• l’année dernière
Un déjeuner partagé avec Hervé Berville, Secrétaire d'État chargé de la Mer, pour parler de la raréfaction du bulot en Seine-Maritime et du désarroi de ces pêcheurs français piégés par le Brexit. Ils ne peuvent plus pêcher dans les eaux britanniques alors que faire de leurs bateaux ?

Loin des codes classiques de l´interview, LCP a concocté un nouveau programme aux petits oignons pour croquer la politique autrement.
Avec la complicité de Jean-Pierre Montanay, Brigitte Boucher mettra son grain de sel dans cette cuisine pour passer le politique sur le gril.
« Cuisine et Confidences »... Quel rapport l´invité politique entretient-il avec la
gastronomie ? Sa gourmandise, ses talents ? Les orientations culinaires de ce boulimique de la politique ? Mais aussi « Les pieds dans le plat »... pour aborder les sujets d´actualité.
Et enfin « La face cachée de nos assiettes »... ou comment le contenu de nos assiettes en dit long sur notre société face à ses nouveaux enjeux.

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Transcription
00:00 ...
00:16 -Bonjour à tous.
00:17 C'est l'heure de "Politique à table" sur LCP.
00:19 On se retrouve avec un invité autour d'un plat et d'un dessert.
00:23 Aujourd'hui, nous recevons Hervé Berville. Bonjour.
00:26 -Bonjour et merci de l'invitation. -Merci d'avoir accepté.
00:29 -Avec moi pour présenter cette émission, Jean-Pierre Montaner.
00:32 Bonjour. -Bonjour, Brigitte.
00:34 Hervé Berville. -Bonjour.
00:36 -Vous êtes secrétaire d'Etat à la maire depuis juillet 2022,
00:40 député des Côtes-d'Armor.
00:41 Vous avez été élu en 2017 et réélu en 2022.
00:44 Vous vous engagez dès 2015 auprès d'Emmanuel Macron.
00:48 Vous êtes le référent de la Macronie
00:50 dans votre département et chargé de défendre dans votre région
00:53 le programme ECO, vous qui êtes diplômé d'une maîtrise
00:57 en sciences économiques à la prestigieuse
00:59 London School of Economics.
01:01 Vous êtes originaire du Rwanda.
01:02 A 4 ans, vous êtes adopté par une famille de plus d'une eau.
01:06 C'est à 30 km de Saint-Malo, dans les Côtes-d'Armor,
01:09 la Bretagne, la mer qui a inspiré le déjeuner du jour.
01:12 -Oui, Brigitte, un menu breton avec du poisson, du rouget,
01:15 grillé, aux petits légumes et en dessert,
01:17 des crêpes à la confiture de cerise.
01:20 -Dans le dessous des plats, les bulots ont chaud.
01:24 Résultats qui se font plus rares et plus chers.
01:27 On vous embarque à la pêche en Seine-Maritime.
01:29 -Dans les pieds d'un plat, le désarroi de ces pêcheurs bretons,
01:33 français piégés par le Brexit.
01:35 Ils ne peuvent plus pêcher dans les eaux britanniques.
01:38 Que faire de leur bateau ? Reportage à suivre.
01:40 -Allez, on passe à table. Tout de suite, cuisine et confidence.
01:44 ...
01:51 -Hervé Berville, au moment où votre pays d'origine
01:54 est un pays de tourisme, vous auriez pu nous faire découvrir
01:57 les spécialités du Rwanda. Rien que pour le plaisir,
02:00 j'en cite une qui nous a fait saliver avec Brigitte,
02:03 l'Iji safulia. C'est un ragoût de poulet,
02:05 plein de saveurs, avec des bananes plantains,
02:08 des feuilles de manioc, mais ce n'est pas avec la promotion
02:11 d'une recette sans produits de la mer que vous pouvez
02:14 scanner votre déclaration d'amour. "Je veux rendre à la Bretagne
02:18 "ce qu'elle m'a donné." Elle vous a donné la mer,
02:21 ses richesses, ses produits. Vous, qui incarnez
02:24 le poisson de Renaud, c'est pas l'homme qui prend la mer,
02:27 c'est la mer qui prend l'homme. Vous, la mer, elle vous a donc pris,
02:30 je me souviens, un lundi de juillet 2022,
02:33 quand vous avez été nommé ministre de la Mer.
02:35 Donc, le poisson, et en l'occurrence ce rouget,
02:38 c'est votre totem culinaire, un peu votre label breton et marin,
02:42 mais là où je ne vous comprends plus, monsieur le ministre,
02:45 c'est quand vous précisez un rouget de Méditerranée.
02:48 Alors là, la Bretagne risque de mal prendre cette trahison.
02:52 -C'est pour monter mon caractère inclusif
02:55 et qu'on est ministre de la Mer et de toutes les façades maritimes.
02:59 Non, parce que je me suis dit, l'occasion fait le larron,
03:02 et vu que j'ai l'opportunité de me faire offrir un déjeuner
03:05 et que je connais moins les produits de la pêche
03:08 issus de la Méditerranée, j'ai souhaité mettre à l'honneur
03:12 les produits de la pêche de la Méditerranée,
03:14 parce qu'on a la chance d'avoir en France
03:17 des façades littorales splendides, d'abord,
03:20 qui ont des pêches très différentes.
03:22 Notamment les méditerranéens.
03:23 J'étais la semaine dernière dans le Var,
03:26 dans les Alpes-Maritimes, et à Marseille la semaine avant.
03:29 Ils sont très attachés à ces spécificités méditerranéennes.
03:32 Je serai la semaine prochaine en Corse.
03:35 Et puis les bretons, c'est des poissons que je connais mieux.
03:38 -On trouve du rouget en Bretagne.
03:40 -Il y en a en Méditerranée et en Atlantique.
03:43 Je marche sur les deux jambes. -Un peu surpris avec Jean-Pierre.
03:46 -C'est pour vous montrer qu'on peut avoir
03:49 des produits sur nos façades littorales.
03:51 On a une chance incroyable,
03:52 parce qu'il y a peu de pays en Europe,
03:55 peu de pays dans le monde, qui ont cette diversité
03:58 des produits de la mer.
03:59 Je pense également à la conchiliculture,
04:02 à l'aquaculture, à l'austréiculture.
04:05 Bref, on a une qualité, un savoir-faire,
04:08 je crois qu'il faut en retenir,
04:10 qu'il faut reconnaître, valoriser.
04:12 -Vous vous êtes sauté derrière des pales à mer.
04:15 -Vous savez que j'étais breton,
04:17 j'ai pris un poisson méditerranéen.
04:19 -Est-ce que vous avez été élevé au poisson,
04:21 à toutes ces coquillages qu'on trouve près de chez vous ?
04:26 -Non, j'ai appris à les connaître.
04:28 D'abord, je suis né dans un pays, vous l'avez dit...
04:31 -Couplé au continental. -Exactement.
04:33 Il n'y a pas d'accès à la mer.
04:35 Tout peut arriver et on peut aimer la mer
04:39 au fil des années.
04:41 Et...
04:42 Moi, j'ai grandi à Pluzuno,
04:44 c'est une commune rurale.
04:46 Mon grand-père était agriculteur,
04:48 la moitié de ma famille est dans l'agriculture.
04:50 Dans les côtes d'Armor,
04:52 comme un peu partout en Bretagne,
04:54 c'est entre terre et mer, c'est l'Armor, l'Argoat.
04:57 Il y a aussi, ce qui m'intéresse aussi dans cette mission,
05:00 c'est de faire découvrir la mer à des gens
05:02 qui n'y habitaient pas trop loin.
05:04 Par exemple, mon grand-père,
05:06 lui, il a grandi toute sa vie à 10 km de la mer,
05:10 mais jamais ça lui aurait venu à l'esprit
05:12 d'aller l'été sur la plage.
05:15 C'était quelque chose pour lui,
05:17 les vacances étaient plutôt dans la vallée.
05:19 -A la campagne. -Oui.
05:21 On voit bien que ce n'est pas parce que vous habitez
05:24 à côté de la mer que vous y allez régulièrement.
05:27 Il y a une vraie nécessité d'avoir une politique publique.
05:30 -Vous, vous alliez à la mer quand vous étiez petit ?
05:33 -Oui, je fais partie de cette génération
05:35 qui, contrairement à nos grands-parents,
05:38 y passait beaucoup plus. J'ai fait des classes de mer,
05:41 j'étais animateur de centre aéré,
05:43 donc on allait quasiment tous les deux jours à la mer.
05:47 Et puis, surtout, moi, la mer, ça a été,
05:50 comme beaucoup, d'ailleurs, un vrai espace
05:52 d'abord de rêve, de liberté, d'imaginaire,
05:55 parce que quand vous voyez cette grande étendue,
05:58 vous vous demandez... -Vous faisiez du bateau ?
06:00 -C'était pas ma grande spécialité. -Vous n'avez pas trop le pied marin.
06:04 -Oui, mais c'était pas là où j'excellais.
06:07 Moi, j'étais plutôt basket, football,
06:10 mais c'est vrai que prendre la mer
06:14 et puis voir aussi tous ces exploits...
06:16 Je me rappelle très bien ma première année,
06:18 je suis arrivé en France en 1994. -Vous avez traversé ?
