Port de l'abaya à l'école : une atteinte à la laïcité ?
Aujourd'hui dans "Punchline", Laurence Ferrari et ses invités débattent du port de l'abaya à l'école.
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Transcript
00:00 (Générique)
00:03 Punchline, Laurence Ferrari sur Europe 1.
00:06 (Générique)
00:12 18h36 en direct dans Punchline sur CNews et sur Europe 1.
00:15 Julien Drey est avec nous.
00:16 Vous avez choisi de nous parler de Jean-Luc Mélenchon,
00:18 qui, ce week-end encore, disait que l'Abaya n'est pas un problème.
00:21 Ce n'est pas une tenue reconnue par la foi musulmane
00:23 comme une tenue musulmane.
00:24 Le problème de l'école, ce n'est pas l'Abaya,
00:26 c'est le manque de professeurs, l'insuffisance de l'accueil,
00:28 l'impossibilité de discuter,
00:30 a déclaré le leader de la France insoumise.
00:33 Il y a certainement, je dirais, beaucoup de choses
00:36 qui peuvent être critiquées dans l'éducation nationale
00:38 et qui doivent être critiquées,
00:39 parce que je pense que ça va très, très mal,
00:41 mais ce n'est pas parce que ça va mal
00:43 qu'on a le droit de relativiser quelque chose qui est essentiel.
00:46 Vous avez une bataille qui se mène en ce moment.
00:48 Ce n'est pas une petite bataille.
00:50 Il y a eu la bataille sur le voile, maintenant, la bataille sur l'Abaya.
00:54 Et ceux qui connaissent un peu les réseaux frères musulmans
00:57 savent que tout ça, ce sont des batailles idéologiques organisées
01:00 pour faire reculer la laïcité et l'état de droit.
01:02 Donc, on n'est pas en train de rigoler.
01:04 Ce n'est pas une tenue...
01:05 L'Abaya n'est pas apparu comme ça, comme un effet de mode,
01:07 c'est-à-dire on porte le T-shirt avec Picsou
01:09 et puis demain, on va porter le T-shirt avec Nike ou je ne sais pas quoi.
01:12 L'Abaya, c'est un instrument de bataille politique
01:15 dans l'éducation nationale.
01:16 Je pense donc à tous ces professeurs, à tous ces proviseurs
01:19 qui mènent la bataille depuis des semaines et des semaines
01:21 dans des situations qui sont très difficiles, parfois,
01:24 et qui ont un des principaux personnages politiques,
01:27 parce que c'est un des principaux,
01:28 il a fait un score énorme, etc.,
01:31 et qui, lundi matin, vont se retrouver avec des élèves
01:34 qui vont leur dire "Mais monsieur, madame, regardez,
01:37 on a entendu M. Mélenchon, il a dit que c'était une tenue ludique,
01:40 que c'était juste pour masquer des formes.
01:43 Il nous prend pour qui ?"
01:45 - Pour des idiots ? - Oui, je pense.
01:47 Là, il se fout...
01:48 Et vous voyez, je peux le dire,
01:50 parce que moi, je l'ai défendu bien des fois,
01:52 j'ai été son compagnon politique pendant là,
01:55 mais là, j'ai été scandalisé, révolté,
01:58 et je le suis d'autant plus
01:59 qu'il a été ministre de l'Éducation nationale.
02:01 - Donc il sait ce que ça veut dire. - Et enseignant.
02:04 Et enseignant. Enseignant pas longtemps,
02:05 mais ça a été un bon ministre, en plus, à l'époque.
02:08 Louis Dragnel.
02:09 Je souscris à 100 % de ce que vient de dire Julien Dray,
02:12 et je pense qu'en fait,
02:14 il faut pas se perdre aussi dans la terminologie de cette tenue,
02:17 parce qu'un jour, on vous dit "C'est le voile,
02:19 alors quelle taille, combien de centimètres ?"
02:21 Le lendemain, on vous dit "Là-bas,
02:22 on somme le ministre de l'Éducation nationale
02:25 de préciser dans sa circulaire le nom des tenues."
02:28 Lui, il ne veut pas.
02:29 Je pense que pour solder ce sujet-là,
02:31 ce qu'il faut, de manière très claire,
02:33 c'est considérer que ces tenues
02:34 sont des tenues vestimentaires islamiques,
02:37 par destination, peu importe la terminologie.
02:40 Et en utilisant cette terminologie juridique,
02:43 ça permet non pas d'avoir une nouvelle loi,
02:46 mais de faire appliquer et de faire interdire
02:48 toutes ces tenues religieuses,
02:49 parce qu'elles n'ont absolument rien à faire à l'école,
02:52 et je pense également, là où je vais peut-être plus loin,
02:55 que ça n'a rien à faire même dans l'espace public.
02:57 - Gautier Lebret. - Si Jean-Luc Mélenchon
02:59 a changé aussi radicalement d'avis,
03:01 parce que le placard à archive est rempli
03:03 avec toutes les déclarations de Jean-Luc Mélenchon,
03:05 opposé au voile, pourquoi il a fait ça ?
