Emmanuel Macron "utilise l'autoritarisme comme moyen et le populisme comme discours", selon Yannick Jadot

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Yannick Jadot, eurodéputé EELV, était l'invité du Grand entretien de France Inter mardi 25 avril. Il dénonce le "mépris" d'Emmanuel Macron sur la réforme des retraites et parle de "dérive illibérale". L'eurodéputé écologiste reproche aussi à l'exécutif "un déni de l'urgence environnementale".

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Transcript
00:00 Avec Léa Salamé, nous recevons ce matin dans le Grand Entretien un eurodéputé Europe
00:04 Ecologie, les Verts.
00:06 Vos questions au standard d'Inter 0145 24 7000 ou sur notre application mobile.
00:13 Yannick Jadot, bonjour.
00:14 Bonjour.
00:15 Et bienvenue à ce micro.
00:16 On va évoquer avec vous dans quelques instants la situation du pays, la situation de la gauche.
00:21 Mais pour commencer, après trois semaines de contestation, la réforme des retraites
00:26 a donc été promulguée.
00:28 Elle entrera en vigueur à partir de septembre.
00:31 Diriez-vous ce matin que d'une certaine manière, Emmanuel Macron a gagné, réussi
00:35 à faire passer tout simplement cette réforme ?
00:37 Non, il a perdu et c'est le pays qui est en train de perdre.
00:40 C'est le pays qui est en train de s'enfoncer dans une crise qui n'est pas simplement
00:44 une crise sociale, qui est une crise démocratique profonde.
00:47 On voit un président de la République qui est dans la jouissance de lui-même, dans
00:51 la jouissance de son pouvoir, dans le mépris à peu près de tout ce qui constitue, de
00:56 tout ce qui construit une démocratie et les forces vives de la société.
01:01 On voit un président de la République qui continue avec un agenda très dur, un agenda
01:07 assez libéral, mais qui aujourd'hui, parce que ce modèle est dans l'impasse, au fond,
01:14 utilise l'autoritarisme comme moyen et le populisme comme discours, simplement.
01:17 On le voit, l'autoritarisme, c'est marcher sur la démocratie sociale, marcher sur la
01:24 démocratie parlementaire, c'est contester même le Conseil d'orientation des retraites
01:29 parce qu'il n'a pas dit ce que le gouvernement souhaitait, c'est contester les agences de
01:34 sécurité sanitaire et environnementale parce qu'elles veulent interdire les pesticides,
01:39 c'est contester les experts indépendants sur le nucléaire, c'est la dérive antirépublicaine
01:44 du maintien de l'ordre et puis le populisme.
01:46 C'est quand, au fond, il n'y a plus de solution, il n'y a plus que des coupables.
01:52 On a un problème de chômage, c'est le problème des chômeurs qui sont des profiteurs.
01:55 On a un problème de la jeunesse, c'est nos gamins qui sont gâtés.
01:59 On a un problème sur les retraites, ce sont les travailleurs seniors qui sont des fainéants.
02:05 On a un problème sur l'écologie et pour masquer l'inaction, dans le premier quinquennat,
02:09 on avait les amiches, maintenant on a les terroristes qui sont les écologistes.
02:12 Tout ça est une dérive extrêmement grave.
02:16 Alors certes, on n'est pas la Hongrie ni l'Apollo, mais c'est une dérive illibérale.
02:19 Quand on vous écoute ce matin, on a l'impression qu'on n'est pas loin de Viktor Orban,
02:22 parce que autoritarisme, populisme, vous avez même parlé de dérive illibérale.
02:27 Ah, vous dites bien sûr, illibérale.
02:29 Dérive illibérale en quoi ?
02:31 Pardon, j'entends votre opposition à Emmanuel Macron et à la réforme des retraites,
02:36 mais vous parlez de crise démocratique, lui répond à la crise démocratique,
02:39 que le processus démocratique a été respecté.
02:43 Le 49-3, c'est constitutionnel.
02:46 Vous ne l'aimez pas, sans doute, mais c'est constitutionnel.
02:50 En quoi, à un moment, le processus démocratique a été enfreint dans toute cette histoire ?