06:21 -L'une des premières grandes...
06:24 Grandes expériences, ou en tout cas événements
06:26 que mes parents m'ont amené, c'était la route du Rhum.
06:29 Il y avait ces milliers, ces millions de gens.
06:32 Moi, j'étais au Cap Fréhel,
06:33 parce qu'au Cap Fréhel, dans ma circonscription,
06:36 vous voyez le départ de la route du Rhum,
06:39 un manège splendide. -Magique.
06:41 -Je me suis rendu compte que les Bretons étaient très attachés
06:44 à ce littoral, à cette mer,
06:46 et puis rien de mieux que faire un foot sur la plage
06:49 l'été avec les copains.
06:51 -Je reviendrai au rouget, vous êtes inclusif,
06:53 mais le rouget, vous allez me dire, vous êtes l'expert,
06:57 j'ai aussi pensé que vous le prendriez dans l'Atlantique,
07:00 car de ce que je comprends, il est moins victime de la surpêche
07:03 qu'en Méditerranée. Les chiffres de l'Ifremer
07:06 de la dernière fournée sont compliqués à lire.
07:08 Est-ce que le rouget est un poisson durable ?
07:11 -Oui, le rouget est un poisson durable,
07:13 mais il faut toujours travailler
07:16 pour augmenter la durabilité
07:18 de tous nos différents stocks de pêche.
07:20 -L'intérêt d'avoir des quotas. -Exactement.
07:23 Chaque année, à l'Union européenne,
07:25 la pêche, c'est une politique communautaire,
07:28 c'est une politique de l'Union européenne,
07:30 les pays se mettent d'accord sur des quotas de pêche
07:33 en fonction des façades maritimes, ce qui limite la surpêche,
07:37 surtout ce qui est fait dans l'intérêt des pêcheurs
07:40 et que les pêcheurs portent comme politique.
07:42 Il faut qu'on arrive à gérer le stock
07:44 pour avoir encore, bien évidemment,
07:47 des poissons dans les années à venir
07:49 et pour les futures générations.
07:51 Un très bel exemple, qui est au-delà
07:54 des quotas de pêche à l'Union européenne,
07:58 mais c'est ce qui se passe, par exemple,
08:00 sur les coquilles, la coquille Saint-Jacques,
08:03 au large de ma magnifique circonscription en Bretagne,
08:07 ou encore en Normandie,
08:08 en l'espace de 15 ans, les pêcheurs ont triplé la ressource
08:12 parce qu'on leur a fait confiance,
08:14 parce qu'ils sont basés sur les données,
08:16 sur la science, parce qu'ils ont préservé l'habitat marin.
08:20 -Il y a des espèces de se renouveler.
08:22 -On a un produit de grande qualité,
08:24 reconnu dans le monde entier, bien géré.
08:27 -On va goûter ce rouget.
08:28 Pendant ce temps, vous, vous ne goûtez pas.
08:31 Vous êtes privé de rouget.
08:33 Trois choses à savoir sur le rouget.
08:35 -Merci, Brigitte.
08:36 -Vite, l'appellation "rouget" ne doit être utilisée
08:39 que pour désigner le rouget barbé.
08:41 Mais ça, monsieur le ministre,
08:43 identifiable grâce à ces longs barbillons
08:45 qui sont à près de sa bouche,
08:47 et puis ses couleurs vives,
08:49 et pas pour le grondin rouge ni pour le rouget du Sénégal.
08:52 Attention, le rouget, c'est un mot particulier
08:55 qui a tendance à être galvaudé.
08:57 Dans ces deux cas, il y a tromperie.
08:59 Le rouget barbé est présent dans l'océan Atlantique,
09:02 est de la Norvège, jusqu'au Sénégal,
09:04 et les îles Canaries, y compris en Méditerranée,
09:07 et même, je l'ai découvert, en mer Noire.
09:09 Deux, pour la cuisson, le four est souvent l'option numéro un.
09:13 Attention, le rouget a une chair très délicate,
09:16 donc pas plus de 15 minutes à 180 degrés.
09:18 Autre option, la papillote, dans du papier aluminium ou cuisson,
09:22 ajoutez des épices, des aromates,
09:24 enfournée 10 grosses minutes à 170 degrés.
09:26 Et puis, le rouget à la poêle,
09:28 c'est comme ça que notre restaurateur l'a préparé,
09:31 avec un peu d'huile d'olive.
09:33 On le met sur la peau, on le fait cuire,
09:35 5 minutes. -Pas trop longtemps.
09:37 -Il faut que la cuisson soit appropriée.
09:39 Comment l'accompagner ? Le rouget est facile,
09:42 il se marie très vite avec du riz, des légumes au pistou,
09:45 des courgettes, des pommes de terre,
09:48 des tomates à la provençale, avec du persil et de l'ail,
09:51 le citron, confit ou pas, toujours bienvenu avec le rouget.
09:54 -Hervé Berville, ce rouget, il est bon ou pas ?
09:57 -Splendide. -Splendide.
09:59 Il est à votre goût.
10:00 -De belles couleurs estivales dans l'assiette.
10:03 -Il est parfaitement cuit.
10:04 J'ai appris beaucoup de choses, parce que, je dois l'admettre,
10:08 je ne sais pas comment parfaitement cuire le rouget.
10:11 -Vous allez le faire dès que vous rentrez.
10:14 Vous aimez cuisiner ?
10:16 -J'aime bien cuisiner, j'ai beaucoup moins le temps.
10:19 -Hm-hm.
10:20 -Je suis plutôt dessert.
10:24 -Ah ! Plutôt sucré.
10:25 -Pour tout ce qui est exactement la cuisine.
10:28 J'ai la chance d'avoir un frère qui est chef cuisinier,
10:31 qui m'a du coup dispensé de travailler la matière
10:34 aux Côtes-Années. -Vous lui faites confiance.
10:37 -J'ai quatre frères et sœurs qui sont d'excellents aussi
10:40 cuisiniers et cuisinières, en tout cas qui adorent ça.
10:43 Je suis un peu... -Qu'est-ce que vous savez faire ?
10:46 -Mauvais élève de la famille en la matière.
10:49 -Vous avez sûrement des spécialités.
10:51 Si on vient dîner chez vous, qu'est-ce que vous nous préparez ?
10:54 -Je pense en entrer un petit taboulet.
10:57 J'aime beaucoup ça.
10:58 -Le taboulet avec un peu de semoule,
11:00 pas le vrai taboulet libanais avec de l'herbe.
11:03 -Je vais préciser.
11:04 Taboulet avec semoule, un peu de menthe,
11:08 tout ce que vous connaissez bien.
11:10 Ensuite, qu'est-ce que je pourrais vous faire ?
11:13 Ca peut être du lieu,
11:16 ou alors si c'est une viande,
11:18 ça peut être de la Côte de Port.
11:21 Ca vient des Côtes d'Armor aussi, chez moi.
11:23 J'aime beaucoup les pommes de terre.
11:25 C'est très simple, c'est toujours bon.
11:28 Et puis en dessert, on en mangera plus tard,
11:30 c'est des crêpes, mais j'adore le clafoutis.
11:33 Clafoutis ou tartes à la rhubarbe.
11:35 -C'est en parlant.
11:36 -C'est très simple à faire.
11:38 -C'est votre spécialité.
11:39 -J'ai aussi un faible pour les tartes au figue.
11:42 -Aucune recette d'Afrique ?
11:44 J'ai fait allusion tout à l'heure.
11:46 En cherchant, il y a une vraie tradition gastronomique au Rwanda.
11:50 -Vous connaissez bien cette culture-là ?
11:52 -Cette spécialité culinaire ?
11:54 -Je suis arrivé, quand j'avais 4 ans,
11:57 on se rappelle de peu de choses,
11:58 et c'était un contexte très lourd,
12:00 puisque c'était au moment du génocide des Tutsis.
12:04 Et donc, je me suis pas plongé
12:07 dans l'histoire culinaire du Rwanda,
12:10 mais quand j'y suis retourné,
12:12 j'ai eu l'occasion de goûter un certain nombre de plats.
12:15 Je dois dire,
12:16 c'est pas faire offense à la cuisine rwandaise,
12:19 que je préfère la cuisine française et la cuisine bretonne.
12:22 -Vous la comparez à la meilleure du monde.
12:25 -Je connais la mieux.
12:26 Mais en tout cas,
12:27 vous voyez, dans beaucoup de restaurants,
12:30 il y a cette... beaucoup de fusions,
12:33 ça date d'un certain nombre d'années,
12:35 mais entre la cuisine dite "africaine",
12:39 parce que l'Afrique, c'est... -Très vaste.
12:41 -Beaucoup de pays, donc on peut pas caractériser la cuisine africaine,
12:45 et la cuisine méditerranéenne ou européenne,
12:48 même si en Afrique, vous avez le Maghreb,
12:50 qui est méditerranéen.
12:52 Et puis, il y a aussi, vous avez peut-être déjà vu ça,
12:55 de la fusion entre la cuisine japonaise
12:58 et puis la cuisine qui vient du Sénégal.
13:00 Il y a des restaurants à Paris, je me rappelle plus le nom,
13:03 j'ai testé, c'est délicieux.
