les bébés aussi ils
07:03 vont être complètement pas mal décalés. Ensuite il y a les personnes qui ont déjà des troubles du
07:10 sommeil. Oui parce qu'on a dit que ça entraînerait en plus des troubles du sommeil. Qui elles aussi vont être décalées.
07:15 Je te parlais des animaux mais les animaux aussi sont décalés. Il va falloir les recaler. Il y a
07:20 certains animaux qui sont très sensibles au changement d'heure. Alors je reviens aux humains.
07:24 Est-ce qu'on peut donner des petits conseils pour éviter, pour adapter au mieux notre corps
07:31 pour qu'il soit pas trop perturbé par ce changement d'heure ? Alors si on a fait une émission sur ce
07:36 sujet une semaine avant le passage à l'heure d'été, c'est justement parce qu'en fait il est brutal ce passage à l'heure d'été.
07:44 C'est-à-dire que le samedi, tu perds une heure et donc il va falloir se recaler. Il va faire nuit le matin.
07:52 Il va faire jour le soir. Tu n'auras pas envie d'aller te coucher. Et tout ça c'est très brutal.
07:57 Alors que le corps humain il n'aime pas les changements brutaux. Il aime bien quand ça se
08:03 passe progressivement. Donc alors que si tu le fais progressivement, vous avez encore une semaine
08:09 pour vous préparer. C'est-à-dire, tous les jours, il faudrait prendre ses repas et se coucher
08:17 10 minutes plus tôt chaque jour. Comme ça on habite petit à petit notre corps.
08:21 Donc pas que le dîner, le déjeuner, tous les repas on les avance un petit peu.
08:26 En fait on décale toute notre journée de quelques minutes.
08:29 Pour arriver à une heure samedi prochain. Pareil, avoir une activité intense, s'habituer à être très actif le jour.
08:37 Et être très très actif samedi prochain. Comme ça vous endormirez plus tôt le soir.
08:43 Et comme ça cette heure de sommeil, vous en aurez moins les conséquences.
08:47 Éviter les écrans, c'est une évidence, on l'a dit tout à l'heure. Pour s'endormir plus facilement.
08:52 Et éventuellement prévoir, tu sais, parce qu'en fait il va faire jour quand on va se coucher.
08:57 Plus tard. Enfin pas tout de suite, mais après les jeux vont allonger.
09:00 Donc c'est vrai que les petits masques de sommeil c'est pas mal. Et pour les enfants, dans les chambres des enfants,
09:05 c'est pas mal de leur mettre éventuellement des petits rideaux occultants.
09:09 Mais c'est vrai qu'en préparant l'organisme, petit à petit, on aura beaucoup moins de conséquences.
09:14 Et beaucoup moins peut-être, j'ai pas parlé, mais il y avait aussi des AVC, une augmentation des accidents vasculaires cérébraux.
09:19 Donc on va limiter comme ça les dégâts qui peuvent être causés par le passage à l'heure d'été.
09:25 Et là justement on parle que du passage à l'heure d'été où on perd une heure.
09:29 Du coup c'est différent pour le passage à l'heure d'hiver où on gagne une heure ou est-ce qu'il y a quand même des conséquences ?
09:34 Alors ça n'a rien à voir. Effectivement, l'heure d'hiver, en fait, pour l'organisme, ça se passe bien pour plusieurs raisons.
09:41 Déjà tu dors une heure de plus.
09:43 Mais surtout...
09:43 Enfin moralement c'est mieux de passer à l'heure d'été que de passer à l'heure d'hiver.
09:46 Parce que c'est les vacances, parce que tout ça, et tu as raison.
09:49 Mais surtout on se recale par rapport au rythme naturel du jour et de la nuit.
09:55 On est plus proche du vrai cycle sommeil.
09:59 L'heure d'hiver c'est une heure de décalage par rapport au rythme du soleil naturel.
10:05 Alors que l'heure d'été c'est deux heures de décalage.
