Agnès Verdier-Molinié : «On rajoute toujours des taxes, mais on n’en enlève jamais»

  • l’année dernière
Invitée sur le plateau des Visiteurs du Soir sur CNEWS, Agnès Verdier-Molinié s'est exprimée sur la question de la fiscalité. Selon la directrice de l'IFRAP, «on rajoute toujours des taxes, mais on n’en enlève jamais».

Category

🗞
News
Transcript
00:00 2022 a été l'année où les Français, les entreprises françaises ont payé le plus d'impôts depuis les années 90.
00:06 Vous parlez d'overdose fiscale.
00:08 Oui, on y est clairement. C'est assez incroyable, d'ailleurs, ce qui se passe.
00:11 On n'arrête pas de nous parler de baisse d'impôts ces dernières années.
00:15 Et on n'a jamais payé autant. On est à 45,3% de taux de prélèvement obligatoire.
00:20 Alors, c'est pas moi qui le dis. Ce sont les chiffres annexés au budget de cette année 2023 qui le montrent et qui refont la série.
00:28 Sous François Hollande, c'était moins de 45% ?
00:30 Oui, on avait atteint 45,1% en 2017. Mais là, on est au-dessus.
00:37 Mais c'est pourquoi ? C'est parce qu'il y a eu l'inflation aussi.
00:39 Et l'inflation, par exemple, ce qui est assez incroyable, c'est qu'on nous a dit prélèvement à la source, sur l'impôt sur le revenu,
00:46 ça va être formidable parce qu'on va tout changer en temps réel.
00:50 Sauf qu'on a tout changé en fonction des revenus des Français en temps réel, mais pas en fonction, finalement, des circonstances économiques du moment.
00:57 Donc, on a revalorisé le barème de l'impôt sur le revenu que de 1,5% d'inflation en 2022, alors qu'on a eu presque 6% d'inflation.
01:07 C'est quand même rigolo. C'est-à-dire qu'on vous prend en temps réel sur vos revenus de l'année, même s'ils ont beaucoup augmenté.
01:12 Mais alors, on vous calcule l'inflation en dessous de ce qu'elle était.
01:15 Ça va y être, il va nous le rendre.
01:16 Non, mais alors, ça fait 3 ou 4 milliards, peut-être plus, d'impôts sur le revenu payés en trop par nos compatriotes.
01:23 Et d'ailleurs, on le voit dans les questions...
01:23 Il va nous le rendre. L'État va nous le rendre.
01:26 Il va nous le rendre...
01:28 On ne peut pas dire ça exactement comme ça.
01:30 D'une certaine manière, toute la dépense publique, on nous le dit tout le temps, c'est pour vous.
01:35 L'État dépense pour les Français, l'État dépense pour les entreprises françaises, etc.
01:39 Mais finalement, quand on se penche sur comment ça se passe, et c'est ce que je dis dans mon livre, on ne sait pas la qualité.
01:46 On met de l'argent, on met des milliards, 1 500 milliards par an.
01:49 Mais alors, à la fin, on n'a pas le droit de savoir si tel hôpital est meilleur que tel autre,
01:56 si tel école...
01:56 On n'a plus le droit de classer les hôpitaux.
01:58 On n'a plus le droit. C'est ça.
02:00 Donc, on est dans la transparence, on est dans l'ouverture de la donnée publique,
02:04 on est dans "en avoir pour mes impôts", là, c'est la nouvelle campagne de Bercy.
02:09 Mais alors, depuis cette année, la CNIL a décidé qu'on n'avait plus le droit de classer les hôpitaux et les cliniques.
02:15 Ça fait combien ? 20 ans que Le Point et d'autres faisaient des classements entre les hôpitaux et les cliniques
02:22 grâce à des données publiques, celles hospitalières, informatiques, qu'on appelle le PMSI.
02:27 Mais alors maintenant, juste pour dire que la CNIL nous dit "non, on ne peut pas classer
02:32 parce que ça risquerait d'influencer sur le choix de l'hôpital ou de la clinique".
02:36 Mais on rêve !
02:37 C'était un peu le but.
02:38 Non, mais on rêve, en fait.
02:40 Donc, on n'a pas le droit de savoir si ma petite grand-mère, si elle se fait opérer de la hanche,
02:44 est-ce qu'elle sera mieux à tel ou tel endroit ?
02:46 Ou si on a une opération de la cataracte à faire, quel est le meilleur endroit ?
02:50 Non, mais c'est quelque chose qui est extrêmement grave.
02:53 Parce qu'on ne peut pas être le pays qui dépense le plus, qui taxe le plus.
02:57 Et alors, on dit aux Français "circulez, braves gens, il n'y a pas besoin de se poser de questions".
03:02 C'est complètement contraire à l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
03:06 Oui, mais vous dites vous-même que, en fait, on n'est pas du tout, face à Bercy, on n'est pas du tout protégé.
03:10 Même le Conseil constitutionnel ne fait pas son travail, d'après vous.
03:14 Non, parce qu'en fait, il a mis un maximum d'impôts,
03:16 mais que pour les gens qui payent l'impôt sur la fortune immobilière.
03:19 Alors, ça ne représente quand même pas énormément de personnes en France.
03:22 Et donc là, c'est 75% maximum d'impôts et encore, ça ne compte pas tous les impôts.
03:27 Alors, pour les autres, c'est combien le maximum ? On ne sait pas.
03:31 Alors, ça peut monter très très haut.
03:33 Et puis finalement, on se dit, quand on regarde les chiffres,
03:36 il y a 10% qui gagnent le plus en France et encore,
03:39 on rentre dans les 10% à 3 400 euros par mois.
03:43 Donc, bon, ce n'est pas non plus énorme,
03:45 mais c'est eux qui payent 50% de la recette d'impôts sur le revenu.
03:48 Et sur tous les impôts directs, c'est 70% même.
03:52 Sur tous les impôts directs, c'est 50%.
03:54 Ça veut dire qu'en gros, il y a une pression fiscale
03:56 qui s'abat en permanence toujours sur les mêmes.
03:59 Et en même temps, on nous dit, il y en a des riches qui ne payent pas assez, etc.
04:02 Alors qu'il y a eu des taxes exceptionnelles créées, mais jamais supprimées.
04:05 La taxe sur les hauts revenus à 3 et 4%, elle n'est pas supprimée, elle est toujours là.
04:10 Elle a été créée en 2012 pour financer la crise de 2008.
04:14 On a toujours cette taxe exceptionnelle.
04:16 Et donc, on rajoute toujours des taxes, mais on n'en enlève jamais.
04:19 Et chaque fois qu'on annonce des baisses d'impôts,
04:20 en fait, on voit que d'un autre côté, ça monte.
04:23 C'est un peu un jeu de bonnes taux, mais c'est normal d'une certaine manière.
04:26 Parce que de l'autre côté, la dépense ne baisse jamais.
04:29 Donc, comment imaginer qu'il y ait vraiment un reflux de l'impôt
04:32 si en face, on ne sait pas où va l'argent,
04:34 on ne sait pas comment il est dépensé, on ne connaît pas la qualité
04:37 et le Parlement ne fait pas son travail non plus
04:39 d'évaluation des politiques publiques.
04:41 [Musique]
04:45 [SILENCE]

Recommandée