Thierry Marx est l'invité de Amandine Bégot

  • l’année dernière
Regardez L'invité de RTL du 21 avril 2023 avec Amandine Bégot.
Transcript
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL Matin
00:06 Il est 7h43, excellente journée à vous tous qui écoutez RTL. Amandine Bégaud vous recevez donc ce matin le chef étoilé Thierry Marx,
00:13 par ailleurs président de l'UMI.
00:14 L'UMI, principal syndicat de l'hôtellerie et de la restauration. Toute la semaine sur RTL on a choisi de donner la parole justement à des patrons
00:20 en quête de saisonniers. C'est notre série 7 jours 7 reportages à découvrir jusqu'à dimanche, on l'entendra
00:26 à 8h tout à l'heure. Parmi eux Thierry Marx, de très nombreux restaurateurs, vous nous disiez à l'instant il y a 200 000 postes à
00:32 pourvoir. Est-ce que c'est plus
00:34 que les années précédentes ? Plus que l'avant Covid en tout cas j'imagine ?
00:38 Alors c'est pas vraiment plus que les années précédentes, c'est assez récurrent ce chiffre des 200 000, on est entre
00:43 190 000 et 220 000, mais aujourd'hui c'est un vrai problème parce que ça limite effectivement
00:49 la capacité aux établissements d'ouvrir et d'ouvrir dans de bonnes conditions. Pourtant la profession dans son ensemble
00:56 a fait l'effort, l'effort des salaires, de la replanification
00:58 du travail, mais quand même il manque des postes. Il y a plusieurs facteurs à ça, il y a aussi les problèmes de mobilité
01:04 et les problèmes de logement. Aujourd'hui loger un saisonnier c'est un vrai problème. On va essayer de trouver ensemble
01:10 les solutions possibles dans un instant, mais iriez-vous jusqu'à dire que cette pénurie de bras met en danger certains établissements aujourd'hui ?
01:16 Mais complètement, ça les met en danger économiquement parce qu'ils peuvent pas.
01:21 La période de la saison est une période dense, forte, d'ailleurs même pour les saisonniers qui font un salaire, qui font en général
01:27 leur salaire de l'année, eh bien là il y a des établissements qui n'ont pas de personnel, donc ils
01:32 limitent les accès aux terrasses, ils limitent... - Moins de services, fermé un jour ou deux... - Donc moins de chiffre d'affaires,
01:37 dans une période qui est très tendue. - Vous disiez, on a augmenté les salaires de plus 16% je crois. - 16%, c'est ça.
01:44 - Aujourd'hui ça gagne combien un saisonnier par exemple serveur ou un cuisinier ? - Un saisonnier en être
01:49 vraiment sans qualification
01:51 forte, il est entre 1 500 et 1 800 net, vraiment, et puis il y a des primes, il y a des primes, des primes de fédéralisation,
01:57 des heures supplémentaires, etc. Tout ça, la profession joue le jeu là-dessus pour que les gens qui viennent en saison
02:03 puissent avoir un salaire qui soit un serviteur confortable, mais s'ils sont pénalisés par le logement,
02:08 eh bien effectivement ça ne fonctionne plus. - C'est le gros point noir ça le logement, aujourd'hui on n'a pas de quoi loger les saisonniers ?
02:14 - Non, on n'a pas de quoi loger les saisonniers, on en a parlé avec Olivier Klein, on travaille beaucoup sur les logements sociaux.
02:19 Du logement social saisonnier, ça peut peut-être aider, et puis dans certains départements,
02:23 on a des départements pilotes comme la Bretagne, la Côte d'Emeraude avec qui on travaillait sur la ville de Kanka, la ville de Saint-Malo,
02:30 pour essayer de trouver des solutions. Nous avons trouvé, mais il faut les rendre pérennes. - C'est quoi la solution ?
02:37 - La solution c'est le logement, c'est le logement
02:39 abordable, le logement saisonnier. - Et la solution pour trouver du logement abordable,
02:42 certaines collectivités vous aident ? - Oui, alors c'est la rénovation, c'est l'utilisation aussi
02:48 des logements disponibles, notamment dans les internats où on trouve que là il y a des logements disponibles,
02:54 mais c'est de mettre en construction du logement social saisonnier, qu'on peut copartager d'ailleurs, c'est pas forcément
03:00 réservé aux métiers de l'hôtellerie-restauration. Le monde agricole aussi souffre du manque de logements saisonniers, on voit bien que ça peine là aussi
03:08 dans le recrutement parce qu'on ne peut pas loger nos saisonniers. - C'est de plus en plus compliqué aussi parce qu'il y a beaucoup de propriétaires
03:13 qui préfèrent bien louer via certaines plateformes plutôt que louer à des saisonniers comme c'était le cas auparavant.