02:54 Mais vous pouvez considérer qu'en Hongrie, en Pologne,
02:58 et encore une fois, je n'ai pas dit que la France était devenue la Hongrie, la Pologne.
03:01 Je parle de dérive illibérale.
03:02 Mais Orban, il s'appuie aussi sur la Constitution,
03:08 il s'appuie aussi sur les lois qu'il fait voter pour remettre en cause des contre-pouvoirs.
03:13 C'est quand même assez rare en France d'avoir, par exemple, un gouvernement,
03:18 y compris sa première ministre, qui remet en cause la Ligue des droits de l'homme.
03:22 Parce que simplement, cet État contre-pouvoir, d'un seul coup, il faudrait le dissoudre.
03:26 Vous avez les soulèvements de la terre, donc vous avez des luttes locales.
03:30 On a entendu l'éditorial sur les sécheresses et la canicule en Asie du Sud-Est.
03:37 On a des mers aujourd'hui qui sont tétanisées dans les Pyrénées-Orientales.
03:42 Il y a déjà plus d'eau, on est au mois d'avril.
03:44 Regardez la situation de l'Espagne, c'est absolument catastrophique.
03:47 Et donc celles et ceux qui luttent pour la survie, pour une planète habitable,
03:53 il faut les dissoudre ou il faut les disqualifier en disant que ce sont des terroristes.
03:57 Pour ce qui est des soulèvements de la terre, parce que là vous parlez de tout en même temps.
04:02 Pour le soulèvement de la terre, effectivement, le Conseil des ministres pourrait prononcer demain
04:05 la dissolution de ce mouvement né à Notre-Dame-des-Landes,
04:07 présent à la manifestation contre la méga-bassine de Sainte-Seline
04:10 et ce week-end contre le projet d'autoroute Castre-Toulouse.
04:13 Gérald Darmanin leur reproche aussi de plusieurs envahissements d'entreprises,
04:16 des exactions fortes contre les forces de l'ordre, des destructions de biens,
04:19 des centaines de gendarmes, de policiers blessés, plusieurs appels à l'insurrection.
04:23 Vous répondez quoi à ça ?
04:25 Les soulèvements de la terre, y compris sur l'enjeu majeur des méga-bassines
04:30 que le gouvernement continue de soutenir malgré la sécheresse, malgré les canicules,
04:35 malgré y compris l'opposition d'une forte partie des paysans,
04:40 c'est le soulèvement qui organisait localement des débats,
04:44 y compris avec les agriculteurs qui veulent ces méga-bassines pour irriguer.
04:48 Donc ce sont des outils de construction démocratique.
04:51 À un moment donné, une démocratie, ce n'est pas le président qui décide tout seul.
04:57 Donc il va falloir à la fois remettre les difficultés, les grands défis
05:03 auxquels nous sommes confrontés dans l'agenda politique,
05:05 ce que refuse de faire le président de la République,
05:08 et puis il va falloir sacrément changer nos institutions
05:10 si on veut sortir par le haut de cette crise démocratique.
05:14 Vous voyez bien quand même que si demain il y avait des élections,
05:16 on pourrait avoir Marine Le Pen présidente de la République,
05:19 Éric Ciotti Premier ministre.
05:21 La faute à qui ?
05:23 Mais la faute aujourd'hui à ceux quand même,
05:26 celles et ceux qui gouvernent ce pays depuis un moment.
05:29 Seulement ?
05:30 Ou la faute au manque d'alternatives à gauche, notamment, ou à droite ?
05:33 Mais bien sûr qu'on a à travailler.
05:35 Vous avez parfaitement raison.
05:36 Nous devons travailler à un projet qui à la fois répond à ce qui est la crise majeure,
05:42 selon moi, de notre société, ce que j'appelle la crise de l'avenir.
05:46 On n'arrive plus à se projeter.
05:48 Les chocs climatiques, les chocs pandémiques, la précarité sociale
05:52 fait que nos sociétés sont prises de vertiges aujourd'hui.
05:55 Et quand une société est prise de vertiges,
05:58 eh bien la tendance à répondre par les tripes, par la peur, par l'appel du vide,
06:04 ce qui est quand même l'extrême droite, cette sorte de passé fantasmé,
06:09 plutôt que de fonctionner avec son intelligence et de regarder devant.
