«Pour échapper au club de buveurs de François Braun, il faut savoir distiller distiller les éléments de langage»
Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce lundi, il s'intéresse aux éléments de langage de Gérald Darmanin pour échapper au "Club des invisibles" des ministres peu visibles médiatiquement.
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Transcript
00:00 télescopage de Bruno Donnet. Bonjour Bruno. Bonjour Philippe. Tous les jours Bruno, vous décortiquez ici la mécanique médiatique et ce matin
00:06 vous avez choisi de vous arrêter sur le journal du dimanche d'hier
00:09 dont on a beaucoup commenté la une mais pas suffisamment selon vous la page 6. Oui car pour bien comprendre la une
00:16 retentissante du JD délire, Philippe, sur laquelle Gérald Darmanin
00:19 dénonçait le terrorisme intellectuel de l'extrême gauche, il fallait en fait aller lire un tout petit indiscret qui figurait en page 6
00:26 du même journal. Pourquoi ? Et bien parce qu'on y découvrait la confidence un brin saugrenue du ministre de la Santé
00:31 François Braune qui raconte que parce qu'il en a ras la casquette de ministre de se faire moquer de lui par certains de ses collègues
00:38 qui le trouvent totalement transparent, il vient de fonder un club, le club des invisibles et d'y inviter à boire du whisky
00:44 ses camarades Pap N'Diaye et Christophe Béchut, très transparents eux aussi, traduisés "peu visibles
00:51 médiatiquement". Car oui Philippe, quand on est ministre, pour exister politiquement, il faut savoir se faire entendre. Voilà pourquoi hier Gérald Darmanin
00:58 a décidé d'utiliser un mot qui claque, terrorisme, dans une interview qu'il accordait au journal du dimanche.
01:04 Succès garanti, la formule a été reprise absolument partout, CNews l'a commenté dans son édition matinale
01:10 "Gérald Darmanin, il est brut de décoffrage matin, Gérald Darmanin, qui donne une interview au JDD
01:15 laissant prendre au terrorisme intellectuel de l'extrême gauche". BFM TV a fait la même chose
01:20 "Gérald Darmanin réplique ce matin dans le JDD, il balaie les critiques autour de la police, fustige, je cite, le terrorisme
01:26 intellectuel de l'extrême gauche". Et ici même sur Europe 1, dès 10h, Sonia Mabrouk dont Gérald Darmanin était l'invité du grand rendez-vous n'a pas manqué de lui poser
01:33 sa toute première question précisément sur cette formule. "Gérald Darmanin, ce sont des propos qui font d'ores et déjà
01:39 beaucoup réagir. Dans le journal du dimanche ce matin, vous accusez l'extrême gauche de terrorisme
01:45 intellectuel. En quoi n'êtes-vous pas dans la surenchère des mots ?" Voilà, toutefois pour échapper au fameux club des invisibles du malheureux François Braun
01:51 il faut savoir utiliser les bons leviers de la communication politique et il se trouve que l'emploi du mot
01:57 "terrorisme" avec toute la charge dramatique qu'il charrie constitue une excellente ficelle, une ficelle tellement efficace
02:04 que Gérald Darmanin tire dessus très allègrement depuis maintenant des mois. Au commencement il a utilisé le mot dans son sens propre
02:12 pour condamner les attentats. "L'ouverture de ce procès est l'occasion pour nous
02:16 de rappeler que la lutte contre le terrorisme islamiste est une grande priorité du gouvernement." Voilà il parlait donc de terrorisme
02:23 islamiste mais très vite le ministre de l'intérieur a choisi de filer la métaphore,
02:27 éduser la ficelle jusqu'à la corde. Comment ? Et bien d'abord en accolant gauche à islamiste pour former une formule explosive
02:35 l'islamo-gauchisme et la lancer en pleine assemblée nationale au député insoumis Alexis Corbière. "Un parti comme le vôtre
02:42 en soit désormais lié avec un islamo-gauchisme qui détruit la république.
02:46 Voilà la réalité monsieur Corbière." Et puis et puis après le terrorisme islamiste, après le terrorisme
02:52 islamo-gauchiste, Gérald Darmanin a inventé le terrorisme vert. "Il y a eu une grande partie des manifestants
02:59 violents encore une fois qui s'en prenaient physiquement aux gendarmes et je veux redire que cela relève de l'éco-terrorisme."
03:05 L'éco-terrorisme. Hier donc avec le terrorisme intellectuel cette fois de l'extrême gauche,
03:11 Gérald Darmanin s'est tout simplement contenté de surfer sur l'emploi du mot dont il sait que la connotation hautement
03:17 dramatique suffira à retenir l'attention des médias. Alors la manœuvre n'est pas neuve. Au début des années 90,
03:23 l'un de ses prédécesseurs au ministère de l'intérieur, un certain Charles Pasquoix avait déjà
03:28 popularisé la ficelle dans une formule restée célèbre. "J'avais dit il faut terroriser les terroristes."
03:33 Aujourd'hui Gérald Darmanin met donc du terrorisme partout. Il l'accommode à toutes les sources y compris
03:40 intellectuelles ou la démonstration, cher Philippe, que pour échapper au club des invisibles buveurs de whisky, il faut savoir distiller,
03:47 distiller et faire vieillir les bon vieux éléments de langage.
03:51 Merci beaucoup Bruno Donnet pour cet élixir.