Il y a 30 ans, en 1993, Marseille remporte le trophée de la Ligue des Champions. Ce sacre a marqué un tournant dans l'histoire du club et dans l'histoire du football français. Éric Di Meco, un joueur mythique de l'Olympique de Marseille, raconte un des plus beaux jours de sa carrière de joueur sur BFMTV.
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00:00 Avec nous sur la musique de Van Halen, évidemment la musique qui accompagne l'entrée des Marseillais quand ils arrivent sur la pelouse du Vélodrome,
00:07 Nicolas Timartoff, vous êtes journaliste à Sous-Foot,
00:10 et l'un des héros du 26 mai 1993, Éric Dimecco, l'un des hommes de cette finale que l'on voit ici soulever la fameuse coupe aux grandes oreilles arrière gauche de l'OM à l'époque.
00:22 30 ans ont passé, Éric ! 30 ans ont passé, j'ai le souvenir de l'unique but de cette finale de Marseille contre l'AC Milan à Munich.
00:37 Tout le monde s'en souvient, Éric. Basile Boli ?
00:41 Oui, c'est toujours dans les mémoires. Moi j'avoue que sur le moment je ne l'ai pas vu parce que j'étais en défense.
00:46 J'ai juste vu les filets trembler ce soir-là en direct.
00:49 Voilà, but de Basile Boli, le seul but de la rencontre, et puis il a fallu tenir pendant 45 minutes, et ce furent des 45 minutes évidemment interminables.
00:57 Il y a tellement de choses à raconter, Éric.
00:59 Ce qui est saisissant d'abord, c'est que je crois qu'il n'y a pratiquement pas un jour sans que l'on te parle à Marseille de cette finale.
01:07 Oui, j'ai la chance de vivre en centre-ville, la bonne mère est à côté de moi.
01:13 Et c'est vrai que tous les jours que Dieu fait, on me fait une référence à cette victoire-là, soit en me remerciant, soit en me faisant un clin d'oeil,
01:21 soit en me disant "ça a été une des soirées de ma vie".
01:25 Voilà, donc c'est vrai que c'est resté dans les mémoires.
01:28 Bon, il y a même ce petit garçon, je crois que tu me racontais ça hier, ce petit garçon sur la Canbière, un gamin de 10 ans, qui te reconnaît ?
01:35 C'est ça, c'est un peu la particularité de cette ville.
01:38 L'histoire du club est transmise par les parents aux enfants. Un petit gamin qui est rentré à l'école le matin, qui m'a croisé, il avait 10 ans sûrement,
01:45 il m'a dit "je vous connais, mon papa m'a montré tous les matchs" et encore il y a peu, j'ai regardé la finale de la Ligue des champions.
01:51 Incroyable.
01:52 Est-ce que ce petit garçon ne sait sans doute pas, Eric, c'est que c'est un moment particulier, ce moment où tu soulèves la coupe, au moment où l'OM est sacré.
02:00 En fait, à ce moment-là, est-ce que tu peux nous dire dans quel état physique tu es ?
02:04 On est cuit, mais euphorique. Et moi, cette victoire était particulière. J'ai été formé au club, arrivé en 80, le club a failli disparaître, liquidation judiciaire.
02:13 Des minots l'ont relevé et Bernard Tapie est arrivé pour nous amener jusqu'au toit de l'Europe.
02:18 Donc pour moi, j'ai vu défiler toute ma carrière en ce jour-là, notamment le Var la Coupe.
02:22 Voilà, et tu manques de t'évanouir, peu avant de soulever la coupe, à tel point que le staff de l'OM, dont Bernard Tapie, vient te soutenir.
02:31 Oui, ça c'était le lendemain, au retour au stade, quand on a présenté la coupe aux supporters.
02:34 Ça, c'est quand même le moment le plus émouvant de ma carrière.
02:38 Il y a une dimension très particulière, évidemment, Nicolas, que ce trophée pour l'OM.
02:44 C'est la naissance d'une nouvelle culture footballistique.
02:47 On peut dire ça, d'abord, la France découvre le mouvement ultra, les supporters, c'est très important.
02:51 Avant, on n'avait pas trop cette dimension-là dans nos clubs.
02:55 Il faut se rappeler quand même que c'est Marseille qui a une position particulière en France,
03:01 qui a un rapport qui se sent très mal aimé, qui se sentait méprisé.