10:07 Donc tu vois, alors s'il y a des accidents plus fréquents de trottinette, de vélo,
10:11 à l'heure, si tu veux, de sortie où il y a beaucoup de trafic et tout, parce qu'il fait nuit très tôt,
10:15 et donc souvent on ne les voit pas, il y a une accidentologie dans l'heure d'hiver.
10:19 Ça c'est le gros défaut de cette heure-là.
10:21 Mais sinon, pour l'organisme, c'est beaucoup mieux.
10:24 Et d'ailleurs, ça fait plusieurs années, depuis 4-5 ans,
10:28 on devrait simplement avoir une seule heure.
10:31 Le choix entre soit rester toute l'année, soit rester toute l'année à l'heure d'hiver,
10:36 soit rester toute l'année à l'heure d'été.
10:39 Alors quand on demande aux gens, évidemment ils vous disent,
10:41 ils entendent "vous préférez l'heure d'été ou l'heure d'hiver ?"
10:43 Ils entendent l'été, ils s'imaginent le soir à la terrasse, un café, tranquille, profiter de la soirée.
10:49 Non, c'est pas comme ça que ça se passe.
10:50 N'oubliez pas que si on reste à l'heure d'été,
10:53 eh bien le matin quand on ira travailler, quand on prend son petit déjeuner,
10:56 quand on ira les enfants à l'école, leur première récréation à 10h,
11:01 elle se passera dans le noir total.
11:03 Il fera nuit noire pour la première récréation.
11:05 Et puis surtout, on sera décalé de 2h.
11:07 Donc pour l'organisme, ce serait beaucoup, beaucoup, beaucoup mieux de rester à l'heure d'hiver.
11:12 Et là, en attendant, on s'adapte, on prend 7 semaines pour s'adapter au changement d'heure de samedi.
11:23 - Docteur Martin Blachier, bienvenue.
11:24 Je rappelle que vous êtes médecin de santé publique, épidémiologiste.
11:27 Et aujourd'hui, vous vouliez réagir sur tout ce dont on a beaucoup parlé cette semaine,
11:33 notamment l'augmentation de la consommation des psychotropes chez les très jeunes.
11:39 Vous allez d'abord nous rappeler un petit peu, on le voit, nos enfants en surdose, etc.
11:45 Les chiffres sont là ?
11:46 - Absolument, les chiffres sont là et c'est un des marqueurs très importants qui est objectif.
11:51 C'est très difficile de mesurer l'état de santé mentale d'une population.
11:54 Et l'augmentation des traitements psychotropes,
11:57 c'est-à-dire tous les traitements qui sont là pour pallier un mal-être qui doit être traité,
12:02 c'est un très, très bon traceur.
12:03 - Mais quand vous dites augmentation, voilà les chiffres.
12:07 - Non, non, mais c'est une explosion.
12:08 - C'est quand même 50%.
12:10 On va rappeler que les antipsychotiques, c'est pour traiter la bipolarité, la schizophrénie.
12:16 Que les antidépressifs, bon ça, tout le monde sait ce que c'est.
12:18 Psycho-stimulants, c'est plutôt pour traiter...
12:20 - Tout ce qui est hyperactivité, exactement, les TDAH, on dit.
12:23 Et puis les hypnotiques et sébatives, c'est pour les insomnies qui ont effectivement une explosion.
12:27 - Et pourtant, vous dites qu'à priori, il y a quand même une erreur de diagnostic, expliquez-moi.
12:31 - Alors en fait, moi, ce qui m'a choqué, c'est la façon dont le sujet a été traité.
12:34 On a constaté dans les bases de l'assurance maladie
12:37 qu'il y avait une explosion de la consommation de tous ces médicaments chez les enfants.
12:40 Et la réaction qui a été, c'est de dire...
12:42 - Quand on dit chez les enfants, c'est les moins de 20 ans et c'est entre 14 et 21.
12:45 - C'est entre 2014 et 2021.
12:46 Et on a dit, oh là là, c'est un scandale, les médecins surtraitent les enfants.
12:50 Ils ne les prennent pas bien en charge et on a tendance à trop mettre
12:53 de médicaments antidépresseurs, de médicaments anxiolytiques.
