Le journal de la Défense - A l'assaut de la montagne

  • l’année dernière
Sa verticalité, son altitude et ses températures parfois extrêmes rendent la montagne imprévisible.
Et depuis que l'homme se fait la guerre, elle a toujours concentré l'attention des stratèges militaires. Point d'observation, frontière naturelle mais aussi zone refuge, cette géographie particulière constitue un milieu à part que l'homme en arme se doit de maitriser. En France, ils sont 8000 soldats d'active et de réserve à être spécialistes du combat en montagne. Rompus au relief et à l'évolution en zone montagneuse, ces militaires doivent, à chaque engagement, composer avec ce milieu qui ne pardonne pas pour partir à l'assaut dans la montagne.
Réalisateur : Florent Corda

Immersion au sein des forces armées.
Au travers d'images réalisées au plus près des entraînements comme en opérations, Le Journal de la Défense pose chaque mois un autre regard sur l'actualité des armées pour mieux appréhender et comprendre l'univers de la Défense.

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Transcript
00:00 ...
00:10 Musique pesante
00:13 -La montagne.
00:14 Sa verticalité, son altitude, ses températures parfois extrêmes
00:18 la rendent aussi majestueuse qu'imprévisible.
00:21 -La montagne est un milieu abrasif.
00:24 -C'est un monde dangereux.
00:25 -On fait face à la tyrannie du milieu.
00:28 -La montagne a toujours été un espace répulsif,
00:30 sauf qu'aujourd'hui, il devient stratégique.
00:33 -Et depuis que l'homme se fait la guerre,
00:35 ses dénivelés, ses lignes de crête et ses sommets enneigés
00:38 ont toujours concentré l'attention des stratèges militaires.
00:42 Point d'observation, frontière naturelle
00:44 ou encore zone refuge du résistant ou de l'insurgé,
00:47 cette géographie bien particulière fait de la montagne
00:50 un milieu à part que l'homme en arme se doit d'apprivoiser
00:54 ou du moins de maîtriser.
00:56 -Dans le combat en montagne, on a deux ennemis,
00:58 l'espace naturel dans lequel on combat
01:00 et l'ennemi proprement dit.
01:02 -C'est aussi une façon de raisonner le terrain,
01:05 de raisonner l'ennemi.
01:06 -A la fin des années 2000, on se rend compte
01:09 que plus de la moitié des conflits dans le monde
01:11 ont lieu en zone de montagne.
01:13 -En France, ils sont 8 000 soldats d'activés de réserve
01:16 à être spécialistes du combat en montagne.
01:19 Rompus au relief et à l'évolution en zone montagneuse,
01:22 ces militaires n'ont cessé de mettre leur savoir-faire
01:25 au service des opérations.
01:27 Au sol, mais aussi dans les airs,
01:31 ils ont à chaque fois dû composer avec ce milieu bien particulier
01:35 pour partir à l'assaut dans la montagne.
01:38 Musique intrigante
01:40 ...
01:44 -Du coup, les gars, là, de ce que j'ai vu sur les dernières descentes,
01:48 c'est vraiment pas mal, d'accord ?
01:50 Là, en grosso modo, on va dire un jour et demi complet en station,
01:55 vous avez atteint le niveau
01:56 où vous êtes capable de descendre une piste bleue.
01:59 Pour des gars qui avaient jamais ou presque jamais skié avant,
02:02 c'est déjà bien, quoi.
02:04 Là, j'ai une section de jeunes incorporés,
02:06 qui sont arrivés en octobre 2022.
02:09 Là, ils ont fini la partie FGI, formation générale initiale.
02:12 C'est une formation initiale qui dure 10 semaines.
02:15 Ensuite, pendant cinq semaines,
02:17 on fait ce qu'on appelle la famille hiver,
02:20 la formation montagne-hiver pour les chasseurs alpins.
02:23 Là, comme on est vraiment au début pour apprendre à skier,
02:26 on commence en station.
02:27 Et après, dès la fin de semaine,
02:29 on va commencer à faire un peu de ski de randonnée.
02:32 Et dès la semaine prochaine,
02:33 à partir dans des domaines hors piste
02:37 et là, découvrir vraiment ce que c'est le ski de randonnée militaire.
02:40 Musique intrigante
02:43 -Les débuts sont difficiles pour ces jeunes engagés.
02:45 Certains n'ont jamais chaussé de ski.
