- Grand témoin : Aurore Bergé, députée Renaissance des Yvelines et Présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale
LE GRAND DÉBAT / Relocaliser la production de médicaments : pari impossible ?
« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski
Un mois après une longue série de déplacements consacrés à la réindustrialisation du pays et à son regain d'attractivité pour les investisseurs, Emmanuel Macron reprend, mardi 13 juin 2023, une nouvelle séquence consacrée à la souveraineté industrielle. En France, de plus en plus de médicaments viennent à manquer : paracétamol, antibiotiques, antiépileptiques... Selon une étude BVA réalisée pour « France Assos Santé », 37% des Français ont été confrontés à des pénuries en pharmacie. À cet égard, le Chef de l'État a annoncé la publication d'une liste de médicaments pour lesquels une « sécurisation des chaînes d'approvisionnement » sera prioritaire, via une relocalisation ou une diversification des fournisseurs.
Invités :
- Damien Maudet, député LFI de Haute-Vienne
- Anne-Sophie Leroux, porte-parole d'OTMeds
- Professeur Jean-Jacques Zambrowski, médecin et professeur d'économie de la santé
- Christophe Lucas, Président de « Epilepsie France »
LE GRAND ENTRETIEN / Aurore Bergé : la puncheuse de la Macronie !
Le 22 juin 2022, les collègues d'Aurore Bergé l'élisent dès le premier tour Présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale. Elle devient ainsi la première femme à diriger le groupe majoritaire dans l'hémicycle. Depuis, certaines de ses interventions ont été très remarquées, tout comme les coups d'éclat de l'opposition. Comment Aurore Bergé a-t-elle vécu cette première année dans le chaudron de l'Assemblée ?
- Grand témoin : Aurore Bergé, députée Renaissance des Yvelines et Présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale
BOURBON EXPRESS :
- Stéphanie Dépierre, journaliste LCP
LES AFFRANCHIS :
- Cécilia Gabizon, directrice des rédactions « ETX Majelan »
- Fanny Guinochet, journaliste économique à FranceInfo
Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.
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LE GRAND DÉBAT / Relocaliser la production de médicaments : pari impossible ?
« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski
Un mois après une longue série de déplacements consacrés à la réindustrialisation du pays et à son regain d'attractivité pour les investisseurs, Emmanuel Macron reprend, mardi 13 juin 2023, une nouvelle séquence consacrée à la souveraineté industrielle. En France, de plus en plus de médicaments viennent à manquer : paracétamol, antibiotiques, antiépileptiques... Selon une étude BVA réalisée pour « France Assos Santé », 37% des Français ont été confrontés à des pénuries en pharmacie. À cet égard, le Chef de l'État a annoncé la publication d'une liste de médicaments pour lesquels une « sécurisation des chaînes d'approvisionnement » sera prioritaire, via une relocalisation ou une diversification des fournisseurs.
Invités :
- Damien Maudet, député LFI de Haute-Vienne
- Anne-Sophie Leroux, porte-parole d'OTMeds
- Professeur Jean-Jacques Zambrowski, médecin et professeur d'économie de la santé
- Christophe Lucas, Président de « Epilepsie France »
LE GRAND ENTRETIEN / Aurore Bergé : la puncheuse de la Macronie !
Le 22 juin 2022, les collègues d'Aurore Bergé l'élisent dès le premier tour Présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale. Elle devient ainsi la première femme à diriger le groupe majoritaire dans l'hémicycle. Depuis, certaines de ses interventions ont été très remarquées, tout comme les coups d'éclat de l'opposition. Comment Aurore Bergé a-t-elle vécu cette première année dans le chaudron de l'Assemblée ?
- Grand témoin : Aurore Bergé, députée Renaissance des Yvelines et Présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale
BOURBON EXPRESS :
- Stéphanie Dépierre, journaliste LCP
LES AFFRANCHIS :
- Cécilia Gabizon, directrice des rédactions « ETX Majelan »
- Fanny Guinochet, journaliste économique à FranceInfo
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00:00:00 [Musique]
00:00:05 Bonsoir et bienvenue, ça vous regarde en direct, notre grand témoin ce soir c'est vous, Rorberger, bonsoir.
00:00:11 Et merci d'être là, vous êtes la patronne des députés Renaissance.
00:00:15 Merci aussi d'inaugurer ce soir une série spéciale d'émissions consacrée à ces un an de la nouvelle Assemblée Nationale.
00:00:23 Et oui, le premier tour des législatives c'était le 12 juin dernier.
00:00:26 On va revenir sur votre première année de présidence, on va parler de cette réforme des retraites, adopter quelques plots forceps si je peux bien le reconnaître.
00:00:33 Et puis cette motion de censure, un échec puisqu'elle a été rejetée hier, on y reviendra dans le détail.
00:00:38 Mais on commence ce soir par la pénurie de médicaments.
00:00:42 Antibiotiques, paracétamol, antiepileptique, un français sur trois a été confronté à des ruptures de stock en pharmacie.
00:00:49 Alors Emmanuel Macron fait une promesse aujourd'hui, relocaliser en France une cinquantaine de médicaments essentiels.
00:00:56 La réindustrialisation sanitaire est-elle possible ?
00:01:00 On en débat dans un instant avec mes invités avant de retrouver nos affranchis pour leur parti pris.
00:01:05 Et puis un Bourbon Express ce soir sur la génération 86, la vôtre, Aurore Berger, elle est consacrée, on va le voir à l'Assemblée.
00:01:12 Voilà pour le menu, on y va ? Ça vous regarde, c'est parti !
00:01:16 *Générique*
00:01:27 Le Covid et les grippes de l'hiver n'expliquent pas tout.
00:01:30 Certains patients sont confrontés aujourd'hui à la pénurie de certains médicaments.
00:01:34 La France, premier consommateur d'antibiotiques et d'antidouleurs en Europe, est particulièrement exposée.
00:01:40 Et notre dépendance industrielle, à la Chine notamment, nous place dans une situation particulièrement risquée.
00:01:45 Mais peut-on réellement en sortir ?
00:01:47 Bonsoir Damien Maudet, et merci d'être là.
00:01:50 Vous êtes député de la France Insoumise de la Haute-Vienne, vous travaillez sur ces sujets,
00:01:54 vous préparez une proposition de loi pour un pôle public de la santé.
00:01:58 Vous nous direz exactement de quoi il s'agit, vous travaillez avec la NUPES sur ce sujet.
00:02:03 Bonsoir Anne-Sophie Leroux, bienvenue.
00:02:06 Vous êtes porte-parole d'OT-MEDS, c'est l'Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament.
00:02:11 Vous nous direz si le rendez-vous présidentiel était suffisamment transparent ou pas.
00:02:16 Bonsoir Jean-Jacques Zambrovsky, bienvenue, merci d'être là.
00:02:19 Vous êtes économiste de la santé, enfin, bonsoir Christophe Lucas.
00:02:22 Ravi de vous accompagner parmi mes invités.
00:02:25 Vous êtes président d'Epilepsie France, association qui défend les malades atteints d'épilepsie,
00:02:30 confrontée, il faut le dire, particulièrement à cette pénurie, notamment d'antihépiliptiques.
00:02:35 On y reviendra.
00:02:36 Aurore Berger, c'est un débat fondamental, c'est un problème de santé publique qui nous concerne tous
00:02:41 et vous êtes évidemment invité à réagir et à participer à ce débat.
00:02:45 On commence comme chaque soir par planter le décor, il a 200 secondes, le chrono de Blaco, c'est parti.
00:02:49 Et je me retourne pour vous accueillir comme chaque soir, mon cher Stéphane, bonsoir à vous.
00:02:56 Bonsoir Anne, bonsoir à toutes et tous.
00:02:58 Alors, ces annonces et cette pénurie.
00:03:01 Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais on est toujours en plein compte à rebours.
00:03:05 Je me souviens que le président s'est donné 100 jours pour tourner la page des retraites, là il en reste 31 jusqu'au 14 juillet.
00:03:11 Alors forcément, en ce moment, il se démultiplie un peu partout en France.
00:03:14 Le mois dernier, vous vous en souvenez, j'imagine, il était à Dunkerque pour vanter son action en matière de réindustrialisation.
00:03:20 Eh bien aujourd'hui, il était en Ardèche pour parler de relocalisation, notamment dans l'industrie du médicament.
00:03:27 Et là aussi, je fais appel à vous souvenir, ben oui, souvenez-vous, 2020, au début du Covid,
00:03:32 on se rend compte qu'un médicament aussi familier que le paracétamol, qu'on appelle nous plutôt le doliprène généralement,
00:03:38 pouvait être en restau de stock.
00:03:40 Incroyable, en France, dans notre pays, donc le gouvernement réagit en disant que d'ici trois ans, ça sera réglé.
00:03:44 Donc tout ça est bien parti puisqu'on trouve le chimiste Séquence qui est capable d'en fabriquer.
00:03:49 Donc on maintient l'objectif pour 2023.
00:03:52 Le problème évidemment, c'est que relancer une filière industrielle, ça se fait pas par décret, par ordonnance.
00:03:58 Donc c'est pas seulement de la politique, il y a beaucoup de choses derrière à mettre en place.
00:04:02 Et donc le résultat, c'est que finalement, on apprend maintenant, on a appris la fin de l'année dernière,
00:04:06 que ça serait pas 2023 mais 2024.
00:04:08 Et si on regarde le détail de l'article, on se rend compte que, en fait, les médicaments, le paracétamol,
00:04:12 ne sera pas mis sur le marché avant 2026.
00:04:15 Ce qui fait que cet hiver, trois ans après le Covid, on a de nouveau connu des pénuries de paracétamol.
00:04:23 Donc la question c'est, que faire ?
00:04:26 Alors la réponse du président, elle tient en un seul mot, c'est "accélérer".
00:04:31 Donc voilà, ce sont les extraits de son discours qui ont été choisis par l'AFP.
00:04:35 Et vous voyez que le mot qui intervient dans chacun des extraits, c'est "accélérer".
00:04:37 Accélérer, accélérer, accélérer.
00:04:41 Oui, rattraper ce retard qu'on semble avoir pris depuis quelques temps.
00:04:45 Alors comment faire ?
00:04:46 Vous l'avez dit, le gouvernement a mis au point une liste de 450 médicaments
00:04:49 qui sont absolument indispensables, qui ne doivent pas souffrir de pénuries en France.
00:04:53 On ne va pas forcément tous les fabriquer, mais il faut diversifier les approvisionnements
00:04:57 et de s'assurer qu'on puisse les avoir.
00:04:58 Il y en a au moins 50 qui, en revanche, sont indispensables, vraiment plus qu'indispensables.
00:05:03 Il faut les fabriquer en France.
00:05:04 450, c'est beaucoup. 50, ça reste encore beaucoup.
00:05:07 Donc finalement, qu'est-ce qu'il a dit le président ? On l'écoute.
00:05:10 Nous avons décidé d'accélérer.
00:05:13 Et dans les semaines à venir, je vous annonce que sur la cinquantaine de premiers médicaments essentiels
00:05:19 pour lesquels notre dépendance aux importations extra-européennes est avérée,
00:05:23 donc les médicaments à relocaliser, et bien la moitié, c'est-à-dire 25 de ces médicaments,
00:05:28 verront leur production relocalisée ou augmentée significativement sur le territoire national.
00:05:34 Forcément, quand on est chroniqueur, on est toujours tenté de se moquer.
00:05:37 Quoi ? 450 médicaments indispensables et au résultat, il y en a 25 dont peut-être, on espère,
00:05:42 qu'ils seront fabriqués en France.
00:05:45 Mais cela dit, plutôt que de se moquer, peut-être qu'on pourrait se sentir concerné aussi.
00:05:49 Le président l'a dit, il a dit, il y a quand même un travail de prévention aussi à faire
00:05:51 où tout le monde est concerné.
00:05:53 Si on maintenait aujourd'hui les gestes qu'on a faits pendant le Covid,
00:05:55 eh bien évidemment, il y aurait moins de maladies transmissibles, moins d'épidémies,
00:05:58 moins besoin de médicaments, mais qui d'entre vous, je vous le demande,
00:06:01 a envie de garder encore le masque ou de le mettre dans le métro ?
00:06:03 Ce n'est pas si évident.
