Le politologue Guillaume Bigot réagit sur les menaces de mort dont étaient victimes deux étudiants de l'UNI à Grenoble: «Ce qui est choquant, c'est de laisser place à l'intimidation».
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00:00 Guillaume Bigaud, l'université c'est quand même un lieu où doivent vivre les idées,
00:04 a priori les échanges sont possibles, manifestement il y a une forme d'intolérance,
00:08 est-ce qu'aujourd'hui on pourrait dire qu'il y a une forme quelque part de terreur intellectuel dans certains milieux universitaires ?
00:14 Oui, on peut aussi rappeler quand on prend du recul que l'université c'est un lieu particulier,
00:22 il y a des libertés universitaires depuis le Moyen-Âge,
00:25 c'est un peu la condition aussi de l'élaboration de la science, il faut vraiment que le débat soit libre, qu'il n'y ait pas de pression etc.
00:32 Et souvent dans l'université, depuis toujours, depuis le début de l'université,
00:37 on a des théories un peu foutraques, on a des théories un peu hérétiques,
00:41 les grands intellectuels, les grands universitaires défendent des thèses un peu hurluberlues,
00:47 donc l'extrémisme sous toutes ses formes, la bizarrerie intellectuelle, appelons-ça comme ça,
00:53 ça a toujours été présent dans l'université.
00:55 Mais ce n'est pas gênant parce que la règle de base c'est la liberté.
00:59 C'est la vie des idées quelque part.
01:01 C'est la vie des idées et c'est la condition pour que les idées s'élaborent,
01:04 qu'on puisse tester des théories un peu farfelues.
01:06 Et c'est pour ça que dans les plus grands établissements français, je pense à Normale Sup,
01:12 avec cette influence de l'ultra gauche, de l'ultra gauche très maoïste, hyper agressive,
01:19 qui était représentée par des grands philosophes comme Althusser par exemple,
01:23 il y a toujours eu cette tradition.
01:25 Donc que l'université soit pénétrée par des courants extrêmes,
01:28 même parmi ses professeurs et ses plus éminents professeurs, etc., ça a toujours existé.
01:32 Ce n'est pas ça qui est choquant.
01:33 Ce qui est choquant c'est de laisser la place à l'intimidation.
01:36 Et ce qui est choquant aussi, c'est que ce n'est plus le magistère de ces intellectuels,
01:41 quitte à ce qu'ils aient des idées parfois très contestables,
01:44 mais surtout pas les mêmes idées.
01:46 C'est-à-dire qu'il faut que les idées puissent s'opposer,
01:48 et qu'il n'y ait pas un monopole intellectuel, un étouffoir,
01:51 que ça devienne un étouffoir idéologique.
01:53 Eh bien, ce qui est très gênant là, c'est que la force brute,
01:59 des nervices, des brutasses, puissent intimider les étudiants.
02:06 Et donc ce n'est pas seulement la pénétration de l'extrémisme dans l'université,
02:10 c'est vraiment le règne du plus fort.
02:13 Pourquoi c'est le règne du plus fort ? Parce qu'il y a une lâcheté administrative,
02:16 parce que je pense que dans notre société, on ne sait plus ce que ça veut dire de commander.
02:20 On gère, on manage, on ouvre son petit parapluie, on se couvre en tant que dirigeant.
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