13:05 J'aime bien aussi ces mélanges.
13:07 C'est une manière d'appréhender une cuisine, une tradition.
13:11 -Vous fusionnez la Bretagne et l'Afrique,
13:14 dans votre assiette ? -Non, très peu.
13:16 Très, très peu.
13:18 Je fusionne plus l'aspect méditerranéen
13:21 avec la Bretagne.
13:24 Alors après... -On reste en France.
13:26 -J'ai vécu...
13:28 Quand j'ai vécu au Mozambique,
13:30 pendant deux ans, qui est un pays splendide,
13:33 ils faisaient ce qu'ils appellent des "kamaranesh",
13:36 c'est des crevettes délicieuses.
13:38 Bon, ça, j'ai essayé de l'importer,
13:40 mais c'est jamais aussi bien fait que là où on l'a découvert.
13:43 -On trouve des bonnes crevettes chez vous.
13:46 -Oui, mais c'est la manière de le faire.
13:48 -La préparation. -C'est la préparation.
13:50 Donc non, mais c'est quelque chose,
13:53 peut-être que quand j'aurai plus de temps libre,
13:55 je m'essaierai à expérimenter la fusion
13:58 entre le Rwanda et la France.
14:00 Après, moi, j'ai forcément
14:03 un attachement à ce pays.
14:06 J'ai eu la chance que le président de la République
14:09 me nomme envoyé spécial pendant les 25e commémorations
14:12 du "Génocide" de Toulouse.
14:14 C'était un moment, forcément, qui était très fort.
14:17 Mais moi, je suis assez... comment dire ?
14:20 Très intéressé par la manière dont un pays
14:22 se sort d'un drame aussi terrible.
14:25 Imaginez les millions de personnes
14:27 qui ont été massacrées en l'espace d'un mois.
14:29 -Un million, pour ceux qui ne connaissent pas bien
14:32 cette histoire. -Un million en un mois.
14:35 -Un million en un mois à la machette.
14:37 Donc l'horreur au-delà du nombre
14:39 et qui arrive en moins de deux décennies
14:41 à se relever, à être un exemple
14:43 pour beaucoup de pays africains sur le développement.
14:46 Il y a, comme dans beaucoup de pays,
14:49 des problèmes qui persistent.
14:50 Et puis, c'est cette réconciliation.
14:53 C'est fascinant de voir que, par exemple,
14:55 avec ce qu'on appelle les tribunaux gatchatchas,
14:58 ceux qui avaient perpétré le génocide,
15:00 vu qu'il n'y avait pas assez de place dans les prisons,
15:03 se sont inspirés des tribunaux traditionnels
15:06 et faisaient des travaux que plus d'aller en prison.
15:09 Donc la manière dont, en effet, la concorde,
15:11 la paix civile a été retrouvée,
15:13 même si personne n'oublie,
15:15 on a reconstruit, pas à pas,
15:17 fil après fil, le tissu social de ce pays.
15:21 Je trouve ça remarquable.
15:23 Je dois avouer que ça m'intéresse
15:25 beaucoup plus que la nourriture,
15:27 mais je m'y intéresserais.
15:29 Je reviendrai peut-être ici
15:30 en vous proposant cette fusion-là.
15:33 -Si on revient à l'alimentation,
15:34 à la nourriture qui nous occupe,
15:36 est-ce que vous aimez faire le marché,
15:39 choisir vos fruits, vos légumes ?
15:41 Vous disiez que votre grand-père était agriculteur.
15:44 Qu'est-ce qu'il cultivait ?
15:45 Vous avez un peu cet attachement à la terre ou pas ?
15:49 -Ah oui, je veux dire que là où j'habite,
15:51 où mes parents habitent à Plulino,
15:53 je suis entouré de champs.
15:55 Donc c'est pas un attachement, ça va au-delà de ça.
15:59 C'est constitutif de...
16:01 mes souvenirs et de ce que je suis.
16:04 Mon grand-père, c'était pas un jardin,
16:06 c'était un champ, quasiment.
16:08 Il avait été agriculteur, donc quand il s'est mis à la retraite,
16:11 il a gardé une grande parcelle de terre
16:14 et il cultivait tout.
16:16 Des courgettes, des melons,
16:20 il avait au fond de son jardin des cerises,
16:24 des petits pois, des carottes.
16:26 On devait queuter l'été, je me rappelle,
16:29 les haricots.
16:30 En plus, vu qu'il avait quatre enfants,
16:33 en général, il faisait une production
16:36 comme s'il avait encore ses quatre filles à la maison.
16:39 Du coup, on avait la chance...
16:41 Sauf que ça demande du travail, le jardinage,
16:45 parce que quand vous avez des pommes de terre,
16:48 il faut s'en occuper, après, il faut les dégermer.
16:51 Ca se passe en hiver, pour éviter que les grandes poussent.
16:54 Quand vous avez 500 grammes de patates, ça va.
16:57 Quand vous avez 20-25 kilos de pommes de terre,
17:00 dans le froid en novembre,
17:02 c'est pas la même histoire.
17:04 Moi, les meilleurs moments que j'ai passés avec mon grand-père,
17:08 c'était quand on allait l'aider très modestement
17:11 et pas de la manière la plus efficace,
17:13 dans le jardin, car ça permettait de passer du temps
17:16 avec lui et ma grand-mère.
17:18 Et puis, moi, j'ai jamais vécu autre chose
17:21 que d'avoir des produits, dans ma famille,
17:24 des produits du jardin.
17:26 -Vous étiez autosuffisant, chez vous ?
17:28 -Non, mais on achetait des choses qu'on n'avait pas forcément,
17:32 mais voilà, que ce soit aussi
17:34 les potimarrons, les potirons,
17:38 pour faire des soupes l'hiver.
17:40 -Le gros de la cuisine familiale était fourni par les jardins.
17:44 -On congelait, l'été, carottes,
17:47 même on congelait des cerises.
17:49 On devait équeuter les cerises, on les mettait dans des sacs
17:52 et comme ça, clafoutis aux cerises l'hiver.
17:55 Vous avez un petit coup de mou l'hiver,
17:57 vous faites la préparation,
17:59 vous prenez, décongélez les sacs de cerises,
18:02 alors ça perd un peu de sa saveur, bien évidemment,
18:05 mais c'est des produits du jardin,
18:07 et pareil, pour tout ce qui est courgettes,
18:11 alors melons, non, vous ne congelez pas les melons.
18:14 -C'est ce qu'on ne veut pas. -Non, pas du tout.
18:16 -Vous êtes très attaché à l'agriculture conventionnelle
18:20 ou vous dites, aujourd'hui, il faut manger du bio,
18:22 il faut cultiver naturellement, sans pesticides ?
18:26 -Je dis que l'agriculture telle qu'elle a été développée
18:32 nous a permis la souveraineté alimentaire
18:34 et les agriculteurs ont eu à s'adapter
18:36 à ce qu'on leur a demandé.
18:38 Il fallait nourrir la population,
18:40 il fallait nourrir, ce qui me concerne,
18:42 ce que je connais le mieux, la Bretagne,
18:45 et au fil des années, c'est eux-mêmes
18:47 qui ont proposé des déadaptations.
18:49 On ne pratique plus l'agriculture aujourd'hui
18:52 comme il y a 40, 50 ans.
18:53 Donc, moi, il faut de tout.
18:55 C'est comme dans une forêt, un écosystème a besoin de tout.
18:58 Il y a besoin d'agriculture conventionnelle
19:01 parce qu'on a besoin d'avoir des volumes
19:03 pour fournir les cantines scolaires,
19:06 pour fournir les hôpitaux.
19:07 On a besoin...
19:08 -Les cantines scolaires se mettent toutes au bio.
19:11 -Oui, mais pas toutes. -20 % bio, pour la journée.
19:14 -Elles essayent toutes.
19:15 On en est loin des objectifs.
19:17 Elles tentent vers le bio, pas le conventionnel.
19:20 -Bien évidemment, mais si c'est du bio qui est importé d'Espagne,
19:24 ça n'a aucun sens.
19:25 Ce qui est important, c'est où ça se situe,
19:28 que ce soit du circuit court, du local.
19:30 C'est important.
19:31 Il ne faut pas tomber dans les caricatures.
19:34 Les agriculteurs, au-delà de participer aussi
19:37 à la gestion de l'environnement,
19:39 font un travail qui est remarquable.
19:41 Ils s'étendent très tôt le matin, terminent très tard le soir.
19:44 Il y a toujours des adaptations.
19:46 C'est comme pour les pêcheurs,
19:48 pour le métier de journaliste,
19:50 pour le métier de politique.
19:52 Vous ne le faites pas de la même manière qu'il y a 50 ans.
19:55 Il faut reconnaître leur travail
19:57 et ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain.
20:00 Parce que, et c'est une nécessité,
20:02 il faut renforcer la protection de l'environnement,
20:05 la biodiversité, dans tous les domaines,
20:07 l'industrie, l'agriculture,
20:09 l'activité économique, le commerce,
20:11 tous les secteurs sont engagés dedans.
20:14 J'ai un infini respect pour les agriculteurs,
20:16 je les ai vus travailler au quotidien,
20:19 mon grand-père l'était.