02:48 Tout juste incorporés,
02:49 ils doivent apprendre à évoluer dans ce milieu exigeant
02:52 la montagne.
02:53 C'est un passage obligé pour tous les chasseurs alpins.
02:56 -Oui, j'avais jamais skié, mais ça s'apprend,
03:01 donc je me suis dit, si les autres y arrivent, pourquoi pas moi ?
03:04 Au début, c'est pas facile, c'est compliqué,
03:07 mais on est là pour apprendre, ça sert à ça, le stage.
03:10 -Néanmoins, à deux semaines d'apprentissage,
03:15 les progrès sont déjà visibles.
03:17 Mais si le ski de descente ne constitue que la première étape,
03:20 il faut se débrouiller et gravir mon zé sommet.
03:23 -Comment ça se passe ?
03:24 -C'est très agréable.
03:26 Je skiais déjà un peu dans ma vie civile avant,
03:28 donc c'est que du plaisir,
03:30 et on me touche le coeur du chasseur alpin.
03:33 La montagne, c'est un milieu très particulier,
03:36 qui est quand même assez dur,
03:37 donc il faut être habitué à la fois au froid et à la montée.
03:41 Et dans un second temps, il y a de la bienveillance,
03:44 parce qu'on doit être solidaires les uns des autres
03:47 pour qu'on puisse tous aller au bout de la mission.
03:50 -Ce stage de skieur militaire de cinq semaines
03:52 a pour vocation d'enseigner les différentes techniques d'évolution
03:56 en saison hivernale à cette jeune section.
03:58 -Les gars, tombez votre sac, vous le mettez sur le côté.
04:02 -Donc là, on est en plein...
04:03 C'est le stage brevet skieur militaire,
04:06 qui est un stage traditionnel chez les chasseurs alpins.
04:10 Là, on fait deux semaines de ski technique,
04:12 c'est du ski alpin en station.
04:15 Et ensuite, à partir de...
04:17 Déjà aujourd'hui et la semaine prochaine,
04:19 on va faire de la peau de phoque,
04:21 donc c'est ni plus ni moins que le ski de randonnée.
04:24 Et ça, c'est dans un but ultime,
04:26 c'est de finir le stage par brevet skieur militaire.
04:30 Donc c'est 1 200 m de dénivelé
04:32 à faire en moins de 4h30 avec l'arme.
04:35 -Je suis en train d'installer mes peaux de phoque,
04:38 car là, cet après-midi, on va faire un peu de ski de randonnée.
04:42 Donc les peaux de phoque vont nous permettre
04:45 de monter la pente de la montagne sans glisser.
04:48 -Et pour monter,
04:49 ces jeunes stagiaires vont se confronter à différents ateliers.
04:53 Monter en peau de phoque,
04:54 monter avec des crampons appelés couteaux ou skis à dos,
04:58 le but est de maîtriser un panel de savoir-faire
05:00 pour pallier à toute situation en montagne l'hiver.
05:03 -On se casse à toute plateforme,
05:05 on s'équilibre avec les bâtons ensuite, d'accord ?
05:09 Le ski intérieur, on vient le placer,
05:12 et pareil, on le stabilise, d'accord ?
05:14 Et ensuite, là, c'est pas trop raide,
05:18 mais la spatule du ski qui est en aval, d'accord ?
05:21 Elle fait le tour du talon, comme ça.
05:24 D'accord ?
05:25 N'oubliez pas, quand vous chaussez,
05:30 vous passez bien en position walk.
05:31 Donc là, tu mets d'abord ta pointe,
05:34 tu mets bien ta chaussure dans l'axe des fixations.
05:37 Allez, les gars, on essaie d'être rapide.
05:39 C'est lent, là.
05:42 -OK.
05:43 -OK.
05:46 Il y a encore un peu de boulot, mais le stage est encore long,
05:49 il y a encore pas mal d'étapes,
05:51 et il y a suffisamment de temps d'entraînement
05:54 pour qu'il soit prêt le jour J.
05:56 C'est bon ?
05:57 Ça déroule, le premier reçu, et ainsi de suite.
06:00 -Allez, go.
06:01 -Les sensations nouvelles, pour moi, évidemment,
06:03 parce que c'est quelque chose que je ne pratiquais pas avant,
06:07 ça demande un peu de practicité,
06:08 il faut connaître le matériel,
06:10 il faut être rapide dans les transitions,
06:13 on a différents matériels suivant les situations de montée,
06:16 donc il faut savoir changer rapidement de matériel,
06:18 donc ça demande du temps d'apprentissage
06:21 et également de l'investissement personnel.
