Interview traducteur Zelda Pokémon

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Transcription
00:00 Satoshi, il va falloir traduire le jeu.
00:02 Et en fait, il dit ah bon, mais il va falloir vraiment traduire les noms
00:04 de tous les Pokémon que j'ai inventés.
00:06 Et on lui dit oui, il va falloir.
00:08 Et en fait, il s'est mis à pleurer.
00:09 J'ai travaillé dans le jeu vidéo depuis que j'ai 20 ans,
00:17 j'ai commencé comme testeur de jeu.
00:19 Comment je me suis retrouvé à travailler sur Zelda Ocarina of Time ?
00:21 Alors ça, c'était vraiment chouette parce que j'avais un très bon pote,
00:24 il s'appelle Julien Bardakoff, et on faisait énormément de jeux vidéo ensemble.
00:28 On faisait beaucoup de jeux de combat.
00:29 Et puis on passait des soirées ensemble sur Tekken, sur Soul Calibur, etc.
00:32 En fait, j'apprends, il ne l'avait pas dit,
00:33 mais j'apprends qu'il était traducteur chez Nintendo.
00:36 Et il me dit écoute, je vais partir au Japon
00:38 pour traduire un jeu qui s'appelle Zelda Ocarina of Time.
00:41 Moi, je n'étais pas très joueur de Nintendo.
00:42 Donc je dis bon, Zelda, j'ai entendu parler, j'ai vu les pubs à la télé et tout, etc.
00:46 Mais ça ne me plaisait pas trop.
00:46 Je trouvais ça enfantin.
00:48 Et il me dit mais par contre, il y a une équipe italienne, espagnole, allemande
00:51 et ils envoient à chaque fois deux traducteurs.
00:52 Et moi, je suis tout seul et j'ai besoin de quelqu'un.
00:54 Donc je sais que tu parles bien l'anglais.
00:55 Je sais que tu aimes bien le jeu vidéo.
00:56 Je sais que tu adores le Japon.
00:58 Est ce que tu veux venir pendant un mois, un mois et demi pour traduire le jeu ?
01:00 Là, on va dans les locaux de Nintendo, dans la banlieue de Tokyo.
01:04 Il m'amène dans une pièce blanche où il y a deux consoles comme ça.
01:06 Il me dit écoute, voilà JB, ce qu'on va faire maintenant,
01:09 c'est qu'on doit jouer au jeu pendant deux semaines.
01:11 Dur comme métier.
01:12 On commence à jouer au jeu.
01:15 Et en fait, ce n'était pas le jeu fini, bien sûr.
01:16 C'était une version de ce qu'on appelle encore en production,
01:19 qui n'était pas gold, qui n'était pas terminée.
01:22 Donc, il y avait encore plein de bugs et tout.
01:24 Et on jouait au jeu.
01:26 Mais le but, c'était d'aller au bout de ce jeu
01:28 pour qu'on comprenne l'univers de Zelda,
01:30 l'univers de ce jeu et qu'on en fasse une belle traduction.
01:33 Parce que les Japonais, spécifiquement Nintendo, pour eux, c'est très important.
01:37 La qualité globale du jeu et la traduction, ce n'est pas un truc qui est fait à la légère.
01:40 Traduction, d'ailleurs, c'est un métier un peu dur
01:42 parce que quand ce n'est pas bien traduit, on se moque tout de suite.
01:45 Et quand c'est bien traduit, on ne remarque pas que c'est bien traduit.
01:47 C'est juste naturel.
01:48 Donc, c'est un métier un peu ingrat, je dirais.
01:50 Et en fait, on se retrouve à jouer pendant deux semaines.
01:52 Et puis, de temps en temps, on passe la tête par la porte de Miyamoto,
01:57 qui est le grand pape de Nintendo,
01:59 et qui vérifie qu'on a bien "everything is ok".
02:02 Et nous, on fait "ouais, on adore, c'est génial".
02:05 Et puis, on commence à faire une super traduction de Zelda Ocarina of Time,
02:10 qui a duré finalement, mais resté deux mois, je crois, sur place.
02:12 Ce qui était vraiment bien, c'est qu'on a joué au jeu et qu'on le comprenait très, très bien.
02:16 On avait souvent des Japonais qui venaient nous voir de l'équipe de production
02:19 pour vérifier qu'on avait bien compris certains aspects du jeu
02:21 et qu'on allait faire une bonne traduction.