12:56 Moi, ce n'est pas du tout la conclusion que j'en fais.
12:58 Ce qui ne m'attriste pas, c'est qu'on traite de façon médicamenteuse, avec un traitement efficace,
13:04 les symptômes dépressifs chez les enfants, par exemple.
13:06 Ce n'est pas ça qui est grave.
13:07 Le problème, c'est l'augmentation des syndromes dépressifs.
13:10 Et pour moi, cette augmentation de la médication des enfants
13:13 n'est que la conséquence de l'augmentation du mal-être chez ces enfants.
13:17 Or, c'est un sujet qui a très peu été abordé.
13:18 On a préféré dire, comme d'habitude, quand c'est souvent traité par le monde médical,
13:22 qu'on manquait de moyens.
13:23 C'est sans doute vrai pour répondre à l'explosion des symptômes dépressifs chez les enfants.
13:28 Il n'empêche que le sujet, ce n'est pas d'augmenter les moyens pour les prendre en charge,
13:31 même si c'est une partie du sujet.
13:32 Ce qu'il faut, c'est éviter cette dégradation majeure de l'état mental des enfants
13:37 depuis bien avant la crise Covid.
13:39 Contrairement à ce qu'on a pu dire, ça, c'est la deuxième grande erreur.
13:41 - Ça n'a pas arrangé les choses non plus.
13:43 - Ça l'a révélé. Ça l'a révélé, ça l'a amplifié.
13:46 Mais il y a un mal dont on ignore exactement l'origine
13:49 qui crée du mal-être chez les enfants dès assez jeunes.
13:52 Et le début semble être le passage au collège, c'est-à-dire autour de 10-11 ans,
13:57 et qui continue jusqu'à la vie étudiante et qui peut même continuer dans l'âge adulte.
14:00 - Oui, enfin, vous dites qu'il y a un mal dont on ignore l'origine.
14:03 Vous avez quand même votre petite idée là-dessus.
14:05 Vous avez beaucoup travaillé sur ce sujet.
14:07 - Absolument, c'est un sujet sur lequel j'ai effectivement beaucoup travaillé.
14:10 Et ce qu'il faut dire, c'est qu'on ne sait pas.
14:12 Là, ce que je vous donne, ce sont des pistes.
14:14 Il y a des pistes qui sont évoquées.
14:15 Donc il y a évidemment les réseaux sociaux, on va en reparler,
14:18 parce que pour moi, c'est la piste de loin la plus probable.
14:22 Ensuite, il y a la baisse de la pratique sportive.
14:24 Il y a eu une légère baisse de la pratique sportive.
14:25 Ce qui est vrai, c'est que la pratique sportive protège contre le mal-être des jeunes.
14:30 Donc ça, c'est une des solutions.
14:31 Mais on ne peut pas dire que la pratique sportive se soit effondrée depuis 2014.
14:35 Il y a les questions de la structure du noyau familial avec les familles monoparentales.
14:39 Mais ça, il n'y a pas vraiment de preuves pour l'instant
14:41 de montrer en dehors de la précarité qui peut être financière
14:43 que c'est ça qui serait la cause de l'explosion à partir de 2014.
14:46 Il n'y a pas eu non plus une explosion.
14:47 Il y a une perte de repère chez les enfants.
14:49 Il y a sûrement une perte d'autorité et familiale et éducative qui entre en jeu.
14:54 Oui, mais quand on regarde les tendances, si vous voulez,
14:55 il y a vraiment quelque chose qui a démarré en 2014-2015 et qui n'existait pas
14:59 et qui ne fait que s'aggraver et qui ensuite a explosé pendant la crise Covid.
15:02 Et les familles monoparentales, si on regarde la chronologie,
15:05 ça ne peut pas expliquer pourquoi tout d'un coup, la santé mentale des enfants a décroché.
15:09 L'éco-anxiété, c'est un thème qui est relativement récent.
15:12 En 2014, l'éco-anxiété, c'était encore limité à une toute petite partie de la population.