00:06:05 En revanche, ce qui est très facile, c'est de râler.
00:06:07 Ça oui, ça râler, on peut le faire, mais souvenez-vous que si on a délocalisé
00:06:11 60 à 80 % de notre production de médicaments en Asie,
00:06:14 c'est parce que ça coûte moins cher de le fabriquer en Asie.
00:06:16 Donc, si on commence à le relocaliser en France, au niveau du prix,
00:06:19 qu'est-ce que ça peut faire ? On écoute le président.
00:06:21 Il en va de même pour la pharmacie comme pour notre alimentation.
00:06:24 Si on fait croire aux gens que plus rien n'a de prix et que plus rien n'a de coût,
00:06:28 eh bien il n'y a plus de gens qui produisent chez nous.
00:06:31 Eh oui, c'est souhait de relocaliser, on a tous envie de localiser,
00:06:34 mais fabriquer français, c'est parfois plus cher.
00:06:36 Bon, je dis ça en 200 secondes, maintenant que vous avez 1200 secondes,
00:06:39 12 000 secondes pour en débattre.
00:06:41 Merci, on va tâcher d'être à la hauteur de votre concision ce soir.
00:06:45 Merci beaucoup Stéphane. J'ai envie de commencer par votre témoignage.
00:06:48 Déjà, Christophe Lucas, expliquez-nous un peu comment on vit au quotidien.
00:06:52 Vous avez, je crois, un fils atteint d'épilepsie.
00:06:55 Oui, il est décédé il y a deux ans et demi.
00:06:58 Vous avez été confronté à ces questions de pénurie ?
00:07:02 J'ai été confronté régulièrement aux pénuries de médicaments,
00:07:06 mais nos adhérents, au niveau de l'association, le sont quotidiennement.
00:07:10 On a à peu près une dizaine de médicaments qui sont fréquemment en pénurie, en pharmacie.
00:07:17 Sur Paris, c'est vrai qu'on arrive globalement, en Ile-de-France, à trouver des solutions.
00:07:21 En province, enfin en région, c'est beaucoup plus compliqué.
00:07:24 Quand il y a une pénurie d'un traitement, il n'y a pas de solution.
00:07:27 Et la problématique...
00:07:28 Et le système D, comment on fait dans ces cas-là ? On court les pharmacies ?
00:07:30 La problématique, c'est qu'en pharmacie,
00:07:34 normalement la pharmacie est censée avoir deux mois sur la plateforme de traitement,
00:07:38 et le laboratoire quatre mois,
00:07:40 mais il y a des médicaments qui restent régulièrement en pénurie.
00:07:44 On a eu le cas du Sabril il n'y a pas très longtemps,
00:07:46 et historiquement, en 2016, 2018, 2019, il y a des pachines.
00:07:50 Et puis là, ces derniers mois, on a eu le Tégrétol, on a eu plein de médicaments.
00:07:55 Et le souci en épilepsie, c'est qu'on a des marges, au niveau du traitement,
00:07:59 qui sont très très faibles.
00:08:01 Et si vous avez un traitement qui est en pénurie,
00:08:05 vous ne pouvez pas aller sur un générique.
00:08:07 C'est le risque...
00:08:09 On ne peut pas changer le médicament au cours du traitement.
00:08:11 Voilà. Dans l'épilepsie, si on doit changer de traitement,
00:08:14 il y a une réadaptation du traitement qui dure plusieurs semaines,
00:08:17 en moyenne, c'est ça.
00:08:18 Et si vous prenez tel médicament qui est en pénurie,
00:08:21 vous ne pouvez pas changer le paracétamol.
00:08:23 On fait alors dans ces cas-là, concrètement, on bricole...
00:08:25 Il y a souvent le système D,
00:08:27 entre patients, entre... qui se connaissent,
00:08:30 et ce n'est pas forcément adapté.
00:08:33 Et souvent, c'est des mails, des appels à l'épileptologue
00:08:39 pour lui dire "comment on fait, là, j'ai une solution".
00:08:42 Et c'est à lui d'essayer de trouver une solution,
00:08:44 de se réadapter en fonction de ce qu'il sait sur l'état du marché.
00:08:47 Et ça, il ne le connaît pas.
00:08:48 - Elle dure combien de temps, ces pénuries, ces ruptures de stock ?
00:08:51 Ça s'arrange ? Est-ce que ça date aussi post-Covid ?
00:08:54 Pendant le Covid ?
00:08:55 - Ça a toujours été...
00:08:57 Ça fait 10 ans, en épilepsie, c'est fréquemment,
00:09:00 c'est très, très fréquent,
00:09:01 et quels que soient les médicaments eux-mêmes,
00:09:03 c'est vraiment très, très fréquent.
00:09:05 Et je pense que la problématique, elle est un peu plus large que ça.
00:09:09 C'est la gestion des approvisionnements en pharmacie
00:09:12 et dans les centrales qui posent problème à un moment donné
00:09:15 et qui patauge un petit peu.
00:09:18 - D'accord. Donc c'est la gestion en France,
00:09:20 pas forcément la question de la fabrication...
00:09:23 - Et l'information.
00:09:24 - ...de la molécule à l'étranger.
00:09:25 - C'est un travail bien meilleur ces dernières années d'information.
00:09:29 Je vous donnais l'exemple du Sabril.
00:09:31 Ils ont informé dès le mois de janvier qu'il y allait avoir une pénurie.
00:09:34 Ils ont demandé à ce que les nouveaux patients
00:09:37 ne soient pas traités au Sabril,
00:09:38 qu'ils soient attendus en attendant que cet été,
00:09:41 la réindustrialisation reparte en Italie.
00:09:44 Mais globalement, l'information, elle est donnée par la NSA,
00:09:47 mais elle fait son travail aujourd'hui.
00:09:49 - C'est l'Agence du médicament qui pilote l'anticipation.
00:09:52 - Oui, l'Agence de santé des médicaments.
00:09:54 - Très bien. Anne-Sophie Leroux.
00:09:56 Il y a beaucoup de témoignages de pharmaciens qui disent
00:09:58 que parfois, ils sont obligés de sélectionner leurs patients
00:10:01 pour tel ou tel médicament en fonction de leur pathologie.
00:10:04 On arrive à quantifier un peu les choses ?
00:10:07 De quoi manque-t-on le plus aujourd'hui ?
00:10:10 - Eh bien, comme vous l'avez évoqué tout à l'heure,
00:10:13 ce dont on manque le plus, c'est d'information.
00:10:15 Puisque précisément, pour savoir combien il y a de malades
00:10:18 qui ne peuvent pas être soignés,
00:10:19 combien il y a de malades qui voudraient l'être
00:10:21 et qui ne trouvent pas de médicament,
00:10:22 il faudra avoir des informations sur les pénuries,
00:10:24 les réelles dates de manque d'approvisionnement,
00:10:27 les dates de réapprovisionnement, savoir qui fabrique,
00:10:30 où, dans quelles conditions,
00:10:32 quel médicament est sous brevet, lequel ne l'est pas.
00:10:35 C'est extrêmement compliqué d'avoir accès à l'information.
00:10:37 - Pourquoi, à votre avis ?
00:10:39 - Parce que probablement, c'est déjà une information très complexe.
00:10:42 Mais on peut considérer que ce n'est pas le seul domaine
00:10:46 dans lequel l'information est complexe à gérer.
00:10:49 Et par ailleurs, c'est un mélange d'action publique
00:10:52 et d'activités privées.
00:10:55 La totalité de la production de médicaments
00:10:58 auxquels on a accès en France
00:11:00 sont produits par des industriels privés.
00:11:02 Donc forcément, il y a une sorte de conflit d'informations.
00:11:06 Et on peut imaginer que pour les élus aussi,
00:11:08 c'est difficile de prendre de bonnes décisions
00:11:10 quand on n'a pas accès à des informations.
00:11:12 - Alors ça, c'est vraiment le cheval de bataille
00:11:14 de votre association, la transparence.
00:11:16 Jean-Jacques Zambowski, les pénuries ne datent pas du Covid.
00:11:18 On est tous encore très marqués par ce qui s'est passé par l'épidémie.
00:11:22 On l'a bien en mémoire.
00:11:23 Les usines, c'est simple, de fabrication des molécules,
00:11:26 des médicaments, en Chine, en Inde, se sont arrêtées.
00:11:29 Donc évidemment, il y avait des pénuries.
00:11:31 Mais ça ne date pas forcément que de cette épidémie-là,
00:11:33 ou même des grippes de l'hiver.
00:11:35 Il y a eu toujours des pénuries. Ça date de quand ?
00:11:37 - Ça date du moment où on a décidé que les prix des médicaments
00:11:41 étaient la variable d'ajustement des budgets en déficit
00:11:44 de la Sécurité sociale.
00:11:45 Il y a longtemps, un Premier ministre qui s'appelait Alain Juppé
00:11:48 a dit que le déficit de la Sécurité sociale, il était abyssal,
00:11:51 il avait raison par rapport aux chiffres de l'époque,
00:11:53 et il a demandé combien les Français et les entreprises de France
00:11:56 accepteraient qu'on prélève et comment on allait répartir
00:11:59 l'argent restant.
00:12:01 Alors depuis 1997, donc c'est vieux, on vote l'objectif national
00:12:05 des dépenses de l'assurance-maladie, en gros, moitié pour la ville,
00:12:08 moitié pour l'hôpital.
00:12:10 Et là-dedans, le médicament, ça représente en gros
00:12:13 20% des dépenses pharmaceutiques.
00:12:15 Le reste, c'est les honoraires, c'est le salaire des médecins,
00:12:19 hospitaliaux, des infirmières, enfin bon.
00:12:22 Quand on revalorise, et il le fallait, les salaires des infirmières
00:12:27 ou des personnels hospitaliers, quand on augmente même seulement
00:12:30 d'un euro 50 la consultation des médecins,
00:12:33 eh bien en même temps, on considère que le médicament,
00:12:36 ça fonctionnera toujours.
00:12:38 Quand je regardais, avant de venir sur ce plateau,
00:12:41 la moxiciline, vous parliez d'antibiotiques.
00:12:44 -Pour les enfants, notamment.
00:12:46 -Mais aussi pour les adultes, c'est l'antibiotique le plus prescrit
00:12:49 pour les infections bactériennes, évidemment pas virales.
00:12:52 Ça vaut 1,53 euro, la boîte de gélules,
00:12:55 toute marge incluse, la logistique incluse,
00:12:58 le grossiste répartiteur, qui les livre chez le pharmacien,
00:13:02 et le pharmacien.
00:13:04 A ce prix-là, aucun industriel, il s'agit du prix du générique
00:13:07 le moins cher d'amoxicilline, aucun industriel ne peut fabriquer
00:13:10 ne serait-ce qu'en équilibrant ses frais,
00:13:13 le fait de vous mettre à disposition
00:13:16 les blisters qui contiennent en France...
00:13:18 -Il faut expliquer, ce sont des médicaments,
00:13:20 le brevet est déjà tombé dans le domaine public.
00:13:23 -Ce médicament existe sous forme générique depuis au moins 10 ans.
00:13:26 -Il n'est plus rentable, en fait, c'est ça ?
00:13:29 -Non, non. Il n'est plus protégé par un brevet.
00:13:32 Donc, au bout de 10 ans, le brevet tombe,
00:13:35 et n'importe qui peut donner les caractéristiques,
00:13:38 les garanties de qualité, peut avoir le droit
00:13:41 de soumettre une autorisation en vue de commercialiser
00:13:44 une version dite générique. C'est le même,
00:13:47 parfois fait dans la même usine, mais il se trouve
00:13:50 que n'étant plus protégé par un brevet, le prix s'effondre.
00:13:53 En France, on est le seul pays qui a une diminution de 60 %
00:13:56 obligatoire à l'introduction du premier générique,
00:13:59 suivie d'une diminution d'encore 12,5 % 18 mois plus tard.
00:14:02 Donc, finalement, au bout de 18 mois
00:14:05 après la mise sur le marché du premier générique,
00:14:08 le médicament ne coûte plus qu'un tiers de ce qu'il coûtait,
00:14:11 étant entendu qu'il est utilisé depuis 10 ans
00:14:14 et qu'il a gardé son intérêt en thérapeutique.
00:14:17 On ne générique pas des médicaments qui ne sont plus d'intérêt thérapeutique.