03:18 - Exactement ça, c'est-à-dire que ce qui est venu perturber en plus ce marché du travail c'est
03:24 ces locations saisonnières qui ne sont pas vraiment référencées, qui sont sur des plateformes et qui finissent par pénaliser
03:29 ces logements qui étaient loués par les employeurs pour leurs saisonniers. Le logement d'un saisonnier c'est entre
03:35 350 et 500 euros au maximum,
03:38 sinon il n'a plus d'intérêt à venir faire une saison et d'engranger un petit peu, pour envoyer un terme un peu cru,
03:45 du salaire pour l'année. - Aujourd'hui dans certaines stations balnéaires,
03:49 ce chiffre que vous avancez de 300 ou 500 euros c'est ce qu'on leur demande par semaine. - Exactement.
03:54 - On va les nommer Airbnb par exemple, vous demandez quoi aujourd'hui au gouvernement ? D'essayer de mieux encadrer ça ?
04:01 - On demande au gouvernement de regarder un peu cette dérégulation au niveau du logement et de ces plateformes.
04:06 Là vous venez de citer Airbnb et c'est vrai que moi non, Lumie a beaucoup
04:10 travaillé un peu contre Airbnb, ça dérégule le marché. Donc il faut permettre une catégorie
04:16 de gens qui ont des choses à louer, notamment des hôtels qui ne sont pas tout à fait aux normes, de remettre ces hôtels
04:21 de façon plus légère aux normes pour qu'on puisse loger des saisonniers et puis de travailler sur le logement
04:28 saisonnier. Mais ce marché dérégulé à cause de ces plateformes c'est un vrai problème. - Ce problème il se pose pour les saisonniers mais
04:34 mais pas seulement, vous continuez à avoir du mal à recruter tout court dans votre secteur.
04:39 C'est quoi ? Un problème de formation aussi ? On a beaucoup parlé ces derniers jours de la réforme du lycée professionnel.
04:44 Emmanuel Macron a dit qu'il fallait que ça aille vite, il a dit ça lundi dans son allocution.
04:49 - Je suis assez d'accord avec ça. Un bloc CAP par exemple, un bloc de compétences
04:55 à ce diplôme du CAP doit être passé beaucoup plus vite aujourd'hui. Je pense qu'un CAP en trois mois c'est parfaitement
05:03 acceptable, on connaît les bases et il faut faire
05:05 accélérer cette formation professionnelle. Et puis on ouvre quelque chose à l'UMI qui va être important,
05:11 on ouvre le CV numérique, donc on aura une CVtech, vous pouvez vous inscrire très facilement sur ce CV
05:18 numérique de l'UMI et même si vous n'avez pas de diplôme,
05:21 la montée en compétences se fera en entreprise. Et puis là on vous raccorde ensuite s'il y a besoin
05:26 un système de formation pour que vous puissiez avoir le diplôme nécessaire.
05:30 Mais il faut accélérer les choses, il faut former mieux et plus vite et que les blocs de compétences
05:34 soient vraiment
05:37 raccord, en harmonie avec le diplôme concerné.
05:40 - Plus de formation,
05:43 une meilleure prise en charge des logements, on le disait, pour les saisonniers, les salaires, on en a parlé.
05:49 Il y a une question que se posent sans doute beaucoup d'auditeurs, est-ce que vous avez l'impression tout simplement aujourd'hui que
05:54 certains jeunes par exemple ne veulent pas travailler ?
05:56 - Je ne dis pas que certains jeunes... Je ne vais pas faire simplement catégoriser comme ça...
06:01 - Il n'y a pas les jeunes et les vieux ?
06:03 - Non, il n'y a pas les jeunes et les vieux.
06:04 Je pense que c'est le rapport au travail qui a changé, c'est-à-dire qu'on ne veut plus avoir un rapport sacrificiel au travail.
06:09 - Et ça c'est le Covid qui a changé ça ?
06:11 - Qui l'a accéléré.
06:12 Le Covid a accéléré ça. Donc ce non-rapport sacrificiel au travail, on peut l'entendre, ça veut dire qu'il faut
06:17 replanifier le travail. Et je pense qu'il faut retravailler sur la convention collective avec les organismes syndicaux
06:25 salariés comme les organismes syndicaux patronaux et le régalien bien sûr, pour essayer de trouver des solutions sous cette
06:31 replanification du travail.
06:33 - Sauf que la restauration ça reste un métier difficile et ça vous n'arriverez pas à le changer ?
06:37 - Mais à chaque fois on montre du doigt comme ça la restauration.
06:41 Les métiers de la santé sont des métiers difficiles, les métiers de la logistique sont des métiers difficiles, tout est difficile si ce n'est pas un projet.
