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Chroniqueuse : Julia Vignali


La voix de Florent Pagny habite tous les Français, même si sa parole est rare. Julia Vignali accueille le chanteur qui signe son autobiographie « Pagny par Florent » chez Fayard. Il se raconte et se confesse aussi sur son cancer qui combat depuis plus d'un an maintenant. 

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Transcription
00:00 Bonjour Florent Pagny, merci d'avoir accepté l'invitation de Télématin.
00:03 Alors ce matin, nous allons parler de votre autobiographie,
00:06 "Pagny par Florent", ça pèse lourd, c'est un sacré pavé,
00:09 c'est pas moi qui le dis, c'est vous qui le dites.
00:11 Pavé que vous avez co-écrit avec Emmanuel Cossod.
00:13 Alors vous vous racontez de votre enfance à aujourd'hui,
00:16 vos hauts, vos bas, en toute intimité.
00:18 Et forcément, la première question qu'on se pose tous,
00:20 c'est comment vous allez Florent ?
00:22 Ah, je vais plutôt bien, sinon je ne serais pas là.
00:25 Non mais c'est vrai que toutes ces vies, plus celle-ci,
00:33 fait qu'à un moment c'est un peu lourd mais c'est sympa.
00:36 Et en ce moment c'est trop lourd ou ça va mieux ?
00:38 Non, non, justement en ce moment c'est sympa,
00:40 ça a été lourd mais c'est devenu plus sympa.
00:42 Mais bon, comme on sait que maintenant c'est ondulatoire
00:45 et puis que ça va durer longtemps, on est cool,
00:48 on croise les doigts, ça se passe bien.
00:49 Vous parlez de votre cancer maintenant avec des hauts, des bas, c'est ça ?
00:51 Vous vous êtes habitué à l'idée que ça allait bien,
00:53 puis moins bien, puis revient ?
00:55 J'ai compris que ce n'était pas quelque chose
00:57 qui se soignait avec 15 jours d'antibiotiques,
00:59 donc j'ai pu même vivre le moment où ça revient,
01:03 ah c'est reparti.
01:04 Mais bon, tu commences à connaître un peu ton sujet
01:08 et à gérer les situations.
01:10 Et en fait, j'ai de la chance,
01:13 le protocole fonctionne à chaque fois super bien.
01:16 Maintenant j'ai compris, j'arrête de ne pas le prendre.
01:18 Oui, c'est ça, vous ne partez plus 5-6 mois ailleurs.
01:21 Si, mais je vais gérer pour avoir le produit
01:23 que j'ai besoin. Cette immunothérapie,
01:25 elle progresse tellement qu'il ne faut pas s'en priver.
01:28 Et c'est vrai que pendant 5 mois, je l'ai abandonné, mais bon.
01:31 C'est fini.
01:32 Voilà, c'est passé. Maintenant, je reprends du poil de la bête.
01:36 La chimio est derrière moi, donc dès que les produits chimiques s'éloignent,
01:40 tout devient plus sympa.
01:43 Et à la fin, tu te dis, OK, c'est bon, là je vais commencer à rechanter.
01:47 Oui, c'est ça, cette tournée, on va en parler tout à l'heure.
01:50 Oui, pas même avant, je vais retourner en studio,
01:52 je vais retravailler parce que c'est un muscle aussi.
01:53 Et donc, nous, le problème...
01:56 Et votre voix n'a pas été abîmée d'ailleurs ?
01:57 Non, non, la voix, elle marche bien. C'est l'oxygène qui a manqué un peu.
02:00 Le souffle, ça se travaille.
02:01 Oui, mais bon, ça va avec l'âge aussi.
02:03 Vous décomposez votre vie en 7 chapitres
02:05 et vous racontez les 7 vies que vous avez eues jusqu'ici.
02:08 On va commencer par la première, c'est celle de l'enfance.
02:10 On apprend que vous étiez hyperactif, un électron libre.
02:13 Et je me suis dit en lisant le bouquin qu'en fait, ça n'avait pas vraiment changé.
02:16 Vous tenez ça de qui finalement ?
02:17 De votre grand-père paternel qui avait une voix remarquable
02:20 ou de votre mère qui aurait voulu être chanteuse ?
02:22 Moi, je pense que je tiens plus de ma mère qui est un peu aussi rapide.
02:28 Non, mais c'est vrai que j'ai pu identifier les problèmes que j'avais quand j'étais enfant
02:33 puisque j'ai passé ma vie.
02:34 Ils ont passé leur vie aussi à m'accompagner au pédopsychiatre
02:37 parce qu'il y a un moment, tu fais "Putain, le moum, il est dur à gérer".
02:40 Vous étiez ingérable ?
02:41 Pas ingérable, mais j'en faisais quand même beaucoup.