20:20 -Il faut que l'Etat accompagne les agriculteurs
20:23 pour les aider dans cette transition.
20:25 -C'est ce que nous faisons.
20:27 L'année dernière, dans les Côtes d'Armor,
20:30 on a signé, et c'était Julien Normandie
20:32 qui était ministre de l'Agriculture,
20:34 avec un plan à hauteur de 215 millions d'euros,
20:37 des producteurs de porc,
20:39 parce qu'ils vivaient une crise liée à l'augmentation de l'énergie,
20:43 pour faire en sorte qu'on ait encore cette souveraineté alimentaire.
20:47 On importe des produits qui n'ont pas les mêmes standards que nous.
20:51 Il faut le redire aussi,
20:52 nous avons la pêche la plus contrôlée,
20:55 la plus exigeante du monde.
20:56 Dans le cadre européen, on a souvent été taxés de surtransposer,
21:00 c'est-à-dire qu'au Parlement, on a des règles encore plus dures
21:04 que ce qu'il y a en Europe.
21:05 Je le constate tous les jours.
21:07 Quand je me déplace, je vois bien que dans d'autres pays,
21:10 c'est pas pareil.
21:12 -Beaucoup disent que ça suffit pas,
21:14 dans l'agriculture, la pêche.
21:16 -Il faut regarder la dynamique, l'évolution,
21:18 et regarder quelle est la cause, par exemple,
21:21 de l'effondrement des stocks de pêche dans le monde.
21:24 C'est pas la pêche française,
21:26 c'est la surpêche qui vient des navires usines
21:29 de pays asiatiques.
21:31 Ce qui menace la biodiversité marine,
21:34 ce n'est pas la pêche artisanale côtière française,
21:38 c'est les risques, par exemple,
21:40 d'exploitation minière des fonds marins.
21:43 -Vous avez fait une ligne avec Jen Fonda.
21:45 -Exactement.
21:46 -Pour interdire cette exploitation.
21:49 -On avait rencontré, et j'avais eu l'occasion de voir,
21:52 à New York, lors de la négociation du sommet
21:56 sur le traité des Nations unies pour les océans,
21:59 pour la protection de la haute mer.
22:01 On avait fait une conférence de presse commune
22:04 et on s'était dit qu'un jour, on souhaiterait faire
22:07 une tribune sur un autre sujet que la protection de la haute mer.
22:11 La haute mer, c'est 60 % des océans.
22:13 La haute mer, c'est 45 % de la surface de notre planète.
22:17 Si on veut protéger les océans, la biodiversité marine,
22:20 l'environnement, parce que les océans sont importants,
22:23 on doit protéger la haute mer.
22:25 Après 15 ans de négociations,
22:27 c'était dans les abysses des discussions onusiennes,
22:30 le président de la République a relancé cet accord,
22:33 ce traité onusien, en 2022.
22:35 Il m'a demandé d'en faire une priorité.
22:37 Je me suis rendu trois fois à New York
22:41 et, grâce à l'Union européenne,
22:43 grâce à l'engagement de la France et du président,
22:46 nous avons, il y a une semaine, adopté cet accord
22:49 qui est majeur pour la protection.
22:51 -Il faudra ratifier avant 2025. -Il faut voir le passé.
22:54 45 % de la surface de la planète est protégée.
22:57 Je m'éloigne.
22:58 -On revient au sujet.
22:59 Avec ce rouge que vous nous avez demandé,
23:02 c'est un vin de Bourgogne, en appellation Haute Côte de Nuit.
23:05 On est au nord de la Bourgogne, à l'ouest de l'appellation Côte de Nuit,
23:09 près de Vaudromaney ou de Nuit-Saint-Georges.
23:12 On a un millésime 2021.
23:13 Le cépage, c'est du pinot noir.
23:16 La particularité, c'était une robe un peu violacée,
23:19 pour vous, Jean-Pierre, assez intense.
23:21 Il a un nez un peu fruité.
23:24 Je sais pas si...
23:26 Et c'est bu d'autres arômes de fruits rouges,
23:29 un peu cassis, un peu mûrs, et des notes de réglisse.
23:32 Vous aimez particulièrement le vin de Bourgogne ?
23:35 -Oui. -Ca a été un choix...
23:37 -Vous savez, les goûts et les couleurs,
23:39 ça ne se commande pas, ça ne se choisit pas.
23:42 Il y a une connexion entre mon palais
23:45 et le vin de Bourgogne.
23:46 Je peux pas l'expliquer,
23:48 c'est juste que c'est le vin que je trouve savoureux.
23:51 -C'est un accord qui va bien avec le rouget,
23:54 même si c'est étonnant...
23:55 -Je vais vous poser la question.
23:57 Vous conseillez du rouge ? On dit plutôt du blanc.
24:00 -J'ai fait exprès.
24:02 -C'est une bonne idée,
24:03 parce que le rouget est un poisson fort.
24:06 Ca se marie assez bien.
24:07 C'est un choix original et c'est un bon choix.
24:10 -Pour revenir sur ce que vous disiez,
24:12 quand vous viendrez manger chez moi,
24:15 vous allez voir que je fais souvent ça,
24:17 du poisson avec du vin rouge. Ca se marie très bien.
24:20 -On fait exprès avec ce goût. -Il y a beaucoup de gens qui le font.
24:24 -On va voir si vous êtes incollable.
24:26 A présent, c'est le quiz.
24:28 -Hum.
24:29 ...
24:32 Alors, vous, le Breton, vous le savez sans doute,
24:34 d'adoption, certes, la sardine a longtemps été
24:37 l'un des poissons rois de la Bretagne.
24:39 C'est ici, en Bretagne, dans votre territoire,
24:42 qu'est née la boîte de sardines à l'huile
24:45 de vin, cette boîte de sardines.
24:47 Sauriez-vous nous dire si ces affirmations
24:49 sont vraies ou fausses ?
24:51 Avant d'être rangées dans les boîtes,
24:53 vous pouvez lire là, avant d'être rangées dans les boîtes,
24:56 les sardines sont salées.
24:58 -Faux.
25:01 -Effectivement, elles sont ébouillantées.
25:04 Ensuite, elles sont rangées les unes à côté des autres
25:07 avec de l'huile d'olive.
25:08 Les boîtes de sardines en fer blanc,
25:10 c'est une invention, ont été inventées par les Britanniques.
25:14 -Faux. -Hum...
25:15 Ca, je pense que c'est...
25:18 Je pense que c'est vrai. -Oui, c'est vrai.
25:22 Ils ont apporté un peu de leur savoir-faire
25:25 dans cette confection des sardines en boîte,
25:27 car les sardines étaient bretonnes, mais les boîtes étaient britanniques.
25:32 Au XIXe siècle, la sardine en boîte made in France
25:34 s'impose dans le monde entier comme un aliment de grande consommation
25:38 et bon marché. -C'est vrai.
25:40 -Non, c'est faux. C'est faux.
25:42 Manger des sardines à l'époque était un luxe
25:44 et un signe de distinction, comme boire du Bordeaux,
25:47 donc la sardine à l'huile, dans sa petite boîte,
25:50 à ce siècle-là, c'était un produit de luxe.
25:53 Enfin, pour concurrencer les Français,
25:55 qui monopolisaient le marché de la sardine en boîte,
25:58 une société allemande a commercialisé des sardines
26:01 sous le nom de "soupiquets" pour faire du mal
26:03 à l'un des leaders du marché français,
26:06 "sopiquets". C'est vrai ou c'est faux ?
26:08 "Soupiquets" contre "sopiquets". -Ca me paraît
26:11 comme une petite blague. Je dirais que c'est faux.
26:13 -C'est vrai. -C'est vrai.
26:15 -C'est pas très malin, ces Allemands.
26:17 -Vous allez pouvoir vous rattraper avec ce second quiz.
26:20 On va voir si le Breton... -50 %.
26:22 -50 %, c'est pas mal. -C'était sur la première question
26:25 qui était la plus importante.
26:27 -On va voir si le Breton que vous êtes
26:29 est incollable sur le bulot.
26:31 Le bulot, on va en reparler un peu plus tard dans cette émission.
26:35 Alors, sauriez-vous nous dire d'où viennent
26:38 ces surnoms suivants ?
26:40 A, "calicoco".
26:42 Est-ce que ça vient de la Somme, du Québec,
26:45 du Cotentin ou du Finistère ?
26:47 Comment on appelle, finalement, le bulot ?
26:49 Le calicoco, ça vient d'où ?
26:53 Somme, Québec, Cotentin ou Finistère ?
26:56 Vous l'avez jamais entendu ? -Aucune idée.
27:02 -C'est pas très loin, mais c'est pas chez vous. Cotentin.
27:05 -Oui.
27:07 Je ne me proche pas de l'Allemand.
27:09 Le kilog.
27:10 Kilog. Finistère.
27:12 Somme, Québec ou Finistère ? Finistère.
27:14 Très bien.
27:16 -C'est chez moi. -Voilà.
27:17 Bourgo ? Bourgeois ?
27:19 -Bourgo. -Bourgo.
27:21 -Je dirais la Somme.
27:22 -Euh...
27:23 Alors, non, c'est le Québec.
