C’est l’histoire d’un homme au destin tout tracé… jusqu’à ce que tout finisse par dérailler. D’officiel NBA respecté – avec 772 matchs de saison régulière et 20 matchs de playoffs arbitrés en 13 ans au compteur - Tim Donaghy est passé à suspect interrogé par le FBI puis criminel condamné dans une sombre affaire de paris en 2007. Une carrière et une vie fichue en l’air par l’addiction au jeu.
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00:00 C'est l'histoire d'un homme au destin tout tracé, jusqu'à ce que tout finisse par dérailler.
00:03 D'officiel NBA respecté, avec 772 matchs de saison régulière et 20 matchs de play-off arbitrés en 13 ans au compteur,
00:09 Tim Donaghy est passé à suspect interrogé par le FBI, puis criminel condamné dans une sombre affaire de Paris en 2007.
00:16 Sa carrière et sa vie ont littéralement été fichues en l'air par son addiction au jeu.
00:20 Avec son père Jerry Donaghy arbitre NCAA et son oncle Billy Hawks arbitre NBA,
00:24 c'est tout naturellement que Tim Donaghy s'est dirigé vers le sifflet.
00:27 Le comté du Delaware, où il est né, est un véritable réservoir dans le domaine.
00:31 Steve Javie, Ed Malloy, Joe Crawford, Mike Callahan, Ed Middleton ou encore Tom Washington en sont originaires.
00:37 Malloy, Crawford et Callahan sont d'ailleurs passés par le même lycée que lui.
00:40 A l'école, Tim est un peu le clown de la classe, celui qui va déclencher l'alarme à incendie pour faire rire les copains.
00:45 Entouré de quatre frères, il grandit dans une famille compétitive où il ne vaut mieux pas ramener un trophée de second.
00:50 Un jour d'ailleurs, il en balance un dans l'eau par la fenêtre de sa voiture,
00:52 alors qu'il traverse le pont Walt Whitman de Philadelphie pour rentrer à la maison.
00:56 Et ouais, pas question de mettre ça sur la cheminée.
00:58 Lui-même bon joueur de basket, il ne rate pas non plus un seul match des Sixers,
01:02 époque Moses Malone et du le serving à la télé.
01:04 Il fait ensuite ses armes en tant qu'arbitre de high school pendant cinq ans en Pennsylvanie,
01:08 avant d'être sélectionné pour intégrer la CBA, où il officie pendant quatre ans.
01:11 Entre temps, il rencontre sa future femme Kimberly lors d'un vol pour Chicago.
01:14 Elle est hôtesse de l'air, il la fait rire pendant toute la durée du voyage,
01:18 ils se marient tous les deux sans personne sur une plage pendant les vacances.
01:21 L'histoire est belle, mais ça ne va pas durer.
01:23 Au bout de quatre ans en ligue mineure donc, la NBA l'appelle.
01:26 Il est pris. On est en 1994, il a 27 ans et son rêve se réalise.
01:30 Tout de suite, néanmoins, sa femme, comme elle l'a confié plus tard en interview,
01:34 perçoit chez lui un changement d'attitude.
01:36 Le 9 novembre 1994, il arbitre son tout premier match NBA.
01:39 Indiana reçoit Houston.
01:41 La fin de match est serrée et il siffle une faute offensive à Reggie Miller sur une feinte de tir à trois points,
01:45 face à Kimura Johan dans le corner.
01:46 Scandale, les fans sont furieux et commencent à jeter tout ce qu'ils peuvent sur le terrain.
01:50 Le match est stoppé pendant 20 minutes avant que les dernières secondes ne puissent être enfin jouées.
01:54 Les Rockettes s'imposent 109-104 et sur le chemin du vestiaire,
01:57 l'arbitre en chef, cassette du match en main, lui lance
01:59 "On va très vite savoir si tu vas réussir dans cette ligue."
02:02 Coup de pression donc devant la télé de la chambre d'hôtel,
02:04 mais son supérieur lui donne finalement raison sur le fameux call.
02:07 Au fil des années, il acquiert une solide réputation dans le milieu.
02:10 Ses résultats en termes de pourcentage de coups de sifflet corrects le classent parmi les meilleurs de la ligue.
02:13 En parallèle, son nouveau train de vie fait peu à peu apparaître le visage d'un homme au parfait profil du joueur compulsif.
02:19 Fan de golf, il s'inscrit au Country Club de Westchester en Pennsylvanie.
02:22 La nouvelle maison familiale est construite non loin de là.
02:24 Au club, il se crée un nouveau cercle d'amis.
02:26 La bande se retrouve trois à quatre fois par semaine et pas que pour jouer au golf.