06:23 -Mais la route est encore longue
06:25 avant de devenir un chasseur alpin chevronné.
06:28 En complément du brevet de skieur militaire,
06:30 ces jeunes stagiaires apprendront aussi
06:33 à se déplacer en montagne l'été.
06:34 Ce sera l'objet d'un autre stage,
06:37 celui d'alpiniste militaire.
06:38 Au programme, escalade et ascension.
06:41 En hiver comme en été,
06:43 ils auront acquis les bases de l'évolution en montagne.
06:46 -Le dénominateur commun,
06:48 c'est la capacité à apprivoiser le milieu
06:51 ou à maîtriser les conséquences ou les contraintes du milieu,
06:55 et donc le brevet de skieur militaire,
06:57 le brevet d'alpiniste militaire,
06:59 ce sont des brevets que nous passons en début de formation,
07:02 c'est la première marche des compétences
07:04 pour un soldat de montagne.
07:06 -Pour les pilotes d'hélicoptère,
07:08 la montagne est un milieu à part.
07:10 Et c'est ici, au coeur des Pyrénées,
07:12 dans un centre unique en France,
07:14 le centre de vol en montagne,
07:16 que les jeunes pilotes, aussi bien de l'armée de terre,
07:19 de l'armée de l'air et de l'espace,
07:21 de la marine nationale
07:22 que de la gendarmerie nationale viennent se former.
07:25 Sur leurs 10 mois de formation initiale,
07:28 ils passent 15 jours à évoluer dans les reliefs.
07:30 Pour Edwin, le vol en montagne est une découverte.
07:33 Depuis son arrivée au centre, il y a une semaine,
07:36 il vole tous les jours.
07:38 Un objectif ? Savoir poser son hélicoptère en montagne
07:41 et en toute sécurité.
07:43 -Le vent a des effets un peu spécifiques en montagne.
07:46 En fonction du relief, il va porter plus ou moins la machine
07:49 ou la rabattre vers les reliefs.
07:51 On aura un souci permanent de la sécurité
07:53 en déterminant des zones de dégagement
07:56 pour éviter de percuter le relief.
07:59 -On va partir sur le premier point
08:01 qu'on traitera certainement, une ligne de crête.
08:04 D'accord ?
08:06 -Perché à 1 300 m d'altitude et à proximité de 11 zones d'entraînement,
08:09 le centre de vol en montagne est l'endroit idéal
08:12 pour appréhender ce milieu vertical.
08:14 Au total, 4 000 mouvements d'hélicoptère
08:18 sont enregistrés ici chaque année.
08:20 Au centre de vol en montagne, la formation est éprouvante.
08:26 Sous l'œil attentif du capitaine Laurent, pilote depuis 24 ans,
08:30 Edwin entame son septième vol en montagne
08:32 à bord de cet hélicoptère EC120 militarisé.
08:35 -On va commencer notre séance par une reconnaissance aérologique
08:39 pour te rendre compte des effets du vent
08:42 sur la zone de manière précise.
08:45 Ensuite, on va développer la méthode de raisonnement
08:48 pour l'approche et le décollage afin d'aller se poser
08:51 sur un point qu'on a défini a priori
08:53 afin d'aller sans doute un point plus haut en ligne de crête.
08:56 -En appliquant une méthode spécifique
08:59 de raisonnement d'approche et de décollage,
09:01 il devra analyser son environnement
09:03 pour identifier la meilleure zone de posée possible.
09:06 -Le vent, pour moi, il est toujours le long de la zone haute.
09:10 -Euh... C'est pas très précis.
09:14 -Pourquoi ? -Le vent descend la vallée.
09:16 -Ah oui.
09:17 -Mais au-delà de voler sans les repères habituels
09:20 comme l'horizon et de composer avec la météorologie
09:23 et l'aérologie spécifiques liées à la montagne,
09:26 l'enjeu de cette formation est d'appréhender
09:28 ce que les pilotes appellent la limite de puissance.
09:31 En résumé, la capacité de portage de l'appareil.
09:34 Et du fait de l'altitude et de la densité de l'air,
09:37 les Pyrénées constituent un terrain d'entraînement
09:40 des plus propices pour appréhender les limites de l'appareil.