00:14:21 Le laboratoire qui fait le produit d'origine doit lui aussi baisser son prix.
00:14:25 La Sécu peut consacrer, et c'est tant mieux,
00:14:28 une partie de l'argent qui lui reste, de l'économie qu'elle fait,
00:14:32 à permettre des nouveaux produits qui coûtent encore très cher.
00:14:36 Sauf qu'à 1,53 euro, par exemple,
00:14:39 la boîte entière d'amoxycyline,
00:14:42 personne, pas même le génériqueur, ne peut s'en servir.
00:14:45 Et je répondrai à ma voisine, à part l'information,
00:14:48 qui est un vrai problème, à part l'équité,
00:14:51 se pose tout simplement le problème de...
00:14:54 Les industriels, qui n'ont pas la charité publique
00:14:57 comme première vertu, c'est normal aussi,
00:15:00 ils vont vendre dans des pays où on achète leur produit plus cher
00:15:03 que dans le pays d'Europe où on l'achète le moins cher.
00:15:06 -D'accord. On avait besoin de cette mise au point,
00:15:09 parce que c'est pas si simple à comprendre.
00:15:11 -Le président de la République a promis,
00:15:13 parmi les promesses qu'il a faites tout à l'heure,
00:15:16 que les prix seront réajustés pour permettre à tout le moins
00:15:20 que la vente ne soit pas à perte.
00:15:22 Personne ne peut rien vendre à perte.
00:15:24 -Aurore Berger, c'est vrai qu'on se dit que les grands labos pharmaceutiques,
00:15:29 on a compris, ne dégagent pas de marge importante à fabriquer,
00:15:33 au moins zéro, dans notre pays ou en Europe,
00:15:36 donc l'intérêt à exporter, il est manifeste.
00:15:39 Ce sont des industriels qui investissent dans la recherche,
00:15:42 donc on peut se dire qu'ils font de telles économies d'échelle
00:15:45 à fabriquer les molécules en Chine ou à faire fabriquer en Inde
00:15:49 qu'on aura bien du mal à les convaincre de revenir.
00:15:53 Qu'est-ce qu'on peut faire, qu'est-ce que le politique peut faire ?
00:15:56 C'est la contrainte, c'est quoi ?
00:15:58 -Il y a ceux qui ont annoncé et qui se sont engagés,
00:16:01 dans le cadre de France 2030, à revenir,
00:16:03 qui l'ont dit, à Tchouz France notamment,
00:16:05 ces 160 millions d'euros d'investissement
00:16:07 sur neuf grands acteurs industriels qui s'y sont engagés.
00:16:11 C'est un mouvement qui est positif,
00:16:13 de se dire qu'aujourd'hui, ils considèrent que ça a du sens
00:16:17 et qu'on considère aussi collectivement que ça a du sens de relocaliser.
00:16:21 On sort aussi, et vous l'avez dit, la pandémie a marqué durablement,
00:16:24 en tout cas, on l'espère, de ce point de vue-là, les esprits,
00:16:27 mais d'années où on nous expliquait quand même
00:16:29 que la France, si elle devenait une grande nation de service,
00:16:32 c'est-à-dire sans ces industries,
00:16:34 finalement, c'était l'avenir qu'on devait promettre aux Français.
00:16:37 Et donc, on a un retournement,
00:16:39 parce que du fait des questions de souveraineté qui se sont posées,
00:16:42 des sujets de dépendance qu'on a vécus,
00:16:44 notamment sur les questions de médicaments,
00:16:46 mais pas que sur cette question-là,
00:16:48 c'est celles qui sont les plus criantes,
00:16:50 qui ont été les plus criantes pendant la crise,
00:16:52 alors on voit qu'il y a un intérêt stratégique, majeur, à réinvestir.
00:16:55 -C'est un grand jeu, dans la durée,
00:16:57 parce qu'on est à 80 % de dépendance.
00:16:59 -160 millions d'euros,
00:17:01 a priori, c'est pas pour partir le lendemain,
00:17:03 d'autant plus qu'encore une fois,
00:17:05 quand vous relancez des lignes de production,
00:17:07 c'est évident que relancer une ligne de production,
00:17:09 ça se fait pas en trois mois ou en six mois.
00:17:11 Donc ce sont des investissements de moyen long terme,
00:17:14 et donc s'ils ont acté le fait qu'ils revenaient,
00:17:17 choisir les sites au sein desquels ils souhaitaient s'implanter,
00:17:20 c'est évidemment pour une implantation durable en France,
00:17:22 mais après, ça pose les questions que vous avez,
00:17:24 plusieurs à évoquer, sur en effet,
00:17:26 quel est le juste prix qui doit pouvoir exister pour le médicament.
00:17:29 Je trouve que le parallèle qui est fait par le président de la République
00:17:31 sur la question, notamment, agricole,
00:17:33 est le bon parallèle, c'est-à-dire un mot,
00:17:35 quel est le prix, à la fois que l'Etat,
00:17:37 mais à la fois que les citoyens sont prêts à mettre,
00:17:40 par rapport à des sujets qui sont absolument essentiels,
00:17:43 c'est-à-dire notre santé publique,
00:17:45 notre alimentation, c'est notre santé publique,
00:17:47 les médicaments, c'est notre santé publique,
00:17:49 et je crois qu'il faut aussi accepter de mettre ce sujet-là,
00:17:51 sans tombe sur la table.
00:17:53 Donc, comme on a compris que c'est vraiment la variable,
00:17:55 c'est le prix de revient du médicament,
00:17:57 il faut qu'il augmente, qui doit le supporter, ce prix,
00:17:59 plus élevé ?
00:18:01 Je m'inscris...
00:18:03 C'est le patient, c'est l'Etat, l'assurance maladie,
00:18:05 ça dépend du médicament, vous allez me dire.
00:18:07 Pour l'instant, c'est l'assurance maladie qui le supporte, d'ailleurs,
00:18:09 c'est aussi pour ça qu'en France, on a un certain rapport de force
00:18:11 qu'on peut porter, puisque de toute façon,
00:18:13 quand un industriel arrive sur le marché français,
00:18:15 il sait que son médicament va être diffusé,
00:18:17 puisqu'il y a la Sécurité Sociale qui paie les médicaments,
00:18:19 et c'est bien normal. Là où je m'inscris en faux,
00:18:21 quand même, vous ne pouvez pas dire que c'est le prix
00:18:23 qui détermine le fait que des pays sont
00:18:25 improvisionnés en médicaments ou non.
00:18:27 La Suisse paie ses médicaments 40 % plus cher,
00:18:29 pour autant, ils ont quand même eu des ruptures.
00:18:31 De la même manière, on ne peut pas comparer
00:18:33 aujourd'hui la politique agricole et la politique industrielle
00:18:35 dans le secteur pharmaceutique, on ne peut pas comparer
00:18:37 un agriculteur et un secteur qui a explosé
00:18:39 tous ses bénéfices et tous ses records,
00:18:41 notamment durant la crise du Covid.
00:18:43 Je ne résume pas le secteur pharmaceutique à la question
00:18:45 de la crise du Covid, mais quand même,
00:18:47 il y a eu des records absolus dans l'industrie pharmaceutique,
00:18:49 c'est 40 milliardaires supplémentaires
00:18:51 durant la crise Covid.
00:18:53 - Mais ce mouvement de relocalisation
00:18:55 sur les médicaments essentiels, vous l'accompagnez,
00:18:57 j'imagine, malgré tout. - Aujourd'hui, mon inquiétude
00:18:59 sur ce mouvement de relocalisation, c'est quelles sont les conditionnalités
00:19:01 à ces aides-là. Tout à l'heure, Mme Berger vous avait dit
00:19:03 s'ils donnent 160 millions, ce n'est pas pour qu'ils partent
00:19:05 du jour au lendemain. Bon, pendant la crise Covid,
00:19:07 on a donné 200 millions d'euros à Sanofi,
00:19:09 une semaine plus tard, ils annonçaient 1700 suppressions de postes.
00:19:11 Je crois qu'aujourd'hui, si on n'a aucune conditionnalité
00:19:13 dans les aides qu'on donne, on risque tout simplement
00:19:15 de se faire pluer à l'échelle de l'Etat,
00:19:17 et à l'échelle de la sécurité sociale. - Alors conditionnalité,
00:19:19 ça ne veut pas dire contrainte, ça veut dire quoi ?
00:19:21 - Conditionnalité, ça veut dire qu'aujourd'hui, si on investit de l'argent
00:19:23 et que le groupe part ou ne produit pas
00:19:25 ce qu'on lui a demandé de produire, il est censé
00:19:27 rembourser. Et juste d'un point quand même,
00:19:29 honnêtement, il ne faut pas
00:19:31 se dire aujourd'hui que l'industrie pharmaceutique
00:19:33 est un secteur en grande difficulté à vous entendre,
00:19:35 je suis désolé, mais on a l'impression que vous vendez à prix coutant.
00:19:37 - Non, personne n'a dit que les géants
00:19:39 de la recherche pharmaceutique,
00:19:41 les Sanofi et autres Pfizer, étaient...
00:19:43 - On est quand même sur des records exceptionnels.
00:19:45 Maintenant, un des sujets que je souhaite poser aussi,
00:19:47 c'est qu'aujourd'hui, si on veut
00:19:49 une politique industrielle d'ampleur, je crois
00:19:51 qu'il est indéniable qu'à un moment donné, sur certains médicaments,
00:19:53 peut-être les plus basiques, l'Etat aussi
00:19:55 prenne une part de production. Ça existe dans d'autres pays,
00:19:57 et je crois qu'on doit aussi prendre une certaine part
00:19:59 de la production, ne serait-ce que pour
00:20:01 s'assurer un minimum, et ne pas fonctionner seulement
00:20:03 à la subvention, seulement au secours.
00:20:05 - Donc vous voulez nationaliser certains médicaments, c'est ça ?
00:20:07 - Non, je ne veux pas nationaliser certains médicaments.
00:20:09 Je pense que, par contre, les Pays-Bas, par exemple,
00:20:11 produisent une certaine partie de leurs médicaments.
00:20:13 Je sais que le Brésil le fait aussi. Je ne dis pas qu'il faut nationaliser
00:20:15 tous les laboratoires et les industries, ce n'est pas ce que j'ai dit.
00:20:17 Je dis juste que, simplement, aujourd'hui, on peut doubler
00:20:19 certaines productions, s'assurer de différentes productions
00:20:21 pour être sûr d'avoir ces médicaments sous la main.
00:20:23 Et je crois vraiment que...
00:20:25 C'est seulement la question de l'augmentation des prix.
00:20:27 En fait, on part dans une spirale infernale.
00:20:29 Il y a des auteurs qui ont écrit, je pense à Rosane Le Sen, notamment,
00:20:31 sur aujourd'hui, quel est le prix des médicaments,
00:20:33 comment il y a une certaine pression qui s'exerce,
00:20:35 et le fait qu'aujourd'hui, on paye toujours plus,
00:20:37 alors qu'à un moment donné, il faut aussi qu'il y ait des conditions.
00:20:39 Et d'un dernier point, la plus grande niche fiscale
00:20:41 dans notre pays, c'est le crédit impôt recherche.
00:20:43 C'est presque 7 milliards d'euros par an.
00:20:45 Aujourd'hui, il n'y a aucune conditionnalité.
00:20:47 C'est-à-dire qu'on peut donner 7 milliards d'euros par an sans en attendre les retours.
00:20:49 - Alors, ça, c'est encore une autre question.
00:20:51 Mais ce crédit impôt recherche, manifestement,
00:20:53 porte encore ses fruits, puisqu'il permet quand même
00:20:56 de rester dans la compétitivité et l'innovation.
00:21:00 En tout cas, il est très critiqué, c'est vrai.
00:21:02 Je voudrais juste, avant de vous montrer que ça marche,
00:21:04 en tout cas, sur le fameux médicament symbole,
00:21:07 celui qu'on utilise le plus, le doliprane,
00:21:10 puisqu'il y a des usines qui travaillent, on est allés faire un reportage,
00:21:13 je voudrais juste comprendre la molécule.
00:21:15 On parle tout le temps de matière première,
00:21:17 on parle tout le temps des principes actifs.
00:21:20 C'est ça qui est fabriqué en Chine et en Inde.
00:21:22 Ça veut dire quoi, concrètement ?
