• l’année dernière
- Grande invitée : Flora Ghebali, co-présidente de « Coalitions » et autrice de « Le syndrome de la fourmi » (L'Observatoire)

LE GRAND DÉBAT / Climat : qui doit payer la facture ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

Dans son rapport du 22 mai 2023, Jean Pisani-Ferry appelle à financer plus équitablement la transition climatique. Afin de relever les défis environnementaux et sociaux auxquels la France devra faire face, l'économiste et proche d'Emmanuel Macron plaide pour plusieurs sources d'investissement. Il recommande un recours massif à l'endettement qui représenterait entre 250 et 300 milliards d'euros de dette en plus, en cumulé, en 2030. Il préconise aussi la mise en place obligatoire d'un "impôt exceptionnel et temporaire" pour les 10% des ménages les plus aisés. Ce prélèvement pourrait représenter 5 milliards d'euros par an, d'ici 2050. Alors que le gouvernement et Bercy souhaitent réduire la dette, M. Pisani-Ferry répond que lorsqu'il faut "investir massivement sur une période courte, et que le retour sur ces investissements est prévu seulement au-delà de cette période, c'est précisément une raison de recourir à la dette publique". D'autres solutions pourraient-elles être plus efficaces ?

Invités :
- Mathieu Lefèvre, député Renaissance du Val-de-Marne
- Eva Sas, députée EELV de Paris
- Agnès Verdier-Molinié, directrice de la fondation iFRAP et auteur de « Où va notre argent ? » (L'Observatoire)
- Manon Aubry, eurodéputée LFI

LE GRAND ENTRETIEN / Flora Ghebali : climat, il faut enfin passer à l'action !
Si l'on dessine un cercle autour d'une fourmi, elle est incapable de s'en échapper. L'entrepreneuse Flora Ghebali s'inspire de cette métaphore pour son dernier livre intitulé « Le syndrome de la fourmi ». Elle applique cet état paralysant à la transition écologique. Nous avons conscience de ce qu'il se passe d'un point de vue climatique et les solutions existent pour accélérer la transition écologique. Pourtant, nous regardons ailleurs. Il existe deux impasses majeures : nous sommes empreints d'idéologies et les responsables politiques ne s'emparent pas assez du sujet. Quel est le remède pour sortir de ces impasses et ainsi guérir du syndrome de la fourmi ?

- Grande invitée : Flora Ghebali, co-présidente de « Coalitions » et autrice de « Le syndrome de la fourmi » (L'Observatoire)

BOURBON EXPRESS :
- Marco Paumier, journaliste LCP

LES AFFRANCHIS :
- Mariette Darrigand, sémiologue
- Bertrand Périer, avocat

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 *Générique*
00:06 Bonsoir et bienvenue dans "Ça vous regarde ?"
00:08 Notre grand témoin ce soir nous invite à sortir du syndrome de la fourmi.
00:13 Bonsoir Flora Ghebaly.
00:14 Bonsoir.
00:15 "Le syndrome de la fourmi", c'est le titre de votre livre.
00:17 Aux éditions de l'Observatoire, vous êtes essayiste et entrepreneuse.
00:21 Le syndrome de la fourmi, c'est cet état paralysant,
00:24 ces barrières invisibles et mentales qui nous empêchent de passer à l'action.
00:28 On va en parler longuement dans cette émission
00:30 puisqu'on va la placer sous le signe du climat.
00:33 Ce soir, on va commencer par débattre de l'ISF climatique.
00:37 C'est un sacré pavé dans la mare qu'a jeté l'économiste Jean Pisani Ferry en début de semaine.
00:43 Dans son rapport remis à la Première ministre,
00:45 il préconise de taxer les plus riches pour financer la transition écologique.
00:49 Alors le gouvernement ferme pour l'heure complètement la porte
00:52 mais il va bien falloir trouver des milliards pour parvenir à la neutralité.
00:56 Carbone, climat, qui doit payer la facture ?
00:59 Grand débat dans un instant avec nos invités sur ce plateau
01:02 avant de retrouver 20h15 bien sûr, les parties pris de nos affranchis
01:06 et puis Bourbon Express, l'histoire du jour à l'Assemblée.
01:09 Voilà pour le menu, vous savez tout, vous me suivez Flora Ghebaly ?
01:12 - On y va. - Ça vous regarde, c'est parti.
01:14 [Musique]
01:25 Le coût de la transition ne sera accepté que si l'effort est équitablement réparti.
01:31 Là-dessus, tout le monde s'accorde.
01:33 Mais quand il s'agit de savoir qui va payer, eh bien ça se complique.
01:36 Alors faut-il un ISF vert, comme le préconise le rapport de l'économiste Jean Pisani Ferry.
01:43 Bonsoir Mathieu Lefebvre. - Bonsoir.
01:44 - Et merci d'être là, vous êtes député Renaissance du Val-de-Marne,
01:48 hostile, on peut le dire, à ce nouvel impôt sur les plus riches.
01:52 Vous nous direz pourquoi vous débattez ce soir avec Manon Aubry, bonsoir.
01:56 - Bonsoir. - Heureux député La France Insoumise,
01:58 vous avez travaillé à Oxfam, qui propose depuis des années cette ISF climatique, Evassas, bonsoir.
02:04 - Bonsoir. - Merci d'être avec nous, député Europe Écologie-Les Verts de Paris,
02:08 votre parti qui milite aussi depuis des années pour cet impôt.
02:11 Enfin, bonsoir Agnès Verdier-Moulinier. - Bonsoir.
02:14 - Ravie de vous retrouver sur ce plateau, vous êtes directrice de l'IFRAP,
02:16 ce laboratoire d'idées libérales, osons le mot.
02:20 Où va notre argent ? C'est votre dernier livre aux éditions de l'Observatoire,
02:25 cette question fiscale, elle est centrale dans ce livre.
02:28 Flora Ghebaly, il est quasiment pour vous ce débat, le sujet vous passionne,
02:32 donc n'hésitez pas à intervenir ou même à interroger nos invités quand vous le souhaitez.
02:37 La parole pour commencer à Stéphane Blakowski, un ISF écolo, l'idée fait son chemin,
02:43 vous allez le voir, y compris un tout petit peu dans la majorité.
02:46 Le chrono de Blakow, c'est parti.
02:48 - Bonsoir Stéphane. - Bonsoir Myriam, bonsoir à toutes et tous.
02:55 - Alors, cet ISF vert. - Pour commencer, le rapport qui fait polémique,
02:59 donc je vous le montre au moins à la couverture, ne serait-ce que la synthèse,
03:02 elle fait 154 pages, donc je n'ai pas tout lu.
03:05 Ce n'est pas si grave, parce qu'en fait il y a simplement 5 lignes qui font polémique dans ce rapport,
03:09 5 lignes qui proposent de taxer les plus riches pour financer la transition.
03:12 Donc pour résumer ces 5 lignes, ce que dit le rapport,
03:14 c'est que l'ensemble des Français ont 4 700 milliards d'actifs financiers de placement,
03:18 mais 3 000 de ces milliards sont entre les mains de 10 % des Français les plus riches.
03:23 Donc, pour financer la transition écologique, on taxerait ces 10 % de 5 milliards par an,
03:28 pas toujours, mais quand même pendant 30 ans, ce qui ferait 150 milliards au total
03:32 pour financer la transition écologique.
03:35 Donc l'idée n'est pas nouvelle, souvenez-vous de la présidentielle,
03:38 toute la gauche était d'accord pour créer un ISF climatique,
03:43 Mélenchon, Hidalgo, Jadot, chacun avait un peu sa manière de calculer l'ISF,
03:47 mais ils étaient d'accord, c'est une idée que défendent depuis longtemps pas mal d'ONG,
03:51 notamment Oxfam, qui pointe souvent du doigt les plus riches.
03:54 Ils avaient fait un rapport où ils disaient que 63 milliardaires français
03:59 produisent autant de CO2 que la moitié de la population, soit 34 millions de Français.
04:05 Donc c'est un petit peu tendancieux, d'ailleurs Oxfam le reconnaît,
04:07 parce qu'en fait, ce n'est bien sûr pas les 63 personnes qui produisent autant de CO2,
04:11 mais les entreprises dans lesquelles ils sont actionnaires.
04:13 Donc ça revient à dire qu'en fait, il faudrait restreindre l'activité économique
04:17 si on veut moins polluer.
04:20 Donc n'empêche, à gauche, on se réjouit évidemment du retour de l'ISF dans le débat,
04:25 d'autant que, vous l'avez dit Jean Pisani-Ferry, n'est pas un gauchiste illuminé,
04:30 ni un écologiste radical.
04:32 Ce que se plaît à souligner William Martinek, qui lui est de LFI, on l'écoute.
04:37 Pour les classes moyennes et populaires, la transition écologique,
04:40 le changement des comportements, ça ne pourra pas se faire
04:42 si on ne demande pas des efforts aux plus aisés.
04:45 Et je suis en effet en accord avec la proposition qui a été faite par l'économiste Pisani-Ferry,
04:50 dont il faut rappeler qu'en 2017, il était un des soutiens d'Emmanuel Macron
04:54 pendant sa campagne.
04:55 Oui, alors si même celui qui a rédigé le programme économique du candidat Macron en 2017
05:00 nous dit que oui, l'ISF climatique, ce n'est pas une mauvaise idée,
05:04 il y a de quoi s'interroger.
05:05 D'ailleurs même au gouvernement, on s'est dit,
05:08 oui après tout, ça vaut peut-être la peine d'ouvrir le débat.
05:10 En tout cas, c'est ce que disait Christophe Béchut, on l'écoute.
05:12 C'est un sujet qui ne peut pas être tabou.
05:15 Tout le monde n'a pas le même bilan carbone,
05:17 ou les mêmes émissions, ou les mêmes empreintes.
05:18 De la même manière qu'à l'échelle mondiale, il y a des dispositifs de solidarité
05:21 qui consistent à demander aux pays du Nord de financer une partie de la transition,
05:25 il est légitime que cette question puisse se poser dans la sphère nationale.
05:30 Vous avez entendu comme moi.
05:32 Là, on a vraiment l'impression que le gouvernement est prêt à ouvrir le débat.
05:36 En fait, pas du tout.
05:37 Le problème c'est que Christophe Béchut,
05:39 il n'était pas au courant des positions de Bruno Le Maire sur la question.
05:42 Pourtant c'est marqué dans le journal.
05:43 Il l'a dit en 2020, il l'a répété en 2021,
05:46 il l'a répété en 2022, il l'a re-répété en 2023.
05:50 Pas de hausse des impôts tant qu'il sera à Bercy.
05:53 En fait, quand il lit le rapport, Bruno Le Maire,
05:56 il est au moins d'accord sur une chose, c'est le chiffrage.
05:57 Il dirait oui, 70 milliards par an pour financer la transition,
06:01 c'est à peu près ça.
06:02 Mais il propose d'autres sources de financement,
06:04 par exemple l'épargne en écoute.
06:06 Vous avez aujourd'hui 530 milliards d'euros qui sont sur le livret A,
06:09 sur le livret de développement durable,
06:11 et qui ne sont pas forcément fléchés vers les investissements verts.