06:12 Donc c'est un peu construire ça.
06:15 Pourquoi a-t-elle pris 10 points Marine Le Pen en un mois dans les sondages,
06:19 alors qu'on a vu la nuppes à la manœuvre pendant toute la séquence sur les retraites ?
06:25 Comment d'ailleurs avez-vous jugé l'attitude de la gauche des Insoumis
06:30 depuis le mois de janvier ?
06:31 La stratégie d'obstruction, de confrontation parlementaire très musclée d'ailleurs.
06:36 Écoutez, il y a eu toute une période où effectivement,
06:40 il y a eu le spectacle que donnait à voir l'Assemblée nationale
06:47 au fond créer un fort décalage avec la mobilisation dans la rue.
06:50 Les Françaises et les Français restent très fiers de la mobilisation sociale,
06:55 du travail qu'a réussi à faire l'intersyndicale.
06:58 Et il faut aller manifester le 1er mai.
07:00 Et puis à un moment donné, l'Assemblée nationale apparaissait plus comme un lieu du broi
07:04 que de la construction ou du relais de cette mobilisation sociale.
07:09 Et puis vous avez vu à quel point finalement ils ont travaillé.
07:12 Alors moi, je ne vais pas vous dire que je ne regrette pas qu'on n'ait pas voté le fameux article 7
07:18 sur le report de l'âge de la retraite.
07:21 Il n'a pas été voté à l'Assemblée, cette loi n'a pas été votée.
07:25 Au regard des votes, peut-être qu'on aurait gagné à l'Assemblée.
07:28 Bon voilà, on ne va pas refaire l'histoire.
07:30 Mais encore une fois, nous sommes dans une situation qui m'apparaît extrêmement grave
07:35 du point de vue de la cohésion sociale et du point de vue du pacte républicain.
07:38 Donc moi j'appelle...
07:40 Alors je vous pose la question, juste.
07:42 La décision d'Emmanuel Macron de redescendre dans l'arène,
07:46 comme il dit dans Le Parisien, de se réengager dans le débat public.
07:51 Il dit "j'aurais dû sans doute me mouiller davantage sur les retraites,
07:54 y aller moi-même, le fait d'aller à la rencontre des Français sur le terrain,
07:58 malgré les casseroles et les huées, de se donner 100 jours pour apaiser la France".
08:01 Tout ça, pour vous, c'est quoi ?
08:03 C'est que de la com', c'est rien, c'est quoi ?
08:05 Écoutez, à chaque fois que le président de la République...
08:08 Enfin si vous voulez, j'ai parlé un peu de cette concentration ultime du pouvoir.
08:13 Vous avez même un président de la République qui maintenant méprise son gouvernement.
08:17 Je veux dire, sa déclaration, c'est quand même de dire
08:20 au fond, ils ont été incapables de vendre une réforme invendable,
08:26 y compris du fait des ambiguïtés du président de la République.
08:28 C'est quand même lui qui déclarait il y a quelques années,
08:30 il ne faut surtout pas reculer l'âge de la retraite,
08:32 ça serait la réforme la plus injuste.
08:34 Donc aujourd'hui, il n'assume aucune part de responsabilité dans la situation du pays.
08:41 Et ça, c'est quand même extrêmement dangereux.
08:44 Moi, j'appelle notamment, du point de vue de la réforme des institutions,
08:47 à ce qu'on mette enfin en place dans notre pays,
08:50 un mode de scrutin proportionnel pour les législatives.
08:53 Ça, on a le temps d'ici 2027.
08:55 Il faut absolument qu'on fasse la politique différemment dans notre pays.
09:00 Pas simplement pour qu'il y ait la représentativité des votes et des forces politiques,
09:05 mais c'est surtout pour qu'on fasse de la politique différemment.
09:08 Quand vous voyez dans les autres démocraties européennes,
09:11 le scrutin à la proportionnelle permet de faire des compromis,
09:16 permet de faire des coalitions.
09:17 Et parfois, c'est ingouvernable.