02:43 Et puis, j'étais pointu déjà dans les choix des projets.
02:46 Vous n'étiez pas le seul de la fratrie, il fallait s'occuper aussi des trois autres ?
02:49 Oui, on est quatre enfants.
02:51 Vous étiez crevant.
02:51 Moi, je suis le troisième.
02:52 Donc, à un moment, tu fais "Oh là là, celui-là, il va falloir trouver une solution".
02:55 La solution, vous l'avez trouvé.
02:57 Il y avait une révélation.
02:58 À 11 ans, vous interprétez une chanson de Gérard Lenormand
03:01 et vous prenez conscience que votre voix, en fait, c'est un trésor, comme vous l'appelez.
03:06 Est-ce que c'est là que tout a commencé avec cette chanson de Gérard Lenormand
03:09 où vous êtes vous-même sidéré par votre trésor ?
03:12 Non, parce que moi, je sais ce que c'est le trésor parce que ma mère l'avait déjà.
03:16 Et donc, j'avais déjà constaté que dès qu'elle arrivait et qu'elle chantait,
03:20 ce qu'elle provoquait autour.
03:21 Donc, j'étais un peu dans un espèce de mimétisme où je me disais
03:25 "Tiens, si je pouvais faire la même chose".
03:26 Et quand d'un seul coup, ça se révèle,
03:28 "Waouh, tu sais que... Oh là, attends, j'ai 11 ans,
03:31 je suis un petit bonhomme auquel on ne fait pas attention,
03:35 mais qui a besoin beaucoup de reconnaissance".
03:37 Évidemment, quand je chante, tout le monde me regarde.
03:39 Ah bah oui, oui. Donc, c'était mieux que d'ouvrir toujours sa grande bouche
03:42 comme j'avais parce que j'avais déjà ce son-là
03:45 qui faisait que je prenais toujours le dessus vocalement sur le groupe.
03:48 Et si c'était pour dire une connerie, je le faisais au-dessus aussi.
03:52 Alors, acteur ensuite, puisque vous vous envoyez seul à Paris à 15 ans
03:55 pour vivre votre rêve de chanteur.
03:57 Mais une voyante, vous avez prévu que ça n'allait pas être si simple que ça,
04:00 qu'à priori, ça allait mettre du temps à venir la carrière de chanteur.
04:03 C'est le cas puisque ça ne décolle pas tout de suite.
04:05 Vous êtes tout d'abord acteur.
04:07 Une rencontre déterminante en boîte de nuit avec Dominique Besniard,
04:11 un grand agent d'acteur qui n'était pas encore, mais qui l'est devenu.
04:15 Vous croyez au destin avec ce genre de rencontre,
04:17 aux planètes qui s'alignent à ce moment-là ?
04:21 Je crois à un ensemble d'éléments qui peuvent s'appeler le destin,
04:24 les planètes qui s'alignent et la chance.
04:27 Mais comme pour tout le monde, la chance, il faut l'attraper,
04:30 il faut l'identifier et il faut retenir, il faut ressentir.
04:34 Quand je rencontre la Berte, j'ai 11 ans.
04:37 La Berte est importante parce qu'elle est beaucoup plus
04:41 dans quelque chose qui t'emmène plus loin dans le spirituel.
04:44 Quand elle te dit "tu vas y arriver", mais ça ne va pas arriver tout de suite,
04:48 mais elle te donne beaucoup d'espoir.
04:49 Parce que si on te dit "tu vas y arriver, mais on ne t'a pas précisé",
04:53 si ça ne vient pas, tu commences à être déçu, tu perds tes pouvoirs.
04:56 En sachant que tu as le temps, tu gardes toujours le pouvoir.
04:58 Vous croyez au destin, mais vous croyez aussi à la persévérance.
05:01 Vous dites d'ailleurs "mon destin est toujours d'aller provoquer les choses".
05:04 À chaque étape, personne ne m'attend, personne ne m'invite,
05:07 on m'éconduit même souvent, mais à la fin,
05:09 ma détermination se révèle toujours payante.
05:11 Est-ce que c'est grâce à cette détermination que le succès arrive enfin en 1987,
05:15 quand vous avez 27 ans avec le titre "N'importe quoi".
05:18 Est-ce qu'à ce moment-là, c'est une libération ?
05:19 Est-ce que vous vous dites "j'ai bien fait de ne pas renoncer" ?
05:22 Est-ce que vous y avez songé d'ailleurs à renoncer ?
05:25 Non, non.
05:27 On a tous ses hauts et ses bas, donc à un certain moment,
05:30 quand la nature t'a fait un don et que tu l'as identifié,
05:35 tu commences à le travailler, tu peux peut-être avoir un peu de talent.
05:38 Donc à un moment, tout ça réuni te permet de suivre une trajectoire.
