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Battu dans l'opinion publique, sur le front syndical, et même à l'Assemblée où il a été obligé de dégainer le 49.3, Emmanuel Macron garde tout de même le cap. Dans cette chronique, notre journaliste Cyprien Caddeo explique en quoi la répression policière et le mensonge à répétition sont les deux mamelles d'un pouvoir macroniste plus isolé que jamais.

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Transcription
00:00 Pour expliquer les violences policières, il n'y a aucun bon argument.
00:03 Ce n'est pas possible quand il y a une violence policière
00:06 qu'il n'y ait aucune sanction dans la hiérarchie policière.
00:08 Il y en a.
00:09 Il y a un commissaire de police,
00:10 il y a un directeur départemental de la sécurité publique,
00:12 il y a un préfet, il y a un ministre.
00:13 Hum, il est bien ce jeune-là.
00:15 On devrait voter pour lui.
00:16 [Bruits de combat]
00:28 Et j'assure de mon soutien les forces de l'ordre qui ont fait un travail exemplaire.
00:32 Ah ouais.
00:33 Et voilà, encore un qui s'est radicalisé.
00:35 Il a dû trop jouer aux jeux vidéo.
00:37 [Générique]
00:50 Bon, la dernière fois, vous vous en souvenez peut-être,
00:53 on disait que Macron devait choisir entre sa réforme des retraites ou la démocratie.
00:56 Bon, bah, il a choisi.
00:58 Oui, on va continuer à avancer, à marche forcée.
01:00 Et oui, non content le 22 mars de nous expliquer
01:02 que pour les retraites, il ne bougera pas d'un iota,
01:04 le président de la République nous a annoncé aussi
01:06 que pour les prochaines réformes, bah, ce sera la même, marche ou crève.
01:10 Alors, pause.
01:11 Sur les retraites, le président a perdu.
01:13 Il a perdu la bataille de l'opinion, il a perdu dans la rue.
01:15 On ne peut même pas dire que les syndicats ont échoué.
01:17 Les manifs font le plein à chaque fois,
01:19 y compris dans les territoires où on ne s'attendait pas à une telle foule.
01:22 Il a perdu.
01:23 Et au lieu de l'admettre, il cherche à changer les règles.
01:25 Vous ne passez pas par la loi, et on passe trop par la loi dans notre République.
01:29 Oh, oui, la loi, la loi, c'est embêtant, la loi,
01:32 toutes ces consultations, tous ces votes, tous ces 49.3.
01:35 Enfin, non, le 49.3, ça va, ça, c'est cool, mais bon.
01:38 Bref, nous avons un forcené à l'Élysée.
01:40 Résultat, on l'avait vu venir, à force d'ignorer les manifestations légales,
01:43 ça allait déborder de tous les côtés
01:45 et faire basculer une partie des cortèges dans l'action plus radicale.
01:48 Eh bien, c'est fait.
01:49 Alors, effectivement, on était donc à place de la Bastille
01:53 où pas de cortège vraiment a été organisé, des petits groupes par-ci, par-là.
01:57 Un prétexte tout trouvé pour accentuer la violence policière et la répression.
02:01 Depuis le jeudi 16 mars, jour du 49.3,
02:03 on s'est donc habitués à ce genre d'image en boucle sur les réseaux sociaux.
02:07 [Cris de la foule]
02:12 Et de fait, la mobilisation a changé de dimension depuis le 16 mars.
02:14 Sur la forme, avec des manifs sauvages, en plus des journées syndicales déclarées,
02:18 mais surtout sur le fond.
02:19 C'est plus qu'une question de retraite à ce stade.
02:20 Ça l'est toujours, on a toujours la question fondamentale du travail,
02:23 de la pénibilité et de l'usure des corps.
02:25 Mais s'ajoutent à cela désormais des considérations plus larges
02:28 sur la démocratie que nous voulons, l'autoritarisme et les violences d'État.
02:32 En fait, ce gouvernement, tout ce qu'il ne fallait pas le faire, il l'ont fait, quoi.
02:35 Et en fait, ils ont réussi à mettre tout le monde d'accord,
02:36 même les gens qui ne se sentaient pas concernés par la référendum de tête,
02:39 même les étudiants à qui on avait du mal, en fait, à expliquer que
02:41 oui, eux aussi, ça les concerne, oui, eux aussi, ça les précarise.
02:44 Mais en fait, le 49.3, tout le monde comprend.