09:19 Regardez l'Italie avec les combinations, les gouvernements tombent tout rapidement.
09:24 Écoutez, un, il n'y a pas parce qu'il y a un contre-exemple qu'il faut rester là-dedans.
09:29 Mais aujourd'hui, on a certes des institutions qui permettent au président de la République
09:33 de contourner l'esprit des institutions sur la démocratie parlementaire.
09:38 Mais on n'avance plus sur rien.
09:40 Et notre pays est aujourd'hui bloqué de la responsabilité du président de la République.
09:44 Yannick Jadot, dans son interview au Parisien, Emmanuel Macron était interrogé
09:47 par les lecteurs du journal sur l'écologie.
09:49 Et sur l'écologie, il dit, je tiens à le dire, j'ai un bilan.
09:52 Et là, on accélère, je le cite, sur l'éolien en mer, sur le nucléaire,
09:57 la décarbonation de notre industrie.
09:59 Ensuite, on crée une filière de production de véhicules électriques sur notre sol.
10:03 On investit massivement sur le rail.
10:05 100 milliards d'euros, c'est historique.
10:08 Comment avez-vous reçu ces mots ?
10:09 Est-ce que sur l'écologie, vous reconnaissez un bilan ?
10:12 Non. Ou un bilan qui n'est pas à la hauteur des crises que nous traversons.
10:17 Regardez sur l'énergie, ça a été quoi la politique du président de la République ?
10:22 Pour l'hiver, ça a été le col roulé sur la sobriété.
10:25 Ce sont effectivement les véhicules électriques, mais on laisse se développer des SUV,
10:30 des véhicules très chers, très lourds, dont l'empreinte écologique n'est pas bonne.
10:34 Et c'est le fantasme de l'abondance de l'électricité nucléaire à l'horizon 2040-2045.
10:40 Ça ne résout en rien les problèmes que nous avons maintenant.
10:45 On parlait du travail de l'Assemblée nationale avec les écologistes.
10:50 On avait obtenu, et ça a été voté à l'Assemblée nationale, 10 milliards d'euros,
10:54 donc on multipliait par 4 le budget sur la rénovation thermique.
10:58 C'est la mère de toutes les batailles.
11:00 C'est comment...
11:01 Il veut lancer la rénovation des bâtiments, des écoles.
11:04 C'est extraordinaire.
11:05 Interview après interview, il parle de planification écologique.
11:08 En fait, la seule planification qu'on ait, c'est la planification de la planification écologique.
11:13 On ne rentre jamais dans le dur, on ne rentre jamais dans l'action.
11:16 Il y a un déni de l'urgence environnementale.
11:19 S'il y a un beau projet pour rassembler les Françaises et les Français,
11:24 pour qu'il y ait une forme de sursaut républicain, de mobilisation des forces vives,
11:28 c'est bien cette question du climat, parce qu'elle est fondamentalement consensuelle
11:32 dans son diagnostic et dans l'urgence.
11:35 Et donc, il nous faut, en investissant massivement sur le logement,
11:39 sur les transports collectifs, sur un autre modèle agricole,
11:44 sur la façon de bien manger, de bien habiter en ville ou à la campagne.
11:48 Voilà un grand projet dans lequel on pourrait investir et qui mobiliserait tout le monde.
11:52 Mais vous parlez du déni, est-ce qu'il n'y a pas aussi un déni de la part des écologistes et de vous sur le nucléaire ?
11:58 Je rappelle que pendant la campagne présidentielle, vous défendiez,
12:01 vous vouliez sortir totalement du nucléaire d'ici 2040 à 2050.
12:04 Quand vous voyez les conclusions de la commission d'enquête parlementaire
12:07 qui parle d'une politique inconsciente et inconséquente de la gauche de François Hollande
12:11 avec les écolos au pouvoir sur le nucléaire,
12:15 quand vous voyez les résultats de l'Allemagne où aujourd'hui 32% de l'électricité allemande
12:19 est produite à partir du charbon, vous ne vous interrogez pas ?
12:22 Pas du tout, au contraire.
12:24 Regardez l'Allemagne, ils sont effectivement sortis du nucléaire.