27:25 Et le chanteur, c'est la Somme.
27:28 -D'accord.
27:29 -Le chanteur, c'est la Somme.
27:30 -Je vous avais dit que je connaissais que la Bretagne.
27:33 -Il y a un terme générique de ce bulot,
27:36 mais il y a plein de petits noms.
27:38 -Il y en a dans les régions.
27:39 Vous savez qu'en France, le repas occupe une assez large place
27:43 et c'est souvent à table que se nouent les deals politiques
27:46 et que se fait la grande histoire.
27:48 C'est la brève de comptoir.
27:50 Bourgouinage.
27:51 ...
27:53 On vous a demandé, Hervé Berville,
27:55 de réfléchir à une anecdote politique
27:58 autour d'un repas.
27:59 Est-ce que vous avez un souvenir à nous raconter ?
28:02 -Je crois que le souvenir de...
28:07 Vous avez raison de dire que, dans la vie politique,
28:10 nous, on avait la tradition, et on a encore la tradition
28:13 dans la famille, de faire de longs repas le dimanche en famille.
28:17 Je crois que c'était un repas à la fois...
28:22 savoureux et, en même temps, vu que c'était une première,
28:28 je dirais pas que c'était douloureux,
28:30 mais c'est pas celui qui restera gravé dans mémoire
28:33 comme une expérience gustative incroyable.
28:37 C'était au tout début de ma campagne électorale, en 2017,
28:41 et donc, je vais sur un port,
28:44 et j'avais dit que j'aimais bien manger,
28:46 que j'aimais les produits de la mer,
28:48 et que, bien évidemment, soupe de poisson,
28:51 euh...
28:52 Poisson et autres fruits de mer,
28:56 j'adorais ça, sauf que vous avez oublié de me préciser
29:00 que c'était à 5h du matin.
29:01 Je suis plutôt quelqu'un de très salé le matin.
29:04 Euh...
29:05 Très salé, pardon. -Sucré.
29:07 -Sucré, vous voyez. -Le petit déjeuner.
29:09 -Le petit déjeuner. Ca a été un moment assez compliqué,
29:12 mais en même temps, parce que c'est des bons produits,
29:15 je les ai mangés, mais c'est pas ce que j'ai reproduit
29:18 dans la campagne électorale.
29:20 Je vous demande à chaque fois... -Qu'est-ce qu'on mange ?
29:23 -A quelle heure on le mange ?
29:25 Il y a pas de souci de manger des fruits de mer,
29:28 mais à 5h du matin, c'est plus compliqué.
29:30 Ca fait partie des carnets de campagne,
29:32 en tout cas des moments sympathiques
29:35 dans les campagnes électorales.
29:37 C'est où on casse la croûte.
29:39 Je me rappelle d'un repas aussi
29:42 avec un conseiller régional de Bretagne.
29:45 On faisait la campagne de 2017,
29:47 on n'avait pas mangé depuis le matin.
29:49 On s'est arrêtés chez un des militants,
29:52 il n'avait plus rien à manger chez lui,
29:54 on avait juste un petit bout de pâté,
29:56 juste de l'eau gazeuse, on a mangé ça à minuit,
29:59 on est repartis faire 3h de route à côté.
30:01 -C'est ça, les campagnes électorales.
30:04 -C'est des bons moments où on partage quelque chose.
30:06 Au fond, c'est vrai que la politique
30:10 est très liée à la gastronomie en France.
30:12 D'ailleurs, quand je me déplace dans les différents territoires,
30:16 les pêcheurs sont toujours très fiers de me montrer
30:19 ce qu'ils pêchent.
30:23 Les conchiliculteurs, c'est pareil.
30:25 Les ostréoculteurs, c'est la même chose.
30:28 On a vraiment la chance, au fil des pérégrinations,
30:31 de pouvoir goûter toute la diversité
30:34 et la richesse de la gastronomie française.
30:37 -On va parler spécifiquement du bulot,
30:39 ce coquillage qu'on trouve souvent sur les tables à Noël,
30:42 mais pas seulement. Ils se font rares,
30:45 mais c'est le dessous des plats.
30:46 Le bulot serait-il victime du réchauffement climatique
30:55 ou est-ce la surpêche qui le rend plus rare ?
30:57 Jérôme, à bord de son chalutier, doit désormais parcourir
31:01 2000 nautiques supplémentaires pour espérer en attraper.
31:04 Pierre Berreta a embarqué pour une partie de pêche
31:07 avec Maïté Frémont.
31:08 ...
31:14 -Ce matin, je me suis vu à 4h, 4h, 4h15.
31:17 On a mis le bateau en route à 5h,
31:20 chargé les appâts et...
31:22 Et puis on est partis, aussitôt, quoi.
31:25 Quand on arrive près de l'été, on va de plus en plus loin
31:28 parce que les eaux se réchauffent
31:30 et le bulot, il s'envase, en fait.
31:33 Il s'ensable pour garder de la fraîcheur.
31:36 -En 24 ans, les réveils de Jérôme
31:40 n'ont jamais été aussi matinis.
31:42 Ce matin, pour trouver ce bulot si rare,
31:45 le pêcheur naviguera pendant 1h30 en haute mer.
31:49 -C'est pas une question de surpêche.
31:52 Je pense que le réel problème, il est là,
31:54 c'est le réchauffement climatique.
31:56 On peut rien faire pour ça.
31:58 -Un peu de surpêche, mais majoritairement
32:01 une eau qui se réchauffe et une espèce marine qui se réduit.
32:05 L'Institut de recherche pour l'exploitation de la mer
32:08 le confirme. Si l'eau dépasse les 16 degrés,
32:11 le mollusque se reproduit 2 à 3 fois moins bien.
32:15 -Avant, on arrivait à faire notre quota d'une tonne 2.
32:18 Aujourd'hui, on va tourner aux alentours des 600 kg.
32:22 -Mais ce quota a été révolu.
32:24 Depuis le début de l'année, il est passé à 648 kg par an
32:29 et par bateau, à peu près l'équivalent
32:32 de ce que le pêcheur ramène dans ses casiers.
32:35 Alors, le bulot est-il en train de devenir un produit de luxe ?
32:40 Au port de Dieppe, voici Marine.
32:42 -On vous appelle comment ?
32:45 -Bah, madame bulot, j'ai le droit.
32:47 Ou la bulotière. Je vais voir ma petite bulotière.
32:50 -Marine est la femme de Jérôme.
32:53 Tous les jours, elle vend la pêche de son mari
32:55 et ses clients sont les premiers témoins
32:58 de la hausse du prix du bulot.
33:00 -Avant, on les avait à 4 euros, maintenant, à 6.
33:02 -Le kilo. -Le kilo.
33:04 -Pendant un moment, on n'en mangeait plus
33:06 parce que c'était devenu trop cher et on n'en voyait pas beaucoup.
33:10 -A certains endroits, le prix au kilo a même été multiplié
33:13 par deux en un an.
33:15 Le bulot arrivera-t-il à s'adapter à la chaleur
33:18 ou migrera-t-il dans des eaux plus froides ?
33:22 Aujourd'hui, en France,
33:23 30 tonnes de bulot sont pêchées chaque jour.
33:26 -Hervé Berville, les pêcheurs vous ont alerté
33:32 sur le fait qu'il y avait moins de bulot
33:34 ou est-ce que vous-même vous l'avez constaté ?
33:37 -Je l'ai constaté, ils m'ont alerté,
33:40 et c'est un sujet à la fois de préoccupation
33:43 mais qui démontre la nécessité qu'on a aussi,
33:46 sur tous les pans de notre activité, de notre économie,
33:50 à lutter contre le changement climatique.
33:53 C'est le combat premier,
33:54 avec l'enjeu de la souveraineté économique,
33:57 que nous devons porter.
33:58 C'est le cas du bulot,
34:01 mais on voit aussi, du fait du réchauffement climatique,
34:04 des espèces nouvelles qui apparaissent.
34:06 -Je vous interromps,
34:08 parce que le pêcheur qu'on entend,
34:10 il dit que c'est pas une question de surpêche.
34:13 -Je parlais de réchauffement climatique.
34:15 -C'est une réalité.
34:16 -Je voulais dire, est-ce que le pêcheur
34:19 est un déni ? -Pas du tout.
34:20 C'est prouvé scientifiquement qu'il y a des espèces
34:23 qui migrent, donc qui vont dans d'autres endroits,
34:26 et pas forcément là où ils pêchaient,
34:29 parce qu'il y a du réchauffement climatique
34:31 et qu'elles préfèrent des eaux plus chaudes.
34:34 Il y a du thon rouge qu'on peut pêcher
34:36 dans des endroits où on n'en pêchait jamais,
34:39 parce que les thons migrent.
34:40 -On parlait de la Cossie Saint-Jacques.
34:43 Elle aime les eaux plus chaudes.
34:45 Elle se reproduit beaucoup plus vite.
34:47 -Il y a des espèces invasives,
34:49 comme le crabe bleu en Méditerranée.
34:51 C'est lié au réchauffement climatique,
34:54 mais on voit une multiplication.