02:45 En gros, on nous met juste une immense carotte, quoi.
02:47 C'est toute l'entreprise macroniste dont la rue fait désormais le procès.
02:50 Face à cela, sans soutien de l'opinion majoritaire, ignorée,
02:53 sans soutien des corps intermédiaires, méprisés,
02:56 Emmanuel Macron n'a plus que la matraque comme source de légitimité.
02:59 C'est une stratégie volontaire de l'escalade, du pourrissement,
03:02 comme l'explique ici Sébastien Rocher.
03:03 C'est vraiment des décisions politiques.
03:05 Il ne faut pas regarder juste les gars des Bravem qui sont violents.
03:08 Il y a des gens qui savent l'effet de ce type d'unité
03:11 et qui décident de les envoyer, c'est la première chose.
03:14 Et les nazes, c'est exactement pareil.
03:16 Quand on demande, et il y a pas mal d'OPJ qui ont témoigné sur les médias sociaux,
03:20 quand on leur dit maintenant "vous allez faire du chiffre en termes d'arrestation",
03:23 comment vous refusez les instructions de l'autorité hiérarchique ?
03:27 Sans les policiers, le pays serait ingouvernable pour Macron.
03:30 Une situation dans laquelle il s'en est mis tout seul, comme un grand.
03:32 Mais bon, rassurez-vous, on est toujours dans un pays libre où tout roule.
03:35 D'ailleurs, Olivier Véran a un argument imparable pour vous le prouver.
03:38 Si la France n'était pas un pays libre,
03:40 ce n'est pas en France que Greta Thunberg viendrait faire des discours
03:42 et qu'il y ait des actions qui seraient menées par les écolos,
03:44 ils iraient là où ça pollue le plus, en Chine ou en Inde.
03:46 Bizarrement, ils viennent en France.
03:47 C'est peut-être qu'on est quand même encore un pays des droits de l'homme
03:49 et que les gens peuvent faire à peu près ce qu'ils veulent.
03:51 Ah bah oui, si Greta Thunberg peut venir faire des conférences, tout va bien, non mais c'est sûr.
03:54 En attendant, si elle était venue à Sainte-Soline, Greta,
03:56 elle aurait mangé du LBD comme tout le monde.
03:58 Les démocraties approfondies en Europe n'utilisent pas en maintien d'ordre
04:03 ni LBD, ni Gredade, ni la Finlande, ni la Norvège, ni la Suède,
04:08 ni le Danemark, ni le Royaume-Uni, ni l'Allemagne,
04:12 c'est-à-dire que les pays qui scorent le plus haut,
04:14 en fait, ils ne veulent pas infliger des mutilations à la population.
04:19 Mais ça nous donne une transition toute trouvée pour évoquer la deuxième arme du gouvernement,
04:23 la fake news, pure et simple.
04:25 À l'image de l'argument lunaire sur Greta Thunberg,
04:27 on peut tout dire, absolument n'importe quoi,
04:29 tant que ça permet soit d'euphémiser l'autoritarisme,
04:31 soit de le justifier, quitte à mentir sans vergogne.
04:34 Des manifestants ont été interpellés pour rien ?
04:36 Bah, ils n'avaient qu'à ne pas être là, répond Darmanin.
04:38 Il faut savoir que être dans une manifestation non déclarée est un délit,
04:42 mérite une interpellation.
04:44 Perdu, le simple fait de participer à une manif sauvage ne fait pas de vous un délinquant.
04:47 Il y a eu de graves violences policières à Seine-Solide, avec deux militants dans le coma ?
04:50 Eh bien, Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture, ne connaît pas ce terme.
04:53 Les violences policières n'existent pas.
04:55 Non, ça n'existe pas.
04:56 Gérald Darmanin, décidément champion en toute catégorie en matière de mensonges,
04:59 n'a d'ailleurs pas vu de LBD à Seine-Solide.
05:01 Non, les gendarmes n'ont pas lancé de LBD en quad.
05:05 Seules des grenades lacrymogènes ont été tirées.
05:08 Enfin, en fait, si, parce que deux heures plus tard, le ministre change de version.
05:16 Les quads qu'on voit arriver, ils étaient utilisés pour lancer des grenades, en effet, lacrymogènes,
05:20 pour repousser les personnes.
05:23 Il y a eu deux lanceurs de LBD.