06:14 Nous allons obliger dans les plans d'assurance vie,
06:17 chaque plan d'assurance vie à avoir ce qu'on appelle une unité de compte
06:21 qui doit servir au financement de la transition écologique,
06:24 aux investissements verts.
06:25 Bon, j'ai un peu essayé de résumer pour lancer le débat, donc c'est parti.
06:29 Donc faut-il taxer les 10% des Français les plus riches ?
06:32 Il y a 90% des Français, ils ne doivent pas être contre.
06:34 Donc bon courage à ceux qui défendent les 10% des plus riches.
06:37 - Merci, limpide et plutôt marrant ce soir.
06:42 Alors vous allez lui fermer la portonnée à Jean-Pythiène Leféry ?
06:45 Comme ça, Mathieu Lefebvre, il a même participé,
06:47 et même c'est l'architecte du programme économique d'Emmanuel Macron en 2017,
06:51 c'est un économiste mesuré.
06:53 Par rapport à ce défi, c'est le défi du siècle, le réchauffement climatique,
06:56 ce n'est pas le moment d'ouvrir la porte à la fiscalité sur les plus aisés ?
07:00 - En tout cas, je pense qu'il pose une vraie question, Jean-Pythiène Leféry,
07:03 mais moi je suis convaincu que ce n'est pas avec un impôt en plus
07:05 qu'on aura des degrés en moins sur la planète.
07:07 Et surtout, ce qui m'inquiète, c'est que ce n'est pas pour les 10% les plus riches.
07:10 On a vu comment ça se passait par le passé, on commence par un ISF
07:13 et on finit par une taxe carbone qui va finir par peser sur tous les Français.
07:16 - Ce n'est pas du tout ce qu'il propose.
07:17 - C'est toujours le risque.
07:18 - Impôt exceptionnel sur le patrimoine financier des 10% des Français les plus aisés,
07:23 sachant que Stéphane l'a bien rappelé, 66 milliards par an d'ici à 2030.
07:30 Et tout ça a été chiffré par France Stratégie de façon extrêmement équilibrée,
07:34 budget par budget, c'est des briques qui ont été montées pour arriver à ces chiffres-là.
07:37 Qu'est-ce que vous dites ?
07:38 - Toujours le risque que l'on a quand on fait le choix d'augmenter les impôts.
07:42 On commence par les plus riches et on finit par les augmenter sur tous les Français.
07:45 - Vous avez fait tout l'inverse.
07:46 - Et par ailleurs, nous avons supprimé l'ISF, on a eu le courage de supprimer l'ISF.
07:50 On ne va pas aujourd'hui faire et défaire. Pourquoi ?
07:52 Parce que cette politique a eu des résultats.
07:54 On est aujourd'hui le pays qui est le plus attractif pour les capitaux étrangers.
07:58 On recrée l'emploi industriel dans notre pays.
08:00 Et ça, on le doit aux décisions d'investissement
08:02 qui étaient liées à une politique fiscale totalement obsolète en 2017.
08:05 - Donc il est tabou ce sujet-là ?
08:07 - Non, il n'est pas tabou.
08:08 En revanche, je crois que recréer un impôt, encore une fois,
08:10 ne fait pas baisser les degrés sur la planète.
08:12 Je pense qu'il y a des solutions qui sont très utiles.
08:14 Par exemple, quand on propose de réorienter le bonus malus sur les véhicules,
08:18 quand on propose d'augmenter le malus,
08:19 je crois qu'on oriente sérieusement les comportements.
08:21 - Non mais personne ne fait le lien.
08:22 Et M. Pisaniferi, sans lui faire offense, ne fait ce lien direct.
08:25 Il a calculé ce qu'il faut faire,
08:27 par exemple supprimer, je ne sais pas moi, les chaudières au fioul.
08:30 Ce que ça implique d'abord dans la réalité,
08:33 puis ensuite c'est chiffré, c'est financé, et on essaye de trouver les financements.
08:37 Même Pascal Canfin, Manon Aubry,
08:39 qui préside le groupe Écolo au Parlement européen,
08:44 il est votre président.
08:45 - Il préside la commission Environnement dans le groupe Renaissance.
08:49 - Absolument.
08:50 - Il dit que cette question de l'ISF vert n'est pas tabou.
08:54 Vous, vous militez là-dessus depuis très longtemps.
08:57 En même temps, la politique économique du gouvernement,
08:59 elle a plutôt porté ses fruits quand on regarde la tracuité,
09:03 quand on regarde le retour des investisseurs, la fin du chômage ou quasi.
09:07 - C'est vrai qu'elle a porté ses fruits en termes de cadeaux faits aux plus riches.
09:10 De ce point de vue-là, l'objectif est atteint.
09:12 C'est vrai, c'est des milliards d'euros
09:14 qui ont été reversés chaque année aux plus riches.
09:17 Quand vous dites, monsieur, que quand on commence par les riches,
09:21 on finit par les pauvres, mais pardonnez-moi,
09:23 vous avez commencé par taxer les plus pauvres
09:25 et vous n'avez jamais fini par les plus riches.
09:27 - Oui, exactement.
09:28 - Par exemple, la taxe carbone dont vous parlez,
09:31 qui a provoqué la mobilisation des Gilets jaunes.
09:33 Emmanuel Macron est revenu dessus au niveau français.
09:35 Elle vient d'être votée au niveau européen
09:36 sous l'impulsion de vos députés Renaissance.
09:39 Donc la taxation des plus pauvres, elle est déjà en place.
09:42 Taxer les plus pauvres, concrètement,
09:43 cette taxe carbone, c'est une taxe sur le logement et sur le transport.
09:46 Donc c'est quand vous allez prendre votre voiture
09:48 et quand vous avez chauffé votre logement.
09:50 - En tout cas, la trajectoire d'augmentation a été revue
09:53 depuis la crise des Gilets jaunes par le président.
09:55 - La trajectoire prise par le président de la République,
09:58 c'est très clairement de faire des cadeaux aux plus riches
10:01 et de mettre la charge fiscale sur les plus pauvres.
10:04 Donc la question qui est posée aujourd'hui, elle est double.
10:07 Elle est d'une part, comment on finance ?
10:09 Parce que ce que propose Jean-Pyzani-Ferris,
10:10 c'est que ça ne rapporte que 5 milliards d'euros par an
10:13 à l'heure où il en faut plus de 60.
10:15 - Et la deuxième chose...
10:16 - Mais par an, d'ici à 2030, ça fait quand même 150 milliards.
10:21 Donc c'est pas rien.
10:22 - C'est pas rien. - 35, pardon.
10:24 - C'est pas rien et j'y suis en faveur.
10:27 Mais vous voyez, dès qu'on commence un petit peu par ça,
10:30 déjà, y compris du côté de Renaissance,
10:33 il crie déjà, il pousse déjà des cris d'orfraie.
10:36 Donc on voit à quel point on est loin d'atteindre
10:39 les besoins de financement que nous avons.
10:40 Et puis pourquoi un ISF vert est aussi nécessaire ?
10:44 Parce qu'en réalité, et ça a été très bien présenté en amorce,
10:47 les plus riches sont aussi ceux qui ont les comportements
10:50 les plus climaticides, les plus nocifs pour le climat.
10:53 Si même vous enlevez la part des investissements,
10:55 et ne serait-ce que sur leur consommation,
10:57 le fait de prendre des yachts, des jets privés, etc.,
11:00 les 10% les plus aisés, ils émettent 5 fois plus de carbone
11:04 que la moitié de la plus pauvre.
11:05 Il est normal qu'on leur demande de contribuer
11:07 davantage que les plus pauvres.
11:08 Voilà pourquoi un ISF vert est nécessaire.
11:11 Et j'ai envie de dire que c'est une des nombreuses briques
11:14 à poser pour repérer...
11:15 - Je vais aller voir Agnès Bernay-Moli pour le contrat d'étoile.
11:18 - ...le changement dont nous avons besoin.
11:19 - Et je reviens vers vous, Eva Sass,
11:20 mais je pense que vous êtes assez en phase
11:21 avec votre camarade insoumise à vos côtés.
11:25 Expliquez-nous.
11:27 - Véritablement, cette politique de pause fiscale,
11:30 en tout cas, il n'y a pas eu de hausse d'impôts,
11:33 elle a porté ses fruits en termes d'attractivité.
11:37 "La constance, c'est la confiance",
11:40 répète le président de la République.
11:43 Tout ça, c'est grâce à l'absence d'impôts.
11:46 En plus, d'abord, rappelez un chiffre.
11:50 En 2022, on n'a jamais eu un taux de prélèvement obligatoire
11:54 en France aussi élevé depuis les années 90.
11:58 Ce n'est pas moi qui le dis,
11:59 c'est les documents annexés à la loi de finances pour 2023.
12:02 On arrive maintenant à 45,3% de taux de prélèvement obligatoire
12:09 par rapport au PIB.
12:10 On n'a jamais payé autant d'impôts
12:12 proportionnellement par rapport à la richesse nationale.
12:14 Et ça, c'est quand même très important de le dire.
12:16 Il n'y a pas eu de baisse massive d'impôts.
12:18 Après, quand on regarde la fiscalité...
12:19 - Il y a eu des baisses d'impôts quand même pour les ménages.
12:21 - Mais quel est le taux pour les plus riches, madame Verdini ?
12:23 - Quel est le taux pour les plus riches ?
12:24 - Quand on regarde la fiscalité du capital,
12:26 puisque aujourd'hui, on parle d'un ISF climatique,
12:29 ça veut dire taxé de capital, on l'a bien dit,
12:32 des 3 000 milliards, finalement, de placement financier
12:35 ou d'assurance-vie, etc.
12:37 - Oui, le patrimoine financier des 10% des plus riches.
12:39 - Là, on parle donc de taxer le capital.
12:42 France Stratégie a fait un rapport qui a été publié
12:44 en octobre 2022 sur ce sujet, qui est passionnant.
12:48 J'incite tout le monde à aller le lire sur Internet.
12:51 Et ce rapport, il montre quoi ?
12:53 Que par rapport à la richesse nationale,
12:54 depuis 2017, il n'y a pas eu de baisse de pourcentage
12:59 de fiscalité sur le capital en France.
13:01 On est toujours à 10,7%.
13:04 10,7%, c'est 2,5 points de plus que la moyenne
13:08 de la zone euro dans laquelle nous sommes tous.
13:11 - Mais les entreprises, elles, elles ont vu quand même
13:13 leur fiscalité baisser.
13:14 La FATAC, la portion de société, ça, ça existe ?
13:17 - On pourra y revenir.
13:18 Moi, l'écart que je vois avec la zone euro depuis 2017,
13:21 il n'a pas baissé en milliards, c'était 100 %.
13:23 - Il n'y a pas eu de baisse d'impôt.
13:24 - Laissez-moi finir.
13:27 Quand on regarde la fiscalité des ménages,
13:29 puisque là, ce sont les ménages qui nous intéressent,
13:31 sur le capital, on a toujours, dans ce rapport de France Stratégie,
13:35 on est à 1,6 point de PIB pour les ménages français
13:38 en imposition du capital, alors que la moyenne de l'UE,
13:41 c'est 0,7 point de PIB.