00:21:24 - Pas seulement. Tout le reste, dans le doliprane, par exemple,
00:21:26 et les autres paracétamols, les paracétamols génériques, par exemple.
00:21:29 L'ensemble des éléments qui vont finir par se retrouver
00:21:33 dans la gélule ou dans le sirop, etc.,
00:21:36 sont achetés à des prix qui permettent finalement
00:21:39 de le commercialiser par les 10 ou 12 laboratoires
00:21:42 qui ont un paracétamol. - Mais fabriquer un principe actif,
00:21:44 parce qu'on entend ces mots, molécule, matière première,
00:21:46 on pourrait le faire en France.
00:21:48 C'est pas des substances qui n'existent que dans ces pays.
00:21:51 - Non, ça a existé chez nous, ça a été breveté quelque part chez nous.
00:21:55 Dans le cas du paracétamol, on sait pas qui est l'originataire
00:21:58 du brevet. Dans le cas de l'aspirine,
00:22:00 c'était un dommage de guerre, donc ça date de l'époque
00:22:04 où il y a eu les guerres mondiales. Dans le cas du paracétamol,
00:22:07 on ne sait pas, mais le principe actif,
00:22:10 il est dans le domaine public. Donc quiconque donne
00:22:13 les garanties de qualité que ce qu'il produit est bien
00:22:16 du paracétamol conforme à la norme, peut en fabriquer...
00:22:19 - Donc la recette, pour le régimer, elle est européenne
00:22:21 ou américaine, selon le... - Elle est mondiale.
00:22:23 - Le laboratoire, elle est mondiale, mais la cuisine,
00:22:26 elle est en Chine ou en Inde. - 80% des principes actifs
00:22:29 sont en effet produits là-bas. On pourrait tout à fait
00:22:31 les produire ailleurs, c'est une logique de marché
00:22:34 et qui nous rend, on l'a vu pendant le Covid, extrêmement vulnérable
00:22:37 quand l'Inde doit cesser sa production
00:22:40 ou la Chine fermer ses frontières. Donc cette vulnérabilité-là
00:22:43 ne peut pas être compensée si on produit pas les principes actifs
00:22:45 sur le territoire national. - Alors on va voir comment ça se passe
00:22:48 dans les usines de salve, nos filles, du calvados.
00:22:50 Vous vous souvenez de cette promesse, refaire du doliprane
00:22:54 bleu, blanc, rouge, et bien ça commence. On a compris
00:22:57 que ça prend un peu de temps. Regardez, c'est un reportage
00:22:59 de Frédéric Prabonneau avec les équipes de France Télévisions.
00:23:02 Une dizaine de boîtes de comprimés de paracétamol
00:23:10 sort chaque seconde de ces chaînes de production.
00:23:13 L'usine de doliprane de Lisieux tourne à plein régime
00:23:16 depuis le Covid et la hausse de la demande cet hiver.
00:23:19 - On a investi dans cet équipement il y a environ 2 ans.
00:23:22 C'est vraiment un équipement à haute performance.
00:23:24 On va pouvoir produire 340 000 comprimés par heure.
00:23:27 - Le laboratoire français vient même d'annoncer
00:23:30 un record de production, plus de 420 millions de boîtes
00:23:33 de doliprane en 2022. Mais ces immenses entrepôts
00:23:36 seraient vides sans une matière première fabriquée
00:23:39 uniquement à l'étranger, le principe actif qui fait
00:23:42 l'efficacité du médicament. - Le paracétamol,
00:23:45 on ne le produit pas chez Sanofi, on l'achète dans différents pays,
00:23:48 en Chine, en Inde, aux Etats-Unis, en Turquie,
00:23:51 on a différents fournisseurs. - La France veut à nouveau
00:23:54 produire ce principe actif. - Ici, le terrassement
00:23:57 a commencé pour la future unité de paracétamol.
00:24:00 - Début de production annoncé en 2025, 15 000 tonnes par an,
00:24:04 2 à 3 fois le marché français. Une relocalisation
00:24:07 pas forcément plus chère, assure le directeur.
00:24:10 - La molécule qui soigne dans le médicament, celle qu'on relocalise
00:24:13 ici, ne pèse pas plus que 5% du prix total du médicament.
00:24:17 - Et pour être plus rentable, le laboratoire a mis au point
00:24:20 un nouveau procédé de production. - Avec une intensification forte
00:24:24 et une automatisation, une robotisation du procédé.
00:24:27 Ca nous permet d'avoir des coûts de fonctionnement bien moindres,
00:24:31 avec un nombre de personnels, pour être clair, directs,
00:24:34 bien moins importants que la Chine. - La société a aussi bénéficié
00:24:37 d'aide. Depuis la crise Covid, le gouvernement finance
00:24:40 des relocalisations, alors que 80% des principes actifs
00:24:43 utilisés en Europe sont produits hors union,
00:24:46 surtout en Chine et en Inde. Mais les laboratoires
00:24:49 pharmaceutiques répètent que pour attirer les producteurs,
00:24:52 il faut surtout augmenter le prix d'achat des médicaments.
00:24:55 - Le prix en France reste régulé, stable, n'évolue pas.
00:24:59 Pour certaines spécialités, il n'y a pas de marge.
00:25:02 - Les pénuries prouvent, selon certains spécialistes,
00:25:05 que laisser faire le marché n'est pas toujours la meilleure option
00:25:08 pour les produits de santé. - Rien n'empêche un Etat
00:25:11 ou l'Union européenne de décider d'aider à la création
00:25:14 de producteurs de médicaments génériques
00:25:18 dans différents pays d'Europe.
00:25:21 Ces entreprises pourraient être soit des entreprises publiques,
00:25:24 soit des entreprises sous format associatif.
00:25:27 - Selon les acteurs du secteur, une indépendance en santé
00:25:30 n'est possible qu'à l'échelle européenne en se concentrant
00:25:33 sur 200 ou 300 molécules essentielles.
00:25:36 - Christophe Lucas, comment vous regardez ce mouvement ?
00:25:39 Parmi les 25 médicaments dits essentiels,
00:25:42 la liste est communiquée ce soir. Vous avez jeté un oeil
00:25:45 à cette liste ? Vous y avez retrouvé les antiénapéptiques ?
00:25:48 Je les cherchais, là. Le diazepam, non ?
00:25:51 - Dans les 25, il n'y en a pas, de mémoire,
00:25:54 mais je les ai vus vite fait. - Moi, j'en ai un,
00:25:57 mais peut-être que... Il y a le diazepam.
00:26:00 - Il y a celui-là, mais c'est pas le plus important.
00:26:03 Mais dans les 450 qui ont été annoncés,
00:26:06 je sais par bruit de couloir, qu'on va dire
00:26:09 98 % des médicaments en épilepsie sont intégrés dedans,
00:26:13 mais pour nous, c'est essentiel,
00:26:16 parce que si vous voulez, entre un médicament,
00:26:19 la déstabilisation de l'épilepsie
00:26:22 par un changement de traitement occasionnel,
00:26:25 on parle du paracétamol. Aujourd'hui, vous avez
00:26:28 mal à la tête, vous prenez un paracétamol X
00:26:31 ou un doliprane, l'effet est le même. En épilepsie,
00:26:34 c'est pas ça du tout, et même avec le même molécule,
00:26:37 il peut y avoir de la divergence.
00:26:40 Les risques associés aux troubles de médicaments
00:26:43 dans l'épilepsie, c'est les états de mal,
00:26:46 c'est les réas pour les épilepsies sévères et lourdes,
00:26:49 et c'est aussi les comorbidités, puisque
00:26:52 quand vous déstabilisez un traitement, vous mettez en péril
00:26:55 la vie des gens. Et j'ai avec le regard
00:26:58 d'un président d'association de patients et d'aidants,
00:27:01 tout cet aspect économique
00:27:04 est pas opposable pour ces familles-là,
00:27:07 parce que leur problématique, c'est la vie.
00:27:10 C'est la vie de leurs enfants, de leurs frères, de leurs soeurs,
00:27:13 et c'est leur vie pour certains. Donc cette problématique-là,
00:27:16 ils la regardent un peu à distance. Maintenant, moi,
00:27:19 je reste conscient que demain matin, il va falloir changer
00:27:22 le coût des médicaments, il va falloir les faire évoluer.
00:27:25 De toute façon, on a le problème aujourd'hui avec l'agriculture,
00:27:28 avec le blé, il faut accepter à un moment donné
00:27:31 de payer peut-être plus cher pour avoir, l'état en général,
00:27:34 les traitements, pour pouvoir être garantis
00:27:37 sur les traitements. Et puis,
00:27:40 le problème d'information qui a été soulevé tout à l'heure,
00:27:43 entre les pharmacies, la NSM, etc., nous, on essaie de communiquer
00:27:46 aux patients dans nos groupes Facebook, etc.,
00:27:49 mais c'est compliqué de donner l'information.
00:27:52 L'avantage, c'est qu'en étant association d'utilité publique,
00:27:55 on a une représentation dans les commissions à la NSM et on peut
00:27:58 donner l'information. - Jean-Jacques Zamboski,
00:28:01 vous qui êtes économiste de la santé,
00:28:04 c'est le début d'une petite révolution
00:28:07 qui peut aller jusqu'à reprendre la souveraineté
00:28:10 sanitaire en main, où, de fait,
00:28:13 les 80 % de dépendance,
00:28:16 on ne va pas réduire ce chiffre à zéro,
00:28:19 c'est juste que pour les essentiels, le modèle peut évoluer ?
00:28:22 - Oui, et il y a une dimension qui n'a pas été abordée
00:28:25 depuis qu'on a commencé à en discuter tout à l'heure,
00:28:28 c'est la dimension européenne. - Bien sûr,
00:28:31 c'est la bonne échelle ? - C'est la seule échelle
00:28:34 qui soit valable. On a vu qu'au moment du Covid,
00:28:37 la disposition et le prix d'achat des vaccins, sur lesquels on pourrait
00:28:40 épiloguer longuement, a été discutée au niveau européen,
00:28:43 à charge pour chaque pays d'organiser sa politique
00:28:46 de vaccination, etc. - Quand on parle de relocalisation,
00:28:49 c'est l'Europe toute entière ? - Je trouve que les médicaments
00:28:52 circulent librement à l'intérieur de l'espace économique européen
00:28:55 et que c'est donc à cette échelle-là qu'il faut raisonner.
00:28:58 On voit aussi, vous parliez du blé, il y a un instant,
00:29:01 et de tel ou tel aliment, on voit que des pâtes fabriquées en Italie
00:29:04 sont vendues librement en France et que tel ou tel produit
00:29:07 fabriqué en France circule librement en Italie.
00:29:10 C'est l'échelle européenne. Maintenant, le président de la République
00:29:13 a eu une initiative qui consiste à dire "assurons-nous au moins
00:29:16 à l'espace de la France qu'un certain nombre de son produit
00:29:19 que nous savions faire, que nous avons le savoir industriel nécessaire".
00:29:22 Les tas d'usines, vous avez montré une carte tout à l'heure,
00:29:25 étant potentielles, elles se sont éteintes au long
00:29:28 de ces récentes années, c'est anormal,
00:29:31 c'est créateur d'emploi, de richesse locale,
00:29:34 ça entretient des savoir-faire locaux, au moins fabriquons
00:29:37 ces 25, peut-être demain 50. Mais n'oublions pas tout ce qui peut
00:29:40 être produit chez les voisins belges, allemands, néerlandais,
00:29:43 pour ne pas parler des pays à moins d'heures.
00:29:46 - Donc ça peut marcher sans passer par un pôle public
00:29:49 tel que le défend Tannay Naudet ? - Je ne connais pas de pays,
00:29:52 quoi que puisse en dire...
00:29:55 Monsieur Naudet, je vais oublier le nom.
00:29:58 Très bien. Je ne connais pas de pays qui aient une industrie
00:30:01 pharmaceutique fiable, pilotée par l'Etat,
00:30:04 ni surtout, parce que le problème n'est pas que l'industrie,
00:30:07 le problème, c'est l'argent de la recherche. Oui, des laboratoires
00:30:10 ont gagné beaucoup d'argent à l'occasion du Covid,
00:30:13 mais des tas d'autres laboratoires d'abord, et d'autres industries
00:30:16 ensuite, se sont complètement cassés la figure économiquement.