09:43 -Ne reste pas bloqué sur cette idée.
09:45 Ne cherche pas à recommencer, re-recommencer,
09:48 re-recommencer, jusqu'à ce que tu arrives à le piloter proprement.
09:51 C'est pas toi qui est mauvais, c'est l'aérologie qui n'est pas facile.
09:55 Donc, il faut que toi, tu te mettes dans la meilleure condition
09:58 pour y arriver.
10:00 -Sa formation au centre de vol en montagne accomplie,
10:02 Edwin rejoindra sa base-école de l'aviation légère
10:05 de l'armée de terre, située à Dax,
10:07 pour terminer sa formation initiale.
10:09 Par la suite, il se spécialisera
10:12 et sera amené à piloter sur hélicoptère de manoeuvre
10:15 ou hélicoptère d'attaque en opération extérieure.
10:18 Opération sur des terrains rarement privés de relief et d'altitude.
10:22 -La troisième dimension, pour relancer la manoeuvre en montagne,
10:27 c'est vraiment quelque chose qui est essentiel.
10:30 On peut s'en passer, mais ça donne une plus-value énorme.
10:33 Nous l'avons utilisé, nous l'utilisons,
10:35 nous sommes en relation constante avec nos camarades de l'ALAT
10:38 et avec lesquels on a combattu, en particulier au Sahel.
10:42 Et donc, cette capacité à appréhender
10:46 l'aérologie, la complexité de ce milieu-là,
10:51 en fait, ça nous donne un vocabulaire et une grammaire
10:56 que nous partageons avec nos camarades de l'ALAT.
10:59 -Savoir skier ou encore voler en montagne
11:04 ne suffit pas pour combattre dans ce milieu particulier.
11:07 Et c'est ici, à Chamonix,
11:09 dans le temple de l'alpinisme français
11:11 à l'école militaire de Haute-Montagne,
11:13 que les cadres des soldats de montagne
11:15 viennent se former encore et toujours.
11:18 Et c'est même un passage obligé.
11:19 Ils sont 650 stagiaires à venir éprouver ici,
11:23 la montagne chaque année, en été comme en hiver.
11:27 -Donc, du coup, aujourd'hui, petite phase synthèse sur trois jours.
11:31 Trois jours de déplacement et deux nuits de stationnement.
11:34 Tout ça pour vous faire acquérir les actes réflexes du grand froid,
11:39 des techniques grand froid.
11:40 Ca va nous permettre d'utiliser,
11:42 comme si vous étiez en opérationnel,
11:44 les poules-cars et les tentes grand froid
11:47 et les réchauds grand froid.
11:49 Donc, un petit déplacement, là,
11:51 de 400 m jusqu'au point de stationnement.
11:54 Et demain, une course en montagne jusqu'à la tête de Boston.
11:58 -L'objectif à atteindre, dans ces conditions éprouvantes,
12:03 est un sommet, perché à 2300 m d'altitude.
12:06 Pour mener à bien cette mission, ils tractent des poules-cars,
12:09 ces traîneaux pesant près de 70 kg,
12:11 contenant vivre et tentent pour la nuit.
12:13 -Pour les derniers, n'hésitez pas à prendre bien large dans le virage.
12:17 -Pour le capitaine Benoît, c'est une première.
12:20 Ca se pince bien, on avance à une bonne vitesse.
12:23 Donc, le poids de la poule-car est soutenable.
12:26 -Avant de devenir commandant d'unité au sein de son régiment,
12:29 il doit effectuer ce stage de six semaines
12:31 pour devenir chef de détachement en haute montagne,
12:34 c'est-à-dire être formé à emmener une section en altitude.
12:38 -Cette formation de chef de détachement haute montagne,
12:41 hiver, pour la saison actuelle,
12:43 nous permet d'emmener avec un très grand degré d'autonomie
12:46 une troupe de chasseurs alpins avec déjà de la formation.
12:50 Ca nous permet soit de les former initialement,
12:53 soit de les emmener lors de différentes sorties,
12:56 soit de sorties purement techniques,
12:58 soit des sorties tactiques,
13:00 et de mettre en oeuvre des techniques qu'on a apprises
13:03 dans du grand froid, dans les différentes saisons.
13:06 -Avant d'atteindre la tête de Bostan,
13:10 le groupe fait halte pour la nuit.