03:07 Parce qu'il a changé une partie de ses électeurs,
03:09 il a perdu le vote ouvrier au profit de Marine Le Pen.
03:13 Enquête très intéressante du JDD paru hier,
03:15 27 % des électeurs de Jean-Luc Mélenchon
03:17 ont déjà voté pour le Rassemblement national.
03:19 Et 69 % des électeurs musulmans
03:22 ont voté au premier tour pour Jean-Luc Mélenchon.
03:25 Ça avait même inquiété les renseignements intérieurs
03:28 qui avaient déligenté une enquête.
03:30 Ça ne veut pas dire pour autant que ces 69 % d'électeurs musulmans
03:33 sont d'accord avec Jean-Luc Mélenchon sur la baïa,
03:36 mais c'est purement électoraliste,
03:38 ce revirement de Jean-Luc Mélenchon en plusieurs années.
03:40 Mais attention, parce que moi, je vais vous dire,
03:42 depuis hier, j'ai eu beaucoup d'amis à moi musulmans,
03:45 qui me disent qu'ils étaient en total désaccord.
03:47 - Mais bien sûr. - J'ai beaucoup de jeunes filles
03:49 qui m'ont dit qu'on mène la bataille,
03:51 y compris parfois par rapport à nos grands frères,
03:53 qui nous forcent à porter, et là, ils ne nous rendent pas service.
03:56 - Au contraire. - C'est pire que ça.
03:57 - Ça, c'est bâtir le service. - Je pense que ça...
04:00 Et on est en plus dans un contexte international
04:02 où il y a des femmes qui se battent en Afghanistan, en Iran,
04:06 qui meurent, qui sont exécutées.
04:08 Et tout ça, ça n'existe pas, tout ça, c'est ludique.
04:11 Pour qui on... Pour qui il nous prend, là ?
04:12 Je pense qu'il y a vraiment une double faute
04:14 de la part de Jean-Luc Mélenchon.
04:16 Il y a celle, dans le fil de ce que vous venez de dire,
04:17 effectivement, avec, en plus, en entretenant la confusion.
04:20 On l'a vu avec Mathilde Panot la semaine dernière,
04:23 qui commentait la Une du Parisien
04:24 en disant que c'était de l'islamophobie,
04:25 que ça l'armait, du nom de Dabaïa.
04:27 Et donc, c'est entretenir la confusion
04:29 entre ce qu'est la laïcité, mais pour protéger chacun, en fait.
04:32 C'est une protection. Les prières à Nice, c'était quoi ?
04:34 Ce qui est choquant, c'est pas en soi une prière,
04:35 c'est le fait qu'il y ait une pression sociale
04:37 qui s'exerçait sur les enfants, qui ne l'auraient pas fait d'eux-mêmes,
04:40 en disant "T'es un bon ou une mauvaise musulmane,
04:43 prouve-moi que tu l'es".
04:44 Donc, il entretient ce climat-là.
04:46 C'est vraiment déjà une première faute grave
04:48 de dire que la laïcité est en fait une arme contre les musulmans.
04:51 Non, la laïcité, elle se fiche des musulmans en particulier,
04:54 elle s'adresse à tous les citoyens de la République.
04:57 Et la deuxième faute grave, c'est son interprétation même
04:59 de l'islam, en quelque sorte.
05:00 Il y a quelques jours, on a publié sur Atlantico une interview
05:03 avec le recteur de l'université Al-Azhar.
05:05 Vous savez, il n'y a pas de clergé,
05:06 ou il n'y a pas de Vatican de pape en islam.
05:08 Enfin, la plus haute autorité morale du monde sunnite,
05:11 c'est le recteur de l'université Al-Azhar.
05:13 Qu'est-ce qu'il disait, notamment en répondant
05:15 à des questions sur la France ?
05:16 Il dit "Le voile, comme la baïa, sont secondaires en islam.
05:19 D'ailleurs, même au Caire, à l'université en question,
05:22 les femmes peuvent être non voilées.
05:24 Et de deux, les Français qui s'en revendiquent
05:26 et qui en font un point de friction avec les autorités françaises
05:28 ne comprennent pas l'islam, ils en font une provocation.
05:32 Ça ne devrait pas avoir lieu d'être."
05:33 Donc, si lui est capable de le dire,
05:34 Jean-Luc Mélenchon devrait être capable de le voir aussi.
05:37 Aucune obligation dans l'islam à porter cette tenue-là.
05:40 Aucune obligation.
05:41 Aucun texte coranique n'oblige à cela.
05:45 Au contraire.
05:45 Et je signale que les premiers régimes d'indépendance
05:48 qui se sont constitués, qui étaient les pays musulmans,
05:51 menaient la bataille contre le pan.
05:53 Vous avez un discours de Gamal Abdel Nasser
05:55 qui est remarquable en la matière,
05:57 qui devrait plutôt faire référence à Jean-Luc Mélenchon,
06:00 parce qu'à l'époque, c'est un leader anti-impérialiste.