Aujourd'hui, Juliette revient sur un classique de la littérature française avec Mitsou de Colette.
Retrouvez toutes les chroniques de Juliette Arnaud dans « C'est encore nous ! » sur France Inter et sur https://www.franceinter.fr/emissions/la-chronique-de-juliette-arnaud
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AmusantTranscription
00:00 Juliette, vous avez choisi Colette, c'est votre autrice préférée, je pense.
00:04 Vous avez tout lu, je pense, de Colette.
00:07 Et vous avez relu, donc cette fois-ci, Mitsu ou Comment l'esprit vient aux filles.
00:11 Si, Denis, Gabrielle, Colette, nom de scène et de plume, Colette est née il y a 150 ans.
00:17 Et je ne voulais pas manquer de participer aux célébrations.
00:19 Restait un casse-tête lequel de ces livres choisir ? Parce que moi je les aime tous
00:22 les livres de Colette, c'est comme mes enfants.
00:23 C'est le choix de Sophie ce truc.
00:25 Alors je fais comme n'importe quelle mère, je sais celui qui semble aux yeux du monde
00:28 le plus tordu, le plus brin de zinc, le plus saugrenu et je le prends.
00:31 Aux yeux du monde peut-être, mais voilà.
00:33 Marcel Proust, après l'avoir lu, avait écrit à Colette ceci.
00:36 Je cite "J'ai un peu pleuré ce soir, pour la première fois depuis longtemps, et pourtant
00:41 depuis quelques temps je suis accablée de chagrin, de souffrance et d'ennui.
00:44 Mais si j'ai pleuré, ce n'est pas de tout cela, c'est en lisant la lettre de Mitsou.
00:49 Les deux lettres finales, c'est le chef-d'oeuvre du livre."
00:52 Bon ben moi je suis comme Proust, j'ai pleuré comme un veau quand j'étais adolescente
00:55 et rebelote comme un veau à chaque fois que je l'ai relu.
00:58 Deux lettres finales notifiaient Marcel.
01:00 Ah, donc c'est un roman épistolaire.
01:02 Alors la fin, oui, mais le début, c'est une pièce de théâtre.
01:06 Qu'on aurait beaucoup de mal à monter au théâtre, tant le but de Colette n'est
01:09 pas de produire du matériel de théâtre.
01:11 La taille imposante d'Eddie Dascali, l'humour d'Eddie Dascali, leur qualité littéraire,
01:16 franchement ça dénote.
01:17 Et puis vite on passe aux lettres donc, et puis là ça devient un roman classique, et
01:21 puis c'est encore un roman épistolaire.
01:22 Alors oui dans la forme c'est particulier, c'est saugrenu, c'est n'importe quoi, mais
01:25 voilà.
01:26 Mitsu est publié en 1919 et la première guerre mondiale a changé le monde, a redistribué
01:30 les cartes et je pense que Colette voulait procéder d'eux-mêmes.
01:34 D'ailleurs l'action du livre se passe pendant la guerre, mais à l'arrière, à Paris,
01:37 où Mitsu chante et danse et joue au music hall.
01:40 C'est une petite vedette.
01:41 Paris où régulièrement viennent en permission les soldats.
01:44 Quand le livre commence, Mitsu, pas très vêtu, accueille, contre son gré pour faire
01:49 plaisir à une pote qui elle n'a pas de loge, accueille dans sa loge un lieutenant
01:53 en uniforme bleu, aussi jeune qu'elle, ils ont 24 ans tous les deux.
01:56 Et ils se ressemblent un peu physiquement.
01:58 Le lieutenant, après des mois au front, et on l'imagine fort bien, assez émoussié
02:01 de se retrouver dans cette loge tiède, douillette.
02:05 Mais Mitsu le calme instantanément par son attitude.
02:07 Elle fait le taf sur scène, mais dans la vraie vie, c'est pas le genre à minoder,
02:11 même à moitié à poil, elle est aussi digne qu'une carmélite.
02:14 Je cite Colette, « Mitsu montrait un sangein morose, une impudeur distraite qui bannit
02:20 toute coquetterie.
02:21 Comme si Mitsu n'était pas ce qu'on appelle une fille.
02:24 » À l'époque.
02:25 Mitsu a ce qu'on appelle un bon ami, un monsieur d'âge certain, le double du sien,
02:29 pour être précise, et qu'elle aime bien.
02:31 C'est-à-dire qu'elle ne l'aime pas.
02:33 Et là vous vous dites, bon bah c'est plié, le petit lieutenant et Mitsu ils ont le même
02:36 âge, on est dans une fiction, ils vont se rencontrer, se séduire, tomber amoureux,
02:39 c'est le fémino, désir, plaisir, souffrir dans n'importe quel ordre, épée ou proue.
02:43 La fiction s'arrête là.
02:45 Et ben ici c'est pas de cette sorte.
02:46 Ici il arrive à Mitsu et au petit lieutenant de bleu une autre chose, une chose qui arrive
02:50 plus dans la vraie vie.
02:51 Plus souvent.
02:52 On se rencontre, on se chauffe, on s'enflamme, selon notre génération.
02:58 On communique, chez nous par SMS, chez eux par lettres.
03:02 Et puis quand arrive le moment de la première nuit, ça se passe pas si bien que ça.
03:06 Et là l'un des deux protagonistes n'a qu'une envie, refermer la parenthèse, plus ou moins
03:10 élégamment, le petit lieutenant va-t-il purement et simplement ghoster ma chère Mitsu ?
03:15 Colette est-elle si moderne que ça ou les choses de l'amour n'ont-elles donc pas du
03:19 tout changé en fait ?
03:20 Suspense.
03:21 Merci.
03:22 Merci.
03:23 Merci Juliette Arnaud.
03:24 Donc vous l'avez lu d'abord à l'adolescence.
03:29 Et puis plusieurs fois, vraiment ?
03:32 Oui plusieurs fois parce que vraiment quand on arrive aux deux dernières lettres, il
03:35 y a une lettre du petit lieutenant et une lettre de Mitsu.
03:38 Je vous défie, après avoir lu Mitsu, de lire la lettre de Mitsu sans avoir le menton
03:44 qui me tremble, le dessous des paupières qui pique, rien que d'y penser j'ai à nouveau
03:47 envie de pleurer.
03:48 Et puis c'est que 123 pages.
03:49 Je vais te le piquer Juju.
03:50 Je te le pique.
03:51 Ça je peux le lire.
03:53 Oui, mais attention parce qu'il y aura une suite.
03:55 C'est pas terminé, la chronique n'est pas finie, c'est en deux parties mon cher Thomas
03:59 Croisière.
04:00 Mais j'ai 15 jours pour le lire.
04:01 Si vous voulez.
04:02 Allez d'accord.