Parlons Vrai chez Bourdin avec Jean-Paul Pelras, écrivain, ancien maraîcher et rédacteur en chef du journal L’Agri.fr.
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00:00 Il est 10h34, merci d'être avec nous.
00:02 La colère monte dans les campagnes,
00:05 et les agriculteurs se sentent de plus en plus méprisés, injustement montrés du doigt.
00:12 Je vous lis simplement ce qu'écrit un agriculteur du Nivernais,
00:19 qui s'étonne de voir tant de haine et de mépris à l'égard de ceux qui nous nourrissent.
00:25 Souvenez-vous, dit-il, comme les agriculteurs étaient bien vus à l'époque du Covid, et puis plus rien.
00:31 La société ne les remercie plus, elle les méprise, elle les oublie.
00:36 Jean-Paul Pelleras, bonjour.
00:39 - Bonjour.
00:39 - Vous êtes écrivain, ancien maraîcher, rédacteur en chef du journal l'Agri.fr.
00:43 C'est vous qui rapportez ces propos de cet agriculteur.
00:48 La colère monte dans les campagnes, Jean-Paul Pelleras ?
00:52 - Oui, effectivement, la colère monte pour plusieurs raisons.
00:56 Il y a une espèce d'acharnement à l'égard du monde agricole qui n'est plus du tout accepté, ni compris.
01:03 C'est souvent les environnementalistes qui sont à l'origine de cet acharnement et de ce mépris.
01:10 - Acharnement, mépris...
01:14 Deux exemples.
01:15 Premier exemple, l'irrigation dans les Pyrénées-Orientales. Expliquez-nous.
01:21 - Mais si vous voulez, il y a ce département que je connais bien.
01:25 Le débit réservé dans les rivières a été augmenté au détriment du débit qui était consacré à l'agriculture.
01:35 Ce qui veut dire qu'aujourd'hui, les agriculteurs ne peuvent quasiment plus arroser
01:40 parce qu'à l'origine, il y a France Nature Environnement qui a cassé un arrêté préfectoral
01:45 et qui a donc obligé le préfet à remonter le débit dans les rivières.
01:49 Les agriculteurs et les maraîchers vont perdre les récoltes.
01:53 - Voilà. Les agriculteurs et les maraîchers des Pyrénées-Orientales risquent de perdre leur récolte
01:58 parce qu'on a augmenté le débit dans les rivières, c'est cela ?
02:01 - C'est cela, exactement.
02:03 - En empêchant donc l'irrigation.
02:05 - En empêchant l'irrigation. Il y a été une irrigation par les canaux,
02:09 sachant que l'eau de l'agriculture redescend à 80% dans les nappes
02:14 et les 20% évidemment, ils servent pour les fruits, pour ce que nous mangeons.
02:19 - Autre exemple, et là je me tourne une nouvelle fois vers Félix Mathieu,
02:23 une décision de l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire, l'ANSES,
02:27 provoque l'angoisse des céréaliers français.
02:29 L'ANSES a décidé d'interdire la phosphine,
02:32 c'est un insecticide utilisé pour l'exportation par bateau.
02:36 Le problème, c'est que beaucoup de pays importateurs
02:38 imposent cet insecticide sur le continent africain. Félix Mathieu.
02:42 - Oui, si aucune décision n'est prise, dès le 25 avril,
02:45 on ne pourra plus exporter vers des pays comme le Togo, le Cameroun, l'Algérie ou l'Egypte.
02:50 C'est ce qu'explique un responsable des producteurs français de céréales,
02:53 autant de pays qui exigent dans leur cahier des charges
02:56 que leurs importations de céréales soient transportées par bateau
02:59 en contact avec cet insecticide, le PH3, la phosphine.
03:03 Alors nos voisins européens, l'Allemagne, la Belgique,
03:05 ont reconduit l'autorisation de ce produit pour leurs exportateurs de céréales.
