• il y a 2 ans
Victime de violences conjugales, Laura Rapp témoigne après la condamnation de Mohamed Haouas : «Souvent, c'est quand on part que ces hommes passent à l'acte».

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Transcription
00:00 Ce qu'il faut savoir, c'est qu'elle dit que c'est sa dernière chance,
00:02 mais combien de chances elle lui a laissées ?
00:04 Et est-ce qu'elle aura une chance après de rester en vie ?
00:07 Donc ça, personne ne se pose la question.
00:09 Vous savez, il y a autre chose qu'on dit pourquoi elle ne part pas.
00:13 Moi, quelques mois avant l'attentatif de meurtre,
00:15 il y a eu une intervention de police et je voulais partir,
00:17 sauf qu'ils m'avaient balancé une bouteille d'eau froide sur ma fille.
00:20 Ils m'avaient menacé de mort avec un club de goffres
00:22 et le policier m'a dit qu'en gros, je pouvais déposer plainte,
00:24 mais que ça irait à pas bien loin.
00:25 Et je savais que le jour où je déposerais plainte, où je partirais,
00:30 j'étais une femme morte avec ma fille et c'est pour ça que je ne suis pas partie.
00:31 Mais je savais que dans les mois suivants,
00:33 que j'allais trouver le coup, qu'il allait me tuer,
00:36 mais je ne savais pas comment faire.
00:37 Cet homme me terrorisait.
00:39 D'ailleurs, il me disait, si tu pars à la police, tu es morte.
00:41 Je connais bien le système judiciaire.
00:43 Mon père était policier.
00:44 Je ne serai que quelques mois de prison.
00:45 Je me débattrai, je resterai de toi.
00:47 Quand il y a un enfant, je me dis au moins,
00:49 c'est moi qui prend les coups, ce n'est pas elle.
00:51 Donc je sais que ça peut paraître choquant.
00:53 Mais c'est très compliqué quand il y a des enfants,
00:56 notamment plus quand après on doit déposer plainte avec la justice.
01:00 Et je pense que cette femme, elle a peur.
01:02 Elle a peur.
01:03 Regardez, même s'il aurait été maintenu en détention,
01:06 il aurait fait quoi quelques semaines ?
01:08 Et après, elle a des enfants avec lui,
01:10 il n'y a même pas eu d'interdiction de rentrer en contact.
01:12 Il va revenir, qu'est-ce que vous voulez qu'elle fasse ?
01:14 Elle doit être terrorisée.
01:16 Enfin là, quand on voit la photo de cet homme,
01:18 en plus il fait plus de 120 kilos.
01:20 Je ne sais pas, déjà moi je le vois, je me dis,
01:22 je réfléchirai à deux fois avant d'embêter déjà ce monsieur.
01:25 Moi le mien ne faisait pas du tout ce gabarit-là
01:27 et j'étais terrorisée, il avait juste à me regarder.
01:29 Franchement, j'avais peur.
01:31 Donc il y a la peur aussi, il y a ça,
01:33 parce que souvent c'est quand on part que ces hommes aussi passent à l'acte
01:36 et qu'ils peuvent également s'en prendre à nos enfants.
01:38 Donc c'est très compliqué en fait de partir.
01:41 Pour vous, ça a été une spirale en fait, ça a été petit à petit,
01:43 jusqu'au moment où il a tenté de vous étrangler, c'est ça ?
01:46 Avant la tentative de Mars, il y avait trois interventions de police.
01:49 Déjà, il faut réussir à mettre des mots sur les mots, sur les violences.
01:52 Au départ, je ne voulais pas dire que j'étais victime de violences conjugales.
01:54 Et après, ça monte crescendo jusqu'à…
01:56 On était quand même sur des violences physiques, sur les strangulations,
02:00 c'était vraiment des violences physiques très violentes,
02:04 des violences psychologiques.
02:05 Et puis sur les derniers mois, il était tout le temps en train de menacer le mort.
02:08 Il dit « je vais te débarrasser de toi, je vais te tuer, je vais te tuer ».
02:10 Donc je pense qu'au bout d'un moment, quand un homme dit « plusieurs fois,
02:13 je vais te tuer, je vais te tuer », au bout d'un moment, il passe à l'acte.
02:15 Et moi, ce soir-là, la chance que j'ai eue, c'est qu'il m'avait enfermée,
02:18 enfin, il m'a enfermée à clé dans l'appartement,
02:20 et je n'ai pas réussi à sortir de l'appartement.
02:22 Et c'est les voisins qui m'ont sauvée la vie d'une mort certaine.
02:25 Et autre chose, il est parti en garde à vue,
02:27 ce que je dis moins rarement sur les plateaux de télé,
02:30 mais il a été placé en détention prévisoire.
02:32 Mais ce jour-là, quand il a été placé en détention prévisoire,
02:35 les magistrats m'ont sauvée la vie, parce que cet homme serait ressorti
02:38 à 99 %, il m'aurait sûrement tuée.
02:41 Et c'est même pire, parce que quand il est parti en détention provisoire,
02:47 j'ai été soulagée, parce que je me suis dit « la justice me protège enfin avec ma fille ».
02:51 Je n'avais plus de violence, mais psychologiquement, j'étais très mal,
02:54 parce que c'est peut-être difficile à comprendre,
02:56 mais quelque part, ils sont aussi notre vie.
02:58 Pourtant, j'ai fait des études, j'avais un bon travail, je gagnais bien ma vie,
03:01 mais j'étais totalement perdue, je n'avais plus de repères.
03:04 Et quand il part en prison, on ne s'imagine même pas,
03:06 c'est un double choc, au-delà d'avoir vécu des violences extrêmes,
03:09 on doit dire à tous nos proches, tout le monde, il est parti en prison.
03:12 Il n'y a personne qui nous accompagne, qui nous aide,
03:15 qui nous dit « le père de mon enfant est en prison pour violences conjugales
03:19 ou pour tentative de meurtre ».
03:21 C'est quelque chose dont on ne parle pas, mais c'est extrêmement violent,
03:23 même si aujourd'hui, on en parle plus.
03:25 J'avais honte aussi à l'époque.
03:27 Donc, c'est compliqué psychologiquement.
03:30 Mais je sais que la justice, en tout cas, la détention, la prison,
03:34 sert aussi à protéger les victimes.
03:36 Je sais qu'il y en a beaucoup qui sont contre.
03:38 Ou alors, il faut séparer aussi l'auteur de la victime,
03:43 à un certain temps, pour que la victime ne soit plus sous emprise de cet homme.
03:48 [Musique]
03:52 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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