13:43 Ça veut dire qu'on est à 22 milliards de plus.
13:45 Donc, si on voulait se mettre à la moyenne des pays européens,
13:48 on ne serait pas à la hausse, on serait à la baisse.
13:50 - Donc, pour vous, si on augmentait les impôts des plus riches,
13:53 ils fuient directement à l'étranger ?
13:55 - Mais attendez, est-ce que le fait de taxer plus le capital,
13:57 ça nous a enrichi en France ?
13:58 Non, on est en train de perdre des places par rapport aux autres pays.
14:02 Dans les années 80, on était en 11e en richesse par habitant.
14:05 Maintenant, on est 25e.
14:07 - J'entends l'argument. Vous allez nous dire d'ailleurs
14:09 où est-ce qu'on les trouve dans ces cas-là.
14:11 - Est-ce que les autres pays ont gardé leur ISF ?
14:12 Le Danemark, l'Autriche, plein de pays européens
14:15 ont renoncé à l'ISF depuis les années 90.
14:18 Pourquoi ? Parce qu'ils ont vu que cette fiscalité,
14:20 finalement, elle était néfaste pour l'économie de leur pays.
14:24 Ils ont eu raison.
14:25 Donc, dire qu'on va faire ça,
14:27 alors qu'on taxe déjà beaucoup plus que les autres
14:29 et alors que la plupart de nos voisins européens
14:31 ont arrêté ce genre de fiscalité,
14:34 c'est vraiment aller à l'encontre de l'intérêt national de l'intérêt général.
14:39 - Qu'est-ce que vous répondez à ça, Eva Sass ?
14:41 - Moi, j'ai d'abord l'impression que, Madame Verdier-Molinay,
14:43 ça n'intéresse pas beaucoup au climat,
14:44 parce que vous n'avez peut-être pas prononcé le mot une seule fois.
14:47 Là, ce qui nous occupe, c'est comment on finance la transition climatique.
14:50 Ce que nous dit le rapport, c'est très important.
14:52 C'est d'abord qu'il faut doubler l'effort de réduction des émissions
14:55 de gaz à effet de serre.
14:56 Donc, il faut aller beaucoup plus vite.
14:58 Il faut 25 à 34 milliards d'investissement public
15:01 et j'insiste là-dessus, c'est-à-dire qu'il faut mettre des moyens budgétaires.
15:05 Donc, ça veut dire que s'il y a des dépenses, il va falloir les financer.
15:09 Et comment on finance ?
15:10 Il y a trois leviers, c'est soit l'endettement,
15:12 soit la réduction des niches fiscales défaites au climat.
15:15 On va y revenir parce que là, je pense qu'il y a une source importante
15:18 et là aussi, le gouvernement n'avance pas sur ce sujet.
15:21 Et la troisième possibilité, c'est la fiscalité.
15:23 - Il y a un pays du quatrième qui essaie de baisser les dépenses, accessoirement.
15:25 - La fiscalité. - Non mais ça, ça n'existe pas pour vous.
15:27 - Ça n'existe pas.
15:28 - Il faut dire qu'il y a des besoins de financement en matière climatique.
15:31 - Ah oui, peut-être des dépenses qui sont nuisibles à l'environnement, Mme Aubry.
15:34 - Donc, pour vous, il ne faut pas investir dans le climat.
15:35 C'est ça que vous nous dites.
15:36 - Des dépenses qui sont nuisibles à l'environnement, Mme Aubry.
15:38 - Eh bien, vous n'avez rien fait.
15:39 Vous avez maintenu la niche fiscale GNR.
15:42 Vous avez maintenu la niche GNR.
15:45 Aujourd'hui, on subventionne les carburants des engins de travail public
15:48 à hauteur de 300 millions d'euros.
15:50 Est-ce que vous pouvez m'expliquer pourquoi ?
15:51 Pourquoi vous refusez de supprimer cette niche fiscale ?
15:54 - Vous êtes une parlementaire à Guéry,
15:55 vous savez que ça prend fin au 1er janvier 2020.
15:56 - On va essayer d'être un peu pédagogique aussi pour ceux qui nous regardent
15:59 parce que c'est compliqué, les débats de fiscalité.
16:02 Flora Ghebaly, je vais vous montrer une image.
16:04 Vous allez réagir, mais aujourd'hui, et d'ailleurs, vous en revenez,
16:07 vous étiez devant le siège de Total, Manon Aubry,
16:09 soutient l'Assemblée générale des actionnaires de Total,
16:13 où vous le voyez, des jeunes militants qu'on qualifie "activistes du climat"
16:18 ont essayé de manifester.
16:21 Vous le voyez aussi, les forces de l'ordre étaient présentes.
16:24 Il y a eu des jets de gaz lacrymogènes,
16:26 et puis ces militants qui manifestaient pacifiquement
16:30 ont essayé de bloquer l'entrée des actionnaires.
16:33 On est dans un moment spécial,
16:34 on est dans un moment après la crise des retraites.
16:36 Cette question de la justice sociale, mais aussi fiscale, elle est centrale.
16:40 Alors là, il s'agit des super-profits de Total,
16:42 mais c'est un plié.
16:43 Le sujet de la justice fiscale pour les particuliers,
16:48 c'est quand même lié.
16:50 Cet ISF climatique, pour vous, c'est nécessaire ?
16:53 Pour moi, ce débat, il arrive en ce moment,
16:55 ce n'est pas du tout par hasard.
16:57 C'est-à-dire que ça dépend, en fonction de ce que j'ai entendu là,
17:00 d'où on se place.
17:01 Si on se place du point de vue des caisses de l'État
17:04 et de comment les renflouer,
17:06 puisque Jean-Pyzani-Ferry a demandé 66 milliards de plus par an
17:09 pour financer la transition...
17:11 On est à 3 000 milliards de dettes.
17:12 Alors, ça paraît assez juste que les 10 % des plus riches
17:15 prennent plus à leur charge ce financement
17:17 que les 90 % de la population restant.
17:20 On a vu que l'ISF Vert, ça peut apporter,
17:23 selon les calculs et les propositions,
17:25 entre 5 et 15 milliards par an.
17:27 Le chiffre de 15 milliards, c'est précisément le chiffre
17:30 qu'on a entendu pendant toute la réforme des retraites,
17:33 puisque la réforme des retraites a aussi vocation
17:35 à apporter 15 milliards par an dans les caisses.
17:37 Ça relativise aussi.
17:38 Donc, si on se positionne d'un point de vue
17:40 de comment pouvoir redistribuer et mener la transition écologique,
17:45 alors, évidemment, ça a du sens.
17:46 Maintenant, si on fait un pas de côté et qu'on se positionne,
17:49 comment on conduit la transition écologique
17:52 et comment on la conduit de la manière la plus efficace ?
17:54 On le voit bien, et c'est exactement l'objet de mon livre
17:58 dont on va parler.
17:59 Le problème, aujourd'hui, c'est qu'à chaque fois
18:01 qu'on fait un pas en avant, on fait trois pas en arrière,
18:03 puisqu'on est empêtrés dans un modèle économique,
18:06 politique, démocratique, qui fait qu'on n'arrive pas
18:09 à conduire une vraie transition écologique.
18:11 Tous les chiffres le montrent.
18:13 Et aujourd'hui, l'urgence fait qu'on ne peut plus se permettre
18:16 de faire ce genre de pas en avant, trois pas en arrière.
18:18 Permettez-moi de vous dire que ce rapport sort,
18:21 il a été publié par France Stratégie,
18:23 qui est une agence de conseil gouvernementale,
18:26 et ça permet souvent un peu de créer du débat politique,
18:29 de créer un sujet dans l'opinion.
18:32 Et pour moi, ça n'arrive pas du tout par hasard aujourd'hui,
18:34 parce qu'on se souvient, dans le premier quinquennat,
18:37 le débat de la taxe carbone avait créé les Gilets jaunes
18:40 et avait quand même permis de mettre les Français
18:42 les uns contre les autres.
18:43 - On est présentés comme une taxe anti-Gilets jaunes.
18:44 - Et à ce moment-là, pour moi, le gouvernement a fait
18:47 une faute politique et symbolique qui est extrêmement grave,
18:50 qui est qu'ils ont opposé, ils ont créé l'opposition fictive
18:53 entre fin du monde et fin du mois.
18:55 Et moi, en tant qu'activiste écologiste sur le terrain,
18:59 vous ne vous imaginez pas le nombre de discussions
19:02 qu'on doit avoir pour réparer cette faute grave
19:04 qui a été faite par le gouvernement.
19:06 Et j'ai peur qu'avec cette histoire d'ISF vert,
19:09 le gouvernement relance, d'une certaine manière,
19:13 un moyen de cliver les Français les uns contre les autres,
19:15 d'opposer les riches et les pauvres,
19:17 juste après, en plus, le débat sur les retraites,
19:19 où on a déjà vu ce clivage.
19:20 - Vous croyez à ça ?
19:21 Vous pensez que ça va cliver dans la société ?
19:24 - Et moi, je crois qu'aller récupérer 5 milliards ici,
19:27 10 milliards ici, 15 milliards ici, c'est évidemment important,
19:30 mais en fait, la transition écologique,
19:31 c'est un modèle de civilisation différent.
19:33 Donc, si on regarde le truc par des petites portes ici et là,
19:37 on n'arrivera pas à conduire les vrais changements.
19:39 - Alors, la question, c'est quand même où sont les leviers ?
19:43 On a bien compris que vous ne vouliez pas augmenter les impôts,
19:45 y compris des plus riches.
19:47 Reste la dette.
19:48 Il y a de la bonne dette, à lire le rapport de Jean-Pi Zaniferri.
19:52 Vous nous direz ce que vous en pensez,
19:54 mais c'est noir sur blanc, écrit.
19:55 Il veut même enlever les investissements verts
19:59 du calcul des 3 % sur les déficits.
20:01 Quelles sont les autres options possibles ?
20:03 On voit cela avec Hélène Bonduelle.
20:04 Et on revient en débat juste après.
20:06 - Nous ne sommes pas durablement condamnés
20:13 à choisir entre croissance et climat.
20:16 Ce sont les premières phrases du rapport.
20:18 Et pourtant, le coût de la transition écologique est considérable
20:22 et il pèsera inévitablement sur l'économie,
20:25 sur les dépenses publiques.
20:27 - Tout le monde va devoir payer un peu.
20:29 Mais la grande question, c'est la part publique et la part privée.
20:34 C'est à peu près moitié-moitié selon nos évaluations.
20:37 Rénover les logements, le tertiaire,
20:40 s'équiper en véhicules électriques.
20:43 Un investissement supplémentaire évalué à 66 milliards d'euros par an.
20:47 Redéployer les financements des énergies brunes
20:49 vers les énergies vertes est l'une des pistes.
20:52 - On a 10 milliards d'euros de dépenses budgétaires et fiscales brunes.
20:57 - C'est-à-dire des dépenses anti-écologiques ?
20:58 - Exactement.
20:59 Mais à un moment donné, si notre économie se transforme,
21:02 c'est normal aussi que ces dépenses de soutien à des énergies fossiles
21:07 se transforment.