13:12 -On est arrivé dans la zone de stationnement.
13:15 On attend le détachement qui arrive avec les poulkas.
13:18 Ils sont juste là, derrière nous.
13:20 Le but est de trouver la zone la plus plate possible
13:23 pour monter une tente messe pour manger le soir
13:25 et des tentes individuelles
13:27 pour que les trinomes dorment dans les tentes.
13:29 -C'est bon, les gars ?
13:31 -On leur dit de se mettre là,
13:33 et de se mettre là-bas.
13:35 -La priorité, surtout avec des temps comme aujourd'hui,
13:38 c'est le souci de l'humain.
13:39 Il neige, il ne fait pas très froid.
13:41 Mais de manière à ce qu'on puisse se mettre à l'abri,
13:44 on va essayer de les accueillir le plus possible.
13:47 C'est l'humain, et ensuite, on va monter les tentes,
13:50 et c'est le matériel après.
13:51 -Là, on a quand même le grand confort.
13:54 Vous avez vu, en poulka, c'est 200 mètres/heure maximum.
13:58 Donc le chef de dettes trouve bien qu'il pense
14:01 à faire tourner les tireurs de tracteurs,
14:03 les tracteurs-tireurs de poulka.
14:05 Et surtout, là, on a...
14:07 -60 cm de neige est tombée pendant la nuit,
14:12 et les vents avoisinent les 70 km/h.
14:15 Le jour de cet exercice n'a pas été choisi au hasard
14:18 par les instructeurs, bien au contraire.
14:20 Mais pas question pour les stagiaires
14:22 de renoncer pour autant.
14:24 -Pourquoi c'est nécessaire ?
14:25 Parce que déjà, la montagne est difficile.
14:28 Donc il faut avoir de l'expérience et connaître toutes les techniques
14:31 de manière à pouvoir les appliquer au combat par la suite.
14:34 Les conflits de demain seront peut-être dans des zones montagneuses
14:38 ou des zones enneigées ou des zones grand froid polaire,
14:41 ça va pouvoir arriver.
14:43 Donc nous, c'est des techniques et des savoir-faire
14:46 qu'on apprend à nos stagiaires,
14:48 de manière à avoir cette veille opérationnelle
14:50 pour que les stagiaires puissent, je ne l'espère pas,
14:53 mais un jour peut-être s'en servir en zone grand froid,
14:57 zone polaire ou zone montagne,
14:59 d'un point de vue tactique et combat.
15:01 -La montagne, c'est de l'opérationnel,
15:03 on l'a bien vu cette semaine,
15:05 puisqu'en fait, on est constamment confronté au danger.
15:08 Donc le danger en montagne, ce sera, en tout cas,
15:11 quand on fait de la montagne technique,
15:13 ce sera pas l'ennemi, mais c'est le milieu qui est difficile.
15:16 Et un mauvais choix peut conduire assez rapidement
15:19 à une situation hasardeuse, voire catastrophique.
15:22 Donc c'est effectivement une situation très opérationnelle
15:26 qui nous aide à prendre des décisions très importantes
15:29 dans un cadre engagé et engageant
15:31 et qui vont avoir un impact immédiat sur le succès de la mission.
15:34 -Je pense qu'un soldat qui n'est pas entraîné à ce milieu particulier,
15:38 face à l'agression climatique, face aux défis physiques,
15:41 face à la verticalité, peut avoir tendance
15:43 à se concentrer sur sa propre survie
15:46 et négliger, finalement, les impératifs du combat.
15:49 C'est pour ça que nous nous entraînons,
15:51 c'est pour dépasser ce stade.
15:53 Et donc, ça nous met en bonne position
15:55 pour intervenir sur des terres froides,
15:57 ou, par exemple, le nord de l'Europe,
15:59 ou, pourquoi pas, l'Arctique,
16:01 si un jour, il y avait un besoin d'intervenir dans cette zone.
16:04 -Ces savoir-faire spécifiques au milieu montagneux
16:07 sont le fruit d'une longue tradition militaire.
16:10 -Un peu plus de poids...
16:11 -Du fait de sa géographie,
16:13 entre les Alpes, les Pyrénées, les Vosges et le Jura,
16:16 la France est un pays où la montagne
16:18 fait figure de frontière naturelle.