02:30 Sur le green, sa pari, sa picole, s'affile même parfois au casino Borgata d'Atlantic City
02:35 pour s'installer à une table de blackjack.
02:37 Dans ces cas-là, Donaghy se vise une casquette sur la tête pour éviter les regards et les caméras.
02:41 Et oui, car il est bien écrit noir sur blanc dans le contrat des arbitres
02:44 qu'il est interdit de placer le moindre pari que ce soit au Country Club ou au casino.
02:48 Chez lui, il a aussi une grande table de poker au sous-sol.
02:51 J'adorais ça.
02:52 Tous les jours de ma vie, c'était soit golf, soit jeu de cartes,
02:55 paris sur des matchs universitaires de basket, de foot US, du baseball, du hockey.
02:59 C'était un homme célibataire marié avec quatre enfants, résume sa femme.
03:03 Et puis un beau jour, après un 18-roues, son pote Jack Concanon,
03:06 avec qui il brasse déjà des milliers de dollars en pariant sur d'autres sports,
03:09 lui demande deux-trois tuyaux pour les matchs du soir en NBA.
03:12 Donaghy regarde les codes dans le journal,
03:13 s'informe sur les arbitres assignés aux rencontres en question et lui donne trois vainqueurs.
03:17 Bingo, trois sur trois, Concanon est aux anges.
03:19 Et il lui dit "mais c'est si facile que ça".
03:21 Ensuite, c'est vite l'effet boule de neige.
03:23 Donaghy s'enfonce peu à peu jusqu'à placer, toujours avec Jack, des paris sur ses propres matchs.
03:27 On est en mars 2003, là, plus de quatre ans avant que le scandale n'éclate au grand jour.
03:31 Loin d'être dans le besoin, Donaghy se laisse porter par le frisson du jeu,
03:34 l'amour du risque, l'appât du gain.
03:36 Parce que oui, il le dit lui-même, cet argent, il n'en avait pas besoin.
03:39 Entre son salaire, les bonus de play-off et ses investissements en bourse,
03:42 il gagnait ainsi près de 400 000 dollars par an.
03:44 En interview, il explique qu'au bout d'un moment, pris de remords,
03:46 il a dit à son pote Jack, qui bosse lui dans les assurances, qu'il fallait arrêter.
03:49 Du coup, ils arrêtent, puis reprennent, puis arrêtent à nouveau.
03:52 Sauf que problème, Concanon, sans que Donaghy soit au courant, selon ce dernier,
03:56 faisait indirectement passer les infos à d'autres personnes,
03:59 qui profitaient donc eux aussi de ces tuyaux.
04:00 Et là, on ne parle pas de parieur du dimanche,
04:02 parce que parmi eux, on avait notamment Jimmy "The Ship" Battista.
04:05 Lui, c'était une sorte de courtier, appelé "mover".
04:08 En fait, ce dernier place des paris au nom de ses clients,
04:10 auprès de bookmakers de différents types, dans le monde entier, légaux ou non.
04:13 Il bosse également avec un groupe de bookmakers de Philadelphie,
04:16 appelé "The Animals", qui possède son propre site appelé "Playasap",
04:20 et auprès de qui Concanon dépose ses paris.
04:22 Et d'un coup, ce n'est plus 100, 200 ou 500 dollars que Concanon mise sur ses matchs,
04:26 mais plusieurs milliers de dollars.
04:27 Lui et Tim misaient entre 4000 et 5000 billets verts par match à l'époque.
04:31 Battista et Peter Ruggieri, patron des Animals,
04:34 mais également membre du même country club que Donaghy,
04:36 découvrent le poteau rose, et décident de les suivre dans leur pari,
04:39 en misant 10 à 20 fois plus.
04:41 Il y a rapidement des millions de dollars en jeu chaque soir.
04:43 Donaghy devient une machine à cash.
04:46 Littéralement.
04:46 "Est-ce que je pensais qu'il truquait les matchs ?
04:48 Oui, mais je m'en foutais, c'était de superbes infos.
04:50 De 2003 à 2007, on n'a pas manqué un seul match.
04:52 On avait un pari sur chacun des matchs qu'il arbitrait."
04:55 a affirmé un ancien client des Animals, resté anonyme à ESPN en 2020.
04:59 "Si vous regardiez les stats, vous pouviez voir qu'il sifflait plus de fautes à l'équipe contre qui il avait parié,
05:03 et moins de fautes à l'équipe qui l'avait donné gagnante le soir-là.
05:06 C'était évident." a ajouté un autre.
05:07 Si Donaghy et Concanon ne parient plus, c'est donc une très belle recette qui disparaît.
05:11 Puis là, on a omis un détail en vous présentant les Animals.
05:13 Battista a fréquenté le même lycée que Donaghy,
05:16 et les deux avaient un ami en commun au Cardinal O'Hara High School,
05:19 Tommy Martino.