21:08 Mais cela ne suffira pas.
21:10 La France va devoir s'endetter, selon les auteurs.
21:13 Au risque d'alourdir l'endettement de l'État
21:15 de près de 25 points de PIB en 2040.
21:19 Au moment où le président de la République
21:21 tente de rassurer les marchés et les agences de notation,
21:24 l'équation n'est pas si simple.
21:26 - Je pense que les agences de notation ne sont pas idiotes.
21:28 Et si on leur explique pourquoi on s'endette,
21:31 et si on leur explique que cet endettement est générateur de revenus futurs,
21:34 elles peuvent le comprendre.
21:35 Reste les impôts.
21:37 C'est la troisième voie préconisée par le rapport.
21:40 Une ligne rouge pour le gouvernement.
21:42 Emmanuel Macron entend même les baisser pour les classes moyennes.
21:46 - Je préfère une France qui soit championne des emplois,
21:48 ce qui est le cas aujourd'hui,
21:49 et ce qui est aussi le résultat d'une politique de baisse des impôts,
21:54 en particulier sur les entreprises,
21:56 qu'une France qui soit championne des impôts.
21:58 - Les auteurs du rapport ne s'y sont donc pas trompés
22:01 en écrivant que nous entrons dans les décennies de toutes les difficultés.
22:06 D'autant que pour être accepté,
22:07 la transition écologique devra s'appuyer sur des efforts partagés.
22:13 - Bon, alors si on n'arrive pas à vous mettre d'accord sur l'ISF climatique,
22:16 vous serez d'accord sur la dette.
22:18 De toute façon, il va falloir s'endetter
22:20 quand on voit les montants colossaux des investissements à faire.
22:24 C'est ce que dit Jean-Louis Pisaniféri très clairement dans son rapport.
22:27 - Oui, mais qu'il y a un besoin de financement de la transition écologique,
22:29 c'est une évidence.
22:30 Mais ce qu'oublient de dire nos contradictrices,
22:32 c'est qu'il y a d'autres moyens pour se dégager des marges de manœuvre.
22:35 On peut réduire les dépenses qui sont néfastes à l'environnement,
22:38 on peut réduire les dépenses fiscales qui sont néfastes à l'environnement.
22:40 - Mais avec ces montants-là, vous récupérez autant ?
22:42 - Bien entendu, on peut récupérer...
22:43 - Mais vous ne le faites pas du tout.
22:45 - Madame Sasson, on peut le faire ensemble si vous souhaitez.
22:46 - On a fait plein de propositions.
22:48 Alors donnez-nous des exemples concrets sur les dépenses.
22:50 - Les TVA réduites sur les billets d'avion.
22:51 Pourquoi est-ce qu'il y a une TVA réduite sur les billets d'avion ?
22:53 C'est totalement contraire aux objectifs climatiques.
22:55 - Une raison très simple, Madame Sasson,
22:57 c'est que si vous faites ça, demain,
22:58 vous allez mettre en péril notre compagnie nationale.
23:00 - Ah mais voilà, à chaque fois, vous avez une réponse.
23:02 - On peut le faire que dans un cadre européen.
23:03 - Et donc, quelles sont les niches fiscales que vous...
23:05 Nous avons fait plein de propositions.
23:06 Quelles sont les niches fiscales néfastes au climat
23:08 que vous avez réduites ?
23:09 - Madame Sasson, le GNR, par exemple, vous l'évoquez,
23:11 en janvier 2024, c'est un milliard d'euros.
23:13 - Vous avez reporté sa suppression.
23:15 - Pardon, c'est le gazole non routier.
23:17 Mais simplement, on est dans un pays
23:19 qui a quand même une passion pour la fiscalité.
23:21 Dès qu'il y a un problème, il y a un appel à la puce.
23:23 - Non mais là, on vous pose une question très concrète.
23:24 Sur les niches fiscales, si c'est le levier que vous privilégiez,
23:27 lesquels vous supprimez ?
23:28 - Les dépenses budgétaires également.
23:29 - Les dépenses publiques, s'il s'agit vraiment
23:31 de faire une réforme de l'état d'ampleur.
23:33 Qu'est-ce que vous faites ?
23:34 - On a tout un tas de soutien des entreprises
23:36 à des dépenses brunes, par exemple,
23:38 dans des domaines qui sont, en effet, pour la pollution.
23:42 Mais ce n'est pas tant le sujet aujourd'hui.
23:44 Le sujet aujourd'hui, c'est est-ce qu'il faut un impôt en plus ?
23:48 Ma réponse, c'est...
23:49 - Comment financer ? Qui doit payer la dette ?
23:52 - Les mêmes.
23:53 - Je trouve que le rapport Pisani-Ferry a quand même posé
23:55 une question sous-jacente sur laquelle il n'y a pas de conclusion.
23:59 En gros, il dit que c'est bien de s'endetter pour investir.
24:02 Là, en l'occurrence, c'est pour la transition climatique,
24:05 mais globalement, on est tous d'accord
24:07 qu'on doit s'endetter pour investir et pas pour fonctionner.
24:10 Le gros problème que nous avons en France,
24:12 c'est que depuis les années 90,
24:15 on s'est beaucoup plus massivement endettés pour fonctionner
24:18 que pour investir. Pourquoi ?
24:19 Parce qu'on s'est endettés pour payer le chômage,
24:21 pour payer les retraites, pour payer la science...
24:24 - J'entends bien, mais est-ce que vous, Agnès Verdi-Molinier de l'IFRAP,
24:26 vous êtes d'accord pour s'endetter pour investir
24:29 pour cette transition climatique ?
24:31 Si c'est fléché vers des investissements, tels quels ?
24:33 - Le sujet, c'est de remplacer de la dette de fonctionnement
24:36 par de la dette d'investissement et de ne pas s'endetter plus.
24:39 - Donc, il n'y a pas de dons de monnaie de chômage ?
24:41 - Quand M. Pisaniferi dit dans son rapport en 2040
24:44 qu'il faudrait qu'on ait 25 % de dette en plus,
24:46 ce n'est pas du tout ça qu'il faut faire.
24:48 Il faut dire quelles sont les dépenses
24:50 qui nous emmènent en fonctionnement vers de la dette supplémentaire
24:54 et on arrête. On ne devrait pas s'endetter.
24:56 D'ailleurs, dans les pays du Nord de l'Europe,
24:58 ils ne s'endettent pas pour financer les dépenses de sécurité sociale,
25:01 les dépenses de protection sociale.
25:03 - Ça, c'est à travers français.
25:05 - Le problème, c'est que quand vous posez la question
25:09 quelles dépenses il faut baisser,
25:11 vous dites qu'il faut des exemples concrets.
25:13 Mais moi, je vous en donne des exemples concrets.
25:15 Si on dit que l'assurance chômage doit être équilibrée,
25:17 on se débrouille avec le budget qu'on a.
25:19 Si on dit que l'assurance maladie doit être équilibrée, c'est pareil.
25:21 Si on dit que les retraites doivent être équilibrées,
25:23 et ça rejoint ce qui a été dit tout à l'heure,
25:25 équilibrer les retraites, ça veut dire repousser l'âge,
25:27 ça veut dire travailler plus longtemps, etc.
25:29 - Vous avez un peu le sourcil, mais manifestement.
25:31 - Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on a d'énormes marges pour investir plus,
25:35 et malheureusement, au lieu de dire qu'il y a une possibilité
25:38 de stopper cette dette de fonctionnement
25:41 qui n'existe pas ailleurs dans ces proportions du tout,
25:43 et le rapport n'en parle pas,
25:45 et tout ce qu'il dit, c'est finalement
25:47 augmenter les impôts ou niche fiscale.
25:49 Mais niche fiscale, ça veut dire quoi si on en supprime ?
25:51 Ça veut dire qu'on augmente aussi les impôts,
25:53 ça veut dire qu'on augmente aussi les prélèvements obligatoires.
25:55 Et finalement, les entreprises qui polluent, justement,
25:57 elles ont besoin de pouvoir investir pour changer leur modèle.
26:01 - C'est ce que dit Total aujourd'hui,
26:03 nos super-profits servent à l'énergie verte.
26:05 - Est-ce qu'on y pense à ça ?
26:07 - Le crédit impôt-recherche,
26:09 - Ah attendez, des nouvelles bonnes,
26:11 - hyper-évoluées, ça permet aussi de changer de modèle.
26:15 - Oui, alors il est critiqué, ce crédit impôt-recherche.
26:17 - Donc arrêtons de s'endetter pour fonctionner,
26:19 peut-être que là, on aura d'énormes marges de manœuvre.
26:21 - Le message est très clair.
26:23 - On parle d'investissement,
26:25 non pas par rapport à une dette de fonctionnement,
26:27 mais d'investissement.
26:29 Moi, ce que je vois, c'est qu'au fond,
26:31 déjà, on pourrait se réjouir qu'on n'est plus dans un débat
26:33 "faut-il agir ?"
26:35 On est dans un débat de financement.
26:37 Donc ça veut dire qu'on est sortis du déni,
26:39 on pourrait se féliciter de ça, et qu'on avance.
26:41 On est tous très clairement conscients
26:43 de ce défi et de cette urgence.
26:45 Mais quand on regarde le financement,
26:47 c'est l'impasse, là, ce soir.
26:49 - Et pendant qu'on parle sur les voies de financement,
26:51 j'entends que ce que proposent
26:53 les macronistes à l'heure actuelle,
26:55 c'est de couper dans les dépenses,
26:57 et donc de couper dans la protection sociale,
26:59 couper quoi, demain, dans nos hôpitaux
27:01 ou nos écoles ?
27:03 La seule voie de financement que vous avez proposée,
27:05 c'est de couper dans les dépenses.
27:07 Et aujourd'hui, la réalité, c'est qu'à la fois
27:09 du côté de l'endettement, si vous regardez
27:11 les règles qui vont revenir au galop
27:13 au niveau européen, c'est le retour
27:15 de la règle des 3 % de déficit
27:17 et des 60 % de dette,
27:19 à travers lesquels il n'y aura pas
27:21 d'investissement vert.
27:23 - C'est la deuxième chose que je veux dire.
27:25 Permettez-moi de répondre sur la mise à contribution
27:27 des plus riches. Quant à Agnès Verdier-Moulinier,
27:29 elle dit que le taux moyen d'imposition en France
27:31 est de 45 %, elle a raison.
27:33 Mais ce qu'elle omet de dire, c'est que la France
27:35 est devenue un paradis fiscal pour les plus riches.
27:37 Parce qu'en pratique, les 370 familles
27:39 les plus riches de notre pays
27:41 ne payent que 2 % d'impôts.
27:43 - Alors, ça, c'est précisément...
27:45 - Attendez, attendez, attendez !
27:47 - Je vous ai pas entendu, s'il vous plaît.
27:49 - Quand vous avez dit ça, je vous ai laissé...
27:51 - Vous avez beaucoup de temps
27:53 sur ce plateau pour vous exprimer.
27:55 Et donc, l'enjeu, c'est comment on met
27:57 à contribution les personnes les plus riches
27:59 dont on a déjà prouvé que leurs
28:01 comportements étaient les plus polluants.
