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Des marionnettes pour raconter des histoires de résistances féministes. C’est ce que propose l’artiste italienne Marta Cuscunà dans une trilogie de spectacles. Seule sur scène, elle anime ses différents personnages dont l'histoire résonne encore aujourd'hui.

Transcription
00:00 Les marionnettes pour raconter des histoires de résistance féministe.
00:02 C'est ce que propose l'artiste italienne Marta Cuscuna dans une trilogie de spectacles.
00:06 Dans mon travail, j'essaie d'utiliser les marionnettes ou les figures
00:11 quand mon corps n'en est pas assez pour raconter certaines questions
00:16 de l'histoire liées en particulier au genre.
00:18 Dans La Simplicité Trahie, qu'elle a présentée à la Biennale Internationale des Arts de la Marionnette à Paris,
00:24 l'artiste met en scène sept marionnettes qu'elle manipule seule sur scène.
00:27 Ce spectacle retrace l'histoire des Clarisses d'Oudiné,
00:29 une communauté religieuse italienne du XVe siècle
00:32 qui a développé un espace de contestation, de liberté de pensée, inédit pour des femmes à l'époque.
00:36 Elle s'inspire du livre L'Enfer Monacal d'une de ses nonnes, Arcangela Talrabotti,
00:44 qui témoigne de ce qu'elles ont bâti.
00:45 C'est une histoire qui, malgré son éloignement de la plupart des femmes contemporaines,
00:54 a des analogies très fortes avec des questions qui encore
00:59 forment les femmes dans un système patriarcal.
01:02 Pour faire un exemple, la première est cette idée de monétiser la figure féminine
01:09 sur laquelle se basaient les dotes matrimoniales,
01:12 qui est peut-être encore aujourd'hui, en quelque sorte, sous terre,
01:18 cette idée que la beauté soit l'unité de mesure du valor d'une femme.
01:25 A l'époque, avoir une fille implique de payer pour la caser.
01:28 Marta Cuscuna se met dans la peau de ses futures mariées.
01:30 Comme dans une salle de bourse, on décide de leur avenir en fonction de leur prix.
01:34 Pour certaines, ce sera le mariage, pour d'autres, le couvent.
01:36 Dans cette satire, elle donne vie à ses nonnes à travers les marionnettes qu'elle a dû apprendre à manier.
01:41 Je pense que c'est beaucoup d'entraînement,
01:44 donc un nombre infini de prises,
01:49 dans lesquelles je travaille souvent avec un écran devant,
01:52 et l'idée de filmer beaucoup de voix que je ressens peut-être dans la vie ou au cinéma,
01:59 pour pouvoir imiter.
02:09 Les religieuses sont positionnées les unes à côté des autres,
02:11 sur une barre en fer, dans un espace très limité, à l'image de leur couvent.
02:15 Dans les œuvres d'Archangel Tarabotti,
02:18 les monastères forcées sont comparées à des oiseaux pris dans le visqueux.
02:23 Ils ont cet aspect si mortifère,
02:26 parce que dans l'Inferno monacale, Archangel Tarabotti dit que
02:30 les monastères forcées étaient souvent très malades, décrépites.
02:37 Parce que les monastères, à l'époque, étaient des endroits malades,
02:43 où il fallait rincler et oublier ces filles féminines.
02:46 L'inspiration est la "Marie-Cadavre" de Tim Burton,
02:50 et le "Court for the Birds" de Pixar,
02:54 où il y a ce flou de oiseaux,
02:56 et toute la planète se passe sur un fil.
03:00 Les dialogues entre elles sont piquants et drôles,
03:02 encore plus lorsque l'Inquisition, incarnée par la tête d'un religieux aux yeux exorbités,
03:06 cherche à les faire taire lors d'un procès.
03:08 L'aspect comique était fondamental pour cette histoire,
03:11 pour récupérer le spirit de la protagoniste.
03:15 Je crois que c'est encore une arme efficace
03:20 pour parler de questions féministes
03:23 à un public qui peut être encore sceptique
03:28 par rapport à ces sujets.
03:30 Marta Cuscuna s'est d'abord orientée vers le musical,
03:33 avant de trouver sa voix dans l'univers des marionnettes,
03:35 grâce à un directeur qui l'a incité à continuer dans le théâtre d'objets.
03:38 Au début, c'était un sujet de budget.
03:40 Pour pouvoir faire un spectacle avec beaucoup de personnages,
03:45 et en devant en payer une seule,
03:47 je restais avec des marionnettes.
03:50 L'un des indications qui, en fonction du budget,
03:54 étaient données aux scénographes,
03:57 était de construire la scène
04:01 en fonction des mesures du bagageur de la voiture de mes parents,
04:05 qui est celle avec laquelle nous partons en tournée.
04:07 "Sorry Boys" et "Il canto della caduta"
04:09 sont les deux autres spectacles de la trilogie.
04:11 Ce sont des histoires qui racontent des personnes
04:16 qui, dans des endroits et des temps très différents,
04:19 ont inventé des stratégies pour détruire le système patriarcal,
04:24 et qui ont trouvé le courage d'imaginer
04:28 pour elles-mêmes et pour les autres,
04:31 un monde qui les comprenne.
04:35 Et je pense que c'est encore utile aujourd'hui
04:38 pour toutes ces catégories de personnes
04:40 qui sont encore laissées au bord du patriarcat.
04:45 Sous-titrage Société Radio-Canada

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