16:20 -Et c'est surtout à partir de la constitution de l'Etat moderne
16:24 qu'il y a besoin de protéger les frontières,
16:28 en particulier ces frontières naturelles,
16:31 fondées sur l'élément montagne.
16:34 Et c'est pour éviter, justement,
16:35 que des armées adverses puissent se traverser,
16:38 et que les militaires, les armées, de manière générale,
16:41 ont cherché à protéger les grands axes d'accès.
16:44 Il faut attendre la fin du XIXe siècle,
16:46 plus actement le décret de 1888,
16:48 pour voir créer les premières unités.
16:51 Ce sont des bataillons de chasseurs à pieds
16:53 qui sont mis en place pour protéger les périphéries frontalières
16:57 en zone de montagne.
16:58 -Néanmoins, il faudra attendre plus d'un demi-siècle
17:03 pour que les premières instructions spécialisées
17:05 au combat en montagne voient le jour.
17:08 Le premier texte vraiment officiel
17:10 est un manuel d'alpinisme destiné aux militaires.
17:12 Un an après, il y aura la première instruction provisoire
17:16 pour les opérations des grandes unités en montagne.
17:19 On est en 1932.
17:20 C'est relativement récent, mais c'est en même temps très tôt
17:24 si on compare la montagne à d'autres espaces
17:26 comme la ville ou la jungle.
17:28 -Et c'est une première en rapport avec un espace spécifique.
17:32 Les instructions au combat en milieu désertique, forestier et urbain
17:37 n'apparaîtront qu'après la Seconde Guerre mondiale.
17:40 -C'est que pour la première fois, on voit un milieu
17:43 être pris à part par rapport à ce que l'on pense
17:46 de l'art de la guerre.
17:48 La montagne suscite un certain intérêt
17:50 tout au long du 19e siècle.
17:51 Il faut attendre l'après Première Guerre mondiale
17:54 pour voir la pensée militaire évoluer,
17:56 mais aussi le métier militaire évoluer
17:59 par rapport à ce type de milieu.
18:00 -Depuis, le combat en montagne n'a cessé d'évoluer
18:03 au fil des opérations.
18:05 De la résistance du plateau d'Aiglière en 1944
18:08 au massif des Ifogas au Mali.
18:10 -La Bosnie-Herzégovine dans les années 90,
18:13 le Kosovo en 1999,
18:15 également l'Afghanistan que vous avez cité,
18:18 le Mali et l'Afrique sahélienne,
18:20 d'une manière générale, dans les années 2000
18:22 jusqu'aux années 2020.
18:24 Lorsque l'on regarde une carte des conflits
18:26 à la fin des années 2000,
18:29 on se rend compte que plus la moitié des conflits dans le monde
18:32 ont lieu en zone de montagne.
18:34 -Et dans ces confrontations, une constante apparaît.
18:37 La montagne est l'espace de la guérilla par excellence.
18:40 -La montagne, ça a toujours été une zone refuge.
18:43 Donc, évidemment, c'est un terrain qui est propice
18:45 à l'insurgé, parce que c'est un terrain
18:48 où une force classique
18:51 ne peut pas utiliser complètement ses armes.
18:54 En tout cas, l'effet de ses armes
18:56 est beaucoup moins efficace qu'en zone de plaine.
18:59 -Et une opération extérieure
19:01 a profondément marqué le retour de combat en montagne.
19:04 Notre engagement en Afghanistan, entre 2001 et 2014.
19:08 Alors chef de corps du 27e bataillon de chasseurs alpins,
19:11 le général Leunen est déployé avec ses hommes,
19:14 fin 2008, en Kapisa,
19:16 la zone d'opération française en Afghanistan.
19:19 -Alors, notre état d'esprit en Kapisa, d'abord,
19:22 c'était un peu un aboutissement pour nous tous.
19:25 C'est-à-dire qu'on allait renouer
19:29 avec une opération extérieure qui allait se dérouler
19:32 dans notre milieu de prédilection, puisque la Kapisa,
19:35 c'est une province montagneuse,
19:37 constituée de vallées,
19:38 et encadrée par des sommets de 3 000 m.
19:41 Donc, c'était notre terrain.
19:43 Notre état d'esprit, c'était l'aboutissement,
19:46 finalement, une forme de retour aux sources.
19:49 Et donc, on s'est entraînés pour ça.
19:51 -Dans cet environnement accidenté,
19:54 fait de sommets et de gorges,
19:55 tous les principes du combat en montagne ont été mobilisés.