28:03 Et si vous prenez même les 37 familles
28:05 les plus riches, vous êtes à 0,2 % d'imposition.
28:07 - Il faut peut-être expliquer, Eva Stass.
28:09 - Je veux juste terminer là-dessus. Quand Bernard Arnault,
28:11 par exemple, si on lui prend juste 5 %
28:13 de sa fortune, il lui reste 200 milliards d'euros.
28:15 Qu'on m'explique comment Bernard Arnault
28:17 peut difficilement survivre avec 200 milliards d'euros.
28:19 - Attendez, attendez, s'il vous plaît.
28:21 C'est moi qui mène ce débat. Je vais vous la donner,
28:23 la parole, simplement. Il y a des téléspectateurs.
28:25 Et on s'adresse aussi à eux
28:27 de faire un peu de pédagogie.
28:29 Ça heurte quand on entend
28:31 que les 380
28:33 milliardaires français
28:35 ne... Qu'est-ce que je raconte ?
28:37 Pas du tout. Les 370 familles
28:39 en France,
28:41 c'est Gabriel Zoukman, c'est un économiste
28:43 qui a enseigné à Berkeley,
28:45 à Londres, et qui revient en France,
28:47 explique que oui, pour ces familles-là,
28:49 eh bien,
28:51 d'une certaine façon, la France est un paradis
28:53 fiscal parce qu'ils ne sont
28:55 imposés sur leurs revenus
28:57 qu'à hauteur de 2 %.
28:59 - Absolument. - Ça, quand même,
29:01 je suis sûre que ceux qui nous écoutent vont avoir
29:03 l'oreille qui se lève. Et vous allez pouvoir réagir.
29:05 Eva Sass, puis Agnès Verdemolini.
29:07 - D'abord, première chose, tout à l'heure, vous disiez,
29:09 on est sortis du déni sur les questions
29:11 climatiques, mais on est sortis du déni pour entrer
29:13 dans la com'. Aujourd'hui, il n'y a aucun moyen
29:15 pour le climat, aucun moyen suffisant.
29:17 Et c'est ce que montre
29:19 une fois de plus ce rapport, puisqu'il faut
29:21 25 à 34 milliards supplémentaires.
29:23 Donc on voit bien qu'on n'est pas du tout à la hauteur.
29:25 La deuxième chose que montre ce rapport,
29:27 et ça rejoint les analyses de Gabriel Zoukman,
29:29 c'est que ce sont les plus riches
29:31 qui contribuent le plus au dérèglement
29:33 climatique et qu'au contraire,
29:35 ce sont les plus pauvres qui pâtissent
29:37 le plus du dérèglement climatique.
29:39 Aujourd'hui, les 10 % les plus aisés,
29:41 leur empreinte carbone
29:43 est trois fois supérieure aux 10 %
29:45 les moins riches.
29:47 Alors que quand vous êtes pauvre, vous ne pouvez pas vous adapter.
29:49 Quelqu'un qui est riche, il va pouvoir
29:51 changer de voiture pour un véhicule électrique,
29:53 il va pouvoir isoler son logement,
29:55 éventuellement mettre la clim' même si je lui conseille pas,
29:57 il va pouvoir partir en vacances
29:59 quand il y a des canicules. Quand vous êtes pauvre,
30:01 vous êtes condamné à ne pas pouvoir
30:03 vous adapter et à rester dans votre logement
30:05 lors des canicules. - C'est pour ça que la question de la justice,
30:07 elle est fondamentale. - La question de la justice,
30:09 elle est fondamentale et d'ailleurs, je trouve qu'au contraire,
30:11 ça serait une mesure de cohésion sociale.
30:13 Parce que, qu'il y ait
30:15 une solidarité de ceux qui contribuent
30:17 le plus au dérèglement climatique
30:19 pour que ceux qui ont le moins pu s'adapter
30:21 et par exemple, puissent avoir
30:23 une rénovation thermique de leur logement,
30:25 aujourd'hui, le reste à charge, c'est entre 12 et 20 000 euros
30:27 pour une prime modeste. C'est impossible
30:29 de pouvoir rénover sa maison.
30:31 - C'est important ces mots d'unité et de cohésion.
30:33 Vous vouliez réagir sur
30:35 la France, le paradis fiscal
30:37 pour les ultra-riches ? - Je trouve que là,
30:39 on est complètement partis sur un débat
30:41 qui est totalement
30:43 hors sol. On a en France
30:45 des statistiques... - Je vous renvoie à ces travaux.
30:47 - On a des statistiques
30:49 qui sont hyper claires. Par exemple, sur l'impôt
30:51 sur le revenu, les 10% qui déclarent
30:53 le plus, ils payent
30:55 75% du montant
30:57 total de l'impôt sur le revenu. - Mais c'est pas le seul.
30:59 - Alors, arrêtons... - La TVA, qui en paye le plus ?
31:01 - Attendez, on a fait le travail...
31:03 - Ils en payent le plus, ils ne sont pas les plus pauvres.
31:05 - Vous m'avez laissé parler ? - Je vous permets d'aller terminer.
31:07 - On a fait le travail sur les 10%
31:09 sur l'ensemble des impôts directs.
31:11 Ils payent 50% de la note
31:13 aujourd'hui. Donc c'est eux
31:15 qui financent le plus le modèle. - Mais vous savez que c'est pas le premier impôt
31:17 en France ? - Ce sont eux... - La TVA,
31:19 le premier impôt en France, madame Verdier-Mollinet,
31:21 dit la vérité. - Ce sont eux qui financent le plus le modèle
31:23 français. Et il y a une concentration
31:25 de l'impôt qui s'aggrave.
31:27 En 2019, c'était plutôt autour de 70%
31:29 que les 10% qui gagnent
31:31 le plus payés en impôts sur le revenu.
31:33 Maintenant, c'est 75%. - L'impôt sur le revenu,
31:35 il est loin d'être le premier impôt.
31:37 Prenez un impôt qui n'est pas représentatif
31:39 de l'ensemble des impôts payés par les Français.
31:41 - Il y a de moins en moins de ménages... - Allez faire vos courses,
31:43 madame Verdier-Mollinet, vous verrez bien la TVA.
31:45 - Il y a de moins en moins de ménages
31:47 qui payent l'impôt sur le revenu
31:49 en France. Et quand vous regardez les autres
31:51 pays, il y a proportionnellement
31:53 beaucoup plus de ménages qui sont assujettis,
31:55 il y a beaucoup moins d'impôts qui pèsent sur les 10%.
31:57 - Je vais donner la parole à Mathieu Lefebvre,
31:59 qui est le plus riche. - Arrêtez de dire des choses
32:03 qui ne sont pas réelles et qui ne correspondent pas aux impôts
32:07 qui sont payés par les Français. - On ne va pas vous mettre d'accord
32:09 sur les questions de fiscalité sur les impôts.
32:11 Simplement une question. Dans le rapport,
32:13 Jean-Pizani-Ferry parle d'une révolution
32:16 industrielle majeure devant nous.
32:18 Le rapport, c'est uniquement sur les réductions d'émissions.
32:21 C'est ce qu'on appelle l'atténuation.
32:23 Mais il va y avoir des dépenses liées à l'adaptation.
32:26 Ce qui va être énorme. Si on est à 50 degrés à Paris,
32:28 il va y avoir énormément de choses
32:30 qui vont coûter très cher pour éviter le pire.
32:32 Donc, vous, vous dites quoi ?
32:34 Il y a de quoi quand même se réjouir de ce défi-là ?
32:37 Et vous nous donnez des espoirs d'être à la hauteur,
32:41 de financer tout ça, ou vous ne serez peut-être plus aux affaires
32:45 et on verra bien après qui gérera.
32:47 - D'abord, personne ne peut croire qu'Emmanuel Macron
32:50 n'a rien fait pour favoriser la transition écologique.
32:52 Quand j'entends Mme Sasse, j'ai l'impression qu'on ne vote rien.
32:55 Mais MaPrimeRénov' permet de rénover...
32:57 - Je peux juste m'exprimer, Mme Sasse.
32:59 - ...c'est le même montant qu'un livre d'impôt
33:00 de développement durable.
33:01 - Je peux juste m'exprimer.
33:02 - On va laisser le mot de la fin au député.
33:03 - La prime pour changer sa voiture, c'est Emmanuel Macron
33:05 qui l'a mise en œuvre.
33:07 Mais surtout, il y a une véritable contradiction
33:10 chez nos opposants qui, au moment de la réforme des retraites,
33:13 nous ont dit, après tout, l'équilibre des comptes,
33:15 on s'en fiche littéralement.
33:16 Mais là, par contre, pour aller financer,
33:18 pour aller chercher de l'argent, on vous retrouve.
33:20 - Vous avez plein de propositions sur la réforme des retraites.
33:22 - Moi, ce que je vous propose, Mme Sasse,
33:23 c'est qu'on travaille ensemble à réduire les dépenses
33:25 qui sont néfastes à l'environnement
33:26 et les dépenses fiscales sur l'État et sur l'environnement.
33:28 - J'ai fait des dizaines d'amendements.
33:29 - On va se quitter sur ce point, d'accord ?
33:31 - C'est simple.
33:32 - Rendez-vous dans l'hémicycle.
33:33 - On a que 1% des émissions en France
33:36 et on a 4 points de PIB par rapport à l'ensemble de la planète.
33:40 - Sur la transition énergétique et écologique, rendez-vous en juin.
33:44 - Un énorme problème de production.
33:47 - On va attendre de toute façon même de déficits commerciaux.
33:49 - On va attendre les arbitrages du président de la République
33:51 qui seront rendus publics en juin.
33:52 - Il faut produire moins en France, je ne crois pas que ce soit la solution.
33:54 Il faut produire plus au contraire.
33:55 - C'est dit.
33:56 On verra quel levier sera privilégié pour répondre à la question
34:00 de qui doit payer ou qui va payer la facture.
34:03 Merci, on s'arrête là.
34:04 Merci d'être venu débattre sur LCP.
34:07 Vous restez avec moi, Flora Ghebaly.
34:08 Dans une dizaine de minutes, les partis prides nous affranchissent.
34:10 Ce soir, vous les voyez.
34:11 Le mot de la semaine de la sémiologue Mariette Darré-Grand,
34:14 "des civilisations".
34:16 C'est ce néologisme qui a repris cette semaine à Emmanuel Macron.
34:19 Maître Bertrand Perrier va revenir sur l'acquittement de Tariq Ramadan
34:22 et les conditions de son procès à Genève.
34:25 Et puis dans Bourbon Express, ce soir, une proposition de loi
34:28 sur le congé menstruel.
34:29 Petite révolution.
34:30 On verra ça avec Marco Pommier.
34:32 Mais d'abord, on va parler un peu de vous, Flora Ghebaly,
34:34 et puis de ce syndrome de la fourmi qui nous empêche d'agir,
34:38 des barrières mentales qui nous enferment.
34:40 Alors, de quoi s'agit-il et comment en sortir ?
34:43 L'invitation ce soir est signée Stéphanie Despierre
34:45 et on en discute ensemble juste après.