00:30:19 Ce qui a été gagné en plus, parce qu'il y avait des millions
00:30:22 de malades dans le monde, a été gagné en moins
00:30:25 par les industries du tourisme, de l'hôtellerie, de la restauration
00:30:28 ou simplement des vêtements. Alors il y a eu
00:30:31 effectivement un déséquilibre économique au moment
00:30:34 de cette pandémie mondiale. A tout le moins,
00:30:37 reconstruisons une économie européenne fiable autour
00:30:40 de la santé et du médicament. Ne soupayons pas,
00:30:43 non plus, et soyons peut-être attentifs, effectivement,
00:30:46 aux profits que chacun est légitime à faire ou à ne pas faire.
00:30:49 Anne-Sophie Leroux, vous voulez rajouter quelque chose ?
00:30:52 Damien, ce que vous venez de dire, il ne s'agit pas forcément,
00:30:55 je crois, dans la proposition de piloter toute la production,
00:30:58 mais juste d'offrir une alternative qui permet aussi,
00:31:01 dans un cadre de fixation des prix qui, jusqu'ici, est détenu
00:31:04 uniquement par un cadre industriel privé,
00:31:07 d'avoir un potentiel de négociation. Et par ailleurs, je reviens
00:31:10 aussi sur ce que vous disiez sur la révolution.
00:31:13 À partir du moment où l'Etat finance la recherche, par exemple,
00:31:16 où l'Etat, dans le cadre de la relance France 2030, met de l'argent
00:31:19 public, il faut qu'il y ait une contrepartie, c'est ça ?
00:31:22 Il y a de l'argent public mis et il y a aussi 20 ans de recherche
00:31:25 sur la RN qui ont été faites avant la crise du Covid,
00:31:28 qui ont profité au laboratoire. Et c'est bien heureux
00:31:31 que la recherche profite à tout le monde.
00:31:34 Néanmoins, il ne s'agit pas seulement du moment où l'argent est donné,
00:31:37 mais aussi des projets de recherche avant qui doivent être valorisés.
00:31:40 - Un mot de conclusion ? Ça ne va pas se faire du jour au lendemain,
00:31:43 ça, vous l'avez bien compris. - Aujourd'hui, il faut quand même
00:31:46 se poser la question de combien de fois on paye. Je crois que quand
00:31:49 il y a les délocalisations du médicament, quand on paye la recherche,
00:31:52 on paye la relocalisation et ensuite on repaye le prix du médicament.
00:31:55 Il faudrait faire la transparence au moment de la négociation des prix,
00:31:58 quand les industriels viennent vendre un médicament, qu'on puisse savoir
00:32:01 combien l'Etat a déjà financé pour ce médicament. Et ça nous permettrait
00:32:04 de savoir combien on a déjà payé pour ces médicaments-là.
00:32:07 - La contrainte par la transparence. J'ai bien compris l'idée.
00:32:10 En tout cas, la pression par la transparence sur l'information,
00:32:13 c'est quelque chose qui... - L'information à l'épublique,
00:32:16 on sait exactement combien l'Etat... - Sur la fixation du prix.
00:32:19 - Déjà, combien l'Etat investit. On sait évidemment combien l'Etat
00:32:22 investit sur les enjeux de relocalisation sur France 2030,
00:32:25 pour prendre uniquement cet exemple-là. On sait combien l'Etat
00:32:28 investit et finance, parce que justement, on se fixe chaque année
00:32:31 des règles sur le financement de la Sécurité sociale,
00:32:34 et c'est ce que nous, nous votons ici, à la Somme nationale.
00:32:37 Donc cette transparence, il faut pas donner le sentiment
00:32:40 qu'on cacherait des choses sur les investissements
00:32:43 réalisés par l'Etat. Non. - La Commission qui négocie
00:32:46 n'a pas connaissance des prix investis par l'Etat.
00:32:49 - Ce qui compte, encore une fois, c'est faire en sorte que ces productions
00:32:52 puissent être relocalisées et que les Français, encore une fois,
00:32:55 qui sont en stress potentiellement chaque semaine ou chaque jour,
00:32:58 puissent trouver leurs médicaments sans craindre
00:33:01 de devoir faire 3, 4, 5 ou 10 pharmacies.
00:33:04 Notre enjeu public, notre enjeu de souveraineté,
00:33:07 il est là avant d'essayer de jeter l'eau propre sur tel ou tel.
00:33:10 On peut toujours se faire plaisir, parce que les labos pharmaceutiques,
00:33:13 c'est assez facile, je trouve, évidemment,
00:33:16 et ça marche bien dans l'opinion publique de prendre pour cible.
00:33:19 Ce qui compte, c'est surtout que ce soit efficace, et c'est surtout
00:33:22 qu'à la fin, les Français aient accès à leurs médicaments.
00:33:25 - En coulisses, on aura sûrement un nouveau débat quand votre proposition de loi
00:33:29 sera inscrite à l'ordre du jour. On s'arrête là, la fin des pénuries,
00:33:32 avec un point d'interrogation. Ce n'est pas pour tout de suite,
00:33:35 mais il y a un chemin qui est amorcé. Merci à vous, merci d'être venus
00:33:38 débattre sur ce plateau. Vous restez avec moi, Aurore Berger.
00:33:41 Dans une dizaine de minutes, les partis prient de nos affranchis.
00:33:44 Ce soir, l'économie avec Fanny Guinochet,
00:33:47 le simulateur officiel des retraites explose.
00:33:50 Elle nous expliquera pourquoi. La société avec Cécilia Gabison.
00:33:53 Attention, les trigger warning américains nous guettent.
00:33:56 Elle nous dira ce que c'est. Et puis, dans Bourbon Express,
00:33:59 ce soir, Stéphanie Despierre, de quoi parle-t-on ? Je vais vous raconter
00:34:02 l'histoire d'une génération dorée ici, à l'Assemblée.
00:34:05 Je crois que c'est la vôtre, Aurore Berger. D'abord, on va parler de vous
00:34:08 et de vos un an à la tête du groupe. Une femme patronne
00:34:11 du groupe majoritaire, c'était une première ici au Palais-Bourbon.
00:34:15 Et dans quel contexte vous êtes obligée de serrer les rangs
00:34:19 avec un objectif qu'aucune voix ne manque dans cet hémicycle
00:34:23 où il n'y a désormais plus de majorité absolue ?
00:34:26 Est-ce que vous avez trouvé le bon dosage entre l'autorité nécessaire
00:34:29 et la liberté laissée à vos députés ? On voit cela dans l'invitation
00:34:32 de Marion Becker, on en parle ensemble juste après.
00:34:35 Si on vous invite, Aurore Berger, c'est pour un anniversaire.
00:34:43 Le bilan de votre année, la tête du groupe Renaissance à l'Assemblée.
00:34:48 Un an à ce poste-clé, au centre du réacteur macroniste.
00:34:53 Une consécration pour vous, l'impétueuse, l'ambitieuse,
00:34:57 après 20 ans d'engagement politique.
00:35:00 D'abord à droite, en 2002, Jean-Marie Le Pen est au second tour
00:35:04 de la présidentielle, vous vous engagez à l'UMP
00:35:07 et aux jeunes pop dont vous prenez les rênes.
00:35:10 Tour à tour, jupéiste, filloniste, sarcosiste.
00:35:14 En 2017, vous claquez la porte des Républicains pour suivre Emmanuel Macron.
00:35:19 Longtemps, vous espérez un poste de ministre, guettant chaque remaniement.
00:35:24 Ce sera finalement la tête du groupe.
00:35:27 Vous payez sans doute, Aurore Berger, un tempérament cash.
00:35:31 Nous ne laisserons passer aucun comportement qui dégrade notre Assemblée nationale.
00:35:36 Le débat, les rapports de force, les joutes musclées ne vous font pas peur,
00:35:40 quitte à froisser, dernier incident en date,
00:35:44 vos propos à la sortie de l'hémicycle après le drame d'Annecy.
00:35:48 Être en ce moment dans l'hémicycle avec une espèce de bataille de chiffonniers
00:35:52 sur une recevabilité au nom d'amendements,
00:35:55 nous paraît en total décalage par rapport à l'effroi
00:35:58 qui à mon avis submerge notre pays quand des enfants sont pris pour cible,
00:36:02 quand des enfants sont attaqués.
00:36:04 Vous vous êtes depuis défendue de toute instrumentalisation,
00:36:08 reconnaissant une maladresse.
00:36:11 Mais l'affaire illustre les crispations que suscite parfois votre personnalité.
00:36:16 Aurore Berger, vous ne laissez personne indifférent.
00:36:20 En off, certains collègues vous qualifient volontiers de clivante,
00:36:25 quand d'autres saluent votre courage.
00:36:28 C'est une battante, c'est quelqu'un qui a beaucoup de caractère,
00:36:31 je pense en avoir moi aussi.
00:36:33 Alors parfois on peut ne pas être d'accord,
00:36:35 mais la plupart du temps on l'est, et lorsqu'Aurore veut gagner,
00:36:38 lorsqu'Aurore veut convaincre, c'est pas quelqu'un qui reste en dedans,
00:36:42 comme on dit, c'est quelqu'un qui se bat.
00:36:44 Je trouve qu'elle a beaucoup de courage dans ses convictions,
00:36:46 on fait un bel équilibre entre nous.
00:36:48 Dans un temps de combat politique, on a besoin de combattants et de combattantes,
00:36:51 et elle en est une.
00:36:53 Alors après une année à la tête d'une majorité relative,
00:36:56 après 11-49-3, après l'épisode "Ou le déretraite",
00:37:01 on a une question pour vous, Aurore Berger.
00:37:04 Avez-vous réussi à trouver l'équilibre pour mener votre groupe
00:37:08 dans ce tumulte parlementaire ?
00:37:11 Alors, réponse, Aurore Berger.
00:37:14 C'est à mes parlementaires et aux députés de le dire, plus qu'à moi.
00:37:18 Moi je suis mûritie sur ce sur quoi on a travaillé tout au long de cette année,
00:37:22 parce que je pense que c'est important de montrer surtout qu'on travaille,
00:37:25 c'est comme ça que je fonctionne.
00:37:27 Ce sont les projets de loi adoptés ou ce sont les propositions de loi ?
00:37:29 Les propositions de loi, l'initiative des députés.
00:37:31 De propositions de loi, de propositions de résolution qui ont été adoptées,
00:37:35 dont beaucoup, un tiers d'entre elles à l'unanimité de notre Assemblée,
00:37:39 sur les questions de santé, sur les questions d'autorité,
00:37:42 de respect de la propriété privée,
00:37:44 sur les questions de rapports de force aussi avec la grande distribution,
00:37:47 ce qui n'est pas une loi simple à faire adopter,
00:37:49 mais adoptée elle aussi à l'unanimité,
00:37:51 sur l'affirmation d'un certain nombre de corpus de valeurs,
00:37:54 je pense évidemment à ce qu'on a fait sur les droits humains,
00:37:56 que ce soit sur l'Iran, sur l'Arménie, sur l'Ukraine, à plusieurs reprises.
00:37:59 Donc ce n'est pas du tout une mission impossible à vous entendre,
00:38:02 parce que le contexte est choisi entre.
00:38:03 C'est une mission qui est rude, il faut le reconnaître.
00:38:05 Oui, c'est un contexte qui est à la fois difficile,
00:38:07 et c'est aussi une chance pour les parlementaires
00:38:09 d'arriver à s'exprimer plus, d'assumer plus de liberté,
00:38:13 aussi, je crois que ça c'est très important,
00:38:15 de dire que l'initiative elle est partagée.
00:38:17 Il y a à la fois l'initiative gouvernementale,
00:38:19 et en total, loyauté et soutien au président de la République,
00:38:23 à la Première ministre,
00:38:24 et puis il y a l'initiative que nous, nous portons.