02:23 Et ils étaient surpris qu'on comprenne aussi bien,
02:25 et ils nous ont un peu laissé carte blanche.
02:27 Moi, je me souviens, il y avait une arme qui s'appelle...
02:29 Non, le marteau qui s'appelle le Megaton Hammer.
02:31 Et puis, en français, le marteau Megaton, ça ne sonne pas bien.
02:34 Donc, on a pris la décision d'appeler ça le "marteau des Titans".
02:37 Ça claque un peu plus comme ça.
02:38 On avait aussi l'arbre principal, qui s'appelle l'arbre en japonais "deku",
02:43 pour un petit Français qui va avoir 10 ans et qui va lire D-E-K-U, il va lire "deku".
02:47 Et l'arbre "deku", ça ne fait pas top.
02:49 Donc, on a expliqué ça aux Japonais qu'il fallait qu'on change ce nom,
02:53 c'était très important.
02:54 Ils ont dit "OK", on a réfléchi à comment est-ce qu'on allait l'appeler,
02:56 et c'est moi qui ai trouvé le mot de l'arbre "mojo".
02:59 L'arbre "mojo", par exemple, ça fait un peu primitif,
03:01 ça fait un peu tribal, comme ça et tout.
03:02 À un moment, l'arbre meurt, et puis il donne un espèce de petit bourgeon
03:06 qui va grandir, et qui dit "Bonjour, je suis le bourgeon de l'arbre mozo".
03:10 Alors, c'était très rigolo, on avait pris la liberté de le faire vovoter comme ça.
03:13 Et on trouvait ça vachement bien, ça amenait beaucoup de chaleur et de personnalité,
03:18 et puis ce qu'on appelle de la localisation,
03:20 c'est-à-dire qu'on adaptait ça avec la culture française,
03:22 et ça donnait des trucs assez sympas.
03:24 Moi, j'avais juste une mission qui a duré 6 mois sur Zelda,
03:28 et puis 3-4 mois plus tard, mon pote me rappelle de Nintendo,
03:32 il me dit "Écoute, JB, là, il y a un truc un peu lourd qui va arriver,
03:35 et on a besoin d'un renfort en traduction, ça va être une aventure exceptionnelle".
03:40 On me dit "Bah oui, très bien, bien sûr, avec grand plaisir,
03:42 j'ai gardé un très bon souvenir de Nintendo, c'est super".
03:44 Il dit "Tiens, voilà un billet d'avion, on part en Allemagne".
03:46 Donc la maison mère de Nintendo en Europe, c'est en Allemagne.
03:49 Donc on va, pareil, dans des hôtels un peu sympas,
03:51 dans une petite ville très allemande, très confortable.
03:53 Et j'arrive le lendemain dans une énorme salle de réunion,
03:58 et là, il y a tout un banc entier de Japonais.
04:00 Il y a beaucoup de discussions, et puis ça parle japonais, anglais, etc.
04:03 Et puis tout d'un coup, ils disent "Bon, ben voilà,
04:05 au Japon, il y a un jeu qui est sorti en 1987 qui s'appelle Pokémon,
04:08 et qui a fait un carton".
04:09 C'est-à-dire qu'on a vendu, ils disent, 50 millions, 60 millions de cartouches.
04:12 Donc ils posent ça sur la table et ils disent "Ben voilà,
04:14 ça c'est sorti au Japon, c'est sorti aux États-Unis,
04:16 il va falloir le sortir en Europe, et il faut donc faire la traduction
04:18 et vérifier que le lancement marketing va se faire plutôt bien".
04:21 Et alors ils disent qu'au Japon, les premières cartouches,
04:23 c'était les cartouches vert et rouge,
04:24 mais qu'il y avait des gens qui ont fait des analyses aux États-Unis
04:27 et qui trouvent que vert, c'est la couleur de la nature.
04:31 Et je pense que les gens aux États-Unis,
04:32 ils ne comprennent pas ce que c'est que la nature,
04:34 ils la mangent, la nature, donc pour eux, c'est faible.
04:36 Et donc ils ont décidé de passer sur du rouge et bleu,
04:38 alors que normalement, au Japon, le début, c'était rouge et vert.