06:47 Donc il faut faire en sorte de 1)
06:49 accélérer et améliorer la formation professionnelle, la montée en compétences et surtout que le travail
06:54 redevienne un outil d'émancipation. Moi ce qui me choque en France depuis 40 ans, c'est que vous choisissez le travail et votre travail ne vous
07:01 émancipe pas
07:02 économiquement. Ça c'est un sujet. Donc il faut le poser sur la table sans idéologie, il faut s'asseoir autour d'une table et se dire
07:08 voilà les OS, les OP,
07:10 le régalien, regardons comment on peut faire en France quand vous commencez dans un métier, vous puissiez trouver de l'émancipation
07:16 par le fait que vous avez choisi de travailler. - L'autre réforme sur laquelle vous comptez beaucoup c'est le projet de loi
07:22 de migration avec ces titres de séjour pour les métiers en tension. Là aussi vous dites au chef de l'état ce matin "allez-y"
07:27 - Je leur dis "allez-y" déjà, nous on n'a pas à prendre position sur la politique des migrations de l'état, c'est pas notre sujet.
07:34 Nous on recrute des solutions, des cuisiniers, des pâtissiers, du personnel de service, on recrute des solutions. Mais il y a des
07:40 personnes qui sont là depuis longtemps, c'est 17% de gens issus de l'extérieur de l'hexagone qui travaillent dans nos métiers.
07:46 Donc nous on recrute des solutions. - 17% sans qui vos établissements ne tourneraient pas. - Ne tourneraient pas.
07:52 Donc aujourd'hui il faut régulariser ces personnes qui ont une compétence métier et qui sont sur le sol français
07:57 depuis longtemps et qui ne posent pas de problème en étant sur le sol français.
08:01 - Thierry Marx, vous étiez monté au créneau il y a quelques jours pour faire part de votre inquiétude face aux manifestations à
08:05 répétition qui plombent le chiffre d'affaires de certains restaurateurs. Est-ce que vous avez des chiffres, une idée du manque à gagner ?
08:12 - C'est clair, l'une des villes très touchées notamment par la grève
08:16 ça a été la grève des éboueurs sur Marseille. Marseille était très touchée et puis
08:22 chaque fois qu'il y a un mouvement social, évidemment on est impacté, on est entre le marteau et l'enclume et une manifestation c'est
08:28 au moins 40% d'annulation. Ça c'est les derniers chiffres d'hier soir.
08:31 - 40% d'annulation ? - 40% d'annulation.
08:33 Si votre quartier est touché par une manifestation, immédiatement
08:36 le carrier de commande se vide et surtout il y a ce côté anxiogène "est-ce que je vais être pris dans une manifestation ou pas ?"
08:41 Donc là on est vraiment,
08:44 je ne vais pas dire à l'arrêt, mais on peut passer d'un service complet à
08:49 découvert parce qu'il y a une forme d'inquiétude aujourd'hui. - -40% en cas de manifestation.
08:54 On évoquait tout à l'heure avec François Langlais l'inflation. Forcément les Français vont moins par exemple au restaurant.
09:00 Là aussi j'ai vu les chiffres ce matin -50% de fréquentation à l'heure du déjeuner dans les restaurants à Paris.
09:05 - 70% à Marseille ? - Oui exactement, ça c'est vraiment une inquiétude pour des
09:11 collabs, des confrères qui étaient déjà en fragilité de trésorerie parce que là effectivement on regarde à la dépense
09:17 pour aller au restaurant et là, autant dans le monde de l'hôtellerie vous pouvez vous adapter
09:23 avec le "yield management" comme on dit, vous pouvez vous adapter et adapter vos prix,
09:28 or qu'en restauration une fois que vous avez fixé un prix de menu, c'est que ce prix de menu correspond à un coût matière première
09:32 et à un coût du travail.
09:35 Donc vous ne pouvez pas jouer avec les prix et là vous êtes piégé, vous ne pouvez pas faire des offres
09:40 attractives sur vos restaurants. - Mais ça veut dire qu'on va voir des restaurants fermés dans les mois qui viennent ? - C'est notre grande inquiétude
09:46 allumée bien évidemment, d'avoir mis des cellules de veille en département pour voir qui on doit aider en priorité.
09:53 Je rappelle juste une chose à vos auditeurs, c'est que
09:56 on a eu la crise de l'énergie, nous sommes encore dans la crise de l'énergie, elle est d'une brutalité absolue
10:01 et nous avons encore des menaces de coupure par certains énergéticiens.
10:05 Nous avons l'augmentation des coûts de matières premières, nous avons choisi d'augmenter de 16% les salaires, tout ça commence à peser lourdement
10:13 sur l'activité. - Si on devait donner juste d'un mot un chiffre sur le nombre de restaurants menacés ou un pourcentage ?
10:19 - Je n'ai pas de pourcentage aujourd'hui
10:21 précis mais on a une remontée du terrain qui est inquiétante, notamment en milieu rural, même dans les grandes villes.
10:27 Marseille va faire monter des chiffres qui sont inquiétants.
10:29 - Merci beaucoup Thierry Marx. - Merci à vous. - Les 200 000 postes sont donc toujours à pourvoir dans l'hôtellerie
10:33 restauration de notre pays. Merci infiniment Thierry Marx.
10:36 Vous...

Recommandée