05:20 Battista et Donaghy ne s'apprécient pas,
05:22 mais leur amitié commune avec Martino, très proche de Donaghy, fait qu'ils se connaissent.
05:25 En 2006, il y a fracture chez les Animals.
05:27 Battista, Donaghy et Martino se retrouvent au restaurant de l'Hôtel Marriott de l'aéroport de Philadelphie,
05:31 le 12 décembre 2006.
05:33 Plusieurs versions ont été données concernant ce dîner.
05:35 D'un côté, Donaghy affirme qu'il s'est retrouvé dans une sorte de guet-apens.
05:38 Martino l'aurait appelé, en lui disant qu'il aimerait le voir lors de son passage à Philadelphie.
05:41 Il aurait accepté, une voiture serait venue le chercher,
05:44 avec non seulement Martino, mais également Battista à l'intérieur.
05:47 Ça aurait été la douche froide pour Donaghy.
05:49 Il affirme que Battista lui aurait fait peur,
05:50 en lui disant que si les infos ne continuaient pas à tomber,
05:52 il le dénoncerait à la NBA,
05:53 ou en virait quelqu'un rendre visite à sa femme et ses enfants en Floride,
05:56 où la famille s'est installée, là encore, aux Abordant Country Club.
05:59 Il se serait ensuite vu proposer un deal,
06:01 2000$ dans la poche par match gagné, sans pénalité, en cas de pari perdant.
06:05 C'était une manière, pour Battista, cocaïnomane et addict à l'oxycodone,
06:08 de rembourser ses dettes, selon Donaghy,
06:10 qu'il décrit comme un pauvre type qui passe son temps à mentir.
06:12 Battista affirme lui que c'est Donaghy lui-même qui a demandé à le voir,
06:15 qu'il était ravi de gagner cet argent, et qu'il n'y avait jamais eu de menace.
06:18 La version de Martino, ami proche de Donaghy, concorde plutôt avec celle de Battista sur ce point.
06:23 Il donne même un détail supplémentaire,
06:24 expliquant que Donaghy l'a invité à le suivre aux toilettes du restaurant,
06:27 après le coup de pression de Battista.
06:28 Et alors qu'il pensait que Donaghy serait sous le choc d'apprendre que Battista était au courant de ses paris secrets,
06:33 l'arbitre lui aurait plutôt fait part de son étonnement et de sa colère
06:36 vis-à-vis du montant des sommes encaissées par son partner in crime, Jack Concanon.
06:39 Version 1 ou version 2, une chose est sûre, le deal se met en place entre les trois protagonistes.
06:43 Donaghy envoie les infos à Martino, qui les transmet à Battista.
06:46 Pour ça, les deux utilisent un code.
06:48 Martino a deux frères, Johnny et Chuck.
06:49 Le premier a déménagé de Pennsylvania, le second est toujours sur place.
06:52 Ce sera donc Johnny pour l'équipe à l'extérieur, et Chuck pour l'équipe à domicile.
06:56 En tout, Battista a entre 2 et 3 millions de dollars de placés pour différents clients sur les matchs chaque soir.
07:01 - Il y a toujours des moments où t'es dans ta chambre d'hôtel et où tu te dis
07:04 "je ne devrais pas faire ça, c'est pas bien, je vais finir par me faire chopper".
07:07 Mais on gagne 70-80% du temps.
07:10 Le lendemain même de leur accord, Boston joue à Philadelphia.
07:12 Donaghy est de service.
07:13 La veille, il a déjà arbitré avec Derek Stafford,
07:15 qui lui avait glissé qu'il avait le sentiment que Mochix, coach des Sixers, ne savait pas ce qu'il faisait,
07:20 et qu'il n'avait pas le cœur à coacher une équipe qui tanquait.
07:22 Il indique donc à Battista, via Martino, de varier sur Boston.
07:25 En début de 3ème quart, Donaghy siffle 2 fautes au meilleur scoreur des Sixers,
07:28 André Goddala, en moins d'une minute, et alors que l'écart n'est que de 2 points.
07:32 Higgy score 2 minutes après.
07:33 Quand il revient, Boston a creusé un écart de 12 points, et finit par s'imposer de 20.
07:37 Le 20 décembre, Seattle reçoit Dallas.
07:39 Donaghy siffle 11 fautes d'affilée contre Seattle,
07:41 dont la dernière faute de la soirée à 23 secondes de la fin.
07:44 David Harris rentre ses deux lancers, victoire des Mavs, de 8 points.
07:47 Le 31 décembre à Charlotte, il siffle 14 fautes au Bobcats,
07:50 et 5 au Timberwolves, qui s'imposent 102 à 96.