04:42 Et donc ils nous donnent à chacun des cartouches en japonais,
04:44 et ils disent "Ben jouez à ce jeu, commencez à vous imprégner".
04:47 Même technique qu'avec Zelda Ocarina of Time,
04:49 le but c'est de jouer au jeu en fond temps comble et de se l'approprier,
04:52 et ensuite de faire une traduction qui soit sympa.
04:54 Et on passe des heures à jouer, alors c'est compliqué, c'est un RPG,
04:57 donc ça veut dire que c'est des jeux avec des créatures, des statistiques,
05:00 il a combien en attaques, je peux lui apprendre,
05:02 il faut qu'il évolue, qu'il gagne des niveaux,
05:03 je lui donne des attaques nouvelles.
05:05 Donc tout ça c'est en japonais, alors nous on avait un japonais de cuisine,
05:07 on essayait de traduire en tout cas le katakana,
05:09 qui est une prononciation, une façon syllabaire de prononcer les mots occidentaux,
05:13 et puis de temps en temps, on comprenait quelques mots,
05:16 mais on était un peu perdus, mais on vivait le jeu à travers les stats.
05:19 Puis après on a joué à la version américaine,
05:20 et puis après ça a été "Ben maintenant il faut traduire".
05:22 Génial, traduire Pokémon c'est une super idée,
05:25 mais ils nous ont dit "Il faut traduire les noms des Pokémon".
05:28 Et ça c'est ce qu'il y a de plus intéressant, c'est ce qu'il y a de plus amusant.
05:31 Parce que dans ce jeu on passe son temps à courir après 151 Pokémon
05:35 qui sont tous plus rares les uns que les autres,
05:37 et chacun a une véritable histoire, ils ont été faits avec beaucoup d'amour,
05:41 le jeu est d'une qualité qui est incroyable,
05:44 typique de Nintendo qui cherchait vraiment dans les détails,
05:47 et il faut faire la traduction.
05:48 Et la traduction c'est pas un truc qu'on fait à la légère,
05:50 parce que c'est des noms qui vont être répétés par les enfants dans les cours de récréation,
05:54 c'est des noms qui vont être répétés par les enfants devant leurs parents,
05:56 c'est des noms qui vont passer à la télé en boucle,
05:59 donc il faut que ce soit parfait.
06:00 On commence avec cette mission incroyable
06:02 que de traduire les noms des 151 premiers Pokémon.
06:06 On raconte la légende que le créateur du jeu Satoshi Tajiri
06:11 il s'est retrouvé dans un gros meeting très important avec tous les pontes de Nintendo,
06:17 et on leur a dit "Monsieur Satoshi Tajiri, nous allons lancer ce jeu dans l'Occident".
06:23 "Ah, bon super !"
06:25 "Et il va falloir traduire le jeu."
06:27 "Bon, c'est normal."
06:28 Et on pense que beaucoup des noms japonais
06:31 ne pourront pas être prononcés correctement par les occidentaux,
06:34 donc il va falloir les traduire.
06:36 Surtout que chaque nom a vraiment une signification particulière.
06:40 Et en fait il dit "Ah bon, il va falloir vraiment traduire les noms de tous les Pokémon que j'ai inventés ?"
06:46 Et on lui dit "Oui, il va falloir."
06:48 Et en fait il s'est mis à pleurer.
06:49 C'est une légende qu'on raconte, je sais pas si c'est vrai,
06:51 mais en tout cas ça montrait à quel point le créateur du jeu a mis son âme dedans.
06:55 On raconte que quand il était jeune, il faisait des combats d'insectes dans les cours de récré,
06:58 et c'est comme ça que lui est venue l'idée de Pokémon,
07:00 qui était son projet qu'il a depuis une éternité.
07:02 Et donc on commence à faire la traduction des noms.
07:04 Pareil, un fichier avec une colonne des noms en japonais,
07:06 une colonne des noms en anglais,
07:07 et puis une colonne des noms en français.
07:08 On réfléchit à faire de la traduction, on fait du brainstorm.
07:11 Il fallait trouver 150 noms.
07:13 Et alors c'est pas des noms qu'on trouve comme ça,
07:14 parce qu'on peut pas les appeler de façon n'importe comment.
07:17 Ils ont tous ce qu'on appelle un "secret meaning",
07:19 une signification un peu secrète.