34:56 Je vais vous prendre le cas de ma circonscription
34:59 dans les Côtes-d'Armor, où les producteurs de moules
35:02 ont vu, en raison, on pense,
35:04 parce qu'on n'a pas encore toutes les études solides,
35:07 c'est pour ça qu'on a lancé un travail,
35:10 j'ai demandé à Aliph Romer et au service de mon ministère
35:13 de lancer des études pour bien comprendre
35:16 cette multiplication des dorades.
35:20 En fait, des dorades qui mangent toutes les moules.
35:23 Et donc, vous avez des producteurs de moules
35:27 qui voient, depuis sa arrivée,
35:29 dans l'espace d'un an et demi, deux ans,
35:31 l'intégralité de leur pieu qui est mangé par des dorades.
35:35 Et maintenant, des espèces arrivent.
35:37 -C'est des prédateurs qui disparaissent ?
35:40 -On ne sait pas encore.
35:41 Soit c'est des eaux qui se réchauffent,
35:45 et peut-être que les dorades vont dans ces eaux réchauffées,
35:48 ou alors, en effet, c'est les eaux qui se réchauffent.
35:51 On ne sait pas exactement,
35:53 parce que la brutalité à laquelle c'est arrivé,
35:56 ça demande une réponse d'urgence.
35:58 -Mais l'eau ne s'est pas réchauffée en un an et demi ?
36:01 -C'est toujours le tipping point.
36:03 Comme on dit en bon grand breton, c'est le point de bascule.
36:06 Il suffit de ces quelques petits degrés
36:09 pour faire passer dans notre air
36:10 et faire que des espèces apparaissent.
36:13 -On a vu des invasions de poules en Bretagne.
36:15 Ils mangeaient les homards. C'est dû à quoi, ça ?
36:18 -C'est pareil. Il y a...
36:20 Réchauffement climatique, et puis, il y a des causes.
36:24 Est-ce que c'est de la pollution ?
36:27 Est-ce que c'est des causes qu'on ne connaît pas encore totalement
36:31 et qui font que les prédateurs disparaissent
36:34 et que les poules se multiplient ?
36:36 En tout cas, ça, ça demande trois réponses.
36:39 Un, la connaissance, la science. C'est fondamental.
36:42 Tout ce qu'on doit faire dans la politique
36:44 de lutte contre le changement climatique
36:47 et de préservation de la biodiversité,
36:49 ça doit se faire sur la science.
36:51 La volonté du président de la République
36:53 et de la Première ministre, c'est de renforcer
36:56 cette dimension scientifique pour éviter les populismes,
37:00 les caricatures... -De connaissance et science.
37:02 -Deux, c'est s'adapter. C'est anticiper aussi.
37:05 Et donc, quand on parle, par exemple,
37:09 d'espèces invasives,
37:11 il faut prévoir les quotas,
37:13 réduire, augmenter, en fonction de la réalité des stocks.
37:17 On le fera sur la science.
37:19 Et puis, trois, c'est ce que je disais tout à l'heure,
37:22 c'est qu'il faut avoir une attention
37:24 de chaque instant, de chaque jour,
37:27 sur le changement climatique.
37:29 Et donc, c'est la décarbonation de tous les secteurs,
37:32 c'est la préservation des habitats
37:35 et c'est de l'investissement sur cette politique climatique.
37:39 On le fait depuis plus de six ans.
37:41 Il faut continuer à accélérer.
37:43 En veillant, quand on fait tout ça,
37:45 à avoir des activités économiques, notamment de pêche,
37:48 car c'est essentiel pour la souveraineté alimentaire.
37:52 Ca fait partie des traditions, de l'héritage
37:55 que nous ont légué nos grands-pères et nos parents.
37:58 Et donc, avoir des activités de pêche, d'aquaculture,
38:01 de conchiliculture sur nos littoraux,
38:04 c'est essentiel pour avoir cette autonomie stratégique.
38:07 Et ça dépend à 80 %, comme c'est le cas encore,
38:10 des importations de produits de la pêche.
38:12 On voit bien, avec la guerre en Ukraine,
38:15 qu'être dépendant sur des sujets aussi stratégiques,
38:18 c'est une folie. -Vous dites que c'est pas
38:20 à cause de la surpêche qu'il y a moins de bulots.
38:23 Il y a des quotas qui ont été mis en place,
38:25 qui ont divisé à peu près par deux,
38:27 c'est ce que nous dit Jérôme, le volume de pêche de bulots.
38:31 Ces quotas vont permettre, finalement,
38:33 à l'espèce de se renouveler, ou vous n'en êtes pas certain ?
38:37 -C'est pas moi qui dis ce qu'il faut faire,
38:41 tout ce qu'on fait, c'est basé sur la science.
38:44 Il y a des avis scientifiques qui sont donnés
38:47 sur tout un tas d'espèces.
38:48 Chaque année, l'Union européenne,
38:51 sur les stocks de lieux, de bars,
38:54 de... d'anguilles,
38:57 il y a cet avis scientifique qui dit "voilà l'état du stock,
39:00 "et voilà ce qu'on peut pêcher pour permettre le renouvellement
39:04 "et d'avoir des poissons pour les générations futures."
39:07 Le grand défi qui est devant nous,
39:09 c'est d'allier le temps long,
39:12 c'est-à-dire qu'il faut maintenir des activités
39:14 dans un moment où l'espace maritime
39:17 fait l'objet de nombreuses utilisations,
39:20 de nombreux usages. Nous devons développer
39:22 des énergies marines renouvelables, des éoliennes en mer.
39:26 -Il y en a déjà. -Ca va être sur des zones,
39:29 parfois, où il y avait, historiquement,
39:32 des pêcheurs. Il faut concilier les usages.
39:34 -Ca trouve les zones de pêche ?
39:36 -Il va falloir avoir une discussion sur la planification.
39:39 L'idée, c'est de dire, et nous l'avons lancé la semaine dernière,
39:43 on a un triple objectif. Protéger nos océans.
39:45 Nous allons avoir des zones de protection forte.
39:48 L'objectif, c'est d'avoir 10 % de zone de protection forte
39:51 sur tout notre espace maritime.
39:53 Nous avons déjà atteint les 33 % des marines protégées,
39:56 mais nous devons aller plus loin.
39:58 Deux, c'est permettre d'activités économiques
40:02 sur l'espace maritime.
40:04 C'est notamment la pêche, mais c'est aussi l'aquaculture.
40:07 Troisièmement, c'est de mettre en oeuvre
40:10 le déploiement des énergies marines renouvelables,
40:12 40 viguards d'ici 2050.
40:14 On a lancé le travail de concertation,
40:17 de discussion avec les régions, les collectivités locales,
40:20 les pêcheurs, les ONG, pour définir les meilleures zones
40:23 pour mettre ces éoliennes en mer,
40:25 parce que ça va demander un vrai travail
40:28 au plus près du terrain de concertation
40:31 pour définir ces zones et atteindre,
40:33 comme avec la guerre en Ukraine,
40:35 une souveraineté énergétique.
40:37 On a la chance d'avoir une façade et des façades littorales
40:41 qui ont des potentiels en éolienne.
40:43 Nous allons faire ce travail de planification,
40:46 qui est un travail qui nous permet, au fond,
40:49 de se projeter sur les questions d'adaptation
40:51 au changement climatique et de bien partir de la science
40:54 pour mettre en oeuvre des politiques publiques
40:57 et autoriser ou non l'établissement de telles activités.
41:01 -Une canicule sévit en ce moment, sans précédent,
41:04 autour des eaux du Royaume-Uni, donc la Manche.
41:06 Est-ce que ça vous inquiète ?
41:08 Est-ce qu'on peut se dire que ce bullot, qu'on aime bien,
41:11 est mal barré ?
41:13 -Je connais moins le cas de la canicule...
41:15 -C'est en ce moment.
41:16 Les eaux de la frontière n'ont jamais été aussi chaudes.
41:20 -C'est le cas en Méditerranée.
41:21 C'est le cas dans... Vous prenez une carte,
41:24 c'est une carte très illustrative
41:27 qui nous montre la nécessité d'agir
41:30 de manière la plus cohérente, collective et urgente.
41:33 Il y a des canicules sous-marines
41:35 et il y a un réchauffement des eaux qui est indéniable.
41:38 -Sauf dans le Finistère.
41:40 -Non, non, non.
41:41 Il fait une température parfaite dans les eaux du Finistère.
41:44 Encore plus sur la Côte d'Emeraude.
41:46 Il fait une très bonne température.
41:48 Mais les canicules sous-marines
41:50 ou le réchauffement des eaux, c'est un vrai problème
41:53 car ça induit ce que vous disiez, des disparitions d'espèces.
41:57 C'est pour ça que la priorité qui est la nôtre,
42:01 notamment de lutter contre le réchauffement climatique
42:04 avec la décarbonation de tout un tas de secteurs,
42:07 mais aussi de protéger un certain nombre d'habitats marins,
42:10 comme la Posidonie.
42:11 J'étais la semaine dernière à Marseille
42:14 car la France préside la commission du développement durable
42:17 pour la Méditerranée.
42:18 Nous avons fait de la protection de la Posidonie,
42:21 une forêt amazonienne sous-marine, j'exagère à peine.
42:25 La protection de la Posidonie, c'est un élément essentiel aussi...
