Guillaume Blot, les bistrots dans le viseur

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Transcription
00:00 J'ai vu vraiment lors de mon tour de France et de mes différents passages dans les villes,
00:04 les rideaux se fermer.
00:05 Mais moi ce qui m'intéressait c'était vraiment de montrer les résistants, ceux
00:08 qui sont encore debout et de montrer toute la vie qu'il y a, par curiosité en fait,
00:11 aller voir, rencontrer.
00:12 Bistro, buvette de stade, restaurant routier, bienvenue dans la France photographiée par
00:18 Guillaume Blot, qui parcourt le pays pour montrer le charme décalé de certains univers
00:22 populaires.
00:23 Des bars en formica, des bols de cacahuètes, des journaux sur la table, et surtout des
00:29 habitués et leurs histoires.
00:31 Le photographe documentaire s'est arrêté dans près de 90 cafés, de ceux qu'on appelle
00:35 les troquets, les PMU, les rad.
00:37 Il y a une nette diminution du nombre de cafés en France depuis les années 60.
00:41 On est passé de 200 000 à à peine 36 000 aujourd'hui.
00:44 Ça a vraiment, je dirais, une vertu d'archivage avant que ça disparaisse.
00:49 Là on est à l'Elex, un petit village de l'Ain.
00:53 À la Chapelle, c'est un bar qui est, ou plutôt qui était, tenu par Liliane et Marcel, à
00:58 99 et 102 ans.
01:00 Ils viennent de fermer malheureusement avec le Covid.
01:03 Pour la petite anecdote, ils ont un fils qui s'appelle Jean-Pierre et quand on leur a
01:06 demandé pourquoi Jean-Pierre ne pouvait reprendre le café, ils ont simplement répondu avec
01:11 un grand sourire que Jean-Pierre était déjà à la retraite.
01:14 Sa méthode, c'est d'entrer incognito pour ne pas intimider.
01:17 J'arrivais en tant que personne qui commande au comptoir un petit café de menthe à l'eau,
01:22 voire un demi.
01:23 Je papote, j'écoute et ensuite à un moment donné, je me présente un peu plus comme
01:27 photographe.
01:28 Pour eux, c'est du banal en fait ce que moi, mon appareil photo cherche à capturer.
01:32 Puis les clients deviennent des sujets et se prennent au jeu.
01:35 Cette entrée en douceur dans leur quotidien, ils l'appliquent aussi en ville.
01:38 Donc là on est chez Roky, un café de Paris.
01:41 Et Roky, il a un perroquet qui s'appelle Coco.
01:44 Coco.
01:45 Et Coco, en fait, il a grandi vraiment dans le bar.
01:47 Donc ça fait une quinzaine d'années qu'il est dans sa cage au-dessus du comptoir.
01:51 Pour la petite histoire, c'est un bar communauté portugaise.
01:55 Coco, il a appris à parler portugais et à insulter dans cette langue au fur et à mesure.
01:59 Et il a même appris à danser sur du scorpion.
02:02 Là on voit une photo du Zorba, qui est un bar emblématique de Belleville.
02:09 C'est un bar hyper intéressant parce que tout au long de la journée, il y a différentes
02:12 communautés qui gravitent.
02:14 Il y a à la fois les turfistes, ceux qui jouent au tiercé en journée, remplacés
02:18 progressivement par ceux qui viennent boire des coups après le travail vers 18h.
02:21 Et il y a encore une autre population qui vient, celle-ci, c'est les oiseaux de nuit
02:25 en fait, parce que le bar, il ouvre à 5h du matin.
02:27 Ça en devient un bar d'after.
02:29 Le photographe a documenté un moment marquant de l'histoire récente de ces lieux.
02:33 C'est vraiment les retrouvailles.
02:34 On est le 19 mai 2021, c'est le jour de la réouverture des terrasses.
02:38 Il y a une vraie attente avec le confinement.
02:40 Et je pense qu'on s'est vraiment rendu compte de l'importance de nos cafés.
02:43 Guillaume Blau, qui a commencé comme journaliste, constate paradoxalement que les sujets de
02:47 ses portraits se sentent moins mis à nu devant un appareil qu'en présence d'un stylo
02:50 et d'un carnet de notes qui sont des voies d'entrée dans l'intimité.
02:53 Alors, il essaie de retranscrire cette proximité avec un style immersif.
02:58 Je l'utilise beaucoup justement en forme de décadrage, comme si on était vraiment
03:03 dans l'image.
03:04 J'aime beaucoup aussi utiliser le flash, un flash assez brut, assez lumineux, pour
03:07 faire ressortir davantage, je dirais, les couleurs, les matières.
03:11 Mes inspirations, côté photo, j'aime beaucoup le travail de Lars Thunbjork, un photographe
03:17 de l'agence VU qui aimait s'immerger dans des univers assez populaires.
03:21 Il a notamment fait une superbe série sur les bureaux.
03:24 J'aime aussi beaucoup le travail côté réalisation, documentaire, d'Alain Cavalier,
03:28 qui faisait de superbes portraits, qui racontait un petit peu la vie de personnes dans leur
03:33 intimité en images.
03:34 En bon supporter du FC Nantes, il a aussi documenté l'univers des buvettes de stade,
03:38 leurs odeurs de frites, leur ronronnement des groupes électrogènes et leurs discussions
03:42 d'avant-match.
03:43 Avant de s'arrêter dans les relais routiers, ces restaurants de passage dont le nombre
03:46 fond, de 4500 dans les années 70 à 800 aujourd'hui.
03:50 Loin de poser un regard distancié ou ironique sur ces lieux un peu déclassés, il veut
03:55 transmettre un aperçu du vécu des protagonistes retranscrit dans les légendes.
03:59 Une manière de documenter ces bouts de paysage, ces parcelles de villes et les gens qui les
04:03 peuplent.
04:04 [Musique]

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