07:21 Alors je donne un exemple.
07:23 Le Pokémon qui s'appelle Salamèche, en japonais c'est Hitokage.
07:27 Et "hi" c'est le feu, "tokage" c'est le lézard.
07:29 Et donc c'est le lézard de feu.
07:31 Jusque là, on peut pas être plus descriptif que ça,
07:33 ça fait lézard-feu quoi.
07:35 Sauf que lézard-feu, déjà en français, ça sonnerait pas bien,
07:37 c'est pas très joli, donc il fallait trouver un truc comme ça.
07:38 Mais Hitokage, ça sonne bien.
07:40 Sauf que "hito" c'est l'homme, et "kage" c'est l'ombre.
07:43 Et en fait, il a une queue qui a une petite flamme qui est derrière.
07:46 La flamme projette une ombre sur le mur,
07:48 et si on regarde sur le mur, on voit la forme d'une silhouette d'un homme.
07:53 Pourquoi ? Quelle signification particulière ?
07:54 En japonais, je sais pas, mais ça sonne un peu mystique.
07:57 Et donc nous, on se dit "il faut qu'on trouve quelque chose qui soit comme ça".
07:59 Et pour chaque nom des Pokémon,
08:01 il y a une petite signification qu'il y ait à trouver comme ça.
08:04 Pourquoi ils insistent sur cette signification ?
08:06 Parce qu'ils savent que s'il y a de la profondeur dans les noms,
08:10 alors à ce moment-là, on va pouvoir y penser.
08:12 Et les enfants qui viennent d'attraper Salamèche,
08:14 ils jouent pas juste avec lézard-feu, ils jouent avec Salamèche.
08:17 Faut que ça sonne dans leur tête, faut que ça devienne hypnotisant en fait.
08:20 Et puis même quand ils sont à table, ils vont en parler avec leurs parents,
08:22 ils vont dire "papa, papa, j'ai attrapé Salamèche".
08:25 Et Salamèche, déjà c'est un peu mieux.
08:26 "D'où ça vient Salamèche ? Pourquoi ?" etc.
08:28 Et c'est ce qui essaye de susciter en tout cas les Japonais.
08:31 On réfléchit à plein de noms possibles et on arrive sur le nom Salamèche,
08:35 qui ressemble à la salamandre, donc déjà c'est un nom un peu
08:38 moyen âgeux pour qualifier le lézard.
08:40 Puis c'est un lézard, vous savez, il a une peau hurticante,
08:41 quand on le touche, ça brûle un peu.
08:43 Et puis, parce qu'il a une mèche, et en fait cette mèche se transforme en étincelle
08:47 et puis après en feu, donc c'est Salamèche, reptincelle, drapeau feu,
08:50 donc il y a une véritable évolution, il y a une réflexion.
08:53 Et ça ne s'invente pas du tout comme ça.
08:55 Ça faut beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps,
08:56 et je pense qu'on a noirci des pages entières de réflexion pour tous les noms.
09:00 Et après, il fallait les montrer aux Japonais,
09:02 c'est-à-dire qu'il fallait venir avec une sélection de noms.
09:04 Et il y avait un gars, un pauvre gars qui se tapait de les retraduire du français en anglais
09:08 pour expliquer pourquoi on avait choisi Salamèche,
09:10 "Psychositcom from Salamander", et puis la mèche de Sparck, etc.
09:14 Donc on essayait d'expliquer ça, et après c'était retraduit par un Japonais
09:17 pour expliquer aux créateurs du jeu pourquoi est-ce qu'on avait choisi ces noms-là.
09:20 Quoi qu'il en soit, on voyait que les premiers noms qu'on envoyait, ils disaient non,
09:23 et le troisième, ils disaient oui.
09:24 Et donc généralement, on mettait tous nos noms qu'on ne trouvait pas bien,
09:27 toutes nos sélections de noms qu'on ne trouvait pas bien,
09:29 et puis après, on mettait les noms qu'on trouvait intéressants.
09:32 Et puis il y a eu le directeur marketing qui a sorti une arme fatale,
09:36 c'est qu'il a fait un test consommateur auprès d'enfants,
09:38 et il mettait plusieurs possibilités de noms,
09:41 et les enfants, en montrant l'image du Pokémon,
09:43 et pour dire, à votre avis, il s'appelle comment ce Pokémon,
09:46 et en fait, à chaque fois, généralement, les enfants trouvaient que le nom qu'on préférait,
09:49 c'était celui qui était le plus adapté.