12:27 D'ici 2030, ils vont sortir du charbon.
12:30 Et leur grand projet, c'est d'avoir un mix essentiellement avec des énergies renouvelables
12:36 et d'investir sur les économies d'énergie.
12:38 Ils avancent, ils créent des emplois.
12:40 Cette commission dont vous parlez, c'est quand même extraordinaire.
12:43 On a des patrons d'EDF.
12:45 EDF, c'est le deuxième électricien mondial
12:48 qui nous explique que s'ils ont échoué,
12:50 ce n'est pas de leur responsabilité,
12:52 ce n'est pas de la stratégie internationale d'EDF qui a conduit à un endettement,
12:56 ce n'est pas la faillite des EPR et le fiasco industriel,
12:59 ce n'est pas la dette absolue, c'est le complot des écologistes.
13:02 C'est le complot des écologistes.
13:04 Ils ont trouvé. C'est soit l'Europe, soit le complot des écologistes.
13:08 On n'a jamais gouverné ce pays.
13:10 Mais d'un seul coup, le dérèglement climatique, c'est de notre faute.
13:13 La sécheresse, c'est de notre faute.
13:15 La faillite du nucléaire, c'est de notre faute.
13:18 - Ils disent que c'est le quinquennat Hollande.
13:19 - Nous aurons, l'air salamé,
13:21 nous aurons à faire coexister
13:25 le nucléaire et les énergies renouvelables pour l'électricité
13:28 pour les 25 années qui viennent.
13:30 Le seul sujet sur lequel on doit prendre une décision forte,
13:35 c'est est-ce qu'on construit des nouvelles centrales nucléaires
13:38 à l'horizon 2040-2045, très chères,
13:42 avec évidemment un risque sur les délais,
13:46 ou est-ce qu'on investit massivement maintenant sur les énergies renouvelables ?
13:50 Eh bien moi, je préfère agir maintenant sur des énergies propres
13:54 que parier à l'avenir sur une énergie risquée et très coûteuse.
13:57 - Allez, on file au Standard Inter. Bonjour Benoît.
14:01 - Oui bonjour.
14:03 - Je vous en prie, vous nous appelez de Bordeaux, on vous écoute Benoît.
14:07 Écoutez, plutôt une remarque qu'une question,
14:10 et je ne vais pas m'adresser personnellement à votre invité,
14:13 mais c'est plutôt par rapport à ce qu'il représente,
14:15 c'est-à-dire le monde politique français actuel.
14:17 Je pense qu'on est dans une situation assez tendue en France,
14:20 mais quand les gens qui ont la capacité de savoir parler,
14:24 et bien parler et argumenter,
14:26 emploient des termes comme "extrêmement dangereux",
14:29 comme "autoritarisme extrême",
14:32 eh bien je crois qu'on donne aux gens qui n'ont pas cette capacité,
14:37 mais qui n'ont que le physique pour parler,
14:39 la violence des actes physiques.
14:43 Et je trouve qu'on devient une société très très violente,
14:46 et plutôt que d'entendre votre invité,
14:48 mais ça pourrait être un autre parti politique,
14:50 ça pourrait être un autre homme politique,
14:51 employer ces termes-là,
14:53 je pense qu'on aimerait entendre de la retenue,
14:56 des propositions avec plus que des idées,
14:58 des projets, quand on les met en œuvre,
15:00 et que les hommes politiques se servent de ce qui se passe actuellement
15:05 pour monter des projets et qu'on puisse voter en tout état de cause
15:08 aux prochaines élections.
15:10 Je crois que je fais partie d'un certain nombre de Français
15:13 qui ne sont pas extrêmes,
15:15 et qui aimeraient entendre plutôt des idées,
15:17 des choses constructives,
15:18 plutôt que des discours qui ne font que stresser les gens,
15:22 et qui rendent la société de plus en plus violente.
15:24 Merci Benoît pour cette remarque.
15:26 Beaucoup d'auditeurs, notamment sur l'application de France Inter,
15:30 vont dans le même sens Yannick Jadot.
15:34 Comment recevez-vous les propos de Benoît ?
15:38 Faire baisser la violence verbale ?