07:53 À Dallas, le 30 janvier 2007, il siffle 1 faute à l'équipe locale,
07:57 et 12 contre Seattle, dont 6 d'affilée, quand l'écart était de 13 points au moins.
08:01 Les Mavs gagnent de 20 points.
08:02 5 février à Miami, il siffle 12 fautes contre Charlotte, et 2 contre le Heat.
08:06 Miami s'impose de 20 points.
08:07 15 février à Toronto, il siffle 4 fautes au top-scorer des Nets, Vince Carter,
08:11 dont la dernière sifflait à l'opposé du ballon, et alors que les Raptors menaient de 3 points.
08:15 Victoire finale, 120 à 109 pour les Raptors.
08:18 Le 26 février, il siffle 12 fautes au Heat au Madison Square Garden,
08:21 contre seulement 4 pour l'Enix, qui l'emporte 99-93.
08:24 Son cachet passe un peu plus tard de 2000 à 5000 dollars par Paris gagnant,
08:27 car Donaghy est parfois si sûr de lui sur certains matchs que Batista parie 2 à 3 fois plus.
08:32 Martino lui amène même parfois le cache directement à la salle,
08:35 dans un sac en papier craft après la rencontre.
08:37 Et les deux finissent ensuite la soirée en charmante et payante compagnie.
08:41 C'est non sans une certaine fierté que Donaghy explique,
08:43 dans le documentaire Netflix qui lui est consacré,
08:45 que lui et Martino jouaient alors les Rockstars dans les plus beaux clubs de strip-tease locaux.
08:50 A la maison, il y a deux teams, selon son ex-femme.
08:52 Le team qui rentre heureux le soir,
08:54 et le team qui dès le pas de la porte, jette son sac par terre,
08:56 et part s'enfermer dans sa chambre, passer des coups de fil pendant des heures.
08:59 En s'occupant de son linge, elle trouve un jour une énorme liasse de billets,
09:02 dans la poche de sa veste officielle.
09:04 Lorsqu'on lui demande pourquoi elle n'a jamais ni compté l'argent,
09:06 ni confronté son mari sur la situation, elle répond qu'elle avait tout simplement peur.
09:10 Dernier exemple, le 14 mars, Donaghy siffle 4 fautes consécutives,
09:13 contre les Outsiders d'Indiana dans le quatrième,
09:15 et alors que les quarts n'étaient que de 6 points face aux Wizards,
09:18 qui finissent par s'imposer, 112 à 96.
09:20 Les exemples sont nombreux, mais ne constituent pas pour autant des preuves irréfutables.
09:23 Donaghy le sait, et s'il a avoué le fait d'avoir parié,
09:26 il s'est toujours publiquement défendu d'avoir truqué la moindre rencontre.
09:29 Il a pour ça des arguments à faire valoir,
09:31 et estime n'avoir fait qu'utiliser les informations qu'il pouvait récupérer en interne,
09:35 en appliquant des consignes officieuses, venant de la NBA elle-même.
09:38 "Les matchs truqués, je ne sais pas.
09:40 Mais manipulés, oui.
09:41 J'ai fait ça dans le respect des règles.
09:42 Je sifflais ce que la NBA voulait que je siffle."
09:44 Il insiste sur le fait qu'il n'envoyait pas les stars sur le banc pour les empêcher de jouer,
09:48 mais qu'il choisissait les vainqueurs selon les relations qui existaient entre les arbitres et les joueurs,
09:51 les arbitres et les coachs, les arbitres et les propriétaires,
09:53 et selon ce qui s'était dit lors des réunions du matin entre arbitres,
09:56 ce sur quoi l'accent allait être mis ce soir-là,
09:58 et quelle équipe s'allait avantager ou désavantager.
10:01 Cela peut aussi être un préparateur physique, qui donne une info sur l'état de santé d'un joueur.
10:04 Deux à trois fois par semaine, en saison régulière,
10:06 et après chaque match en play-off, il explique que la NBA envoie des points
10:09 sur lesquels les arbitres devront se montrer attentifs.
10:12 Le traitement de faveur accordé aux stars, sorte de points du règlement non écrit,
10:15 fait aussi partie des points soulevés par Donaghy,
10:17 pour illustrer la singularité du métier d'arbitre dans la grande ligue.
10:19 Il explique qu'en gros, en NCA, tu arbitres en appliquant le règlement, tel qu'il est écrit,
10:23 et en NBA, tu arbitres les personnalités, et les noms sur le maillot.
10:26 Il cite pour ça deux exemples vécus au cours de sa carrière.
10:29 En 1996, il arbitre un Sixers Bulls, à Philly.
10:32 La consigne, surveiller les marchés sur les spin moves.
