Ces deux chercheuses africaines en intelligence artificielle impressionnent le monde entier

  • l’année dernière
Les deux chercheuses tunisiennes Rihab Gorsane et Omayma Mahjoub se sont alliées à des scientifiques sud-africains pour publier un article de recherche en intelligence artificielle remarqué fin 2022 aux États-Unis. Leur aventure a inspiré la création d'un film intitulé "Cape To Carthage". Leur combat se rapproche de celui d'Indaba, un collectif qui veut valoriser une intelligence artificielle plus fine, en s'appuyant notamment sur la diversité de langues du continent africain.

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Transcript
00:00 Et la chronique tech c'est avec Guillaume Gralet comme chaque vendredi. Bonjour Guillaume.
00:04 Bonjour Ashren.
00:05 Le monde entier s'étonne, on en a beaucoup parlé ensemble des progrès récents de l'intelligence
00:10 artificielle et réfléchit à sa régulation. Deux scientifiques africaines viennent à ce
00:15 sujet de publier un papier de recherche remarqué. Il y a quelques semaines déjà on avait parlé,
00:21 vous nous aviez donné un avant-goût de la recherche en intelligence artificielle qui
00:24 était particulièrement dynamique en Afrique.
00:26 Oui et on donne notamment une communauté de chercheurs qui s'appelle Indaba, pas moins
00:30 de 400 chercheurs africains qui se sont déjà réunis à Nairobi, bientôt au Ghana, en
00:36 Tunisie et en Afrique du Sud. Et en réalité cette communauté de chercheurs soutient une
00:40 initiative absolument fabuleuse qui s'appelle Masakane, ça veut dire "Nous construisons
00:44 ensemble en Zulu". L'idée c'est de s'appuyer sur pas moins de 2000 langues africaines,
00:49 on connaît le pidgin, par exemple le poko ou encore le yoruba, pour créer un modèle
00:54 de langue qui va permettre de créer des alternatives à chaque GPT dont on parle tant. Mais voilà,
01:00 ça ne se passe pas uniquement aux Etats-Unis, en Chine et en Europe, il y a de plus en plus
01:05 d'initiatives africaines. On doit à des entrepreneurs comme Karim Beghir, un polytechnicien
01:10 franco-tunisien diplômé de l'université de New York qui a fait grandir Instadip, une
01:15 société qu'il a bien revendue. Il veut convaincre de plus en plus les chercheurs
01:20 africains de rester sur le continent et de s'épanouir, de créer une intelligence artificielle
01:24 différente. Et justement dans ce domaine de recherche,
01:26 deux femmes scientifiques africaines viennent donc de se distinguer.
01:30 Oui, elles s'appellent Riyab Ghorsan et Omaima Madjoub, elles ont grandi en Tunisie,
01:36 elles ont été diplômées en Tunisie. Et ce qui est très intéressant, c'est qu'à
01:41 Neurips, qui est un petit peu le grand rassemblement de l'intelligence artificielle, c'était
01:44 le cas l'année dernière aux Etats-Unis, elles ont été ce qu'on appelle les "lead
01:48 authors", c'est-à-dire les auteurs principaux d'un document de recherche sur ce qu'on
01:52 appelle l'apprentissage par renforcement, par agents interposés, c'est-à-dire qu'on
01:57 est vraiment dans une intelligence artificielle pointue.
02:00 Ça peut être utile par exemple pour la conduite autonome, c'est-à-dire lorsque vous avez
02:02 plusieurs facteurs qui vont permettre, en prenant compte les uns des autres, une voiture
02:07 de faire le moins d'erreurs possible. On est dans une intelligence artificielle
02:12 très intéressante et là on voit bien deux Tunisiennes qui sont aux avant-postes.
02:17 Ce qui est intéressant avec cette aventure, c'est également le nom d'un film qui
02:19 s'appelle "Capt to Carthage" parce qu'elles ont pu s'appuyer sur des chercheurs qui