05:43 Tu ne vas pas lâcher, je n'ai pas perdu ma voix.
05:46 J'ai eu des moments où c'était plus down, mais d'un seul coup,
05:48 j'ai repris et la voix a toujours repris le dessus.
05:52 Donc tu suis et puis tu t'accroches.
05:55 Et puis à un moment, oui, c'est vrai que moi, je n'étais pas musicien,
05:58 je n'étais pas auteur. Je me suis mis à faire une chanson,
06:01 à composer avec trois accords que je connaissais
06:04 et à écrire avec le mal que j'avais d'utiliser une plume.
06:08 Et ça a fait ma première chanson.
06:10 Alors en plus, je l'ai appelée n'importe quoi.
06:11 Donc tu vois, tout était cohérent.
06:13 Tout était assez cohérent par rapport à ce qui se passait.
06:15 Alors dans votre livre, vous évoquez également votre idylle
06:17 avec Vanessa Paradis qui a beaucoup marqué le public à l'époque.
06:21 Cette histoire, vous la comparez au film "Star is born"
06:23 dans lequel un couple est divisé.
06:24 L'un prend la lumière pendant que l'autre s'éteint.
06:26 C'est vraiment ce qui vous est arrivé à vous deux ?
06:28 Elle a commencé à décoller au moment où vous sombriez ?
06:30 Oui, de toute façon, tout est gravé.
06:34 On passait à la télé.
06:35 Donc à un certain moment, on a pu bien constater
06:37 qu'il y avait une carrière qui explosait.
06:40 Que vous avez aidé aussi à exploser.
06:41 Parce que vous expliquez dans le livre que vous avez un peu rangé sa chambre à Vanessa.
06:44 C'est-à-dire qu'elle n'était pas forcément toujours bien entourée.
06:46 Vous avez fait du travail.
06:47 J'ai aidé parce que c'était une association.
06:50 Donc c'était les événements qui proposaient ça.
06:54 Un moment, soit tu ne sais pas le gérer, soit tu peux le vivre.
06:58 Et c'était particulier.
06:59 Ça a duré trois ans et c'était hyper intéressant.
07:01 Et ça nous a permis à tous les deux d'apprendre et de comprendre plein de choses.
07:06 Mais c'est vrai qu'elle, elle est montée dans les étoiles
07:07 et moi, je suis rentré à la cave.
07:09 Mais ça ne m'a pas empêché de remonter derrière et de côtoyer les étoiles aussi.
07:13 Et justement, un jour, une femme qui vous porte sur ses épaules,
07:16 c'est la rencontre, celle avec votre femme, Asusena,
07:19 votre héroïne, votre moitié comme vous l'appelez,
07:22 qui va totalement bouverser votre existence.
07:25 Elle vous a sauvé vraiment au moment de votre descente aux enfers.
07:28 Plus de succès, plus d'argent, plus de maison.
07:30 Quand elle vous rencontre, ça ne se passe pas forcément bien.
07:32 Vous ne lui faites pas grande impression.
07:34 Et les autres ne se privent pas pour lui expliquer que vous êtes un peu,
07:38 quoi, infini, c'est ça ?
07:39 Oui, parce qu'à ce moment-là de ma carrière, je suis dans un trou.
07:42 Donc c'est plutôt comme ça que ça se passe.
07:46 C'est plutôt, on monte très haut et puis on redescend.
07:48 De toute façon, tout ce qui monte redescend.
07:50 Et à la fin, ce n'est pas tout le temps que tu remontes.
07:52 Mais c'est vrai que ce n'est pas tout le temps que tu retrouves
07:54 et que tu rencontres d'un seul coup ton deuxième moteur.
07:58 Et là, tu fais, attends, à tous les deux, on peut devenir juste des killers.
08:03 Et on va remonter tout ça.
08:06 Et ça, c'est la chance aussi.
08:07 C'est la chance de rencontrer une personne avec son ADN
08:12 qui correspond parfaitement à ce qui te manque.
08:14 Et toi, tu peux correspondre à ce qui lui manque.
08:16 Et là, ça devient une fusion.
08:18 Et ça fait 30 ans que ça dure.
08:20 Et c'est juste...
08:21 Mais attends, c'est pour ça que depuis le début,
08:23 le mot qu'on utilise le plus, c'est chance.
08:26 Parce que cette chance-là, quand elle arrive,
08:28 mais que tu as su...
08:30 C'est vrai que c'était pas...
08:30 Il faut la reconnaître aussi, la chance.
08:32 C'était pas difficile à la reconnaître.
08:33 Elle était magnifique.
08:35 Mais en même temps, la difficulté, c'était d'y arriver
08:37 et d'un seul coup de lui révéler le fait.
08:41 Et c'est vrai que ce n'était pas évident dès le départ.
08:43 Surtout qu'elle venait de très loin.