15:40 J'y adhère totalement.
15:42 Ce que proposent les écologistes, c'est justement de retrouver...
15:46 Il faut critiquer tout de même !
15:47 J'y arrive, j'y arrive.
15:48 Il y a un éléphant dans la pièce là !
15:51 Il dit "vous proposez rien",
15:54 ou "on attend davantage de propositions".
15:57 Moi ce que j'aimerais, c'est qu'on mobilise la société française,
16:00 qu'on la réconcilie sur son avenir,
16:02 qu'on recrée de la filiation politique, de la filiation sociale,
16:05 le goût de participer à la vie de la cité,
16:08 autour de ce qui nous concerne, c'est la vie,
16:11 donc l'écologie, l'école, les services publics, l'hôpital.
16:15 Mais moi ce qui m'inquiète terriblement,
16:19 et on le voit quand même dans notre société,
16:21 c'est que quand un président de la République
16:23 considère qu'un mouvement social c'est une foule,
16:26 que les manifestants sont des factieux,
16:29 que, je l'ai dit, les chômeurs sont des profiteurs,
16:33 les travailleurs seniors, des fainéants, les jeunes, des gaffés...
16:37 - Pour vous c'est lui qui clive, c'est lui, la violence, c'est lui ?
16:39 C'est ça que vous essayez d'expliquer ?
16:40 - C'est lui et le modèle qu'il défend.
16:43 Je pense que ce modèle libéral,
16:46 à force de prédation sociale et environnementale,
16:49 de concentration des richesses,
16:51 et au fond, qui est un modèle qui tient aujourd'hui sur la technocratie
16:54 et m'a quincé, plutôt que sur les forces vives du pays,
16:57 crée une tension extrême.
16:59 Moi je veux en sortir.
17:00 Quand je propose de mettre la proportionnelle
17:02 au cœur de la réforme de nos institutions,
17:05 c'est justement pour retrouver de l'apaisement,
17:07 c'est justement pour retrouver une capacité de compromis dans notre pays.
17:12 - Mais on vous rétorquera que la violence elle est partout.
17:14 La violence elle est quand un député insoumis
17:17 traite un ministre d'assassin.
17:19 - Mais je critique ces débordements.
17:21 Je veux dire, je ne vais pas vous...
17:24 Je trouve que la politique, y compris à travers les réseaux sociaux,
17:28 et c'est une sorte de politique Instagram,
17:31 ou quasiment maintenant ce film,
17:32 en train de parler à l'Assemblée nationale ou dans n'importe quel endroit,
17:36 au fond pour faire le buzz autour de l'invective.
17:39 On a besoin de remettre de la pensée complexe dans notre pays.
17:43 On a besoin de débats publics.
17:44 On a besoin de débats qui...
17:48 Il n'y a pas de solution simple aux crises que nous traversons.
17:50 Je veux dire, s'il y a une solution simple, c'est la mauvaise.
17:53 Et donc, si on veut affronter les défis du futur,
17:57 et bien oui, il va falloir que les écologistes et ce qu'ils font,
18:00 travaillent avec les paysans sur le modèle agricole,
18:02 avec les citoyens sur toutes les grandes transitions,
18:06 avec les entreprises.
18:07 C'est ça le projet des écologistes, un projet d'apaisement.
18:10 - Monique, au Standard Inter, bonjour.
18:12 - Bonjour.
18:13 - Bienvenue.
18:14 - Bonjour France Inter, bonjour M. Jadot.
18:16 - Bonjour madame.
18:17 - Alors M. Jadot, j'ai voté pour vous au dernier présidentiel.
18:21 Et je vous appelle parce que j'aimerais vous demander
18:24 quand est-ce qu'enfin vous allez travailler
18:26 à un vrai projet de gauche alternatif,
18:29 plutôt que de tirer à boulet rouge sur ce gouvernement
18:31 dont nous n'attendons plus rien ?
18:34 Ne voudrait-il pas mieux se mettre au travail, vraiment,
18:38 et se débarrasser aussi d'un certain angélisme de gauche,
18:42 et vraiment être réaliste,
18:45 et proposer vraiment des choses à nos compatriotes
18:49 qui n'attendent que ça ?