34:49 Si on vous invite Flora Ghebaly, c'est parce que vous militez
34:54 pour changer de modèle et entrer vraiment dans la transition écologique.
34:59 À 28 ans, vous incarnez cette nouvelle génération,
35:02 pas résignée mais engagée et bien décidée à tout tenter
35:05 pour sauver la planète.
35:07 Flora Ghebaly, après un détour à la communication de l'Elysée
35:10 sous François Hollande, vous lancez une agence de conseil
35:13 qui aide les entreprises à devenir plus vertes.
35:16 Chroniqueuse sur BFM TV, en 2022, vous publiez
35:19 "Ma génération va changer le monde".
35:21 Vous avez créé un podcast politique.
35:23 Dans votre dernier livre, vous explorez ce que vous appelez
35:26 le syndrome de la fourmi.
35:29 Saviez-vous que lorsqu'on dessine un cercle autour d'une fourmi,
35:32 elle est incapable de s'en échapper ?
35:34 Elle croit que le trait de crayon est un mur
35:36 et cette croyance l'empêche d'avancer, d'aller de l'autre côté.
35:39 C'est ça que j'ai appelé le syndrome de la fourmi.
35:42 Cet état paralysant qui nous empêche de passer à l'action
35:45 pour sauver du désastre écologique.
35:47 Vous êtes convaincu que le changement passe par les entreprises
35:50 et pas par l'État.
35:52 Les politiques vous paraissent à côté de la plaque.
35:54 Vous prenez une transformation radicale du système économique.
35:57 Nous ne sommes pas en guerre contre les énergies fossiles.
36:00 Nous sommes en guerre contre notre système économique.
36:03 Avocate de la sobriété, vous appelez aussi à l'action individuelle.
36:08 C'est à chacun de nous de se positionner,
36:11 de changer la mentalité de ses collègues,
36:14 de changer sa façon, ses comportements.
36:16 Et ensemble, on peut faire bouger une civilisation.
36:19 Pour obtenir des politiques écologistes dignes de ce nom,
36:22 il faut, dites-vous, construire des rapports de force avec nos gouvernements.
36:26 Mais la révolution, très peu pour vous.
36:28 Vous préférez la transition à condition qu'elle démarre, enfin.
36:32 Alors dites-nous, Flora Ghebaly,
36:34 pour commencer cette transition écologique,
36:37 quelle est la première mesure à prendre ?
36:40 Réponse, la priorité des priorités pour vous.
36:44 Je dirais que c'est de constitutionnaliser la planification écologique.
36:48 Et d'ailleurs, ça revient à un sujet budgétaire exactement,
36:51 sur le débat qu'on vient d'avoir,
36:53 qui est comment on finance, qu'est-ce qu'on priorise.
36:57 Et moi, j'aimerais que quand on vote le budget à l'Assemblée,
36:59 au lieu de se demander qu'est-ce qui rentre, qu'est-ce qui sort,
37:02 comme on le fait actuellement,
37:03 on se demande comment on protège les vivants cette année.
37:06 Et que le Parlement puisse ouvrir un débat chaque année,
37:08 comme le projet de loi de financement de la France,
37:12 le projet de loi de finance du budget,
37:14 ou de la sécurité sociale,
37:16 on réfléchisse à comment cette année,
37:18 on va faire la planification écologique.
37:20 Alors c'est en cours, ça, puisque pour la première fois,
37:23 la Première ministre a posé clairement une planification
37:27 avec des économies d'énergie et surtout des...
37:29 À l'induction des missions par secteur.
37:31 Alors malheureusement, je ne suis pas la seule
37:33 à avoir cette envie-là et cette ambition-là.
37:36 Donc oui, le gouvernement l'a entendu
37:38 et a créé un secrétariat général à la planification écologique,
37:41 ce qui est une bonne chose.
37:42 Mais je pense que tant qu'on n'est pas capable
37:45 de sortir du cercle de la fourmi, je pense qu'on va en parler,
37:48 on pourra créer autant de secrétariats généraux,
37:52 autant de lois, autant...
37:54 Voilà, là, on va peut-être aller sur l'ISF vert.
37:57 Finalement, on sera toujours dans cette mécanique
37:59 qui fait qu'on fait un pas en avant, trois pas en arrière,
38:02 et qu'on n'arrive pas à changer de civilisation.
38:04 -C'est ça, c'est la question maintenant de la conscience,
38:07 presque une conscience malheureuse.
38:09 On sait, mais on n'arrive pas à agir.
38:11 On sait que la maison brûle, on ne regarde plus ailleurs,
38:14 on sort du déni, mais en même temps,
38:16 vous soulignez que savoir ne suffit pas pour agir,
38:19 c'est l'effet "not in my backyard".
38:22 De quoi parle-t-on, précisément ?
38:24 -Vous savez, cette phrase, "la maison brûle
38:26 "et on regarde ailleurs", elle date de 2002
38:28 et elle a été prononcée par un président de droite, Jacques Chirac.
38:32 Donc l'écologie n'est pas un sujet
38:34 qui a émergé seulement à gauche.
38:36 Il y a des grands discours que je raconte dans le livre
38:39 de Valéry Giscard d'Estaing et Georges Pompidou,
38:42 on dirait que c'est du Greta Thunberg.
38:44 C'est impressionnant.
38:46 -Vous combattez tous les clichés.
38:48 L'écolo, c'est pas forcément un gars de gauche qui...
38:51 -C'est ce que j'essaie de faire,
38:53 parce que je crois que le combat du moment,
38:55 c'est de rendre l'écologie universelle,
38:57 et une fois que ce sera le cas,
38:59 de discuter des tenants et des aboutissants.
39:01 Malheureusement, aujourd'hui,
39:03 on ne demande pas suffisamment à nos responsables politiques,
39:06 à nos dirigeants, de se positionner très fermement.
39:09 Et je crois que l'Assemblée générale de Total
39:11 est un très bon exemple, c'est que non,
39:13 on ne peut pas être écologiste et soutenir Total.
39:15 C'est pas possible.
39:16 Donc en fait, il faut maintenant donner
39:18 des grilles de lecture aux Françaises et aux Français.
39:20 Quand on soutient Total,
39:22 on soutient un crime contre la planète.
39:24 -Donc il faut changer de lunettes, en fait, pour vous.
39:27 Et toutes ces histoires de récits,
39:29 j'ai trouvé que c'était une des dimensions
39:31 les plus intéressantes du livre.
39:33 Il nous manque un narratif, un narratif heureux,
39:36 un moyen de se projeter dans un futur désirable.
39:38 C'est vrai qu'aujourd'hui, les jeunes sont parfois angoissés,
39:41 on parle de l'éco-anxiété.
39:43 Comment l'écrire, ce récit-là ?
39:45 -Vous savez, le narratif, ça paraît un peu superficiel.
39:48 Quand on vient d'avoir une discussion sur les taxes,
39:50 le budget, qu'on était avec des économistes
39:52 en costume cravate, on a l'impression
39:54 que moi, je vous parle de grands récits,
39:56 de grandes histoires, ça a un côté superficiel.
39:58 -Pas du tout. -Mais en fait, pas du tout.
40:00 -C'est fondamental. -Le récit, c'est la civilisation.
40:03 Et d'ailleurs, vous savez, la culture,
40:05 aujourd'hui, on a un ministère de la culture,
40:07 on a l'impression que c'est le ministère
40:09 qui administre les arts.
40:10 Mais en fait, ça devrait être beaucoup plus large que ça
40:13 et beaucoup plus fondamental, parce que la culture,
40:15 dans le Larousse, ça se définit
40:17 comme les traits communs à une nation,
40:19 les traits communs à une civilisation.
40:21 Et moi, ce que j'essaye de raconter dans ce livre,
40:23 c'est comment on crée une civilisation écologique.
40:26 -Justement. -Parce qu'aujourd'hui,
40:28 on est dans un modèle post-révolution industrielle...
40:30 -Alors comment ? -Qui est incompatible
40:32 avec les enjeux qui se présentent. -Vous parlez d'écologie culturelle
40:34 qui conduirait le changement.
40:36 Il faut plus d'écologie dans les musées,
40:39 dans notre histoire,
40:41 il faut écrire l'histoire de France,
40:43 de notre pays,
40:45 d'un point de vue de la nature,
40:47 du vivant, de l'écologie ?
40:49 -La première chose, j'ai l'impression
40:51 qu'on dénonce, vous savez, les premiers rapports
40:53 sur les limites de la croissance sont sortis en 1972.
40:55 Ça fait plus de 50 ans.
40:57 Donc j'ai l'impression que la stratégie du bâton,
40:59 elle porte ses fruits,
41:01 elle est très importante, je soutiens toutes les ONG
41:03 et même celles qui font de la désobéissance civile,
41:05 mais je pense qu'elle n'est pas suffisante.
41:07 Et qu'aujourd'hui, la stratégie du bâton,
41:09 elle est plutôt mise en oeuvre,
41:11 mais la stratégie de la carotte,
41:13 la stratégie du désir, de la désirabilité de la transition,
41:15 elle n'est pas assez déployée
41:17 dans le récit collectif.
41:19 Et je pense qu'elle est très efficace...
41:21 -Donc la sobriété peut être heureuse ?
41:23 -Bien sûr, et puis surtout,
41:25 vu la crise de sens qu'on a dans notre pays,
41:27 on a une crise qui dépasse la crise climatique.
41:29 La crise climatique est peut-être
41:31 le plus gros danger qui est face à nous aujourd'hui,
41:33 mais quand on voit les gilets jaunes dans la rue,
41:35 ils demandaient quoi ? Ils demandaient ce qu'on les respecte,
41:37 à ce qu'on les reconnaisse.
41:39 Quand on voit qu'un adolescent sur cinq
41:41 en France a des pensées suicidaires,
41:43 excusez-moi, moi, ce chiffre me choque énormément,
41:45 on devrait s'intéresser
41:47 à l'état mental, la santé mentale
41:49 de nos adolescents.
41:51 -C'est de plus en plus de violences.
41:53 -C'est ça ?
41:55 -C'est pas ce que je dis.
41:57 -Il faut pas manger de viande,
41:59 tu as pas éteint l'eau, ni la lumière,
42:01 tu tries pas les déchets.
42:03 Est-ce que ces discours qui, parfois, culpabilisent,
42:05 c'est la bonne voie ?
42:07 -C'est pas maniqué. Heureusement,
42:09 on est 70 millions dans ce pays,
42:11 8 milliards sur cette planète.
42:13 C'est normal qu'il y ait des discours différents
42:15 qui touchent les gens de façon différente.
42:17 Moi, personnellement, j'ai été très touchée
42:19 par le discours alarmiste,
42:21 mais c'est peut-être une condition cognitive
42:23 propre à ma personnalité.
42:25 Peut-être que vous, vous avez besoin d'autre chose,
42:27 qu'on vous montre que vous avez un meilleur futur ailleurs.
42:29 Je pense qu'on doit pas limiter
42:31 le discours écologiste
42:33 à une certaine intonation,
42:35 à une certaine façon
42:37 de créer un narratif,
42:39 et qu'au contraire,
42:41 on doit s'en emparer...
42:43 -Pas que des collapsologues dans le récit,
42:45 si je comprends bien.