42:29 -Pour la biodiversité marine. -Pour la biodiversité marine
42:33 et pour continuer à avoir la richesse que nous connaissons
42:36 et des espèces qui vivent dans ces eaux.
42:38 Et la protection, c'est une de nos priorités,
42:41 la protection des grands fonds marins.
42:43 C'est ce que je disais.
42:44 Nous devons protéger les grands fonds marins
42:47 car nous ne les connaissons que trop peu.
42:49 De ce que l'on connaît, ce sont des écosystèmes fragiles
42:53 qui sont clés pour réguler le climat
42:55 et clés dans la biodiversité globale de notre planète.
42:59 Et donc, la France est totalement opposée
43:02 à l'exploitation minière des fonds marins
43:04 parce que nous savons que sur les 3 %, à peine,
43:07 des grands fonds marins que nous connaissons,
43:09 qu'il y a des espèces très fragiles.
43:12 Et donc, nous avons une ambition très forte sur la protection
43:15 avec notamment des programmes de recherche.
43:18 On a mis 350 millions d'euros
43:19 pour renforcer la recherche sur les grands fonds marins
43:23 parce que mieux connaître, c'est mieux protéger.
43:25 C'est une bataille diplomatique que nous menons de chaque instant.
43:29 C'est ça, le grand combat du siècle pour la protection des océans.
43:32 -On va s'intéresser aux pêcheurs,
43:34 qui sont pénalisés par le Brexit.
43:36 Faute de licence, certains sont contraints à l'abandon.
43:40 On en parle et on met les pieds dans le plat.
43:42 -Le Brexit continue de faire du mal
43:52 aux pêcheurs français.
43:53 Ceux qui n'ont pas eu de licence pour pêcher
43:55 dans les eaux britanniques
43:57 tentent d'obtenir des indemnisations
43:59 contre le démantèlement de leurs bateaux.
44:02 Mais certains navires passent curieusement sous les radars.
44:05 C'est le cas du chalutier de Loic, pêcheur de Buleau.
44:08 Reportage à Boulogne-sur-Mer de Maïté Frémont et d'André Laffont.
44:12 Musique intrigante
44:14 -Je m'appelle Loic.
44:15 On est au bassin Napoléon.
44:17 Derrière moi, c'est mon bateau.
44:19 Musique intrigante
44:21 Il a été marin pêcheur, mon grand-père aussi,
44:23 mon arrière-grand-père aussi. C'est une sphère de famille.
44:27 -La famille de Loic a toujours travaillé
44:29 dans les eaux anglaises pour pêcher la sole,
44:32 puis le homard et, en 2016, le Buleau.
44:35 Il y a 7 ans, Loic achète pour 850 000 euros ce chalutier.
44:40 Avec ce navire, Loic passe 75 % de son temps en mer britannique.
44:46 -Avant 2020, on commençait à travailler ici,
44:48 c'est-à-dire entre Calais et Dunkerque.
44:51 On tournait juin, juillet, août,
44:53 et on remontait tout le côté anglais.
44:55 On tournait, on faisait une belle boucle.
44:57 -Mais après le Brexit, son bateau n'obtient pas de licence
45:01 pour continuer à faire cette boucle.
45:03 -Maintenant, c'est divisé par deux.
45:05 Je tournais en rond.
45:06 J'ai perdu presque la moitié du chiffre d'affaires,
45:09 passé d'un million à 600 000.
45:11 C'est pour ça que je cherche à m'en débarrasser.
45:14 Je vais me tirer une balle dans le pied, à force.
45:17 -Se débarrasser d'un bateau trop coûteux,
45:19 c'est l'objectif de l'OI, qui découvre
45:22 que les pêcheurs sans licence peuvent bénéficier
45:24 d'un plan mis en place par le gouvernement.
45:27 Une aide pour sortir les navires de la flotte,
45:30 en contrepartie d'une indemnisation.
45:33 Le pêcheur dépose donc un dossier,
45:35 mais contre toute attente, il reçoit une lettre de refus.
45:38 -Il fallait prouver
45:39 à avoir des intériorités entre 2012 et 2016.
45:42 J'ai acheté le bateau en 2016.
45:44 Comme je vous l'ai dit, en 2019,
45:46 j'avais 75 % de montant dans les eaux anglaises.
45:49 Et en 2018, j'avais 25 %.
45:53 Donc même là, à 25 %, je passais dans les critères.
45:56 J'avais tous les critères, plus les intériorités.
45:59 C'est un plan d'accompagnement dû au Brexit.
46:01 Nous, à St-Vincent-à-Calais, Calais-d'Ouvre,
46:04 il y a 40 km, quoi. Il y a rien.
46:07 Même des Bretons ne comprennent pas pourquoi j'ai pas eu le droit.
46:10 Des gars m'appellent, on ne comprend pas.
46:13 Moi non plus, je ne comprends pas.
46:15 -Loïc n'est pas le seul à être dans ce cas.
46:17 A Boulogne, sur 18 bateaux, seulement 6 ont été retenus.
46:22 Au total, en France, 94 navires partiront à la casse.
46:27 -Admettez-le, c'est quand même une situation surréaliste,
46:32 au moins pour ce pêcheur.
46:34 Pourquoi il échappe au dispositif ?
46:36 Pourquoi il ne peut pas faire démanteler son bateau ?
46:39 Il y a une énorme casse à Bordeaux.
46:41 Il ne peut plus pêcher dans les eaux britanniques.
46:44 -D'abord, je connais très bien ce cas,
46:46 puisque je me suis rendu à Boulogne,
46:48 et je connais vraiment le dossier du plan d'accompagnement individuel,
46:53 puisque c'est un dossier qui touche
46:55 des hommes et des femmes engagés, passionnés,
46:58 et forcément, quand il y a un certain nombre de dispositifs,
47:03 on regarde précisément, individuellement.
47:05 J'ai souhaité que ce ne soit pas un plan de sortie de flotte,
47:09 mais un plan d'accompagnement individuel.
47:11 Ce plan d'accompagnement individuel,
47:13 je ne l'ai pas écrit sur le coin d'une table.
47:16 Il y a des règles européennes très claires,
47:18 puisqu'on est dans le cadre du Brexit.
47:21 Vous l'avez dit, et ça a été dit dans le reportage,
47:23 il faut le Brexit.
47:25 C'était...
47:26 la date que vous connaissez.
47:30 Et donc, il fallait prouver des antériorités
47:33 entre 2012 et 2016.
47:35 Et tout cela, tous ces critères,
47:37 ils ont été clairement écrits dans un arrêté
47:40 qui a été publié et coécrit
47:43 avec la filière pêche en septembre 2022.
47:46 Et cet arrêté est l'objet,
47:48 et a fait l'objet de concertation, de discussion,
47:51 avec tous les professionnels
47:53 de toutes les façades maritimes concernées par le Brexit.
47:56 Là, il n'y a pas de surprise.
47:58 -Il n'y a pas de surprise.
47:59 -Il avait deux bateaux, donc il a changé de bateau.
48:02 -Oui, mais c'est...
48:03 Je ne vais pas rentrer dans le détail de cette personne.
48:06 Vous n'avez pas tous les éléments.
48:08 -C'est un manque de bol. -Non.
48:10 -Pour lui, c'est une question d'année.
48:13 -Non, s'il y a des critères.
48:15 C'est comme quand vous voulez postuler à quelque chose,
48:18 il y a des critères définis,
48:19 on rentre ou pas dans ces critères.
48:22 Ensuite, il y avait une liste de navires
48:27 qui rentraient dans les critères.
48:29 Étant donné qu'on était dans une enveloppe fermée,
48:32 il y avait des bateaux qui pouvaient d'abord postuler.
48:35 Si des bateaux disaient "je ne veux pas y aller",
48:38 ceux qui étaient dans les critères et sur les risques complémentaires
48:42 pouvaient rentrer dans les critères.
48:44 -C'est une question de chance.
48:46 -C'est une question de chance.
48:48 C'est une question de juste avoir un arrêté.
48:51 Sinon, le problème, si on dit "très bien, on va lui donner",
48:54 il va devoir rembourser, l'Union européenne va venir contrôler,
48:58 faire des audits et faire rembourser à ce monsieur.
49:01 Vous serez les premiers à me dire "quelle inconséquence".
49:05 -On ne peut pas plaider sa cause, les critères sont les critères.
49:08 -C'est un arrêté ministériel qui a été discuté.
49:11 -C'est un arrêté ministériel qui a été discuté avec la profession
49:15 sur un plan qui était d'abord demandé par la profession
49:18 pour répondre aux conséquences du brédic,
49:21 donc dans des navires qui, avant le Brexit,
49:23 pêchaient dans les eaux britanniques.
49:26 Ensuite, j'ai entendu ce qui était dit à la fin de ce reportage,
49:29 qui doit nous interpeller.
49:31 C'est pas la bonne manière d'appréhender les choses.
49:34 C'est pas le pêcheur qui le dit, c'est la voix off qui dit
49:38 que sur 18 navires qui ont postulé, il n'y en a que 6 qui ont été pris.
49:42 C'est plutôt une bonne nouvelle.
49:44 C'est pas une bonne nouvelle de casser des navires.