10:34 Michael Jordan en fait un, Donaghy le siffle, Phil Jackson fulmine.
10:37 Donaghy lui dit qu'il n'a fait qu'appliquer les consignes,
10:40 mais le Zen Master lui répond "oui, ils veulent que ce soit sifflé",
10:42 mais certainement pas pour lui.
10:44 Debout, à côté, MJ le fusil du regard.
10:46 Et même dans le vestiaire, après le match, l'un de ses collègues lui confirme,
10:49 ils veulent qu'on siffle ça, mais ne le siffle pas à lui.
10:52 Autre exemple plus tard, avec Kobe Bryant, et toujours avec Phil Jackson,
10:55 qui a, un jour, envoyé un DVD de 25 actions, datant des deux matchs précédents,
10:59 où aucune faute n'était sifflée sur Kobe.
11:01 Ce soir-là, Donaghy explique avoir donné les Lakers gagnants,
11:04 certain que Bryant passerait beaucoup de temps sur la ligne des lancers francs.
11:07 Début 2007, Donaghy raconte qu'Alan Iverson avait menacé Steve Javie lors d'un match.
11:11 Contrairement à ce qu'auraient souhaité les arbitres,
11:12 Iverson, tout de même condamné à une amende de 25 000$,
11:15 n'avait pas été suspendu par la NBA.
11:17 Alors le matin du match suivant, pour Denver, Donaghy et ses deux collègues
11:19 décident de siffler tous les portées de balles de l'arrière-star ce soir-là.
11:23 Il dit à Martino de parier contre Denver,
11:25 et appelle Javie pour lui dire "regarde, on va te rendre justice".
11:27 Un mois plus tard, il arbitre un Miami-New York à Big Apple,
11:30 aux côtés de Derek Stafford, pote avec Azaia Thomas,
11:32 et qui ne pouvait pas voir Pat Riley en peinture.
11:34 Batista mise sur Lennox et bingo.
11:37 Un mois plus tard encore, une nouvelle anecdote racontée par Donaghy.
11:39 Orlando joue à Miami, et son collègue Joe Crawford
11:42 s'est embrouillé avec l'un des journalistes locaux.
11:44 Le propriétaire de la franchise ne souhaite qu'une chose,
11:46 que Crawford soit viré.
11:47 Il donne Orlando gagnant.
11:48 Cashing.
11:49 Ok team, mais parle-nous du rôle du subconscient dans tout ça.
11:52 Arbitrer un match sur lequel on parie, le conflit d'intérêts est tellement gros
11:55 qu'il a dû avouer, certes un peu poussé par le FBI,
11:58 qu'il était possible que l'argent en jeu ait au minimum inconsciemment influencé ses coups de sifflet.
12:03 Pour Donaghy, David Stern voulait en priorité mettre en avant certains joueurs et certaines équipes.
12:06 Son produit.
12:07 Il explique s'être un peu résigné à être le meilleur arbitre possible,
12:10 car il voulait que l'NBA se dise qu'il faisait du bon boulot,
12:12 pour ensuite être sélectionné pour les playoffs,
12:13 et ainsi impocher le plus d'argent,
12:15 mais aussi gagner en respect au sein de la ligue.
12:17 En parlant de playoffs, vous vous souvenez du fameux Game Six entre les Kings et les Lakers en 2002 ?
12:21 Sacramento mène alors 3-2 dans la série,
12:23 et les Lakers s'imposent au terme de ce qui a été, selon Donaghy,
12:26 le match le moins bien arbitré de l'histoire.
12:28 Il a d'ailleurs une anecdote sur l'un des arbitres, le vétéran Dick Bavetta.
12:31 Il a dit ouvertement à beaucoup d'entre nous qu'il était le go-to guy de l'NBA pour le Game Six,
12:35 pour faire en sorte qu'il y ait un Game Seven.
12:37 Tu as 3 arbitres qui font énormément d'erreurs,
12:39 et en plus d'ailleurs ils sont reconduits pour les finales,
12:41 avec un nouveau bonus de 20 000$ ?
12:42 Bavetta faisait aussi partie du corps arbitral lors du fameux Game Six,
12:45 entre les Lakers et les Blazers, réputés comme potentiellement truqués en 2000.
12:49 Pour Donaghy, Draymond Green n'aurait pas été non plus suspendu pour le Game Five des finales 2016,
12:53 si les Warriors avaient été menés.
12:54 Personne ne vient te dire directement "truc ce match",
12:56 ou "on a besoin que les Lakers soient là pour les audiences".
12:59 Mais ils te montrent des actions de la série ou les choses sur lesquelles tu concentrais.
13:02 Et c'est toujours en faveur de l'équipe menée.
13:04 Ils te montraient 10 actions, et sur les 10, 8 c'était pour aider l'équipe menée.