00:38:26 Et je suis très fière, au bout d'un an, qu'il y ait eu une trentaine d'initiatives,
00:38:29 non seulement qui aient été portées, mais qui aient été adoptées,
00:38:32 qui aient été adoptées pour certaines à l'unanimité,
00:38:34 montrer que notre groupe est permis ça,
00:38:36 le faire aussi avec la majorité,
00:38:38 c'est-à-dire et avec le modem, et avec Horizon,
00:38:41 parce qu'on est trois groupes, avec trois identités,
00:38:43 avec trois histoires différentes,
00:38:45 et encore une fois, des choses qui, je crois, changent la donne,
00:38:49 et montrent aussi, moi je vois, que les critiques qu'on pouvait avoir
00:38:52 dans le précédent mandat,
00:38:53 ce n'est pas dire qu'elles étaient plus justes,
00:38:55 mais on avait régulièrement ces critiques de députés Pleymobil,
00:38:57 de députés Godillot, je ne l'entends plus depuis un an.
00:39:00 Je suis très fière de ne pas l'entendre,
00:39:01 parce que ça veut dire que nos parlementaires,
00:39:03 les députés du groupe Renaissance, je crois, se sont imposés.
00:39:06 Quand c'est plus difficile aussi, on existe davantage.
00:39:09 Sans doute.
00:39:10 Et on sent que le job vous plaît totalement, pas de regret.
00:39:14 Ah non, mais je n'ai aucun regret, moi je suis fière déjà,
00:39:16 contrairement à d'autres présidents de groupe.
00:39:18 Sur l'appel des retraites, quand même.
00:39:19 Moi j'ai été élue, ce qui est important aussi.
00:39:21 Ma légitimité, c'est que les députés m'ont élue.
00:39:23 Il y a d'autres groupes politiques, LFI ou le RN,
00:39:26 la question ne se pose pas.
00:39:27 Il y a un chef qui est imposé.
00:39:28 Moi, j'ai eu la chance d'être élue,
00:39:30 donc je sais aussi à la fois la responsabilité que c'est
00:39:33 et que je dois porter la voix qui est d'abord la voix de mon groupe.
00:39:36 Et d'ailleurs, les matronistes remettent en jeu tous les ans,
00:39:39 et ça c'est une nouveauté, les postes clés,
00:39:42 les responsabilités à l'Assemblée.
00:39:44 La page des retraites, elle est en train de se tourner.
00:39:46 La réforme a été promulguée, mais à quel prix, Aurore Berger ?
00:39:50 Est-ce que vous ne croyez pas que le fait quand même
00:39:52 qu'il n'y ait pas de vote des 577 députés sur une réforme comme celle-là,
00:39:56 sur le recul de l'âge de départ, ça va laisser quelques traces ?
00:39:59 Le prix, c'est aussi celui de la cohérence et celui de la responsabilité.
00:40:03 Qu'est-ce que vous vouliez qu'on fasse d'autre ?
00:40:05 Quelle est la décision que le président de la République
00:40:07 et la Première ministre auraient dû prendre ?
00:40:09 Pas de 49-3, peut-être.
00:40:11 Et donc dire finalement, on prend le risque aussi,
00:40:13 et je peux comprendre déjà un, je pense que personne n'aurait aimé
00:40:16 être à leur place au moment où ils prennent cette décision.
00:40:18 C'est pour ça que c'est lui le président de la République
00:40:20 et elle la Première ministre.
00:40:21 Ils prennent cette décision en totale responsabilité,
00:40:23 en sachant qu'ils auront à affronter, évidemment, peut-être,
00:40:27 de la frustration et sans doute de la colère.
00:40:29 Donc ils le font en pleine conscience de ça,
00:40:31 mais parce que ça fait des mois, des années,
00:40:34 qu'on dit que cette réforme, elle est nécessaire pour le pays.
00:40:37 Et donc on ne peut pas renoncer à la mettre en place.
00:40:39 Ou alors, ça veut dire qu'on aurait dû renoncer à d'autres politiques publiques.
00:40:42 Il faut quand même que chacun ait conscience qu'aujourd'hui,
00:40:45 chaque année, c'est l'Etat qui rend flou et qui finance nos retraites.
00:40:49 Le système par répartition tel qu'il existe aujourd'hui
00:40:52 ne suffit plus à payer nos retraites.
00:40:54 Et va continuer à de moins en moins suffire,
00:40:57 surtout si on n'avait pas fait cette réforme.
00:40:59 Donc vous pérennisez son équilibre et ça permettra de dégager des recettes,
00:41:02 en plus, peut-être, pour financer des investissements d'avenir.
00:41:05 Ça permet surtout de ne pas avoir à compenser chaque année,
00:41:07 au risque que du coup, les politiques publiques dont on a parlé,
00:41:09 notamment au début de votre plateau, sur les questions de santé,
00:41:11 sur les questions de services publics en général,
00:41:13 sur les questions de l'école, auraient pu être abîmées
00:41:16 si on n'avait pas réussi cette réforme.
00:41:18 Il n'empêche que certains ne désarment pas ici, à l'Assemblée,
00:41:21 alors que la réforme est promulguée.
00:41:23 On va écouter l'insoumis Manuel Bompard, sur France Info, ce matin,
00:41:26 pour qui le combat continue, ici même, au Palais Bourbon.
00:41:29 Il y a de nouvelles niches parlementaires,
00:41:32 de nos différents groupes de la NUPES qui vont arriver à la rentrée.
00:41:35 Nous redéposerons des lois d'abrogation pour obtenir enfin cette abrogation.
00:41:39 À la fin de l'année, on aura une discussion
00:41:41 sur le projet de loi de finances de la Sécurité sociale.
00:41:43 Nous proposerons des amendements à l'intérieur de cette discussion
00:41:46 pour revenir sur cette réforme des retraites.
00:41:48 Et en tout état de cause, je vous le dis, aux prochaines élections nationales,
00:41:52 nous défendrons l'abrogation de la réforme des retraites
00:41:55 et le retour à la retraite à 60 ans.
00:41:57 Comment vous allez faire si des textes d'abrogation des 64 ans reviennent ?
00:42:01 À chaque fois, l'article 40 sera déposé et le texte sera déclaré irrecevable ?
00:42:06 Déjà, il faudra interroger sa déclaration.
00:42:08 C'est-à-dire qu'il ment et il sait pertinemment qu'il ment.
00:42:11 Il sait pertinemment que, quand bien même ce texte serait débattu
00:42:15 et serait adopté à l'Assemblée nationale,
00:42:17 ce texte ne serait pas adopté au Sénat,
00:42:19 il n'y aurait pas de commission mixte paritaire.
00:42:21 Bref, ça ne rentrerait pas en application.
00:42:23 Donc, on peut faire tous les plateaux télé en mentant.
00:42:25 Ce n'est pas un problème.
00:42:26 Certains le font vraisemblablement très bien.
00:42:28 Rien n'empêche de déposer une proposition de loi dans le cadre de sa négociation parlementaire.
00:42:31 Mais il ne peut pas dire "nous abrogerons dans ce mandat".
00:42:34 Oui, je le reconnais, c'est du futur.
00:42:36 Il n'y a pas de majorité pour le faire.
00:42:38 Et surtout, après, ce sera leur responsabilité.
00:42:40 Là, il dit simplement qu'il dépose un texte.
00:42:42 Ça veut dire que l'article 40 à nouveau jouera.
00:42:44 Mais est-ce que ça ne suscite pas une forme de précédent dangereux ?
00:42:46 Déjà, il n'y a pas de précédent dangereux à faire respecter la Constitution,
00:42:49 à faire respecter nos institutions, à faire respecter les règles.
00:42:51 Il y a ceux qui veulent le chaos, qui veulent la conflictualisation permanente,
00:42:54 qui l'ont même théorisé, qui l'ont même assumé,
00:42:56 qui revendiquent l'obstruction systématique.
00:42:58 Très bien pour eux.
00:43:00 C'est leur manière de faire de la politique.
00:43:02 Ce n'est pas la nôtre.
00:43:04 C'est donc que les quatre années qui viennent ne seront pas quatre années utiles pour les Français,
00:43:07 qu'ils n'ont donc aucune autre proposition à faire,
00:43:09 et que les seules propositions de la NUPES,
00:43:11 ça a été la réintégration des soignants non vaccinés.
00:43:14 C'est quand même un message que je trouve extrêmement violent
00:43:17 à l'égard des Françaises et des Français qui, eux, ont agi en responsabilité
00:43:20 et des soignants non vaccinés.
00:43:22 Ils ne servent à rien à vous entendre à l'Assemblée.
00:43:24 Ils servent le Rassemblement national.
00:43:26 Ils servent par leur vacarme, par leur bruit permanent,
00:43:29 par la conflictualisation qu'ils veulent réaliser.
00:43:32 C'est le sable de sa progression.
00:43:34 Mais vous avez un effet de contraste qui joue de manière évidente.
00:43:37 Quand vous avez un groupe qui, systématiquement,
00:43:39 et qui, encore une fois, le théorise pas moins qu'il dit,
00:43:42 c'est Jean-Luc Mélenchon qui le dit,
00:43:44 qui veut systématiquement instaurer ce chaos,
00:43:46 eh bien en face, vous avez juste à rester calme et à ne rien dire.
00:43:50 Ils permettent au Rassemblement national de passer inaperçu.
00:43:54 C'est ça, le vrai sujet, quand même, que l'on a depuis un an.
00:43:57 Parce qu'à la fin, je suis interrogée sur quoi, au bout d'un an ?
00:43:59 Je ne suis pas interrogée par vous sur le Rassemblement national.
00:44:02 Je ne suis pas interrogée par vous par le danger de l'extrême droite dans notre pays.
00:44:05 Je suis interrogée sur qui ? Sur la France insoumise.
00:44:07 Et pas vraiment sur le fond, mais sur l'attitude qu'elle a, là.
00:44:10 Sur les procédures qu'ils utilisent pour essayer de faire abroger cette réforme.
00:44:14 Mais donc, ça montre bien, encore une fois,
00:44:15 que la seule chose qu'ils ont réussi à instaurer,
00:44:17 c'est qu'on parle de non sur le fond, mais sur la forme.
00:44:20 Et c'est qu'on ne parle plus de ce qui est le vrai danger dans notre pays,
00:44:24 à savoir le risque de l'extrême droite.
00:44:26 Celui qui aurait dû, aux yeux de beaucoup de députés de la majorité,
00:44:29 peut-être c'est aussi votre cas,
00:44:31 déclarer irrecevable cette proposition de loi Lyot,
00:44:34 c'est Éric Coquerel, le président de la Commission des finances,
00:44:38 président insoumis.
00:44:40 Souhaitez-vous qu'il soit reconduit dans ses fonctions à la tête de cette commission ?
00:44:44 Il a failli à sa mission, de manière évidente.
00:44:47 On a, depuis la réforme constitutionnelle,
00:44:50 un fait qui est que cette fonction, qui est très importante,
00:44:53 revienne à un député de l'opposition.
00:44:55 Il doit pourtant être le garant de nos institutions.
00:44:58 Ce n'est pas parce que vous êtes un président de commission
00:45:01 que vous êtes un président Renaissance, Modem, Horizon ou insoumis.
00:45:05 Vous êtes président de commission.
00:45:07 Les présidents de commission de la majorité,
00:45:09 il n'y en a pas un qui a rempli son rôle de manière arbitraire ou partiale.
00:45:13 C'est ce que lui a fait.
00:45:14 Il a fait régner l'arbitraire parce qu'il a refusé d'appliquer
00:45:17 et de faire valoir la constitution.
00:45:19 Son poste est remis en jeu le 3 octobre,
00:45:22 comme tous les autres postes clés à l'Assemblée.
00:45:25 Les députés de la majorité pourraient participer au vote ?
00:45:28 C'est un débat qu'on aura.
00:45:29 Vous aurez ce débat ?
00:45:30 D'ordinaire, il est de tradition que, comme ça revient à l'opposition,
00:45:33 la majorité ne vote pas.
00:45:34 Je pense que c'est ça aussi, qu'on puisse avoir ce débat entre nous.
00:45:37 Je prendrai la position qui sera la position majoritaire de mon groupe
00:45:41 et en lien avec les deux autres groupes de la majorité.
00:45:44 Si les députés Renaissance considèrent majoritairement
00:45:47 et Horizon Modem qu'il faut voter
00:45:49 pour le président de la Commission des Finances,
00:45:51 vous les soutiendrez ?
00:45:52 Je suis présidente d'un groupe, donc j'écoute mon groupe
00:45:54 et on travaille de manière démocratique.