03:09 Mais pas la France. L'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire vient de prendre cette décision.
03:14 La France qui, selon les producteurs et négociants,
03:16 menace donc tout simplement de scier la branche sur laquelle elle est assise.
03:19 À notre pays, 4e exportateur mondial de blé en a exporté pour 11,5 milliards d'euros l'année dernière.
03:25 Le gouvernement promet au secteur de ne pas le laisser se faire s'aborder par cette décision de l'ANSES.
03:30 Il étudie les solutions juridiques pour contourner cette contrainte.
03:33 - Est-ce qu'il y a des solutions juridiques pour contourner cette contrainte, Jean-Paul Pelleras ?
03:38 Vous le pensez ?
03:39 - Ecoutez, je pense que c'est comme dans tous les dossiers.
03:42 Vous avez vu les néonicotinoïdes pour la betterave.
03:45 On le voit pour l'eau, on le voit maintenant pour la céréale.
03:47 Il faut que l'État, à un moment donné, arrête de cautionner des décisions franco-françaises qui sont préjudiciables.
03:55 Je ne sais pas si effectivement il y a la loi,
03:57 mais il y a aussi derrière l'appui politique qui doit être franc et arrêter de tourner autour du pot.
04:03 Il faut que l'État impose à un moment donné ces décisions-là, sinon qu'est-ce qui va se passer ?
04:10 Mais tout simplement, là, tout est au même, on va favoriser l'importation.
04:14 Et là, alors, je ne sais pas qui va aller contrôler ce qui rentre entre nous.
04:17 - Évidemment. Jean-Paul Pelleras, vous écrivez dans votre lettre à agri.fr
04:22 "Nous assistons à une guerre d'opinion.
04:26 Ceux qui s'opposent aux agriculteurs ont la loi de leur côté.
04:29 Ils s'amusent à détruire des vies, à ruiner des entreprises,
04:32 alors que leur seul souci est de faire pousser des lentilles dans un bocal et quatre pensées sur un balcon.
04:38 Les agriculteurs ont perdu la main sur le terrain des enjeux sociétaux,
04:41 car à bien regarder, ce n'est pas à une guerre de lots que nous assistons,
04:45 mais à une guerre d'opinion avec d'un côté ceux qui doivent irriguer
04:48 pour pouvoir vivre de leur métier et de l'autre ceux dont le seul fond de commerce consiste à les en empêcher."
04:55 Jean-Paul Pelleras.
04:56 - C'est ça, c'est exactement ça, c'est ce que nous vivons maintenant depuis une bonne décennie.
05:02 Et puis j'ai étonnance à dire que ces gens-là ne connaissent de l'outil ni l'usage ni le prix.
05:08 Ils n'ont qu'à venir passer 366 jours par an dans les champs, payer les prêts,
05:12 et payer les salariés, et payer tout ce que coûte une production,
05:15 et après nous en reparlerons, parce que pour l'instant ils parlent depuis Paris des bureaux climatisés,
05:19 ce sont des marchands d'idéaux.
05:21 Il y a une différence entre celui qui génère une induction de l'emploi, de la production,
05:27 et celui qui va prendre des idées, qui est un marchand de raisonnement.
05:30 Voilà, en gros.
05:31 - Ben que demandez-vous Jean-Paul Pelleras ?
05:33 Vous êtes un peu l'un des porte-parole du monde agricole, que demandez-vous ?
05:38 - Écoutez, on demande tout simplement que l'État,
05:40 et ça c'est ce que je demande personnellement quand j'ai été à l'époque syndicaliste et encore aujourd'hui,
05:45 que l'État fasse un choix clair et précis entre le dogme écologiste et le métier d'agriculteur.
05:53 Voilà, c'est tout.
05:54 Il faut qu'aujourd'hui il se positionne clairement, mais il ne se positionne pas.
05:57 - Bien. Merci Jean-Paul Pelleras.