13:08 Un peu moins d'un mois après le Sacre des Spurs,
13:10 Tim Donaghy donne sa démission, le 9 juillet 2007.
13:13 Car manque de bol, les pics donnés à Batista atterrissaient également dans les mains de la mafia,
13:17 et plus précisément dans celles de la famille Gambino.
13:20 Des mises énormes, des codes qui s'envolent,
13:22 et des millions de dollars qui rentrent dans les coffres de la mob,
13:24 qui ont attiré l'œil du FBI évidemment.
13:26 C'est lors d'un interrogatoire qu'un homme de main va lâcher la bombe.
13:29 On a un arbitre dans la poche.
13:31 Il balance trois noms aux enquêteurs.
13:32 Tim Donaghy, James Batista et Thomas Martino.
13:35 Game over.
13:36 Ensemble, leur bilan aurait été de 37 paris gagnants pour 10 perdants,
13:39 sur 47 rencontres au total depuis l'accord.
13:41 "Qu'est-ce que vous faisiez au téléphone avec Donaghy 9000 minutes par mois ?"
13:44 demande le FBI à Martino,
13:45 avant de lui remettre une citation à comparaitre devant un grand jury la semaine suivante.
13:49 Batista sort de Désintox, et va lui nier en bloc toutes les accusations,
13:52 quand le FBI vient frapper à sa porte.
13:54 Tim est évidemment en pleine partie de golf lorsque Tommy le prévient.
13:56 Il se retrouve alors en position fétale sur son lit,
13:58 à expliquer à sa femme qu'il a fait quelque chose de très mal.
14:01 Elle comprend qu'il parie sur ses propres matchs,
14:02 et attendra septembre pour demander le divorce.
14:04 Lui sait que c'est terminé.
14:05 Il ne dort plus, ne mange plus.
14:07 Avec son avocat John Loro, il coopère avec le bureau du procureur dans les 48 heures.
14:11 Le 20 juillet, le scandale éclate publiquement,
14:13 suite à un article publié par le New York Post.
14:15 Son visage est partout, sa maison est encerclée de médias divers et variés,
14:18 et même survolé par des hélicoptères.
14:19 Le 15 août, il plaide coupable de complot,
14:21 en vue de commettre une fraude électronique,
14:23 et transmission d'informations pour des paris dans le cadre d'un commerce inter-étatique.
14:26 Il admet avoir parié sur plus de 100 matchs entre 2003 et 2007.
14:29 Il reconnaît également souffrir d'une grave dépendance au jeu d'argent,
14:32 pour laquelle il prend des antidépresseurs.
14:34 Relâché contre une caution de 250 000 dollars,
14:36 il est mis à l'amende, à hauteur de 500 000 dollars.
14:38 La NBA lui réclame alors 1,4 million de dollars en dédommagement,
14:41 dont 577 000 dollars par rapport à ses salaires,
14:43 et autres avantages des quatre précédentes saisons,
14:45 plus d'importants frais de justice,
14:47 et d'autres dépenses liées à une enquête interne.
14:49 Son avocat lui obtient que la sanction ne soit appliquée que sur une saison.
14:51 Après plusieurs mois de délai, il est finalement condamné à 15 mois de prison,
14:54 suivi de 3 mois de liberté surveillée, le 29 juillet 2008, au tribunal de New York.
14:58 Martino, relais téléphonique entre Donaghy et Battista, plaide également coupable,
15:02 et prend lui un an et un jour pour fraude électronique.
15:04 Battista, lui, ne plie pas.
15:06 Avec son avocat, il veut pousser jusqu'à un procès contre la NBA,
15:08 où chaque arbitre serait appelé à la barre.
15:10 Il explique qu'on lui aurait ensuite proposé un deal,
15:12 plaidé coupable uniquement pour paris illégaux.
15:15 Il aurait accepté, et pris à son grand soulagement seulement 15 mois.
15:18 Je me suis dit "Putain de merde, David Stern contrôle tout le monde !"
15:21 Dans une enquête interne commandée par la NBA auprès de l'avocat Larry Pedowitz,
15:25 seuls 17 matchs de la saison 2006-2007 sont passés au crible.
15:28 Après 14 mois de recherche, il indique que seul le match Pistons-Nets du 16 décembre 2006
15:32 peut poser question quant au call de Donaghy.
15:34 Conclusion, nous n'avons découvert aucune preuve que la ligue ait demandé aux arbitres
15:37 d'orienter les matchs de manière à favoriser certaines équipes ou certains joueurs.
15:41 Par contre, le rapport de 133 pages met en lumière que plus de 50 arbitres
15:44 ont eux aussi violé le règlement en pariant de l'argent au golf ou au casino.