00:45:56 Donc, s'il y a une majorité qui se dégage dans notre majorité,
00:45:59 alors je l'écouterai, évidemment,
00:46:01 mais je pense qu'encore une fois,
00:46:03 soit il assume de remplir sa fonction de manière respectueuse
00:46:06 de nos institutions, soit il la remplit de manière partisane,
00:46:09 et là, il s'égare, il s'éloigne du rôle qui doit être le sien.
00:46:12 Pendant ce temps, il y a Stéphane Séjourné,
00:46:14 le patron de Renaissance, qui réunit les députés Renaissance
00:46:17 pour une réunion très politique
00:46:19 pour évoquer la stratégie de la majorité
00:46:21 et pourquoi pas une coalition avec les Républicains.
00:46:24 On sait qu'il y a beaucoup de rumeurs de remaniement,
00:46:27 ce qui déstabilise un peu la majorité en ce moment.
00:46:29 C'est la solution pour sortir du blocage à l'Assemblée,
00:46:32 une coalition avec les LR.
00:46:34 Stéphane Séjourné, qui est le président de Renaissance,
00:46:36 ne nous a pas invité à échanger en disant
00:46:38 "Bonjour, êtes-vous pour ou contre une coalition avec les LR ?"
00:46:40 C'est pas comme ça, de toute façon,
00:46:42 la question est de la réflexion.
00:46:43 Pour mieux l'évacuer, peut-être ?
00:46:45 Ce que je constate, c'est que depuis un an,
00:46:47 alors qu'on nous prédisait quelques semaines de courte vie
00:46:49 à l'Assemblée nationale,
00:46:51 on nous disait que la dissolution était inévitable
00:46:53 et que dans trois mois, cette dissolution aurait lieu,
00:46:55 vous m'invitez pour les un an,
00:46:57 et les un an d'une majorité qui a tenu,
00:46:59 qui a tenu collectivement,
00:47:01 ce que disent d'ailleurs mes collègues Jean-Paul Maté
00:47:03 et Laurent Marcangeli,
00:47:04 et qui a permis de faire adopter des textes.
00:47:06 Ce qui est sûr, c'est que c'est nouveau,
00:47:08 parce qu'à chaque fois qu'un texte arrive dans l'hémicycle,
00:47:10 on doit trouver une nouvelle majorité
00:47:12 pour le faire adopter.
00:47:13 Vous êtes favorable à cette option-là ?
00:47:15 Finalement, il n'y a pas besoin d'un accord politique
00:47:17 pour sortir des blocages ?
00:47:19 C'est un débat qu'on aura, et c'est sain qu'on ait
00:47:21 à un moment une configuration inédite.
00:47:23 C'est bien qu'on ait des débats qui sont aussi un peu inédits.
00:47:25 Par contre, ce que je constate,
00:47:27 c'est qu'on a réussi, depuis un an,
00:47:29 à faire avancer sur les questions du travail
00:47:31 qui sont essentielles, non pas juste les retraites,
00:47:33 mais la surassommage, l'I.C. professionnel,
00:47:35 on va avoir la loi sur le plein emploi,
00:47:37 la question du RSA,
00:47:39 sur les sujets régaliens, on parle beaucoup de migration.
00:47:41 La loi de programmation militaire,
00:47:43 elle a été largement adoptée.
00:47:45 La loi de programmation sur la sécurité intérieure
00:47:47 et les lois de justice qui vont arriver.
00:47:49 Elle est très compliquée, cette loi.
00:47:51 Est-ce que déjà, vous reconnaissez
00:47:53 ceux que vous avez un peu fréquentés,
00:47:55 Eric Ciotti, Alain Marlex,
00:47:57 aujourd'hui, ou pour vous,
00:47:59 ils sont sur la même ligne que Marine Le Pen ?
00:48:01 Non, je pense qu'il ne faut pas
00:48:03 tomber dans les caricatures et dire ça.
00:48:05 J'étais plus étonnée
00:48:07 quand Olivier Marlex a réagi
00:48:09 par rapport à ce qui se passait à Annecy.
00:48:11 Il a réagi, je pense,
00:48:13 de manière maladroite et il a réagi
00:48:15 de manière plus excessive même que ce qu'a fait Marine Le Pen.
00:48:17 "Migration incontrôlée tue", avait-il écrit dans son tweet.
00:48:19 Oui, je crois que parfois, il y a des postures.
00:48:21 Après, non, je ne peux pas les ranger
00:48:23 sur le même plan d'égalité.
00:48:25 Ce n'est pas la même histoire politique,
00:48:27 ce ne sont pas les mêmes valeurs.
00:48:29 Ce serait honnêtement de la posture de ma part que de dire ça
00:48:31 et je ne pense pas que ce soit le cas et que ce soit juste de le dire.
00:48:33 Donc, vous vous rempilez ?
00:48:35 Ça ne vous fait pas rêver, le gouvernement ?
00:48:37 D'un mot, il faut conclure.
00:48:39 C'est arrogant si je vous dis que c'est
00:48:41 inenvisageable que je rentre au gouvernement
00:48:43 mais j'aime profondément ce que je fais
00:48:45 et j'ai souhaité ce poste
00:48:47 et j'ai été élue par les députés à ce poste-là.
00:48:49 Eh bien justement, restez avec moi,
00:48:51 Aurore Berger, parce qu'on va encore en parler
00:48:53 des députés, notamment avec Stéphanie Despierres,
00:48:55 nos affranchies pour leur parti pris.
00:48:57 On les accueille tout de suite.
00:48:59 Fanny Guinochet de France Info
00:49:01 qui va nous parler des retraites, encore
00:49:03 les retraites, et puis Cécilia Gabizon,
00:49:05 la présidente éditoriale,
00:49:07 la vice-présidente éditoriale
00:49:09 de ETX, l'agence de presse.
00:49:11 On commence donc par Bourbon Express.
00:49:13 Bonsoir Stéphanie Despierres.
00:49:15 L'histoire du jour à l'Assemblée,
00:49:17 c'est l'histoire d'une génération, c'est ça ?
00:49:19 Oui, l'histoire de votre génération,
00:49:21 Aurore Berger, une députée
00:49:23 renaissance, tous nés entre 1986
00:49:25 et 1988, qui ont tous
00:49:27 entre 35 et 37 ans
00:49:29 et qui depuis cette année sont tous
00:49:31 à des postes clés, prestigieux,
00:49:33 ici à l'Assemblée. Il y a vous donc présidente
00:49:35 du groupe. Sacha Houllier est à la tête
00:49:37 de la commission des lois, la plus
00:49:39 puissante de l'Assemblée.
00:49:41 Guillaume Casbarion est président de celle des
00:49:43 affaires économiques, Jean-Marc Zulési du
00:49:45 développement durable et Pierre-Alexandre Anglate
00:49:47 de celle des affaires européennes.
00:49:49 Ils ont été élus pour la première fois en
00:49:51 2017, réélus en
00:49:53 2022, mais en 2022, plusieurs
00:49:55 piliers du macronisme au
00:49:57 palais Bourbon, Richard Ferrand, Christophe Castaner
00:49:59 ont été battus aux législatives.
00:50:01 D'autres ont été nommés ministres, alors
00:50:03 la voie était libre pour ces nouveaux lieutenants.
00:50:05 - Donc Stéphanie, ils n'ont
00:50:07 pas du tout le même parcours, tous ces
00:50:09 députés de 1986, qu'est-ce qu'ils sont jeunes !
00:50:11 Ça les nourra jeunes !
00:50:13 - Oui, ça peut rêver parfois !
00:50:15 - Et non Myriam, c'est ça qui est intéressant, parce qu'ils
00:50:17 viennent d'horizons très différents et
00:50:19 parfois très opposés. Aurore Berger, vous avez, on l'a
00:50:21 dit, longtemps été républicain, vous tapez
00:50:23 fort sur vos adversaires et vous
00:50:25 défendez une ligne plutôt dure sur les questions
00:50:27 régaliennes. Sacha Houllier, lui,
00:50:29 vient du Parti Socialiste, il tente
00:50:31 d'incarner l'aile gauche du macronisme,
00:50:33 il a dit non à une nouvelle loi anti-casseurs,
00:50:35 il pèse de tout son poids auprès du
00:50:37 ministre de l'Intérieur pour contrecarrer
00:50:39 l'influence des Républicains dans les discussions
00:50:41 sur l'immigration. Et puis parmi ses proches, il y a
00:50:43 Pierre-Alexandre Anglade, le président
00:50:45 des Affaires Européennes, Jean-Marc Zoulaysi,
00:50:47 lui, reste dans son couloir "climat,
00:50:49 écologie". Guillaume Kasbarian, on lui était
00:50:51 consultant, il est sur une ligne libérale
00:50:53 en matière économique, il est devenu
00:50:55 un de vos proches. - Tous de 1986-88 !
00:50:57 - 1986-88, pas plus !
00:50:59 Mais, vous l'avez vu, les profils sont
00:51:01 très divers, mais ça n'empêche pas
00:51:03 une vraie solidarité.
00:51:05 - On a été ensemble
00:51:07 face à l'adversité de la crise
00:51:09 Covid, de la crise des gilets jaunes, de la
00:51:11 guerre en Ukraine, de tous les défis que notre pays et l'Europe
00:51:13 a connus, et tout ça, ça nous soude.
00:51:15 Et on est au fond les garants
00:51:17 de ce qu'est le macronisme, c'est-à-dire
00:51:19 cette volonté de dépassement avec des
00:51:21 histoires politiques, des parcours politiques différents,
00:51:23 mais avec cette capacité de nous rassembler
00:51:25 au service de l'intérêt du pays et du projet
00:51:27 politique porté par Emmanuel Macron.
00:51:29 - Alors, à quoi rêvent-ils,
00:51:31 ces députés de la génération 86 ?
00:51:33 Devenir ministre ? - Peut-être,
00:51:35 devenir ministre. Leurs noms reviennent souvent
00:51:37 en ces temps de remaniement,
00:51:39 mais attention, ne parlez pas trop fort et pas
00:51:41 trop vite.
00:51:43 - Est-ce que quand on est président des affaires économiques, la marge d'après,
00:51:45 c'est de devenir ministre ? - Non, déjà, c'est pas
00:51:47 une question à laquelle, nous, on doit répondre,
00:51:49 c'est pas à nous de choisir ça. - Mais si on vous propose,
00:51:51 vous ne diriez pas non ? - Attendez, aujourd'hui,
00:51:53 je suis très honoré d'être président de commission,
00:51:55 je ne suis jamais en train de viser le coup d'après
00:51:57 et de me dire, mon Dieu, il faut que je prépare la marge qui suit.
00:51:59 Il peut se passer plein de choses à l'avenir, et donc,
00:52:01 c'est pas à moi de le dire et c'est pas maintenant qu'on va en parler.
00:52:03 - On ne recherche pas, ce qui a pu être
00:52:05 le cas par le passé, on ne recherche pas
00:52:07 à tout prix à entrer au gouvernement, parce qu'on a
00:52:09 beaucoup de latitude, parce qu'on
00:52:11 prend beaucoup de plaisir à faire ce qu'on fait ici,
00:52:13 à l'Assemblée nationale, et parce que, quelque part,
00:52:15 on a une vraie solidarité
00:52:17 entre nous. - Est-ce que vous avez l'impression d'avoir
00:52:19 plus de poids en tant que président de la commission
00:52:21 des lois que vous ne pourriez en avoir
00:52:23 à un ministère, quel qu'il soit ?
00:52:25 - Plus de poids, je ne sais pas,
00:52:29 plus de liberté, c'est absolument certain.
00:52:31 - Alors, après sa réélection,
00:52:33 Emmanuel Macron avait largement pioché
00:52:35 dans les députés pour former son gouvernement,
00:52:37 avec cette génération 1986-1988,
00:52:39 qui a pris du galon.
00:52:41 Le président de la République a donc un nouveau
00:52:43 vivier de politiques aguerries, mais il ne
00:52:45 ne pourra pas leur proposer de simple secrétariat
00:52:47 d'État, parce que, désormais, il joue dans la Cour des grands.
00:52:49 - Oui, ça ne fait plus rêver, ce secrétariat d'État,
00:52:51 ça, c'est sûr, dans cette nouvelle Assemblée.
00:52:53 Merci pour cette chronique, Stéphanie.
00:52:55 Toute la semaine, d'ailleurs, des chroniques
00:52:57 Bourbon Express, spéciale un an
00:52:59 à l'Assemblée nationale.