19:59 -On était vigilants, d'abord,
20:02 à tenir les positions hautes,
20:03 parce que celui qui ne tient pas les positions hautes
20:07 en montagne, que ce soit au XXe ou au XVIIe siècle,
20:11 se met d'emblée en position d'infériorité.
20:14 Donc, on tenait systématiquement les parties hautes du terrain
20:17 avant de s'engager dans les fonds de vallée,
20:20 et on s'assurait de nos lignes de communication
20:22 pour pouvoir conserver notre liberté d'action.
20:25 -Son mandat afghan sera notamment marqué
20:28 par la bataille d'Al-Assaï,
20:30 opposant les soldats de la coalition
20:32 aux talibans de Golbodin et Khmatyar.
20:34 -La domination du champ de bataille,
20:37 l'ubiquité, la complémentarité des feux,
20:40 la préparation aux conditions de l'engagement,
20:43 c'est la combinaison de tous ces principes tactiques
20:46 qui nous ont permis de conduire cette opération avec succès.
20:49 -Si les opérations militaires en Afghanistan
20:52 ont marqué un retour du combat en montagne,
20:55 elles ont avant tout permis d'asseoir des tactiques éprouvées
20:58 et démontré la nécessité de maintenir un savoir-faire.
21:01 -Quand je suis rentré dans l'armée terre,
21:04 c'est vrai que la guerre en montagne était un concept éloigné.
21:07 Jamais je n'aurais pensé qu'un jour,
21:09 j'aurais à faire la guerre dans un pays comme l'Afghanistan.
21:12 Jamais je n'aurais pensé que j'aurais à conduire
21:15 des opérations de combat en montagne, et pourtant, on l'a fait.
21:19 Donc, l'enseignement que je tire, c'est qu'il ne faut pas injurier l'avenir.
21:23 -La montagne a tendance à niveler la supériorité technologique
21:27 parce que face à l'observation aérienne,
21:30 face à l'usage des bombes,
21:33 il est relativement facile pour un homme à pied
21:37 d'échapper à la surveillance.
21:39 Et donc, si on choisit d'investir cette zone montagneuse,
21:43 il faut y engager des unités qui y soient préparées
21:46 et qui soient capables d'accepter de descendre dans l'arène
21:49 pour aller se confronter à cette opposition,
21:52 j'allais dire, directe,
21:56 et les yeux dans les yeux.
21:57 ...
22:03 -Allez, en avant, les gars, maintenez le contact !
22:06 Gardez la ligne !
22:07 ...
22:10 -En pleine nuit, cette compagnie de chasseurs alpins est prise à partie.
22:13 L'exercice n'a pas officiellement commencé,
22:16 que déjà, les procédures sont éprouvées.
22:18 -30, au contact ! -Contact à gauche !
22:21 ...
22:23 -OK, les gars, ils sont sur le nord-ouest.
22:26 3 PAX.
22:27 ...
22:30 OK, j'ai mon groupe qui a été pris à partie
22:33 au niveau du village de Saint-Antoine.
22:35 3 PAX, muni d'Aélie, côté nord-est du village.
22:38 -Aux alentours de Maudane, dans les Alpes,
22:40 cet exercice de combat en montagne démarre en bourbatant.
22:44 Il faut réagir vite pour reprendre le dessus sur l'adversaire.
22:47 Et c'est au terme de 2 heures de manoeuvre,
22:49 dans la nuit noire, que la situation se stabilise.
22:52 -La zone du hameau est sécurisée.
22:55 On a fouillé les mecs qui ont dû rompre le contact,
22:58 vers le nord, vers la direction ennemie, là.
23:01 Et du coup, on va se désengager du hameau,
23:05 retourner sur la zone de bivouac et se remettre en défense.
23:09 -Sur le qui-vive, ces hommes du 13e bataillon de chasseurs alpins
23:13 rejoignent leur tente pour profiter du peu de sommeil qu'il leur reste.
23:17 Car 2 heures plus tard, la vraie mission débute.
23:19 -30, départ, premier objectif, hameau Saint-Antoine.
23:23 -Objectif à atteindre ?
23:25 Un fort, perché dans la montagne.
23:27 Et pour y parvenir, il faut être le plus furtif possible.
23:31 La zone est truffée d'ennemis.
23:33 -Comme ça. Tu prends un mec, tu te balances là-bas.