09:50 Dans les Pokémon, il y a des Pokémon qui sont assez simples,
09:53 par exemple, il y a des oiseaux, en anglais c'est Pidgeot, Pidgeotto, etc.
09:56 Enfin, c'est assez simple.
09:57 Et donc en français, on appelle ça Roucou, Roucoucou,
10:00 donc ça semble tout de suite quoi, Roucoul, puis quand même, c'est un Pokémon qui se bat.
10:04 Et puis après, il y a des très beaux noms qu'on trouve très jolis,
10:06 les trois Pokémon légendaires,
10:08 qui sont Articodon, Sulfura et Elektor.
10:12 Et en fait, ils ont chacun un élément,
10:13 nous on trouvait intéressant de les lier,
10:15 cet élément avec le nom d'une divinité,
10:18 dans une mythologie qui est fascinante, et qui est associée, donc, à Thor.
10:22 Dans le subconscient commun, Thor, c'est le dieu de la foudre, il envoie des éclairs.
10:24 Donc Elektor, Articodon,
10:27 alors Odin, c'est le patron des dieux dans la mythologie asgardienne,
10:31 mais on l'associe assez vite, à travers toute la culture de dessin animé, de manga,
10:34 Odin, c'est aussi ce qui se passe dans les fjords, la glace et tout, donc Articodon.
10:38 Et Sulfura, c'est un oiseau de flamme,
10:40 et c'est le soufre, donc, qui est un élément qui est associé au feu.
10:45 Et le dieu Ra, qui est donc le dieu égyptien,
10:46 et on pense tout de suite au désert, et donc, ça fait fasciner.
10:49 J'ai travaillé sur la série des trois Pokémon,
10:50 qui sont Salamèche, Reptincelle, Dracaufeu, et Dracaufeu qui évolue.
10:54 Et effectivement, Dracaufeu, c'était un nom qui était assez fascinant,
10:57 parce que, enfin, c'est un des Pokémon les plus emblématiques,
11:00 il est sur la cartouche rouge.
11:02 Et ça, c'est un peu les trois Pokémon du début,
11:04 on doit choisir cette espèce de choix cornélien.
11:07 Et en fait, ces trois Pokémon,
11:09 il fallait leur donner un nom assez impressionnant.
11:11 Et Dracaufeu, en fait, c'est la représentation totale du feu, de la puissance.
11:16 Donc, ce qu'on a beaucoup aimé dans le nom,
11:19 c'est justement ce côté, le dragon de feu,
11:22 puis Drac-au-feu, au feu, comme ça,
11:25 qui avait un aspect très dynamique,
11:27 et qui donnait...
11:29 C'est un peu enfantin de dire "au feu, au secours, au secours",
11:31 mais en même temps, c'est vraiment ça,
11:33 c'est vraiment un Pokémon qui va faire des flammes partout,
11:34 qui enflamme tout le monde et tout, etc.
11:36 Et on trouvait que ça fitait assez bien.
11:38 Et puis surtout, ça sonne hyper bien à l'oreille.
11:40 Tous ces noms-là ont été très importants
11:42 parce qu'après, ils ont été répétés à la télé,
11:44 on voyait des publicités affichées un peu partout,
11:47 on devait traduire, ou en tout cas vérifier
11:49 que dans les bandes dessinées et le dessin animé,
11:51 c'était bien les bons noms des Pokémon qui étaient utilisés,
11:54 et on vérifiait aussi les cartes Pokémon.
11:56 Et moi, j'avais une boîte à chaussures remplie de cartes Pokémon,
11:59 de la première génération.
12:00 Et en fait, avec Julien, le traducteur,
12:02 on vérifie qu'elles sont bien traduites,
12:04 que c'est bien le nom des bonnes attaques dessus, etc.
12:06 Mais moi, je voyais pas la valeur de ça.
12:08 Et deux, trois ans plus tard, après le lancement,
12:11 j'avais une copine qui avait un enfant qui devait avoir 8 ans
12:13 et je lui donne la moitié de mes cartes.
12:14 Dans sa cour de récré, il s'était fait tout piquer.