02:23 viennent cette fois-ci d'Afrique du Sud. On voit bien l'union entre différents pays
02:27 d'Afrique, l'Afrique du Sud et la Tunisie. Ce film, il a été joué dans plusieurs festivals.
02:35 Il va encore l'être à l'université Johannesburg. C'est une véritable aventure qui, je pense,
02:41 va créer des vocations. Et pourquoi la publication de ces deux scientifiques
02:44 est-elle si importante ? Elle est très importante parce qu'elles
02:48 estiment, ces deux scientifiques avec qui j'ai pu converser, qu'elles peuvent servir
02:52 de rôle modèle. C'est-à-dire qu'elles disent que trop souvent, la recherche vient
02:56 des États-Unis, vient d'Europe, on en parlait tout à l'heure, ou encore de Chine.
03:00 Mais qu'elles peuvent montrer, encore une fois, en s'appuyant sur la richesse africaine,
03:05 notamment les modèles de langue, qu'on peut créer des choses en Afrique particulièrement
03:10 intéressantes. C'est ce qu'on appelle l'apprentissage coopératif par renforcement
03:13 multi-agents, M-A-R-L. Ça a l'air un petit peu technique, mais lorsque je me suis un
03:17 petit peu plongé, j'ai véritablement été inspiré et ça donne envie d'en savoir
03:23 plus. Il y a d'autres chercheurs africains dans
03:25 ce domaine que vous avez trouvé intéressants ?
03:27 Oui, il y a une chercheuse qui est absolument super intéressante également. Elle s'appelle
03:30 Adjie Bousso-Dieng. Elle nous vient du Sénégal. Elle est passée par le lycée Henri IV à
03:38 Paris, elle est diplômée de Télécom Paris. Mais c'est une des premières scientifiques
03:43 de couleur à enseigner à Cornell University. Ce qui est très intéressant, c'est qu'elle
03:48 explique un petit peu son cheminement. Elle explique à quel point elle veut créer des
03:51 vocations. Il y a d'autres chercheurs que je trouve également inspirants, comme Moustapha
03:56 Sissé. Vous savez, c'était un des pionniers de l'intelligence artificielle, notamment
04:00 au Ghana pour Google. Aujourd'hui, il a créé une chair en intelligence artificielle dans
04:05 une école que j'aime beaucoup. On en avait parlé à Schrein-Ensemble, l'Institut
04:08 des sciences africaines des mathématiques. Et Moustapha Sissé, lui aussi, veut créer,
04:13 veut donner des vocations pour les scientifiques africains.
04:15 Et des initiatives et des recherches qui se multiplient alors qu'un nombre croissant
04:19 de pays cherche à mieux réguler l'intelligence artificielle.
04:22 Oui, on a énormément parlé de régulation cette semaine. On a vu Sam Altman, notamment
04:25 vous savez le co-créateur d'OpenAI, la maison mère de Chad GPT, s'expliquer devant les
04:30 autorités américaines sur un besoin de régulation. Il le dit lui-même, il faut réguler. On
04:34 a vu ces dernières semaines l'Italie interdire momentanément Chad GPT. La ville de Montpellier
04:39 également prendre beaucoup de précautions. Et on risque de voir dans les prochains mois
04:44 de plus en plus de pays africains, je pense notamment au Burkina Faso, au Gabon, le Mali,
04:48 le Kenya ou encore la Côte d'Ivoire, l'Ouanda et le Soudan, qui sont réunis au sein de Smart
04:54 Africa, réfléchir de plus en plus à une régulation qui permette à une intelligence
04:58 artificielle d'aider l'homme, de ne pas uniquement prendre ses données personnelles, de respecter
05:03 les droits d'auteur et de créer une intelligence artificielle qui fera peut-être école dans
05:06 le monde entier.
05:07 Merci beaucoup Guillaume pour cette chronique tech. Restez avec nous sur France 24.

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