18:50 C'est quoi l'angélisme de gauche, madame, à vos yeux ?
18:53 - L'angélisme de gauche, c'est de penser...
18:55 M. Jadot l'a un petit peu esquissé au départ.
18:59 Penser que s'il y a des problèmes dans l'éducation,
19:04 c'est forcément de la faute des enseignants,
19:06 c'est forcément de la faute...
19:08 Et de ne pas admettre que oui, nos enfants sont un peu trop gâtés,
19:12 les parents les soutiennent trop.
19:13 De ne pas admettre qu'il y a effectivement de la fraude,
19:17 parfois, aux allocations.
19:20 C'est pas la plus importante, je suis d'accord.
19:22 Mais je pense que ça, ça exaspère une partie de nos compatriotes.
19:26 Et qu'il faudrait vraiment le dire,
19:30 et puis travailler.
19:31 Simplement travailler.
19:33 - Ouvrir les yeux et se mettre au boulot.
19:35 Merci Monique. Yannick Jadot vous répond.
19:38 - Je peux vous dire qu'on travaille tous les jours,
19:40 week-end compris.
19:42 On a des maires qui sont en train de changer
19:45 la façon dont on vit dans leurs agglomérations,
19:48 dans leurs municipalités,
19:49 pour qu'on s'adapte aux dérèglements climatiques,
19:51 pour qu'il y ait plus de vie culturelle, sportive,
19:55 qu'il y ait plus de commerce de proximité au Parlement européen.
19:58 On a gagné sur la fin des produits qu'on importerait,
20:01 qui participent de la déforestation.
20:04 Moi, je suis en charge au Parlement européen
20:07 pour sortir les camions des moteurs thermiques,
20:09 pour lutter contre le travail forcé,
20:11 dont on sait qu'il participe du génocide des Ouïghours.
20:15 Voilà, c'est plein de sujets sur lesquels on travaille tous les jours.
20:17 Parce qu'il va nous falloir un sursaut de projet,
20:21 à gauche, écologiste, c'est incontestable.
20:23 Mais aujourd'hui, il nous faut un sursaut républicain.
20:27 Sinon, encore une fois, l'extrême droite,
20:29 comme dans d'autres pays européens,
20:31 gagnera la prochaine élection.
20:32 - Un mot sur les européennes.
20:33 Vous aviez conduit la liste aux dernières élections,
20:36 en faisant un bon score de 13% à ce micro.
20:38 La nouvelle patronne de votre parti,
20:40 Marine Tendeli, avait martelé en décembre dernier
20:42 son opposition à une liste nupe pour les européennes.
20:45 « Quand c'est non, c'est non, il faut arrêter de faire les forceurs »,
20:48 avait-elle répondu à l'insistance des insoumis.
20:51 Alors, depuis, d'autres voix, comme Sandrine Rousseau,
20:54 Julien Bayou, font entendre un son de cloche différent.
20:57 « Je suis pour qu'on aille sur une union aux européennes,
20:59 quand bien même il y a des discussions sur le fond ».
21:02 Ça, c'est ce que dit Sandrine Rousseau sur France Info,
21:05 mercredi dernier.
21:06 Êtes-vous favorable à une liste commune
21:08 pour les prochaines européennes, Yannick Jadot ?
21:10 - Non, j'ai dit plusieurs fois à votre micro, déjà,
21:13 que j'étais pour la proportionnelle.
21:15 C'est quoi la proportionnelle ?
21:16 C'est la représentation des idées,
21:18 c'est la possibilité pour chacune et chacun,
21:21 chaque formation politique,
21:22 d'aller chercher le maximum de ses électrices et de ses électeurs
21:25 et d'avoir le maximum de députés.
21:27 On a fait la nupe aux élections législatives,
21:30 y compris pour contrer le scrutin majoritaire.
21:33 Et ça a été utile.
21:34 Je pense qu'il faudra une candidature commune en 2027
21:38 pour espérer l'emporter.
21:40 Mais quand aux européennes,
21:42 vous avez la proportionnelle à un tour qui fait vivre
21:45 la diversité des positions,
21:47 il faut embrasser ce système.