12:17 Il y en avait, je sais pas, je lui en donne 250.
12:19 Et dedans, j'avais du Dracaufeu, première génération, etc.
12:22 à qui aujourd'hui, je pense, se vend plus de 1 000 euros.
12:24 Et il était tout triste.
12:25 Et donc, je lui dis "attends, c'est pas grave, je te donne notre moitié".
12:27 Et en fait, il est reparti.
12:28 Et je sais pas ce qu'il s'est devenu,
12:30 mais en tout cas, je m'assois sur une fortune.
12:32 D'ailleurs, ça me rappelle une anecdote.
12:33 Pendant assez longtemps,
12:35 "Tiens, je te présente JB qui a traduit les noms des Pokémon
12:37 ou qui a bossé sur Pokémon".
12:38 Alors, les gens qui avaient mon âge de cette époque
12:40 et qui commençaient leur carrière pour être avocat ou financier,
12:44 évidemment, c'était pas génial, enfin, ils comprenaient pas.
12:46 Mais les enfants, dès qu'on disait ça, les enfants s'émerveillaient.
12:49 Ils devenaient complètement excités, quoi.
12:51 Il y a eu un moment, on a fait une compétition en France de Pokémon,
12:54 la première compétition de Pokémon,
12:56 et il y avait comme grand prix de gagner des Mew.
12:58 Les Mew, c'est le Pokémon numéro 151,
13:00 il est pas trouvable dans le jeu.
13:01 On avait ces Mew là à distribuer aux champions.
13:04 Et il nous en restait, en fait.
13:05 Je sais pas pourquoi, le Japon avait donné une vingtaine de Mew.
13:07 Et moi, j'avais pris sur ma cartouche, j'en avais cinq ou six.
13:10 Et de temps en temps, je me souviens, je proposais aux enfants de mes amis
13:13 ou de petits cousins ou autres s'ils voulaient des Mew,
13:15 mais ils comprenaient pas encore tout à fait.
13:17 Et une fois, je rentre chez mes parents, je suis dans l'ascenseur,
13:19 et il y a un petit garçon qui devait avoir 12 ans et je lui dis
13:21 "Tu joues à Pokémon ?"
13:22 Et alors le pauvre garçon dans l'ascenseur, coincé avec moi, il dit
13:24 "Oui."
13:25 "Tu aimes Mew ?"
13:27 "Je sais pas ce que c'est."
13:27 "Tu veux que je te le donne ?"
13:28 "Non !"
13:29 Et là, la porte s'ouvrait, il s'en fut en courant
13:31 parce qu'il pensait que j'allais lui offrir des cachous, je sais pas trop quoi.
13:33 Et moi, je restais avec mes Mew dans ma cartouche
13:36 et je savais pas trop ce que je pouvais en faire.
13:37 Après toutes ces aventures,
13:39 moi, ce que je voulais, c'était monter ma boîte de jeux
13:42 pour faire les jeux pour moi.
13:43 Pour montrer au monde que je sais faire des jeux d'une certaine façon.
13:46 Je suis allé chercher une ancienne collègue qui s'appelle Charlotte,
13:49 Charlotte Lavergne, et puis elle aussi, elle végétait un peu dans son coin.
13:52 Elle avait envie de faire quelque chose, en tout cas de produire quelque chose.
13:55 On s'est associés tous les deux pour monter une société qui s'appelle SuperCosi
13:58 qu'on a créée maintenant il y a un an et demi.
13:59 On a levé des fonds, on a levé 2 millions d'euros pour commencer notre activité.
14:03 On a une équipe de 10 personnes et on fait des jeux vidéo sur mobile.
14:07 On fait des jeux simples pour l'instant,
14:08 des jeux très accessibles avec des gameplays très simples et tout
14:11 parce qu'on n'a pas non plus l'argent pour faire le prochain Genshin Impact pour l'instant.
14:15 Et on sait très bien qu'on monte petit à petit.
14:18 Mais ce qui est génial, c'est qu'on lance des prototypes, on les teste.
14:21 Et en fait, quand ça marche, cette fois-ci, ce n'est pas le travail d'un autre.
14:24 C'est vraiment notre travail à nous et on est hyper responsable de ce qu'on fait.
14:27 Et on adore ça. C'est le plus beau moment de ma vie.
14:30 [Générique]

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