• l’année dernière
Transcription
00:00 Les pets, on ne parle que des pets.
00:01 Mais tout le monde pète.
00:02 Quand on pète, oh là là, quelle horreur.
00:05 Là, c'est pas un pet.
00:06 C'est un bruit fantastique de pets, c'est autre chose.
00:09 Des repas gargantuesques,
00:10 des quadragénaires au bout du rouleau
00:12 et des flatulences.
00:13 Il règne à Cannes en 1973 un parfum de scandale.
00:18 Le film de Marco Ferreri qui s'appelle "La Grande Bouffe",
00:21 c'est un long métrage qui risque de faire grincer quelques dents sur la croisette.
00:24 Vous connaissez le thème, quatre hommes décident de se suicider
00:26 par une énorme indigestion et dans une atmosphère un peu particulière.
00:29 Bonne chance, c'est bon, c'est encore bon.
00:31 Le film réalisé par l'italien Marco Ferreri
00:35 est projeté en compétition officielle.
00:37 Il est aimé par une partie du public
00:38 qui le trouve obscène, licencieux et pornographique.
00:41 Un scandale !
00:42 Un scandale !
00:42 Un scandale !
00:43 Ça gagne du pognon, ça.
00:47 Sur le dos du pauvre papuleau.
00:49 Avec "La Grande Bouffe", Marco Ferreri affiche un goût certain
00:52 pour la provocation et la décadence.
00:53 Le truculent réalisateur explique avoir voulu faire un film
00:56 non pas psychologique, mais physiologique
00:59 pour dénoncer ce qu'on commence alors à appeler
01:01 la société de consommation.
01:02 La société, c'est une société où un petit groupe de gens
01:12 ils bouffent beaucoup
01:13 et où 90% ne bouffent rien.
01:18 Alors j'ai fait du cinéma pour les gens qui bouffent.
01:22 Je veux que les gens qui bouffent beaucoup
01:25 se regardent dans ce film comme un miroir.
01:28 Si on ne comprend pas qu'on va bouffer l'esprit
01:34 dans ces sociétés, on est vraiment bouffé pour cette société.
01:38 Le film est défendu par son casting franco-italien
01:40 essentiellement masculin dans "Michel Piccoli".
01:42 On dit aussi toujours que c'est un film sur l'horreur.
01:45 C'est le contraire, c'est un film d'éveil.
01:47 C'est un film pour se réveiller, pour voir comment on vit,
01:50 comment certaines personnes vivent, et on peut vivre autrement.
01:53 Bonjour, monsieur !
01:55 Démeure un peu libre, un peu légère.
01:58 Nous verrons bien.
01:59 Et on parle aussi de vulgarité et de sexe.
02:03 C'est parce que les gens ont encore peur des choses,
02:05 alors ils emploient des mots qui cachent toute la vie.
02:09 On met "sexe" pour ne parler de rien,
02:11 on met "vulgarité" pour ne parler de rien.
02:14 Alors quand on a dit ces deux mots, c'est vulgaire,
02:17 alors c'est le paravent.
02:19 Alors que nous baignons dans la vulgarité,
02:21 enfin je veux dire aussi bien à Cannes, sur la croisette,
02:24 que à la télévision française,
02:27 on vit dans la vulgarité.
02:29 À parler de vulgarité à propos de ce film,
02:31 c'était vraiment faire une erreur de plus.
02:33 Alors pourquoi c'est dans ce climat ?
02:34 C'est aussi un film d'amour, de tendresse.
02:36 De tendresse et d'amitié.
02:38 Ferreri aime ces quatre personnages.
02:39 Malgré la polémique,
02:40 La Grande Bouffe remporte le prix de la critique internationale.
02:43 Les journalistes sont divisés devant cet objet cinématographique étrange,
02:47 mais le film connaît un grand succès en salles,
02:49 avec 2,5 millions de spectateurs.
02:51 C'est peut-être le film qui donnera,
02:54 de ces années de la fin du XXe siècle,
02:57 l'image la plus exacte de ce que représentent
03:00 les nations dites civilisées,
03:02 les nations repues, les nations gavées,
03:05 et qui est un spectacle répugnant.
03:06 Monsieur Ferreri a fait un film sur la consommation
03:09 et sur la pollution,
03:10 en montrant que les gens qui mangent,
03:12 qui consomment et qui bouffent,
03:14 provoquent comme déchet la merde
03:16 et que nous serons tués par la merde.
03:18 Par conséquent, c'est un film magistral
03:20 et parfaitement percutant.
03:21 [Musique]

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