05:25 Après, on parle du ministre qui a vu 40 000 faubillés au Stade de France,
05:28 donc je ne me fierai pas trop à son œil de lynx, si j'étais vous, souvenez-vous de ça.
05:31 Ce qui s'est passé, c'est qu'il y a eu entre 30 000 et 40 000 personnes de plus
05:36 que ne peut accueillir le Stade de France, c'est-à-dire 80 000 personnes, sur le parvis.
05:40 Et ils étaient là avec ou sans billet.
05:44 Le ministre de l'Intérieur n'a pas le monopole du mensonge, évidemment.
05:54 On a eu la pension à 1 200 euros avant, cette magnifique une du Parisien,
05:58 regardez comme elle est belle,
05:59 ou encore Elisabeth Born de 25 mars.
06:01 Nous avons fait ce que les Français attendaient de nous,
06:05 construire des compromis sur des textes utiles pour nos concitoyens.
06:10 Alors là, la phrase est magique.
06:11 Il suffit de prononcer le mot "compromis" pour y croire.
06:14 Mais quel compromis ? Où ça ? A quel moment ? Quels en sont les éléments tangibles ?
06:18 Personne n'a été consulté si ce n'est Eric Ciotti.
06:20 C'est pas un compromis, ça.
06:22 Il n'y a même pas eu d'études d'impact.
06:23 90% des actifs sont contre, 2/3 des Français en général.
06:26 Mais c'est ce que les Français voulaient.
06:27 Ah bon, d'accord.
06:28 Dans tous ces exemples, le gouvernement tente d'imposer une réalité alternative,
06:32 où la démocratie aurait fonctionné normalement,
06:34 où le texte aurait été discuté,
06:36 où l'État tient bon face à la violence des barbares de la rue, limite des poutchistes.
06:40 Quand les États-Unis d'Amérique ont vécu ce qu'ils ont vécu au Capitole,
06:43 quand le Brésil a vécu ce qu'il a vécu,
06:45 quand vous avez eu l'extrême violence en Allemagne, aux Pays-Bas,
06:48 ou parfois par le passé chez nous, je vous le dis très nettement,
06:51 il faut dire, on respecte, on écoute, on essaie d'avancer pour le pays,
06:55 et je vais y revenir parce que je veux qu'on parle du fond de cette réforme,
06:58 mais on ne peut accepter ni les factions, ni les factions.
07:02 Il faut alors se poser la question,
07:03 quel message envoient ces violences et les mensonges qui les recouvrent ou les soutendent ?
07:07 L'intransigeance, l'ordre au-dessus de tout.
07:09 À qui cela s'arrête-t-il ?
07:11 À qui sont destinées ces mensonges qu'on a passés en revue,
07:13 puisque personne ne les croit, que les Images les démentent instantanément ?
07:16 Eh bien à eux-mêmes, ou à ceux qui les soutiennent encore,
07:19 comme l'explique ici le journaliste Luka Jakubowicz.
07:21 Et en réalité, je pense que ça va arranger le gouvernement.
07:23 Pendant les Gilets jaunes, en décembre,
07:26 soit c'était le mouvement le plus dur, c'était en décembre 2019.
07:31 On sait très bien que le gouvernement avait laissé sciemment des casseurs,
07:34 cassés des magasins, par exemple, des magasins alimentaires,
07:37 des magasins de scooters, à côté de l'Arc de Triomphe.
07:40 Qu'est-ce qui s'est passé ?
07:41 À ce moment-là, Emmanuel Macron était au plus bas de sa popularité.
07:44 Et finalement, après ces événements, après ces débordements,
07:48 il y a eu un espèce de réflexe légitimiste de la part d'une grande partie de la population,
07:52 qui s'est dit "mais finalement, mieux vaut Macron que les Gilets jaunes".
07:56 Le bloc macroniste minoritaire.
07:58 Cela se fiche pas mal que Macron gouverne démocratiquement,
08:01 pourvu qu'il gouverne, qu'il gouverne pour eux, et contre tous les autres, quoiqu'il en coûte.
08:04 Voilà, c'est la fin de cette vidéo, merci de l'avoir suivie, j'espère qu'elle vous a plu.
08:07 N'hésitez pas à la faire tourner, à la commenter, à vous abonner à la chaîne.
08:10 Nous, on se retrouve dans deux semaines pour un prochain épisode.
08:13 Allez, salut !
08:15 [Générique de fin]

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