05:59 Nous avons un témoignage, celui de Vanessa qui travaille dans l'agriculture.
06:04 Bonjour Vanessa.
06:05 - Bonjour.
06:06 - Merci, merci vraiment Vanessa.
06:08 Vous dites "avant de travailler dans l'agriculture, d'être ouvrière agricole,
06:12 j'avais une image négative de ce métier".
06:15 - Oui.
06:16 - Et maintenant j'ai changé.
06:18 - Oui, voilà.
06:19 Moi j'ai fait des études dans la protection de l'environnement et la gestion de la faune sauvage.
06:23 - Oui.
06:24 - Et effectivement, je suis une fervente protectrice de la nature, tout ça.
06:31 Et effectivement pour moi, l'agriculteur, polluer, polluer avec les herbans, les pesticides, etc.
06:39 Et donc par nécessité de devoir avoir un salaire pour faire vivre ma famille,
06:45 j'ai pris le premier travail qu'on me proposait et j'ai atterri dans l'agriculture.
06:51 Et franchement, ça a changé ma vision des choses parce que tout ce qui est petit agriculteur,
06:57 on va dire, vraiment familial, voilà, ils aiment leur terre, c'est leur bébé.
07:02 - Le bébé, bien sûr, qui aime la terre.
07:04 - Le grand-père, il faut les bichonner comme un bébé.
07:07 Tout est, voilà.
07:08 Et on a des vignes, des céréales, surtout pour avoir la paille en fait.
07:15 On fait des rotations de cultures pour renourrir la terre sans avoir à mettre des engrais en butant, voilà.
07:24 Puisqu'il y a des cultures qui réenrichissent la terre.
07:27 Donc voilà, c'est tout programmé de façon à ce que la terre soit réenrichie avec des cultures
07:32 et non des apports extérieurs.
07:37 Et en plus, un jour, je tombe, par hasard, je viens chercher du matériel et je tombe sur le gars qui fait le phyto
07:44 et qui lui dit "mais pourquoi tu te mets pas en bio ?
07:48 T'as que des produits qui sont utilisés chez les bios et tout."
07:52 Donc j'ai posé la question à mon patron, il m'a dit "mais moi j'ai pas envie d'être géré par un bureaucrate
07:58 qui ne sait rien, qui ne connaît rien et qui m'imposera des choses stupides quoi.
08:04 Je veux pas avoir à faire tout ou n'importe quoi."
08:07 Donc en gros, il fait du bio.
08:10 Puisque le désirban, un jour, pour plaisanter, on passe devant un champ qu'il venait de semer,
08:17 mais il y avait du denturant partout.
08:21 J'lui ai fait "mais vous allez changer de culture ?"
08:23 J'lui ai fait "mais celle-là, elle va pas vous rapporter grand chose."
08:26 Et puis il me dit "ben oui, écoute, y'aura ce qu'y aura."
08:29 Donc en fait, lui, il cherche pas forcément le rendement,
08:32 il cherche à garder sa terre intacte quoi.
08:35 Voilà, il aime sa terre.
08:37 Et il aime la terre et la nature. Merci Vanessa, merci pour ce témoignage.
08:42 Alors, vous n'êtes pas d'accord, il n'y a aucun problème ici, il y a contradiction.
08:47 Donc vous n'êtes pas d'accord, vous appelez tout simplement, puisque vous êtes libre d'appeler.
08:52 0 826 303 5, je vous mets à l'antenne, vous savez, ça, il n'y a absolument aucun problème.
08:58 Il est 10h43, je précise aussi que le tribunal administratif de Poitiers
09:03 a rejeté le recours des opposants au projet de retenue d'eau.
09:06 Donc la justice administrative valide 16 projets de retenue d'eau dans les Deux-Sèvres,
09:12 évidemment en Seine-Solide, mais aussi la Vienne et la Charente-Maritime.
09:16 Il est 10h44.