15:16 Mais vous m'avez dit, en entrée au collège, 10-11 ans,
15:19 donc ils sont déjà éco-anxieux à 10-11 ans ?
15:23 L'éco, ça peut être la famille, ça peut être ce qu'ils voient à la télévision,
15:27 ça peut être ce qu'ils voient sur les réseaux sociaux,
15:29 effectivement, qu'il leur est transmis.
15:31 C'est une des causes qui est relevée par les psychiatres et les pédopsychiatres
15:33 qui disent qu'ils en voient, mais ce n'est pas la grande majorité,
15:36 des problèmes de santé mentale des enfants.
15:38 Et ensuite, la pression scolaire.
15:39 Alors là, pour le coup, moi, je n'y crois absolument pas.
15:41 Il y a probablement certains établissements qui mettent trop de pression aux enfants
15:46 et qui en font sombrer un certain nombre.
15:47 Déjà, ce n'est que certains établissements.
15:49 Et en plus, c'est un phénomène qui est mondial.
15:51 Je vous parle de la dégradation de la santé mentale des enfants depuis 2014.
15:54 C'est mondial, c'est particulièrement vrai aux États-Unis,
15:56 dans tous les pays d'Europe.
15:57 Oui, même dans les pays où il y a beaucoup de structures de soins,
15:59 où il y a beaucoup de psychiatres.
16:00 Exactement, et aussi où l'école est gérée différemment dans les pays nordiques.
16:04 Donc pour moi, ce n'est pas la bonne piste.
16:05 La seule piste, à mon avis, qui est vraiment sérieuse,
16:07 c'est l'utilisation de ces réseaux sociaux.
16:09 Pourquoi ?
16:10 Ils sont apparus quand d'abord, ces réseaux sociaux ?
16:12 Alors justement, on va vous montrer ça sur la prochaine image.
16:15 Si vous regardez la chronologie des réseaux sociaux,
16:17 en fait, dus les années 2003-2005, sont apparus des réseaux sociaux,
16:20 mais des réseaux sociaux qui ne ciblent pas les jeunes et les enfants.
16:22 Donc pour l'instant, c'était plutôt les adultes
16:25 qui ont commencé à arriver sur cette logique de réseau social.
16:28 Ensuite, à partir de 2009-2010,
16:30 on a les réseaux sociaux qui étaient beaucoup plus interactifs,
16:33 beaucoup plus centrés sur l'image, comme Snapchat et Instagram.
16:36 Instagram va avoir une place à peu près centrale là-dedans,
16:39 mais ce n'est pas encore vraiment utilisé par les enfants.
16:41 Et c'est vraiment l'image.
16:42 C'est vraiment l'image, c'est l'image, essentiellement l'image corporelle.
16:45 Et à partir de 2015, il y a eu l'arrivée de TikTok,
16:47 qui est de loin le plus nocif pour la santé mentale des adultes,
16:51 mais notamment des enfants.
16:52 Et puis, il y a eu un développement d'Instagram de façon très importante
16:55 chez les jeunes, notamment les jeunes collégiens.
16:56 Ce qu'il faut savoir, c'est que les jeunes arrivent à peu près sur les réseaux sociaux
16:59 au moment où ils passent du CM2 à la 6ème.
17:02 C'est là où les parents leur offrent un smartphone,
17:04 parce qu'ils considèrent que si les enfants n'ont pas de smartphone,
17:07 ils vont être désociabilisés.
17:08 Et les enfants vont commencer à utiliser les réseaux sociaux.
17:11 Les données qu'on a, c'est que les enfants, à partir de la 6ème,
17:13 utilisent en moyenne deux heures les réseaux sociaux par jour.
17:17 Et il y a de plus en plus de données, notamment aux États-Unis,
17:20 qui montrent que plus on utilise ces réseaux sociaux,
17:23 plus on a un risque d'avoir des troubles de la santé mentale.
17:25 Donc moi, ma piste privilégiée sur le 16 sur laquelle on travaille,
17:28 c'est que ce sont les réseaux sociaux, probablement,
17:30 qui sont la cause de cette dégradation de la santé mentale.
17:33 Pourquoi ?
