Agressions sexuelles: le témoignage salvateur de l’actrice Karin Viard

  • l’année dernière
"Je me faisais rouler des pelles de force, je me faisais peloter dans le métro." Les mots forts et salvateurs de l’actrice Karin Viard victime d’agressions sexuelles, au micro de Deborah Grunwald dans son émission "Dans le rétro".

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Transcript
00:00 Vous êtes tombé sur des prédateurs sexuels qui vous dites ont anesthésié mes sensations.
00:04 J'ai préféré passer à la casserole plutôt que de me rebeller parce que ça me paraissait
00:07 plus simple.
00:08 C'est vous dire à quel point je reviens de loin.
00:10 C'est pas revenir de loin, c'est survivre à ce qu'il y a de plus dégueulasse finalement.
00:14 En réalité...
00:15 Si vous voulez pas en parler, on n'en parle pas.
00:17 J'y suis tout à fait, mais c'est pas un problème.
00:18 D'abord, j'ai couché pour pas passer pour une salope, ce qui est quand même un paradoxe
00:23 absolu.
00:24 Pas parce que j'étais en face de prédateurs sexuels, pas du tout.
00:27 J'étais jeune et je naviguais assez mal dans les prémices, dans les débuts de ma
00:35 vie sexuelle.
00:36 Et je me sentais coupable de susciter du désir en fait.
00:39 Mais parce que j'avais pas eu de père pour me dire "tu vaux quelque chose, tu es belle
00:44 ma fille, regarde, je pose un regard d'homme sur toi".
00:48 J'avais pas eu de mère pour me dire "méfie-toi de ceci, méfie-toi de cela".
00:52 J'étais vraiment une noix blanche.
00:54 J'étais vraiment une gazelle dans la steppe.
00:59 Donc je me sentais coupable de susciter du désir.
01:02 C'est ça qui est fou.
01:03 C'est dingue.
01:04 Et je pensais que je devais y répondre parce que sans doute j'avais allumé des boutons
01:08 sans m'en rendre compte.
01:10 Donc ça déjà tu te dis "cocotte, faudrait quand même que t'ailles un peu réfléchir
01:14 là-dessus parce que c'est complètement à l'envers".
01:16 Donc ça, il y avait ce truc-là.
01:17 Et puis après je suis arrivée à Paris et effectivement je me suis fait agresser sexuellement
01:22 mais énormément.
01:24 Vraiment énormément.
01:25 Jusqu'au jour où je me retrouve dans mon studio avec trois autres copines et je leur
01:30 dis "ah non mais Paris c'est infernal".
01:32 Vous êtes d'accord ? Je venais donc de Rouen.
01:34 Je leur dis "vous êtes d'accord qu'on n'arrête pas de se faire agresser sexuellement ?"
01:38 Moi je me faisais rouler des pelles de ford, je me faisais plotter dans le métro, des
01:42 mecs se branlaient sur moi.
01:43 Enfin je veux dire, c'était des vraies agressions sexuelles.
01:46 Et les trois me regardent, elles me disent "mais absolument pas".
01:50 Et là je tombe des nues.
01:52 Je leur dis "mais ça vous vivez jamais ?" Et les trois me disent "mais absolument
01:57 pas".
01:58 Et ce jour-là en fait, je me suis rendue compte qu'il y avait sans doute quelque chose
02:03 chez moi qui autorisait ce comportement.
02:05 Et vous me croirez si vous voulez mais je vous jure que c'est la vérité.
02:09 De ce jour-là, je n'ai plus jamais été agressée sexuellement par un homme.
02:14 Jamais.
02:15 Plus jamais à partir de ce moment-là.
02:18 C'est que j'ai pris conscience qu'il y avait sans doute quelque chose chez moi qui
02:23 renvoyait la possibilité que ça se passe.
02:26 Et qui trouvait ça assez normal.
02:29 C'est dingue ou pas ?
02:31 C'est fou la façon dont vous en parlez aujourd'hui, avec une force incroyable.
02:35 Mais non, mais c'est pour ça que toutes ces discussions autour des agressions sexuelles,
02:44 il faut les avoir, il faut que la honte change de camp, il faut que les hommes savent qu'ils
02:49 ne pourront pas faire ça comme ils feraient autre chose et que c'est puni par la loi.
02:54 Mais dans le même temps, il faut savoir que les femmes sont fortes et qu'elles doivent
02:59 travailler sur elles-mêmes si ça leur arrive.
03:01 Elles doivent faire le taf pour que ça ne leur arrive plus.
03:05 Vous en parlez avec cette force et donc du coup on a du mal à s'imaginer la souffrance
03:09 que vous avez pu ressentir.
03:10 Pourtant vous avez dû morfler, vous avez dû souffrir profondément.
03:12 Dans ces moments-là ?
03:15 J'avais peur, je me sentais sale, je me souviens m'être écurée tellement de fois
03:24 dans ma baignoire pour enlever le truc comme ça, mais j'étais pas très connectée non
03:30 plus.
03:31 Si j'avais été plus connectée, j'aurais demandé de l'aide, j'étais combative
03:37 en fait, mais j'étais pas très connectée donc j'en ai souffert sans doute, mais j'ai
03:42 plus le souvenir de colère ou de honte ou de gêne.
03:47 Non, j'en ai souffert c'est sûr, mais ça n'est pas quoiquement arrivé jusqu'à
03:53 mon cerveau comme de la souffrance.
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