08:44 Elle n'était pas impressionnée par autre chose.
08:46 Elle était mannequin internationale.
08:48 Elle était courtisée par tout le monde.
08:50 Et elle me regardait en ne comprenant pas tout,
08:52 en me disant "Il veut quoi lui ?"
08:55 Et voilà.
08:56 Il voulait juste passer sa vie avec elle.
08:58 Alors cet amour, évidemment, vous porte,
08:59 vous renouez avec le succès.
09:00 Vous collaborez avec de grands auteurs compositeurs
09:02 comme Jean-Jacques Goldman, Pascal Obispo,
09:04 Lionel Florence, qui vous écrivent vos plus belles chansons.
09:08 Vous assumez, vous, pleinement, de n'être qu'un interprète,
09:11 comme Johnny, d'ailleurs, une de vos idoles.
09:13 Oui, oui.
09:14 Ça ne vous pose pas de problème
09:15 quand on dit de vous, vous êtes un interprète.
09:17 Mais attendez, ce n'est pas que ça ne me pose pas de problème.
09:20 C'est que c'est juste une chance aussi.
09:23 Et oui, parce que ça me libère.
09:25 La création, la composition,
09:28 composer, être musicien, écrire et tout,
09:30 ça prend beaucoup de temps.
09:33 Et puis, ça t'immerge dans un truc qui n'était pas le mien.
09:36 Donc moi, je ressortais toujours en dolori.
09:39 Donc, il y en a, ils font beaucoup mieux que moi.
09:42 Par contre, j'ai quelque chose que tout le monde n'a pas.
09:45 Donc chacun a sa place, avec son pouvoir et la réunion de…
09:50 Les différents pouvoirs créent des tubes.
09:52 C'est là que je peux…
09:53 Alors, c'est vrai que je ne peux pas chanter des choses
09:55 qui ne me correspondent pas,
09:56 qui ne sont pas dans mon mode de penser.
10:01 Donc, à un moment, ils sont aussi très proches de ma personnalité.
10:06 Et un mec comme Lionel Florence, on se connaît très peu.
10:09 On ne se voit pas beaucoup, mais enfin,
10:11 on se connaît très bien, mais on ne se voit pas beaucoup.
10:13 Mais il a réussi à mettre les mots sur ce projet.
10:16 À chaque fois, lui, dès le début,
10:18 « Savoir aimer », c'était pour moi.
10:20 Alors, c'était pour moi aussi parce qu'il y avait la musique de Pascal Obispo,
10:24 avec ces mélodies où là, je suis bon aussi, j'aime ça.
10:29 J'aime ces mélodies-là et ma voix, elle est faite pour ça.
10:32 Et avec ces mots-là, je peux vraiment envoyer des messages
10:35 qui vont super loin et qui font du bien à tout le monde et à moi aussi.
10:40 Alors, c'est quoi vos projets à présent, Florent, pour la suite ?
10:42 Votre huitième vie, vous en avez eu sept, vous dites dans le livre.
10:45 Votre huitième vie, elle va ressembler à quoi ?
10:47 À ce qui se passe.
10:49 Et quoi, la tournée ?
10:50 Qu'est-ce qui vous enchante ?
10:53 C'est un tour de retour pour dire,
10:56 « Attendez, je dois pouvoir encore rechanter un peu.
11:00 Pas comme quand je faisais mes tournées un soir,
11:04 enfin, tous les soirs de suite.
11:06 Là, je fais les festivals. »
11:09 Il y a Nîmes le 30 juin, Nancy le 8 juillet,
11:11 et Béziers, les Arènes de Béziers le 17 juillet,
11:13 Ajaccio le 27 juillet.
11:15 Il y a quand même quelques dates.
11:16 Vous vous sentez d'attaque ?
11:18 Oui, je me sens en forme pour pouvoir être d'attaque.
11:23 C'est-à-dire que là, maintenant, le mois de mai va passer,
11:26 le mois de juin, je dois reprendre du service physique.
11:29 Et puis, le mois de juillet, je dois être sur le terrain.
11:32 On sera là pour vous voir, franchement.
11:33 Merci beaucoup pour cet entretien, Florent Pagny.
11:36 Je rappelle la sortie de votre livre passionnant,
11:38 un livre qui s'est déjà vendu d'ailleurs à près de 100 000 exemplaires.
11:41 « Pagny par Florent ».
11:43 Merci beaucoup de nous avoir accordé votre temps et bonne suite.
11:46 Bonne week-end.
11:47 Merci.
11:48 Merci, Florent.
11:49 Et quand même, on a envie de quelques notes de musique, savoir aimer.
11:52 Ah voilà, on voulait se faire plaisir.
11:54 Vous pouvez.
11:55 Merci, Florent.
11:57 Merci, Florent Pagny. Merci infiniment.

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