03:05 Et d'un coup, elle a un sentiment qu'elle est sur le toit du monde.
03:08 L'autre dimension qui est essentielle aussi, c'est qu'avant, les parcours européens des clubs français,
03:12 on pense surtout à Saint-Etienne, qui était le plus récent.
03:14 C'était toute la France qui était mise derrière, c'était à l'éléveur.
03:17 Là, on a vraiment le sentiment que c'est cette ville-là qui gagne seule, qui gagne et qui découvre sa puissance.
03:22 Et effectivement, je rappelle la naissance, visuellement, du mouvement ultra.
03:26 Il y avait des figures très fortes au Vélodrome, et les Marseillais ont toujours mis en avant
03:30 à la fois le fait qu'ils avaient à jamais les premiers, mais qu'ils étaient, ce qui se discute effectivement,
03:35 les premiers à avoir eu un grand mouvement de supporters organisés, structurés,
03:38 qui reste essentiel encore aujourd'hui pour le club.
03:41 C'est les supporters qui ont inventé "à jamais les premiers", d'ailleurs ?
03:44 Je pense que c'est tout Marseille.
03:46 Le type qui a inventé ce slogan, c'est un génie, parce qu'il va rester pour la nuit des temps, ce slogan.
03:50 Mais ils vont être à jamais les premiers.
03:52 Et surtout, je pense que la deuxième chose qu'ils souhaitent, ce ne sera jamais PSG qui devienne le second.
03:56 Ça, c'est évident.
03:57 Un autre français remporterait une Coupe d'Europe, ils se moqueraient un peu.
04:00 Parce que si PSG remporte, ils ne seront à jamais les premiers, mais les plus récents, ce ne seraient plus eux.
04:04 Eric, est-ce que c'est déjà, à l'époque, la vengeance de Marseille contre la capitale ?
04:08 Oui, on a toujours eu un petit côté, je ne dirais pas parano, mais en opposition avec la capitale.
04:15 C'est un petit peu l'histoire de France, d'ailleurs.
04:17 Et c'est vrai qu'il y a une fierté particulière des supporters, et même de ceux qui ne suivaient pas le football à l'époque, à Marseille, de revanche.
04:26 Je vous dis qu'on regarde quand même, parce que c'est la première fois qu'on voit de telles images en France.
04:30 Est-ce que tu mesures, Eric, on voit des images des supporters peu après le coup de sifflet final.
04:35 Est-ce que tu mesures, avant de rentrer à Marseille, ce que représente cette victoire pour les supporters ?
04:41 J'avoue qu'on s'en est vraiment rendu compte en arrivant à Marseille.
04:45 Quand on a atterri, c'est simple, Marignane, le stade Vélodrome, 20 km de l'autoroute, de la ville.
04:51 Je crois qu'il n'y avait pas un endroit sans supporters sur notre chemin.
04:55 Il y en avait même qui nous suivaient en moto, en voiture.
04:58 C'était complètement la folie.
05:02 Et je suis d'accord que les supporters ont une importance toute particulière dans ce club.
05:07 C'est l'identité du club, c'est le seul qui est encore là de l'époque.
05:10 À l'époque, on est à 5 ans de la Coupe du monde de football que la France va gagner.
05:16 Est-ce que c'est déjà en germe dans cette équipe de Marseille, dans laquelle tout le monde se reconnaît ?
05:21 Tout le monde, ça se discute encore.
05:23 Il faut quand même rappeler qu'après, l'équipe de France ne va pas à un coup de la Coupe du monde aux Etats-Unis.
05:28 On n'a pas trop cette sensation de puissance du foot français à ce moment-là.
05:32 Il y a des joueurs qui sont déjà présents.
05:34 On voit Didier Deschamps qui l'est toujours aujourd'hui à l'équipe de France.
05:38 C'est surtout l'idée que le foot français existe maintenant,
05:41 a une capacité d'exister sur la scène européenne et voire mondiale du football.
05:47 À ce moment-là, non.
05:49 Mais clairement, avec le recul, on peut se dire qu'il y a des grands joueurs qui émergent.
05:52 Est-ce que l'OM invente ce qu'on a appelé le mouvement Black Blanquer ?
05:56 L'invente, non. Parce que la réalité du foot français a toujours été cette nature-là.