49:47 Ca veut dire qu'on se prive d'une production.
49:49 Les navires qui n'ont pas été retenus...
49:52 -La journaliste disait ça parce que les pêcheurs
49:55 voulaient eux-mêmes se débarrasser de leur mateau.
49:57 -Ils ne peuvent pas aller pêcher dans les eaux britanniques.
50:01 -Tous ceux qui rentraient dans ces critères
50:04 qui ont été discutés avec la profession
50:06 ont pu accéder à ce plan d'accompagnement individuel.
50:09 Il y avait ensuite quelque chose de très transparent avec les villes.
50:13 Ca a été discuté pendant des semaines et des semaines.
50:16 Cette situation, ce monsieur, je la connais bien.
50:19 C'est jamais heureux de voir des gens
50:21 qui pensaient pouvoir accéder à un dispositif qu'ils ne l'ont pas.
50:24 Mais je peux vous dire que la priorité,
50:27 c'était de faire face aux conséquences du Brexit.
50:30 -Justement, les conséquences, dites-nous.
50:32 -Les conséquences du Brexit.
50:34 -Les conséquences du Brexit pour nos pêcheurs, pour la pêche.
50:37 -On a quasiment 30 % de la pêche française
50:40 qui était due aux eaux britanniques.
50:42 Forcément, ça a des conséquences sur des navires
50:45 qui ne peuvent pas y aller,
50:47 d'où ce plan d'accompagnement individuel.
50:49 Maintenant, ce qu'on doit faire et ce que je porte,
50:52 c'est de donner de la visibilité aux pêcheurs
50:55 sur notamment la pluriannualité des quotas,
50:57 parce qu'on ne peut plus avoir un système
51:00 où, chaque année, en décembre, on a un conseiller européen
51:03 qui dit à ses pêcheurs, on est le 15 décembre,
51:06 au 1er janvier, voilà la quantité de poissons
51:08 que vous pourrez pêcher.
51:10 Quelle entreprise fonctionne comme ça ?
51:12 Je me bats et j'ai réussi, avec l'Espagne, le Portugal
51:15 et d'autres pays, à mener une coalition
51:17 pour que l'on commence à travailler
51:19 sur la pluriannualité des quotas,
51:21 c'est-à-dire qu'on donne de la visibilité
51:24 sur ce que les pêcheurs peuvent pêcher sur plusieurs années,
51:27 et puis, il faut investir sur la transition énergétique
51:31 des navires, parce que toutes les crises
51:33 sont liées au coût du carburant. -Avec le biocarburant ?
51:36 -Avec de l'efficacité énergétique,
51:38 qui permet de réduire... -Moins gros moments carburants.
51:41 -Moins gros moments carburants,
51:43 avec des méthodes de navigation qui permettent
51:46 la sobriété de l'éco-conduite, comme on dit,
51:49 et puis, surtout, de travailler sur des technologies alternatives,
51:52 ça peut être du biocarburant, ça peut être de l'hydrogène plus tard,
51:57 et donc, on a vraiment engagé ces travaux de décarbonation,
52:01 puisque vous savez que dans le cadre de la loi Climat Résilience,
52:04 tous les secteurs doivent avoir une feuille de route de décarbonation.
52:08 Nous avons engagé le travail.
52:10 L'Union européenne ne nous autorise pas, pour l'instant,
52:13 à financer le renouvellement de la flotte,
52:16 à part les Outre-mer, où ils ont fait une ouverture.
52:19 Il y a des fonds privés,
52:21 qui ont été débloqués par CMA-CGM,
52:24 à hauteur de 200 millions d'euros
52:26 pour la décarbonation du transport maritime
52:29 et de la pêche, pour lancer cette dynamique de décarbonation.
52:33 Et puis, ce qu'il faut pour le secteur de la pêche...
52:36 -On va passer au dessert. -Je sais, j'ai très faim.
52:39 -Regardez les crêpes. -Les crêpes, c'est une odeur.
52:42 Et donc, il faut aussi attirer des jeunes dans le métier.
52:46 Moi, ma priorité, c'est de simplifier aussi,
52:49 parce que, parfois, il y a des règles qui sont incompréhensibles
52:52 et qui désespèrent les jeunes de rentrer dans le métier.
52:55 Deux, il faut montrer la diversité de ces métiers
52:59 et l'importance qu'ils ont pour notre pays.
53:01 On a relancé aussi la formation maritime.
53:03 J'ai ouvert une formation maritime en Guyane, la toute première.
53:07 On va ouvrir un lycée de la mer à La Réunion.
53:10 J'y ai été en novembre.
53:11 Il y a une dynamique. -La dynamique se crée.
53:14 -Il faut investir dans les ports,
53:15 avec les régions, les départements et la collectivité locale.
53:19 C'est important, parce que si on a des navires,
53:22 il nous faut des ports pour la transition énergétique
53:25 et avoir des biocarburants.
53:27 -On est impatients de passer au dessert.
53:29 C'est le péché mignon.
53:30 -Je vais faire vite.
53:35 Ce sont des crêpes, c'est ce qu'a demandé le ministre,
53:38 avec de la confiture de cerise.
53:40 On a compris que les cerises étaient importantes.
53:42 Vous les congéliez. -Je préfère les manger.
53:45 -C'est un dessert très réglé.
53:47 J'imagine que ces crêpes à la confiture de cerise,
53:50 c'est un souvenir d'enfance.
53:52 Ca ne peut pas être autrement ? -Oui.
53:54 D'abord, parce que les cerises, c'est...
53:57 C'était un peu à cette période,
53:59 fin juin, début juillet,
54:02 où on va les ramasser.
54:04 C'était ma première source d'argent de poche.
54:07 C'était très peu, mais en fait,
54:09 nos grands-parents nous payaient quelques euros,
54:14 c'était rien, c'était symbolique,
54:16 mais au kilo de cerises ramassées.
54:18 Il faut aller dans l'arbre, ramasser, c'est difficile.
54:22 Chaque fin de juin, début été,
54:25 on faisait ça avec ma soeur,
54:27 on ramassait le maximum,
54:28 pour faire des confitures de cerises,
54:31 que ma mère faisait, que ma mère aussi,
54:33 que mon frère et ma soeur font.
54:35 -C'est le plat de votre enfance.
54:37 -Et puis, là, moi, les crêpes,
54:40 c'est d'abord une odeur.
54:42 Vous rentrez dans une cuisine,
54:44 c'était souvent le samedi soir,
54:45 après le basket, le soir de l'activité,
54:48 c'était la tradition.
54:49 Vous avez l'odeur de crêpes.
54:51 C'est un geste.
54:52 -Un savoir-faire.
54:53 -C'est un geste qu'on a ou qu'on n'a pas,
54:56 qu'on oublie, et tout le monde a un geste différent.
54:59 Après, c'est une saveur, c'est juste...
55:01 Il n'y a rien qui égale, je trouve, une crêpe...
55:03 -Je pense que les cèdres de votre maman
55:06 seront meilleures.
55:07 -Oui, alors...
55:08 Vous allez nous dire...
55:09 -Je ne sais pas qui les a faites.
55:11 -Pendant ce temps-là, écoutez la musique
55:14 que vous avez choisie pour terminer cette émission.
55:17 Vous allez voir, un petit indice.
55:19 *-C'est pas l'homme qui prend la mer,
55:21 c'est la mer qui prend l'homme.
55:23 Ta-ta-ta !
55:24 Moi, la mer, elle m'a pris, je me souviens.
55:27 Un mordi,
55:28 je l'ai trop aimé,
55:29 Santiago,
55:30 et mon cuir, un peu saune,
55:32 contre une paire de dorsales...
55:34 -Fan de Renaud, alors, comme le disait Jean-Pierre
55:37 dans son portrait.
55:38 -Ca m'a fait rire quand il a mis ça.
55:40 C'est un classique.
55:41 Moi, j'aime tous les types de musiques.
55:44 Musique populaire,
55:46 musique classique,
55:48 hip-hop, aussi rock.
55:50 J'ai eu la chance de baigner dans une diversité musicale.
55:54 La Bretagne étant une terre de festivals,
55:56 on a la chance de voir des concerts...
55:58 -Live. -L'été, énormément.
56:01 Ce que j'aime beaucoup dans cette musique,
56:03 au-delà de la question maritime,
56:05 c'est que les classiques, pour moi,
56:07 et les grandes chansons, c'est, au bout de deux secondes,
56:11 vous reconnaissez la voix et vous savez la musique.
56:15 Et là, c'est... Voilà.
56:16 Vous entendez l'accord tout de suite,
56:18 vous savez qui c'est, et la voix est reconnaissable parmi mille.
56:22 Et c'est très marrant... -On peut finir, ça ?
56:25 -Il a eu la tentation maritime, Renaud.
56:28 C'est là qu'il a écrit cette chanson.
56:30 Il voulait partir, liberté, navigation, aventure,
56:34 et il a écrit cette musique qui est splendide.
56:36 -Comme Renaud, la mer vous a pris.
56:38 Merci, Hervé Berville, d'avoir accepté notre invitation.
56:42 Rendez-vous la semaine prochaine
56:44 pour un nouveau numéro de "Politique à table" sur LCP.
56:47 ...

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