15:47 Donaghy ajoute que parfois, lui et ses collègues prenaient les paris sur celui qui sifflera
15:51 la première faute d'un match et perdre 20, 30, voire 50 dollars,
15:54 ou bien devoir payer le resto de l'après-match.
15:56 Le FBI avait d'ailleurs déjà des pistes sur le sujet,
15:58 et surveillait de près 10 arbitres pour jeux d'argent et paris sportifs.
16:01 Les enquêteurs avaient même l'intention de renvoyer Donaghy en NBA en lui posant un micro
16:05 pour aller à la pêche aux infos, ni vu ni connu.
16:07 Mais la fuite dans la presse que l'avocat de Donaghy, attribuée à demi-mot à David Stern, l'en a empêché.
16:11 C'est dès juin 2007 que la NBA a été mise au courant de l'affaire par Phil Scala,
16:15 en charge de l'enquête pour le FBI.
16:16 Six jours plus tard, la ligue renégociait son contrat télé pour 7,4 milliards de dollars,
16:21 ce qui a aussi fait lever quelques sourcils.
16:23 Et un mois après, le 20 juillet, le journaliste du New York Post Murray Weiss,
16:27 qui n'a jamais voulu donner sa source, révélait l'affaire.
16:29 Pour l'euro, un procès aurait été un bain de sang pour la NBA.
16:32 Il a aussi été révélé plus tard que Stern avait proposé un job à Scala,
16:35 soupçonné par Battista de travailler avec la NBA pendant l'enquête.
16:38 En 2020, ESPN a dévoilé les résultats de sa propre enquête,
16:40 réalisée elle sur les 40 matchs qui ont suivi l'accord entre Donaghy,
16:43 Battista et Martineau en 2006.
16:45 Sur les 40 matchs, 10 ont été écartés d'office car ils se sont terminés en blowout,
16:49 d'un côté ou de l'autre.
16:50 Sur 23 des 30 autres matchs, les coups de sifflet de Donaghy ont favorisé l'équipe donnée gagnante,
16:53 soit 77% du temps.
16:55 Sur 3 matchs, ces coups de sifflet sont allés en majorité à l'autre équipe.
16:58 Sur les 4 matchs restants, c'était du 50/50.
17:00 ESPN donne alors la probabilité que ce déséquilibre se produise au hasard.
17:03 6155 contre 1.
17:05 Et ouais, Battista surnommait Donaghy Elvis,
17:08 car Elvis était le King of Rock et Tim était le King du trucage de match.
17:12 Libéré après 11 mois à la prison fédérale de Pensacola en Floride,
17:15 Donaghy devait ensuite compléter sa peine dans un centre de réhabilitation à Tampa,
17:19 où il devait être traité pour sa dépendance du jeu, comme ordonné par le tribunal.
17:22 Mais surpris dans un centre de rééducation, alors qu'il était censé être au travail en août 2009,
17:26 il est arrêté et envoyé à la prison du côté d'Hernando.
17:28 Son ex-femme et son avocat ont insisté sur le fait qu'il était autorisé à se rendre au centre
17:32 pour son genou blessé suite à une agression en prison.
17:34 Il explique avoir dû intégrer un gang blanc pour se protéger.
17:37 Mais ce n'est qu'en novembre 2009 qu'il a finalement définitivement retrouvé sa liberté.
17:40 Depuis, il n'a jamais admis publiquement avoir truqué des matchs durant sa carrière.
17:43 Et ça, il ne le fera jamais, pas même sur son lit de mort, selon son ex-femme.
17:47 Si les résultats des matchs étaient altérés, selon lui, c'était uniquement de par la volonté de la NBA.
17:52 Il raconte qu'une fois, après trois paris perdus d'affilée,
17:54 il avait peur de retrouver son chien étranglé ou pendu à un arbre en rentrant chez lui,
17:58 car Batista était furieux.
17:59 Il pense aussi que Stern, qui avait à l'époque parlé de trahison le concernant,
18:02 voulait qu'il disparaisse, car son avocat avait fait ressortir des choses qui posaient problème à la NBA.
18:07 "Croyez-moi, s'ils avaient pu me condamner pour des matchs truqués, ils l'auraient fait."
18:10 Il réfute aussi l'argument selon lequel il était un criminel isolé dans la ligue, comme Stern l'a décrit.
18:14 Il explique par ailleurs qu'un repenti de la famille Colombo,
18:17 l'une des cinq grandes familles mafieuses de New York,
18:19 a déclaré sous serment que trois arbitres NBA faisaient déjà passer des infos dans les années 90.
18:24 Il insiste sur le fait que la plupart des arbitres parient qu'ils ne truquent pas les matchs,
18:27 mais qu'il y a beaucoup de subjectivité selon les relations positives ou négatives
18:31 entre les différents protagonistes sur le terrain.