21:51 Et les écologistes, effectivement,
21:53 ils ont cette particularité, qui est une fierté,
21:57 d'être absolument pro-européens,
21:59 de combattre les complaisances économiques et politiques
22:03 vis-à-vis de la Russie, vis-à-vis de la Chine.
22:06 - C'est-à-dire des sujets où vous n'êtes pas tout à fait d'accord
22:08 avec les Insoumis, c'est ça ?
22:09 - Exactement.
22:11 Et voilà, c'est la vie démocratique.
22:13 Je ne dis pas que mes idées sont supérieures aux autres,
22:16 mais je les défends avec conviction.
22:18 Je veux dire, moi, par exemple, le dernier débat
22:20 qu'on a eu sur Taïwan et la Chine,
22:22 le mot-clé qui est censé tout résoudre,
22:24 c'est « non-alignement ».
22:25 Et on se réfère à De Gaulle comme si on avait répondu à tout.
22:28 Je veux dire, utiliser des mots de la guerre froide
22:32 pour se mettre prétendument à équidistance
22:36 d'une des petites démocraties comme Taïwan
22:38 et d'une dictature énorme comme la Chine populaire,
22:43 je trouve que c'est une forme de renoncement.
22:45 - Pourtant, Olivier Faure du Parti socialiste
22:48 semble ouvrir la voie à une liste commune.
22:51 Son numéro 2 l'a dit dans le journal du dimanche ce dimanche.
22:55 Et Sandrine Rousseau aussi ne ferme pas la porte.
22:57 Alors, Manon Bry, ce matin, dit « Les socialistes nous ouvrent la porte,
23:00 les écolos ne sont pas si unanimes, faisons l'alliance ».
23:02 - Écoutez, qui est une personne qui est une position différente
23:06 que celle qui a été y compris adoptée.
23:09 Encore une fois, l'enjeu, ce n'est pas la défiance
23:11 des avis des autres forces de gauche.
23:13 L'enjeu, c'est de dire « le combat européen mérite d'être mené en tant que tel ».
23:19 Et je vois dans ces réactions trop d'instrumentalisation nationale
23:25 du scrutin européen.
23:25 En fait, ce que nous disent beaucoup de responsables politiques à gauche,
23:28 c'est « on a fait la nupèce aux législatives,
23:31 pour nous, c'est important de continuer ».
23:33 Peu importe, au fond, ce qu'il adviendra au Parlement européen.
23:36 Eh bien, je ne suis pas d'accord.
23:37 Au Parlement européen, on obtient des victoires,
23:41 pas souvent, mais on obtient des victoires.
23:43 Et c'est l'enjeu européen mérite en tant que tel d'être défendu.
23:46 - Question rapidissime, vous êtes candidat au sénatorial à Paris en septembre prochain,
23:50 plus tôt donc qu'aux européennes de 2024.
23:52 Vous en aviez marre de l'Europe ?
23:54 - Non, mais j'ai fait déjà quasiment trois mandats au niveau européen.
23:58 Et puis, je l'ai dit, moi, je veux contribuer
24:01 à ce qui est ce sursaut républicain,
24:03 à ce qui est ce projet écologiste et de gauche pour 2027.
24:07 Donc, je veux m'investir pleinement à l'échelle nationale,
24:10 parce que je pense que notre pays est en danger
24:13 et que quand on se bat au niveau européen,
24:15 on n'obtient pas tout, mais on obtient des victoires sur l'environnement.
24:18 Et quand on voit que la France est condamnée à peu près sur tous les sujets environnementaux,
24:22 les renouvelables, l'efficacité, l'eau, la protection des dauphins,
24:25 eh bien, j'ai envie d'agir sur les politiques législatives,
24:28 d'agir sur les politiques publiques nationales
24:30 pour que notre pays sorte de l'inaction écologique.
24:33 - Ça veut dire que vous êtes déjà candidat pour 2027 ?
24:35 - Non, je vais être au Sénat !
24:37 - Ça peut être un tremplin, vous savez.
24:39 - On sait jamais.
24:40 - Merci en tout cas Yannick Jadot d'avoir été à notre micro.

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