42:47 -Excusez-moi, c'est un peu plus complexe
42:49 que ça, encore une fois, parce qu'être collapsologue,
42:51 c'est simplement voir
42:53 que le modèle dans lequel on est s'effondre.
42:55 Donc oui, le modèle dans lequel on est
42:57 s'effondre, et je pense qu'on doit dire la vérité aux gens.
42:59 -Alors justement, est-ce qu'il faut complètement changer
43:01 de modèle ? On sent que vous préférez
43:03 le mot de transition à celui de révolution,
43:05 la radicalité, j'ai pas l'impression que ce soit
43:07 forcément votre truc.
43:09 Qu'est-ce qu'on fait ?
43:11 Il faut changer de système politique,
43:13 de régime ? Vous voulez sortir
43:15 de la Ve République, vous voulez sortir
43:17 du système de l'économie de marché libéral ?
43:19 -Alors moi, je m'interroge,
43:21 et j'ai pas la réponse,
43:23 est-ce qu'en 2023, les humains,
43:25 ici en l'occurrence les Françaises et les Français,
43:27 sont assez évolués pour être
43:29 capables de faire une révolution sans violence ?
43:31 Parce que, quand on regarde à travers
43:33 l'histoire, c'est quand tout s'est effondré
43:35 qu'on a été capables de créer autre chose.
43:37 On regarde 1945, le plan Marshall,
43:39 ça a fait le modèle dans lequel on est.
43:41 Il y avait eu la guerre, le pays a été détruit,
43:43 tout était à reconstruire,
43:45 et donc on a été capables
43:47 de construire quelque chose.
43:49 Je suis pas sûre
43:51 qu'on soit capables de le faire
43:53 cette fois-ci sans violence.
43:55 Je prends l'exemple de 1945, mais on peut aussi
43:57 prendre l'exemple de 1789 et de la Révolution.
43:59 On est passé quand même par un siècle de sang
44:01 pour arriver à la démocratie.
44:03 Il faut quand même en avoir conscience.
44:05 Est-ce qu'aujourd'hui, on va réussir à éviter
44:07 le siècle de drame ?
44:09 J'ai pas la réponse, mais comme je suis profondément optimiste,
44:11 je me dis que c'est bien de poser la question.
44:13 Dernière toute petite question.
44:15 Vous avez participé à la formation
44:17 des députés dans ces séminaires
44:19 de familiarisation
44:21 aux questions climatiques,
44:23 aux enjeux sur le climat.
44:25 Vous les trouvez au point, les députés, sur ces sujets-là ?
44:27 Ça dépend lesquels.
44:29 Moi, j'ai initié la question
44:31 de...
44:33 obliger les responsables politiques
44:35 à avoir fait minimum 20 heures
44:37 de formation aux enjeux écologiques.
44:39 Pourquoi ? Parce que la Convention citoyenne
44:41 pour le climat nous a montré une chose
44:43 qui est incroyable et qui n'a pas été assez dite.
44:45 C'est que quand on prend 150 Français tirés au sort,
44:47 qui sont représentatifs de toute la diversité
44:49 de Français qu'on a dans le pays,
44:51 et qu'on les forme, ils sont tous radicaux.
44:53 Ça devient tous des activistes radicaux.
44:55 Mais vraiment.
44:57 Je suis convaincue que si on est capable
44:59 de former les députés,
45:01 les parlementaires, les sénateurs,
45:03 tous nos élus, alors on aura des politiques
45:05 écologiques qui seront beaucoup plus concrètes.
45:07 Maintenant, il faut le dire, on a un parti politique
45:09 qui s'appelle l'Europe Écologie des Verts
45:11 et plus globalement un groupe politique
45:13 qui s'appelle l'ANUPS où il y a
45:15 des programmes politiques qui sont à la hauteur
45:17 et moi, quand je veux démocratiser l'écologie,
45:19 ça ne veut pas du tout dire que je ne pense pas
45:21 qu'il faut avoir une vision politique de l'écologie
45:23 et considérer qu'aujourd'hui
45:25 un député RN ou un député LR
45:27 a la même conviction écologique
45:29 qu'un député de l'ANUPS,
45:31 c'est évidemment pas ce que je veux dire.
45:33 L'écologie n'est pas le monopole d'un parti politique
45:35 mais il y a des meilleures réponses
45:37 par partie sur le sujet que d'autres.
45:39 Quand on se forme, je crois qu'on fait des choix politiques
45:41 assez évidents. - J'espère que j'ai réussi
45:43 à sortir de ma prison mentale et donc du syndrome
45:45 de la fourmi. - Merci beaucoup.
45:47 - Merci à vous, Flora Ghebaly. C'est donc à l'érosion
45:49 de l'observatoire, voir et déplacer
45:51 les barrières mentales de l'inaction climatique.
45:53 Vous restez avec moi, c'est l'heure
45:55 d'accueillir nos affranchies pour leur parti
45:57 pris et vous faire réagir. Allez,
45:59 c'est à eux tout de suite.
46:01 Mariette Barret, grande bienvenue.
46:03 - Installez-vous, maître Bertrand Perrier.
46:05 C'est un plaisir de vous retrouver
46:07 comme chaque vendredi. On va commencer,
46:09 préparez-vous, par le Bourbon Express.
46:11 - Bien sûr. - L'histoire du jour
46:13 à l'Assemblée nous est racontée ce soir
46:15 par Marco Pommier. Bonsoir, Marco.
46:17 - Bonsoir, Myriam. Et si demain,
46:19 les femmes pouvaient s'absenter du travail
46:21 en cas de règles douloureuses,
46:23 sans perte de salaire ?
46:25 Chaque mois, beaucoup souffrent en silence.
46:27 Près d'une femme sur deux serait concernée
46:29 et pour certaines, c'est un véritable calvaire.
46:31 Trois députés écologistes
46:33 ont donc décidé de passer
46:35 à l'offensive avec une proposition
46:37 de loi pour instaurer un congé
46:39 menstruel pour les femmes.
46:41 PPL déposé aujourd'hui
46:43 par Sébastien Pétavy, Marie-Charlotte Garin
46:45 et Sandrine Rousseau.
46:47 - Et en fait, c'est un scandale.
46:49 C'est-à-dire qu'à un moment, on doit visibiliser
46:51 ce que c'est que d'avoir
46:53 ces règles et les conséquences que ça a.
46:55 Et si nous le faisons dans le monde du travail,
46:57 alors il sera plus facile pour chacune
46:59 des personnes menstruées en France
47:01 de pouvoir réclamer des droits
47:03 au titre de cela.
47:05 Et c'est pour ça que cette proposition de loi
47:07 est extrêmement importante.
47:09 - Alors, à quoi ça va ressembler ?
47:11 - La proposition, c'est un arrêt maladie
47:13 de 13 jours maximum par an,
47:15 un jour par cycle de règles.
47:17 Alors, il faudrait quand même présenter
47:19 un certificat médical délivré
47:21 par des généralistes, des spécialistes,
47:23 sages-femmes ou par la médecine du travail.
47:25 L'arrêt maladie ne ferait pas mention
47:27 de la raison.
47:29 Autre point à souligner, la liberté
47:31 de prendre séjour consécutivement
47:33 ou séparément en fonction des douleurs
47:35 ressenties selon les mois.
47:37 Concrètement, qu'est-ce que ça changerait ?
47:39 Parce qu'aujourd'hui, on peut déjà se faire arrêter
47:41 par son médecin pour des règles douloureuses.
47:43 Réponse avec Sébastien Pétavis.
47:45 - Il y a plein de métiers.
47:47 Par exemple, si on prend une caissière,
47:49 aujourd'hui, elle ne peut pas utiliser le télétravail,
47:51 elle n'a pas un très bon salaire.
47:53 Et si elle pose un arrêt avec la carence,
47:55 elle donne, au niveau de la douleur,
47:57 et financière.
47:59 Le fait de faire un arrêt permet
48:01 de faire lever le jour de carence
48:03 et d'éviter une pénalité financière.
48:05 - Vous l'avez compris, Myriam,
48:07 ce congé mensuel proposé par les écologistes
48:09 serait donc sans jour de carence
48:11 un arrêt intégralement pris en charge
48:13 par l'assurance maladie.
48:15 Certaines entreprises n'ont pas attendu
48:17 les politiques pour mettre en place un tel dispositif.
48:19 C'est le cas du fabricant de mobilier
48:21 Louis Design Carrefour va l'appliquer
48:23 aussi dès cet été.
48:25 En février, c'est l'Espagne qui a franchi le pas,
48:27 une première en Europe.
48:29 Oui mais voilà, pour certaines associations féministes,
48:31 c'est une fausse bonne idée.
48:33 - Avec le congé mensuel,
48:35 il y a certaines féministes qui craignent
48:37 une discrimination à l'embauche.
48:39 Qu'est-ce que vous leur répondez ?
48:41 - Je leur réponds qu'au contraire,
48:43 cet arrêt mensuel permet de lutter contre la discrimination
48:45 des femmes dans le cadre du travail,
48:47 puisque aujourd'hui, tout le droit du travail,
48:49 mais toute la santé au travail,
48:51 c'est des corps d'hommes.
48:53 Les femmes aujourd'hui s'organisent,
48:55 elles prennent un jour de RTT,
48:57 elles partent du travail en urgence,
48:59 un peu en quatier mini,
49:01 elles prennent sur leurs jours de congé.
49:03 Et en fait, ça c'est inadmissible,
49:05 c'est ça la discrimination aujourd'hui.
49:07 - Et la proposition loi va même encore plus loin,
49:09 avec la volonté de sensibiliser
49:11 les entreprises et les administrations publiques,
49:13 avec la mise en place aussi
49:15 de sanitaires adaptés,
49:17 avec des protections menstruelles à disposition.
49:19 Objectif, faire adopter
49:21 cette proposition de loi dans le cadre
49:23 d'une semaine transpartisane à l'Assemblée.
49:25 Quoi qu'il en soit, Myriam,
49:27 le sujet des règles longtemps restées taboues
49:29 crée maintenant le débat,
49:31 et ça, c'est déjà une petite révolution.
49:33 - Absolument. C'est une bonne idée ?
49:35 Qu'est-ce que vous en pensez ?
49:37 - Sincèrement ? - Oui.
49:39 - Je pense que c'est très bien de lever le tabou
49:41 qui a pu l'avoir pendant longtemps sur les règles,
49:43 mais moi, pour viser l'égalité femmes-hommes,
49:45 je préfère qu'on augmente le congé paternité
49:47 en ce qui concrèt un congé menstruel.
49:49 - On l'a déjà augmenté, vous savez.
49:51 - Oui, mais pas assez. On n'est pas encore
49:53 comme en Norvège, où il y a le même congé
49:55 pour les femmes et les hommes.
49:57 Je pense que quand on commence à différencier
49:59 trop les travailleurs
50:01 en fonction de leur genre
50:03 ou de leur sexe, c'est jamais bon pour l'égalité.
50:05 - On verra. On verra quel avenir
50:07 a cette proposition de loi,
50:09 si elle trouve une majorité dans l'hémicycle ou pas.
