La sénatrice de l'Oise Laurence Rossignol, ancienne ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes, était l'invitée de la matinale spéciale de France Bleu Picardie consacrée à la lutte contre les violences intra-familiales le 13 avril 2023.
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00:00 Ils et elles font changer la loi qui définit notamment des peines pour les auteurs de violences intrafamiliales.
00:05 Les parlementaires jouent un rôle important dans la réponse de l'Etat.
00:08 Vous en parlez Céline Autain avec la sénatrice socialiste de l'Oise,
00:11 ancienne ministre de la Famille, de l'Enfance et des Droits des Femmes.
00:14 Bonjour Laurence Rossignol.
00:16 Bonjour.
00:16 On a évoqué il y a une poignée de minutes sur France Bleu-Picardie
00:19 les conséquences psychologiques des violences intrafamiliales sur les enfants.
00:23 Le Sénat vient justement de valider une proposition de loi pour mieux les protéger.
00:27 Vous pouvez nous rappeler ce qui ressort de cette première lecture ?
00:30 En fait dans cette proposition de droit qui venait effectivement de l'Assemblée Nationale
00:34 et qu'on connaît sous le nom de proposition Santiago, du nom de son auteur,
00:38 il est prévu que les parents, le père le plus souvent parce qu'il s'agit des pères,
00:44 qui sont mis en cause ou condamnés pour avoir provoqué et exercé des violences sur la mère de l'enfant
00:54 ou alors sur des violences sexuelles sur leurs enfants, perdent l'autorité parentale.
00:59 Parce qu'on a vu des situations absolument aberrantes
01:03 dans lesquelles des pères condamnés, des hommes violents,
01:08 continuaient d'exercer l'autorité parentale.
01:10 Ça veut dire quoi qu'ils exerçaient l'autorité parentale ?
01:13 Ça signifie qu'ils pouvaient toujours donner leur avis sur est-ce que l'enfant peut être sur la photo de classe,
01:19 est-ce que l'enfant peut partir en colline de vacances,
01:22 qui choisit l'école dans laquelle l'enfant va aller.
01:27 C'est-à-dire qu'on avait des situations qu'on pourrait qualifier de perverses
01:30 avec des hommes violents, abuseurs,
01:34 qui en même temps continuaient d'exercer leur emprise sur l'enfant
01:39 et aussi, et c'est une situation très fréquente,
01:41 utilisaient leur autorité,
01:43 utilisent, c'est pas la situation, elle est malheureusement à l'imparfait encore,
01:46 utilisent leur autorité parentale
01:49 pour continuer d'exercer des pressions et des violences psychologiques sur les mères
01:53 ou aussi pour les retrouver quand elles se cachent.
01:56 - Laurence Rossignol, vous avez aussi poussé un amendement sur les ordonnances de protection qui a été adoptée.
02:01 Qu'est-ce qu'il prévoit ?
02:03 - Dans la dernière proposition de loi,
02:07 j'ai poussé un amendement sur l'ordonnance de protection qui...
02:13 Vous avez une colle là ?
02:15 - Il prévoit notamment qu'un parent bénéficiaire d'une ordonnance
02:18 n'ait pas tenu de communiquer à l'autre parent tout changement de résidence.
02:22 - Oui, là c'est bien.
02:24 J'ai pu tirer l'amendement sur l'ordonnance de protection
02:26 que je présente systématiquement à chaque fois qu'il y a un texte.
02:30 Effectivement, à cette lecture-là a été adoptée la dissimulation de l'adresse.
02:35 C'est très important parce que c'est ce que j'évoquais il y a un instant.
02:38 - Ça a l'air évident mais ce n'était toujours pas le cas, c'est ça ?
02:40 - Ce n'était toujours pas le cas, de même que dès lors que le père exerce l'autorité parentale,
02:45 il peut savoir dans quelle école les enfants sont scolarisés, c'est son droit.
02:49 Et à partir de l'école, il peut retrouver l'enfant et la mère
02:53 et identifier là où la mère se cache avec les enfants.
02:57 Donc on a vraiment une protection supplémentaire à mettre sur les femmes et les enfants
03:03 victimes d'hommes violents ou de pères abusifs.
03:06 - Il est 7h56, vous écoutez France Bleu Picardie.
03:08 Nous sommes avec Laurence Rossignol, sénatrice socialiste de l'Oise,
03:11 ancienne ministre du droit des femmes.
03:13 Il y a un pays européen qu'on prend de plus en plus pour modèle.
03:16 Laurence Rossignol, c'est l'Espagne qui a mis en place des tribunaux spécialisés
03:19 dans les violences intrafamiliales.
03:21 Une mission parlementaire en France doit rendre ses conclusions sur le sujet très bientôt.
03:24 La ministre à l'égalité femmes-hommes Isabelle Longvis-Rom, il est favorable.
03:27 Qu'est-ce que vous en pensez vous ?
03:29 - Moi, je suis très favorable.
03:31 Je pense qu'il faut aujourd'hui casser les murs qu'il y a entre les différents couloirs de justice.
03:39 Pour être plus précise, je dirais que les femmes qui ont besoin à la fois du juge aux affaires familiales
03:46 pour leur séparation ou organiser le droit de visite du père et la garde des enfants
03:53 sont aussi parfois amenées à déposer plainte contre le père,
03:59 le plus souvent pour des faits de violence ou de violence sexuelle
04:02 commis pendant le droit de visite et d'hébergement.
04:05 Et à ce moment-là, elles rentrent dans un labyrinthe judiciaire qui les rend totalement folles.
04:13 Je ne peux pas le dire autrement, tellement c'est violent pour elles psychologiquement.
04:20 Ou ce qui se passe chez un juge n'est pas connu de ce qui se passe chez l'autre juge,
04:24 ou un juge attend que l'autre.
04:25 - Casser les murs entre les juges aux affaires familiales, les juges des enfants,
04:28 le procureur de la République, on le comprend bien.
04:30 Laurence Rossignol, on quitte très rapidement le champ de la définition de la loi
04:36 pour parler du cas Adrien Quatennens, le député du Nord qui fait son retour au sein du groupe
04:40 de la NUPES à l'Assemblée après une condamnation pour violence conjugale.
04:43 Vous y êtes favorable, vous, à ce retour ?
04:45 - Écoutez, non. Je pense que le groupe La France Insoumise à l'Assemblée nationale
04:51 a commis une véritable faute politique.
04:54 - Il a purgé sa peine ?
04:57 - Oui, mais... - Il n'y a pas de pardon possible ?
04:59 - Non, mais nous, les personnalités politiques, on n'est pas exactement soumis aux droits communs
05:04 en matière d'exigence à notre égard, et nous avons notre propre déontologie.
05:09 Lorsqu'il s'agit des violences sur les femmes, plus de 200 000 femmes par an qui en sont victimes en France,
05:15 et il y a eu des propos quand même d'Adrien Quatennens qui étaient vraiment...
05:19 qui prouvaient qu'il n'avait pas tout compris à l'époque,
05:21 et surtout pour un groupe parlementaire, est-ce qu'on peut faire une amnistie politique
05:27 alors que le devoir d'exemplarité qui pèse sur nous devrait être l'élément principal de notre jugement ?
05:34 - Et la réponse est non, on l'entend bien pour vous, Laurence Rossignol.
05:36 Merci beaucoup, je le rappelle, vous êtes sénatrice socialiste de l'Oise, ancienne ministre chargée du droit des femmes.
05:41 Merci d'avoir répondu aux questions France Bleu. Picardie ce matin, bonne journée.
05:44 - Merci de votre invitation, bonne journée.