17:34 Puisqu'on sait, en santé mentale,
17:36 que la première variable qui joue sur votre santé mentale,
17:39 c'est le lien social que vous avez avec vos proches.
17:41 Et en fait, ces réseaux sociaux sont venus rentrer dans la vie des gens
17:46 et ont totalement modifié la façon qu'ils ont d'interagir avec leurs proches.
17:49 Et donc, c'est toute la structure mentale des enfants qui a été modifiée,
17:52 la structure des liens affectifs.
17:53 Et donc, ça entraîne ce dérèglement qu'on commence à constater
17:56 dans les différents pays.
17:58 D'ailleurs, ça a emmené, on le sait, la Chine à supprimer TikTok chez les jeunes,
18:02 à créer une version de TikTok spécifique pour qu'ils ne puissent pas l'utiliser.
18:06 - Attendez, vous êtes en train de me dire, on va finir sur les réseaux sociaux
18:09 et après, on reviendra sur la Chine quand même.
18:12 Mais vous me disiez, c'est l'isolement dans la famille
18:14 où chacun, finalement, est dans sa bulle.
18:16 On peut dire, il n'y a plus de communication non plus
18:18 les uns avec les autres, la structure familiale, tout ça.
18:20 Donc, il y avait ça et il y avait quoi ?
18:22 - En fait, les réseaux sociaux, si vous voulez,
18:24 ils vont rentrer dans le mode d'interaction des enfants
18:27 et vont créer deux événements.
18:28 La première chose, c'est qu'ils vont être responsables de cyberharcèlement.
18:31 C'est-à-dire qu'avant, le harcèlement à l'école était limité par des limites physiques.
18:34 C'est-à-dire que vous alliez à l'école, vous aviez en général une tête de Turc
18:38 qui était celui qui était un petit peu embêté par les autres.
18:40 Mais cette personne pouvait toujours s'isoler,
18:42 essayer de ne pas fréquenter les personnes qui allaient l'embêter.
18:45 Et puis, quand il rentrait à la maison, c'était terminé.
18:46 Le problème, c'est qu'avec les réseaux sociaux,
18:48 ce harcèlement, il est 24 heures sur 24.
18:50 Vous êtes mis en avant devant la totalité de l'établissement scolaire.
18:53 Et en plus, le harcèlement est beaucoup plus fort
18:56 parce qu'on va beaucoup plus vous humilier que l'humiliation que vous aviez d'habitude.
18:59 Donc, on a vu une augmentation du harcèlement
19:01 et on sait que ce harcèlement scolaire est responsable de troubles psychiques chez l'enfant.
19:04 Et ensuite, il y a un autre phénomène qui est un phénomène d'addiction, tout simplement,
19:07 parce qu'en fait, les réseaux sociaux sont gérés par des algorithmes d'intelligence artificielle
19:12 dont l'objectif, c'est de faire que vous restez de plus en plus.
19:14 Et en fait, on sait que ça déclenche des boosts de dopamine,
19:18 exactement comme une drogue.
19:19 Et en fait, les enfants vont être quasiment drogués au réseau social
19:22 et ça va devenir un espèce de mécanisme cérébral qui va se mettre en place.
19:25 Et donc, en fait, finalement, les enfants vont être sous l'emprise de ces réseaux sociaux
19:28 et ça va complètement prendre toute la place dans leur cerveau,
19:30 exactement comme une drogue prend la place dans le cerveau d'un addict.
19:34 Donc, plus l'isolement où chacun est dans sa bulle,
19:36 où les parents sont de leur côté, les frères, les sœurs et tout,
19:39 on n'a jamais été aussi loin en étant aussi proches.
19:42 Exactement, exactement.
19:44 Autre chose aussi, vous avez parlé de l'image.
19:47 C'est de l'image.
19:49 Alors, il y a eu aussi une explosion des troubles du comportement alimentaire,
19:51 notamment chez les petites filles.
19:53 Et ce qui est très intéressant, d'ailleurs, c'est que cette dégradation de la santé mentale
19:56 n'est pas du tout la même chez les petites filles que chez les petits garçons.