18:33 Il cite en exemple le fameux bif entre Chris Paul et Scott Foster.
18:36 Et Scott Foster, parlons-en, l'arbitre était un proche de Donaghy.
18:39 Ce dernier le considérait comme son frère, et leurs épouses respectives étaient aussi amis.
18:43 Durant la saison 2006-2007, 134 appels ont été comptabilisés entre eux,
18:46 avant et après les matchs, parfois même à la mi-temps.
18:49 Donaghy pourtant l'assure, Foster, innocenté par les enquêtes du FBI et de Bedowitz,
18:53 n'était au courant de rien.
18:54 Si Donaghy a toujours refusé d'admettre l'utilisation du terme "match truqué" en public,
18:58 il aurait néanmoins vidé son sac à quelques personnes en privé.
19:00 Martino a révélé pour sa part que Tim lui aurait lâché qu'il pouvait influencer les résultats des matchs de six points,
19:05 d'un côté ou de l'autre.
19:06 Avant de valider la publication de son livre "Personal Fall" en 2009,
19:09 l'agente publicitaire Sean Vercher lui aurait, elle, demandé de se soumettre à un détecteur de mensonge.
19:13 Il aurait répondu que ses avocats lui avaient déconseillé de le faire.
19:15 Vercher lui aurait demandé pourquoi, ce à quoi il aurait répondu "parce que j'échouerais au test".
19:20 Dans un autre témoignage également recueilli par ESPN,
19:22 un parieur expliquait que Donaghy disait qu'il aimait siffler une défense illégale
19:26 dès la première minute du match pour forcer l'équipe contre laquelle il avait parié
19:29 à être un peu moins agressif défensivement.
19:31 A ce même parieur, il aurait confié regretter de ne pas avoir demandé plus d'argent,
19:34 alors que ceux qui profitaient de ses talents pariaient des millions.
19:36 Et là, la question se pose, s'est-il mis plus d'argent dans la poche que ce qu'il ne veut bien avouer ?
19:40 C'est bien possible.
19:41 A la fin du documentaire "Untold, Operation Flagrant Fall" de Netflix,
19:45 la question lui est posée, deux fois.
19:46 La première fois, il répond "je ne sais pas",
19:48 et la deuxième fois, le "je ne sais pas" devient "absolument pas".
19:51 Mystère donc.
19:52 Et puis enfin, l'un de ses anciens amis, Aaron Cooley, a tout simplement déclaré
19:56 que Donaghy lui avait directement avoué truquer les matchs qu'il arbitrait.
20:00 Depuis sa sortie de prison, il a travaillé dans le conseil aux parieurs Loisir,
20:02 dans un centre spécialisé dans la dépendance aux jeux d'argent,
20:05 et même comme arbitre dans la ligue professionnelle américaine de lutte, MLW, en 2021.
20:09 Aujourd'hui, ses investissements immobiliers lui assurent la majorité de ses revenus.
20:12 Il a aussi eu à nouveau affaire avec la police en 2017,
20:14 quand il a été arrêté pour "voie de fait grave".
20:16 Persuadé que sa fille de 19 ans se droguait chez un ami,
20:19 il s'est pointé chez ce dernier et l'a menacé avec un marteau.
20:22 Il a été relâché contre une caution de 5000 dollars.
20:24 Du côté de la NBA, le scandale a fait évoluer certaines règles concernant les arbitres.
20:27 Dès 2007, ils ont été autorisés à placer des paris non sportifs.
20:30 L'annonce de l'identité des arbitres d'un match a été déplacée de 90 minutes avant la rencontre,
20:34 au matin même, pour réduire la valeur de l'information pour les parieurs.
20:37 Une vérification plus approfondie des antécédents des personnes embauchées a également été mise en place.
20:41 En mai 2018, la Cour suprême des Etats-Unis a aboli une loi interdisant les paris sportifs
20:45 dans 46 des 50 états américains.
20:47 La NBA n'a pas perdu de temps.
20:48 Dès le mois de juillet 2018, son nouveau commissionneur, Adam Silver,
20:51 annonçait un partenariat d'au moins 25 millions de dollars sur 3 ans
20:54 avec le groupe d'hôtel Casino MGM Resorts International, un des leaders du monde du jeu.
20:58 Parier sur des matchs où des joueurs font désormais partie du quotidien de nombreux fans
21:01 et les décisions arbitrales, ou l'absence de décisions arbitrales,
21:04 n'ont peut-être jamais fait autant parler qu'aujourd'hui.
21:06 Chaque coup de sifflet étant scruté très très près.
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21:13 mais aussi à celle du 6e homme pour avoir deux visions complémentaires de la NBA.
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