23:37 On va se mettre en place sur notre itinéraire d'infiltration.
23:40 Les deux autres groupes de la section,
23:42 près de notre itinéraire, vont se mettre en place pour l'appui.
23:46 -C'est quoi la contrainte de naviguer dans le relief ?
23:49 -La première contrainte, c'est la contrainte physique.
23:53 Forcément, les efforts sont plus soutenus.
23:55 La deuxième contrainte, c'est que l'ennemi est sur les hauts
23:59 et on est sur les bas.
24:00 Ca nécessite pas mal de coordination,
24:03 des débordements, enfin, des gros détours
24:06 pour essayer de récupérer des positions sur les hauteurs
24:10 pour gagner un avantage sur l'ennemi.
24:12 -Dans le combat en montagne, tout est une affaire de coordination.
24:16 ...
24:19 -Alors que les premiers efforts ont été fournis par une section,
24:23 une autre prend le relais pour toujours gagner du terrain
24:26 dans cet environnement éprouvant.
24:28 -Croissant, tu maintiens l'appui en face !
24:31 ...
24:33 -Les contraintes, elles sont multiples.
24:35 La première, c'est le temps que prend chaque déplacement,
24:39 puisque c'est fatigant, c'est plus long.
24:42 On a des contraintes au niveau des liaisons radio,
24:44 puisqu'avec les différents changements d'altitude,
24:47 y a pas forcément tout qui passe.
24:49 On est également contraints par l'emport en munitions,
24:52 puisque les deux niveaux positifs
24:54 font qu'on peut pas apporter énormément de choses.
24:57 Donc, ouais, y a pas mal de contraintes
24:59 qui s'ajoutent à ça.
25:00 Y a un vrai travail logistique au niveau de la compagnie
25:03 pour qu'on soit appuyés par la section de commandement
25:07 au fur et à mesure de l'opération.
25:09 -On est dans un terrain qui, souvent, reste relativement vierge.
25:12 Et tout ça pour dire que les options,
25:14 les routes à prendre, etc., sont pas multiples.
25:17 Donc, en fait, le terrain, non seulement il s'impose aux combattants,
25:21 mais en plus, il n'a pas été préparé ou remodelé
25:24 par la main de l'homme en tant que tel.
25:26 Et donc, les contraintes sont encore plus fortes.
25:29 Contrairement à ce qu'on pourrait penser,
25:31 le combat en montagne, c'est un combat
25:33 qui se fait aussi au milieu des populations.
25:36 Et des populations qui, le jour où elles choisissent
25:39 de prendre les armes, sont probablement les mieux placées
25:42 pour y combattre efficacement.
25:44 -OK, Mathieu, tu resteras bien sur la droite, là.
25:50 Tu restes bien dans la pente.
25:52 Nous, on va se resserrer vers toi, d'accord ?
25:54 On va se resserrer un peu sur la droite.
25:56 ...
25:59 -Bien joué.
26:00 ...
26:04 -Allez, trace-moi ça !
26:06 -300 m de dénivelé positif plus tard, le fort du Sapé.
26:09 Il aura fallu 6 heures pour l'atteindre.
26:12 -Ils sont à 50 m en direction de mon bras,
26:14 entre les deux poteaux électriques.
26:16 -Un blessé ! Un blessé ! Un blessé !
26:19 -OK.
26:21 -OK. -Basse-basse.
26:22 -Reste à mon bras droit, là.
26:24 -Le triné en boursier, lâche ta bécane !
26:27 -Au terme de 3 heures d'assaut, ces hommes obtiennent enfin
26:30 l'avantage sur l'adversaire, retranchés dans ses habitations.
26:33 -OK, avance encore ! Avance un petit peu, relève-toi un peu.
26:37 -Donc, assaut terminé, 5,5, neutralisé dans les baraquements.
26:41 -Si le combat en montagne a nécessairement évolué
26:43 au fil des opérations, la tyrannie de ce milieu reste intangible.
26:47 Maîtriser la montagne ne s'improvise pas.
26:50 Et au terme de plus d'un siècle d'existence,
26:52 les troupes de montagne n'ont cessé de cultiver
26:55 leur esprit cordé et leur savoir-faire bien particulier
26:58 pour une finalité, faire de ce milieu un atout
27:01 pour conserver la supériorité au combat.
27:04 ...
27:18 ♪ ♪ ♪

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