00:53:01 Fanny, vous avez regardé
00:53:03 le compte officiel de la réforme
00:53:05 des retraites, le... Comment on appelle ça ?
00:53:07 Le simulateur. Alors,
00:53:09 dites-nous, il explose, manifestement.
00:53:11 - Alors, il explose parce que, maintenant que
00:53:13 la réforme est votée, les Français ont
00:53:15 acté, malgré leur opposition,
00:53:17 parce que ça y est, c'était...
00:53:19 - C'était fait. - C'était fait. Eh bien, tout le monde
00:53:21 veut savoir à quelle sauce il va être mangé.
00:53:23 Donc, on fait le test.
00:53:25 Alors, c'est assez simple, c'est un outil.
00:53:27 Vous rentrez votre numéro de Sécu,
00:53:29 vous... Ça mouline. Et là, c'est vrai
00:53:31 que ce simulateur, en ce moment,
00:53:33 les connexions explosent, parce que, depuis
00:53:35 lundi, il a intégré les nouvelles...
00:53:37 les nouveaux critères de la réforme
00:53:39 des retraites, le plus important étant
00:53:41 le décalage de l'âge de 62 à
00:53:43 64 ans dans le privé.
00:53:45 Alors, ça vous permet de voir, grosso modo,
00:53:47 à quel moment vous pourrez partir à taux plein
00:53:49 et, aussi, quel sera
00:53:51 le montant de votre pension.
00:53:53 Ce simulateur, il fonctionne parce que
00:53:55 il agrège toutes les
00:53:57 données qu'ont transmises les
00:53:59 employeurs depuis le tout début,
00:54:01 quand vous faisiez des petits jobs
00:54:03 d'été jusqu'à aujourd'hui. Il n'est pas
00:54:05 nouveau, il est gratuit, tout le monde peut l'utiliser,
00:54:07 les fonctionnaires, quel que soit le statut, les agriculteurs,
00:54:09 les salariés... - Je suis allée, moi.
00:54:11 Je sais à quelle sauce je vais être mangée, ça change rien pour moi.
00:54:13 Donc, c'est fiable. Il y a des risques d'erreur, quand même ?
00:54:15 - Alors, déjà, tous les décrets n'étant pas
00:54:17 passés, tous les critères n'ont pas été
00:54:19 intégrés. Les principaux le sont, notamment
00:54:21 par exemple celui sur les carrières longues, dont on a
00:54:23 beaucoup parlé, ce système qui permet de partir
00:54:25 plus tôt parce que vous avez commencé
00:54:27 à travailler plus tôt. Mais, par exemple,
00:54:29 attention, c'était déjà le cas avant la réforme,
00:54:31 mais les maternités des
00:54:33 femmes, souvent, sont oubliées.
00:54:35 Alors, c'est vrai que la réforme a tendance
00:54:37 à les effacer, mais
00:54:39 on rappelle que, quand même, un enfant
00:54:41 équivaut à 8 trimestres
00:54:43 travaillés.
00:54:45 Alors, un conseil, il faut vérifier,
00:54:47 passer au cribe
00:54:49 toute votre carrière pour essayer de voir qu'il n'y ait
00:54:51 pas des oublis parce que, comme il y a une étude
00:54:53 de la Cour des comptes qui montre que
00:54:55 1, une pension sur 7,
00:54:57 une pension de retraite sur 7, fait l'objet d'une
00:54:59 erreur, en général, c'est au détriment
00:55:01 des pensionnés. C'est pas une petite erreur.
00:55:03 En moyenne, la Cour des comptes a calculé que c'était quand même
00:55:05 50 euros d'oubliés par mois.
00:55:07 Sachant que la retraite, en moyenne,
00:55:09 en France, c'est 25 ans, ça vous fait un petit manque
00:55:11 à gagner sur lequel il serait
00:55:13 dommage de s'asseoir. - Et sur l'avenir,
00:55:15 sur la partie avenir de la réforme ? - Alors, sur l'avenir, en fait,
00:55:17 c'est une simulation par rapport aux
00:55:19 projections de salaire que vous pouvez espérer.
00:55:21 Mais attention, ce simulateur,
00:55:23 il fonctionne aujourd'hui.
00:55:25 Vu l'état
00:55:27 du régime, il y aura peut-être
00:55:29 d'autres réformes des retraites.
00:55:31 - Ah oui, vous croyez ! - Pas tout de suite, mais...
00:55:33 Et donc, il faudra une...
00:55:35 Il faudra que ce simulateur soit réadapté.
00:55:37 - Merci beaucoup,
00:55:39 Fanny. Ça va vous intéresser, j'en suis sûre,
00:55:41 cette chronique pour terminer de Cécilia Gabidon.
00:55:43 Vous nous alertez sur un phénomène
00:55:45 né aux Etats-Unis, qui pourrait
00:55:47 bien débarquer chez nous. Il s'appelle
00:55:49 le "trigger warnings". - Oui.
00:55:51 - De quoi s'agit-il ? - Comme ça, on pourrait penser
00:55:53 au nom d'un golfeur, mais non. En fait,
00:55:55 il s'agit de ces avertissements, les "warnings",
00:55:57 qu'on met avant des scènes de violence
00:55:59 ou des paroles qui pourraient choquer,
00:56:01 ou tout élément factuel. Alors, comme ça,
00:56:03 ça paraît plutôt bien d'avoir des avertissements, on est plutôt
00:56:05 habitués, mais ça entre maintenant dans le domaine
00:56:07 de l'enseignement supérieur, où, en fait,
00:56:09 avant de présenter des faits qui pourraient
00:56:11 choquer, par exemple, des événements historiques,
00:56:13 on est amené à prévenir
00:56:15 ses élèves et même leur proposer de quitter la salle.
00:56:17 Alors, ça soulève quand même un peu des questions
00:56:19 sur la liberté d'enseigner.
00:56:21 Alors, aux Etats-Unis, aujourd'hui, c'est à peu près
00:56:23 un professeur sur deux qui dit "utiliser
00:56:25 les trigger warnings", comme on dit.
00:56:27 Au Royaume-Uni,
00:56:29 86 % des étudiants, les plébiscites,
00:56:31 les demandent. - C'est énorme.
00:56:33 - Et là, c'est en train d'arriver, en fait,
00:56:35 en France. Alors, aujourd'hui,
00:56:37 c'est ni la norme... - En France, aussi.
00:56:39 - C'est ni la norme, ni l'usage, mais
00:56:41 on a des cas, et notamment parce que vous savez que
00:56:43 maintenant, il y a des évaluations des professeurs en fin d'année dans le supérieur,
00:56:45 et en fait, dans les évaluations,
00:56:47 ça remonte. Il y a des étudiants, alors le cas
00:56:49 dans une école supérieure, d'un professeur
00:56:51 qui a été quelque part mis en accusation
00:56:53 pour ne pas avoir fait un trigger warning
00:56:55 avant un cours sur la Shoah.
00:56:57 Dans une université à Tours,
00:56:59 trigger warning également, problème trigger warning,
00:57:01 un cours sur... Un article du Monde,
00:57:03 c'est un cours de méthode, un article du Monde
00:57:05 sur les attentats du 13 novembre.
00:57:07 Donc, en fait, c'est pas encore une obligation,
00:57:09 mais les professeurs ont tendance à se censurer.
00:57:11 - Ah bah oui, un censure inévitable.
00:57:13 - Et on a vu un cas dans l'université d'Oklahoma,
00:57:15 où le professeur de littérature, qui faisait un cours
00:57:17 sur le langage de l'empathie, lisait une lettre
00:57:19 de Martin Luther King, une lettre écrite...
00:57:21 Alors, cette lettre s'appelle
00:57:23 "Martin Luther King depuis la prison de Birmingham",
00:57:25 et il emploie le "n-word",
00:57:27 comme on dit, donc le mot "nègre",
00:57:29 mais utilisé par les racistes,
00:57:31 et en fait, ce professeur a fait l'objet de dénonciations
00:57:33 et l'objet d'une enquête de son université.
00:57:35 - On se souvient aussi que Samuel Paty
00:57:37 avait proposé à ses élèves
00:57:39 de sortir pour son cours sur
00:57:41 les caricatures, la question
00:57:43 du blasphème, de la liberté d'expression.
00:57:45 - Alors là, un cas évidemment tragique, dramatique,
00:57:47 mais qui montre que l'extrémisme
00:57:49 n'a que faire des précautions.
00:57:51 Mais au-delà des précautions, on se rend compte
00:57:53 que ces trigger warnings, d'après des études
00:57:55 maintenant menées, notamment des études australiennes,
00:57:57 non seulement ne marchent pas,
00:57:59 mais même auraient des effets délétères,
00:58:01 parce que ça crée une sorte de culture d'attention-attention,
00:58:03 c'est-à-dire une culture de l'angoisse, tout est dangereux.
00:58:05 Et puis ça centre les étudiants
00:58:07 sur leur propre trauma, sur le traumatisme.
00:58:09 Et donc, ça produit alors
00:58:11 cet effet pour préserver la santé mentale,
00:58:13 le bien-être des gens, en fait, au contraire,
00:58:15 quelque part, ça les ancre dans l'inquiétude.
00:58:17 Donc là, nous conclusons une seule,
00:58:19 c'est, et notamment
00:58:21 pour les cours d'histoire, comme on sait,
00:58:23 l'histoire n'est pas un long fleuve tranquille,
00:58:25 affrontons la réalité avec subtilité,
00:58:27 intelligence, et apprenons
00:58:29 de ce qu'il s'est passé pour mieux agir.
00:58:31 - Qu'est-ce que ça vous inspire,
00:58:33 au renverger ? - Je trouve ça très inquiétant,
00:58:35 cette espèce de culture de l'offense,
00:58:37 où par principe on se sent offensé par ce qui pourrait être dit,
00:58:39 donc il faut maintenant une prévention pour tout,
00:58:41 mais à force de prévention, il y a le risque que ça dénature,
00:58:43 encore une fois, des enseignements
00:58:45 qui sont absolument vitaux.
00:58:47 On ne va pas prévenir, au risque
00:58:49 de se censurer sur des faits
00:58:51 historiques aussi nécessaires
00:58:53 à appréhender que ce que vous avez évoqué,
00:58:55 que ce soit notamment la Shoah.
00:58:57 Et le risque, c'est ça,
00:58:59 c'est qu'à un moment, les enseignants ne se sentent plus libres
00:59:01 d'enseigner parce qu'ils ont peur
00:59:03 des réactions de main
00:59:05 de leurs élèves, des parents d'élèves.
00:59:07 Et malheureusement, ce serait la triste
00:59:09 conclusion, parce que
00:59:11 ce qui s'est passé avec la décapitation
00:59:13 de Samuel Paty, c'est qu'on aurait dû,
00:59:15 au contraire, avoir un mouvement
00:59:17 de révolte pour dire que, évidemment,
00:59:19 nos enseignants
00:59:21 doivent être libres sur leur méthode pédagogique
00:59:23 et surtout libres de dire l'histoire
00:59:25 et d'éveiller à l'esprit critique.
00:59:27 Et malheureusement, c'est l'inverse
00:59:29 qui peut se produire. Le simple fait
00:59:31 qu'aujourd'hui, aucun collège n'ait
00:59:33 pris le nom de Samuel Paty...
00:59:35 - Alors ça pourrait changer. - Tant mieux si ça peut changer.
00:59:37 - Normalement, ça devrait changer.
00:59:39 - Ça en dit un petit peu long quand même
00:59:41 sur le risque d'autocensure.
00:59:43 - Merci beaucoup. Merci d'être venu
00:59:45 sur le plateau de LCP, Aurore Berger.
00:59:47 Et bon vent. J'ai l'impression que l'avenir se joue
00:59:49 encore pour vous. En tout cas, j'ai senti
00:59:51 qu'il y avait de la volonté ici
00:59:53 au Palais-Bourbon ou ailleurs.
00:59:55 On regardera ça de près dans les jours,
00:59:57 dans les semaines à venir. Merci à vous, mesdames.
00:59:59 Stéphanie Despiera, très vite.
01:00:01 Très belle soirée sur LCP. Soirée documentaire
01:00:03 qui commence avec Jean-Pierre Gratien.
01:00:05 À demain.
01:00:07 (générique)