06:00 Je rappelle la première équipe de France qui est à majorité composée de joueurs de couleur,
06:05 c'est début des années 80, c'est un match amical contre l'URSS de l'époque.
06:09 Mais ce qui est réel, c'est que Bernard Tapie derrière met en scène ou illustre ça en disant
06:13 "Marseille est une ville populaire, multiculturelle, l'équipe est à son image".
06:17 Et c'est vrai que quand on regarde, c'est la réalité.
06:19 Même Basile Boli, c'est un Parisien d'extraction, c'est pas un Marseillais pur jus.
06:23 Contrairement à notre invité.
06:25 Il le met en scène, mais ça va mettre du temps à évoluer.
06:28 Et c'est vrai que le climat politique en France va évoluer à ce moment-là,
06:31 parce que l'extrême droite explose et que toutes ces problématiques vont prendre de l'importance.
06:34 Et après, il y a la réalité de Marseille en tant que ville, comment elle se conçoit, comment elle se regarde.
06:38 Je rappelle qu'en même temps, c'est aussi la ville où l'UFN fait ses premiers gros scores à ce moment-là.
06:42 Donc c'est quelque chose de très paradoxal.
06:44 Mais Bernard Tapie va en jouer parce qu'il a aussi des ambitions politiques derrière.
06:47 Voilà une victoire qui prend donc une dimension presque politique, Eric.
06:51 Oui, le football est éminemment politique, on le sait encore aujourd'hui.
06:56 Et ce qui est rigolo dans notre histoire, c'est que les deux personnages centraux de cette histoire,
07:00 c'est-à-dire notre président et notre buteur ce soir-là, sont des Parisiens, un bon teint en plus.
07:04 Il n'arrête jamais.
07:07 Il n'arrête jamais.
07:08 Eric, il chante mon père maintenant. Tu peux y aller d'ailleurs, on a un supporter parisien, Mathieu Croissando.
07:12 Tu peux vraiment y aller.
07:13 Est-ce que tu les revois ?
07:16 Tu les revois les coéquipiers régulièrement ?
07:19 Tu les revois les coéquipiers, il demande, Mathieu ?
07:22 Oui, oui, demain il y a une fête, le président de l'OM qui a joué le jeu pour une fois,
07:27 parce que ce n'est pas évident pour les présidents de mettre en avant une génération qui a gagné,
07:30 quand ça ne gagne pas trop.
07:31 Là, le président de l'OM et l'actionnaire M. Macron nous invitent demain à déjeuner,
07:35 et au stade demain soir, oui.
07:36 Et avant ça, ce soir, il y a une grande fête sur le parvis de l'hôtel de ville de Marseille aussi.
07:41 Je fais ce qu'on peut appeler un jubilé.
07:45 L'année de mes 60 ans, j'ai décidé de revoir tous mes anciens coéquipiers,
07:48 parce que d'abord, il me manque, et que j'ai peur que dans 10 ans, soit on soit trop abîmés,
07:52 soit il en manque, donc il faut vite profiter.
07:56 Quand même pas.
07:57 Tu es en forme, hein ?
07:59 Oui.
08:00 Tu es toujours très en forme.
08:01 Merci beaucoup, Eric.
08:03 Merci, Nicolas.
08:04 À jamais les premiers.
08:05 J'adore ce slogan.
08:06 Droit au but, et à jamais les premiers.
08:07 Est-ce qu'on peut juste regarder la une de la Provence de ce matin ?
08:08 Oui, tu as raison.
08:09 Tu as raison.
08:10 Bon alors, ils se sont dit, qu'est-ce qu'on va faire ?
08:12 Ils ont sorti la même une qu'à l'époque.
08:13 C'est pas grave.
08:14 C'était le Provençal à l'époque, qui est devenu la Provence.
08:17 Ils n'ont plus que ça, ils n'ont plus que ça maintenant.
08:19 Ils sont plutôt sur tout ça.
08:20 Depuis, je vois Mads remporter une nouvelle une.
08:22 Déjà, le PSG avec 600 millions de budget, il n'y arrive pas.
08:24 Jamais dire jamais.
08:25 À l'époque, c'était un des plus gros budgets d'Europe.
08:27 C'était partout qui poussait.
08:28 Merci à tous les deux.
08:29 On ne s'en lasse pas les images de cette soirée de folie, rassemblées par Antoine Fernandes.
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