19:58 En fait, elle est beaucoup plus grave.
19:59 Elle est deux à trois fois supérieure.
20:01 Enfin, là, c'est ce qu'on voit, c'est 40 à 50 %,
20:03 mais selon les variables que vous regardez sur les idées suicidaires, c'est encore plus.
20:06 Là, c'est incroyable.
20:07 Donc, il y a vraiment une interaction sur le sexe, comme on dit.
20:09 Donc, ça joue essentiellement sur les petites filles.
20:10 Oh, si vous regardez la consommation des réseaux sociaux,
20:13 elle est à peu près deux fois plus importante chez les petites filles que chez les petits garçons.
20:16 Et c'est particulièrement vrai sur TikTok,
20:18 qui a l'air d'être quand même celui qui a le plus de place sur cette dégradation de la santé mentale.
20:21 Donc, ça, c'est encore un argument pour dire que c'est vraiment probablement le facteur prioritaire.
20:25 Ce sont ces réseaux sociaux qui sont en train d'abîmer nos enfants à partir du collège.
20:29 Donc, on le sait, c'est très compliqué de limiter les réseaux sociaux.
20:33 Et vous me parliez de la Chine.
20:36 Donc, la Chine a pris une décision radicale.
20:37 Donc, eux, ils sont conscients que c'est bizarre.
20:39 Ils ont analysé les données TikTok.
20:40 Ils se sont rendus compte que c'était un drame.
20:42 Et donc, du coup, pour la Chine, ils ont créé une version spéciale de TikTok pour les enfants.
20:46 Et les enfants ne peuvent y avoir accès que 40 minutes par jour.
20:49 Et toute la version qu'ils vendent au monde entier,
20:51 en fait, les enfants peuvent l'utiliser.
20:53 Ils l'utilisent à peu près deux heures par jour.
20:54 Et donc, les Chinois ont mis en place ça de façon très stricte.
20:57 Les Américains, avec leur système de process, ont entré de s'intéresser à ça.
21:01 Et notamment, Instagram est beaucoup attaqué.
21:03 En Europe, on commence à en discuter,
21:04 mais je pense qu'on n'est pas encore au niveau de l'ampleur du phénomène que c'est.
21:07 Et le risque, c'est que si vous êtes enfant et que vous faites une dépression,
21:10 le risque de faire une dépression à l'âge adulte, il est beaucoup, beaucoup plus important.
21:13 Donc, en plus, ce sont des cohortes d'enfants qu'on va suivre pendant des années et des années.
21:18 On est en train de fabriquer un monde d'adultes qui va mal.
21:20 Qui va être détruit sur le plan psychique à cause de l'utilisation très précoce de ces réseaux sociaux très toxiques.
21:25 Alors, sans doute qu'on arrêtera un jour, mais il est urgent d'agir,
21:27 puisque sinon, effectivement, c'est des cohortes d'enfants qu'on condamne.
21:30 Il est urgent d'agir.
21:31 Pour ça, vous aviez aussi donc limité les réseaux.
21:33 Limiter les réseaux sociaux, c'est une urgence.
21:34 Et la pratique sportive.
21:36 Et la pratique sportive parce qu'elle protège effectivement
21:38 contre ce phénomène d'addiction aux réseaux sociaux.
21:40 Et quand vous faites du sport, vous ne faites pas des réseaux sociaux, donc ça protège également.
21:43 Mais ce que fait la Chine, on pourrait pour une fois s'en inspirer.
21:45 Je pense qu'il faut regarder très près.
21:47 Et s'ils le font, c'est qu'ils ont une raison.
21:48 Et ce n'est pas contrairement à ce qu'on entend pour éviter que les enfants aient de l'information.
21:51 C'est vraiment parce qu'il y a un vrai phénomène toxique de ces réseaux sur le cerveau des enfants.
21:55 Merci beaucoup, docteur Blaché.
21:57 Merci.
21:57 Merci à vous de nous avoir suivi et resté en notre compagnie.
22:00 L'info, c'est sur CNews.