50:11 Bertrand voulait revenir
50:13 sur l'acquittement par la justice
50:15 suisse. C'était avant-hier
50:17 de l'islamologue Tariq Ramadan.
50:19 - Oui, Myriam, en effet, mercredi, après trois jours
50:21 d'audience, le tribunal correctionnel de Genève
50:23 a acquitté Tariq Ramadan
50:25 des accusations portées à son encombre par
50:27 une femme qui est aujourd'hui âgée de 57 ans
50:29 qu'on appellera donc Brigitte, et qui
50:31 affirme avoir été violée par
50:33 Tariq Ramadan dans une chambre d'hôtel
50:35 à Genève en 2008.
50:37 Le parquet avait requis
50:39 trois ans de prison ferme,
50:41 dont 18 mois ferme,
50:43 mais la juridiction,
50:45 ce sont des juges, ce ne sont pas des jurés populaires
50:47 en Suisse, a donc acquitté
50:49 Tariq Ramadan. - Acquittement au bénéfice
50:51 du doute. - Oui, au bénéfice du doute.
50:53 Le tribunal estime n'avoir pas
50:55 permis d'avoir une réelle
50:57 certitude sur la culpabilité.
50:59 Il a reconnu que la plainte d'ordre n'avait pas
51:01 varié dans ses déclarations,
51:03 mais il n'y avait pas de preuves
51:05 matérielles, il n'y avait pas de constatations médicales,
51:07 des vidéosurveillances.
51:09 Les témoignages apportés par
51:11 Brigitte n'ont pas été considérés
51:13 comme suffisamment fiables
51:15 et, en définitive,
51:17 il a été relevé aussi que,
51:19 après les faits, Brigitte avait continué
51:21 à envoyer des messages
51:23 affectueux à Tariq Ramadan.
51:25 - Évidemment, verdict salué
51:27 par Tariq Ramadan, on le comprend.
51:29 Il y a aussi beaucoup de féministes
51:31 pour qui c'est une claque, ce jugement.
51:33 - Oui, c'est une claque aussi dans le déroulement
51:35 de l'audience. Les observateurs décrivent
51:37 une audience extrêmement déséquilibrée,
51:39 très dure à l'égard
51:41 de Brigitte, qui a été interrompue,
51:43 malmenée, on lui a ordonné de se taire,
51:45 et, à l'inverse,
51:47 très complaisante à l'égard de Tariq Ramadan,
51:49 qui, pendant trois jours, a pu dérouler
51:51 assez librement son discours,
51:53 selon lequel il est victime
51:55 d'un complot, d'affabulatrices
51:57 qui veulent lui nuire et nuire
51:59 à l'islamologue qu'il est,
52:01 avec le soutien un peu inattendu
52:03 de Dieu Donné, qui est venu témoigner
52:05 pour lui. - Oui. Alors,
52:07 ce verdict, on sait que,
52:09 peut-être, est temporaire, puisqu'il va y avoir
52:11 un appel, les avocats
52:13 l'ont fait savoir de la partie civile.
52:15 Ca pose aussi
52:17 une vraie question sur ce qu'il reste du mouvement
52:19 #MeToo, tout de même, ce procès.
52:21 - Oui, il y a une question assez simple,
52:23 c'est est-ce que #MeToo a franchi la frontière suisse ?
52:25 Est-ce qu'il y aurait une sorte d'exception
52:27 culturelle helvétique en la matière,
52:29 pour le dire très clairement, est-ce que Genève
52:31 a 20 ans de retard ? Et on ne peut pas
52:33 s'empêcher de... Bien sûr !
52:35 Dans une enceinte judiciaire,
52:37 le doute profite, personne n'est cru
52:39 sur parole, il faut apporter des preuves,
52:41 il y a un débat contradictoire. Mais les conditions
52:43 de recueil de la parole
52:45 de Brigitte, la façon dont, encore une fois,
52:47 elle a été rudoyée par
52:49 le tribunal, un tribunal
52:51 ostensiblement fébrile,
52:53 hostile, avec une pression
52:55 médiatique forte, posent le problème,
52:57 encore et toujours, du recueil
52:59 de la parole des femmes,
53:01 et de l'écoute qu'il aurait
53:03 réservée. On va probablement avoir l'occasion
53:05 de voir ce qui va se passer en France,
53:07 puisque Tariq Ramadan
53:09 est susceptible d'être renvoyé
53:11 devant la Cour d'assises en France
53:13 pour des viols qu'il aurait commis cette fois-ci
53:15 sur notre territoire. - Merci.
53:17 Carte blanche signée, Bertrand Perrier.
53:19 Ça vous a choqué, vous, ce verdict ?
53:21 - Je connais pas
53:23 les considérations juridiques, mais je crois
53:25 que Tariq Ramadan a aussi des procès en cours en France,
53:27 donc on verra quel sera
53:29 le jugement ici. - Quelle sera la suite ?
53:31 - Je sais pas si le mouvement #MeToo a de la place
53:33 dans les prétoires. - Merci, Bertrand.
53:35 On termine avec un mot,
53:37 le vôtre, celui que vous avez choisi
53:39 comme chaque semaine, Mariette. Vous vouliez revenir
53:41 sur ce mot, ce néologisme,
53:43 en fait, "déscivilisation",
53:45 qu'a employé Emmanuel Macron dans le huis clos
53:47 du Conseil des ministres, ce qui a été
53:49 mercredi dernier. Qu'est-ce qu'il a
53:51 voulu dire, à votre avis, le président ?
53:53 - Alors, en fait, je pense qu'il a fait deux choses
53:55 à la fois, en même temps. C'est son habitude.
53:57 Il a, en fait, mêlé deux titres
53:59 de livres. Le premier livre, "Déscivilisation",
54:01 c'est un livre de Renaud Camus, auteur
54:03 prolixe dans les formulations,
54:05 donc il a créé ce néologisme qui va bien
54:07 avec sa théorie du remplacement,
54:09 mais il est pas dans le dictionnaire. Ce mot, je l'ai pas trouvé.
54:11 En revanche, le second titre,
54:13 c'est "Le processus de civilisation",
54:15 c'est un grand classique des sciences humaines,
54:17 écrit par Norbert Elias
54:19 dans les années 39,
54:21 et qui revient, si vous voulez, justement
54:23 sur ce que l'on peut appeler "civilisation".
54:25 Alors, Norbert Elias écrit
54:27 ce livre dans la montée du nazisme,
54:29 mais il en est victime, il doit s'exiler,
54:31 malheureusement, mais il fait quelque chose
54:33 de tout à fait intéressant pour notre histoire.
54:35 Il va regarder ce qui se passe dans les années
54:37 1380, XIVe siècle,
54:39 ambiance un peu "Game of Thrones". - Oui, Moyen Âge.
54:41 - Qu'est-ce qui se passe dans les cours
54:43 d'Allemagne et de France ?
54:45 Cours, c'est-à-dire que ça va donner la courtoisie.
54:47 Les chevaliers qui sont mal dégrossis,
54:49 qui sont violents, guerriers, etc., acceptent
54:51 quelque chose, probablement
54:53 sur la demande des femmes, c'est une sorte de "me too"
54:55 à leurs valeurs, et ils civilisent
54:57 leur force, ils commencent
54:59 à pratiquer ce qu'Elias
55:01 appelle l'autocontrainte, c'est-à-dire une
55:03 intériorisation de la loi. Ils acceptent
55:05 quelque chose qui est fondamental, et c'est ça
55:07 qui va donner, finalement, le vivre-ensemble
55:09 de notre État moderne aujourd'hui,
55:11 où la violence est civilisée.
55:13 - Deux visions, donc, très
55:15 différentes de ce qu'est la civilisation.
55:17 - Oui, dans un cas, on peut dire que la civilisation, c'est la culture.
55:19 En France, on aime la liberté,
55:21 la laïcité, la gastronomie, le luxe.
55:23 On peut dire que la civilisation humaine, c'est
55:25 ethnologique, en quelque sorte. Ce que dit Elias,
55:27 et c'est ça qui, pour nous, est un héritage fondamental,
55:29 c'est que la civilisation,
55:31 c'est anthropologique, c'est l'être humain
55:33 qui est en cause. Et le titre, en français,
55:35 du livre, c'est
55:37 "La civilisation des mœurs", donc c'est
55:39 le résultat, si vous voulez, alors qu'Elias a appuyé
55:41 sur le process, process,
55:43 le processus de civilisation.
55:45 C'est-à-dire, il nous dit, ça se fait pas en un jour,
55:47 c'est long, ça prend le Moyen Âge,
55:49 la Renaissance, etc., et dans chacun de nous,
55:51 on voit bien avec les enfants que nous éduquons,
55:53 ça prend énormément
55:55 de temps, donc c'est
55:57 jamais gagné, et la civilisation doit toujours
55:59 être remise sur le métier. -Et nous devons
56:01 reprendre ce processus aujourd'hui,
56:03 vous diriez ? -Oui, je pense que c'est absolument fondamental.
56:05 Il faut vraiment qu'on réfléchisse à ça
56:07 collectivement, c'est ça qui nous arrive
56:09 avec la montée des violences, ce qu'on appelle
56:11 la montée des violences. Il faut être plus que
56:13 sociologue ou sociopolitique, il faut être
56:15 anthropologue, et il faut vraiment
56:17 considérer que, ben, ça passe,
56:19 il y a, il s'explique, c'est très agréable à lire,
56:21 c'est très intéressant, il dit, ça commence par
56:23 "ne pas se moucher dans ses doigts", la civilisation,
56:25 c'est comme ça. Donc, pour moi,
56:27 ce qui est à retenir de la séquence
56:29 de notre président, c'est que
56:31 la vraie répartition,
56:33 c'est pas entre les gens civilisés
56:35 et des gens qui seraient décivilisés,
56:37 mais c'est entre
56:39 les gens civilisés, quelle que soit leur
56:41 origine, quelle que soit leur ethnie,
56:43 quelle que soit leur culture d'appartenance,
56:45 et l'attachement à cette culture.
56:47 Voilà, nous aimons être français, mais
56:49 il y a les gens qui acceptent ce
56:51 processus de civilisation, cette autocontrainte
56:53 pour vivre ensemble, et les
56:55 autres, soit ils n'acceptent pas, soit,
56:57 malheureusement, on peut dire, sous l'effet des substances
56:59 ou autres, s'entendent ça
57:01 de ce qu'il faut bien appeler la civilisation
57:03 humaine. - C'est très juste.
57:05 Et c'est très fin, comme d'habitude, avec
57:07 Mariette. Merci beaucoup.
57:09 Voilà, j'espère que nous avons fait
57:11 lien en cette fin de semaine.
57:13 Le processus de civilisation était,
57:15 j'espère, à l'oeuvre. Merci beaucoup,
57:17 Flora Ghebaly, le syndrome de la
57:19 fourmi, c'est-à-dire aux éditions de l'Observatoire,
57:21 Bertrand, Mariette,
57:23 à la semaine prochaine, à très vite,
57:25 bien sûr, Marco, c'est le week-end,
57:27 profitez bien, et donc à la
57:29 semaine prochaine.
57:31 (Générique)
57:33 ---
57:44 [SILENCE]

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