Statistiquement, Novak Djokovic est le meilleur joueur de l'histoire du tennis. Encore plus avec son 23e titre en Majeur décroché à Roland-Garros 2023. Pourtant, il n'égalera jamais la popularité d'un Roger Federer ou d'un Rafael Nadal. Dans cette vidéo, nous allons tenter de déconstruire le personnage du Serbe pour mieux comprendre cette ambivalence.
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00:00 : Introduction
00:21 : Novak Djokovic en chiffres
01:02 : Son enfance
05:25 : Son début de carrière
06:55 : Pourquoi Djokovic est le joueur des années 2010
09:24 : L'aspect mental
13:10 : Témoignages
18:59 : Un traitement médiatique qui pose problème
20:42 : La santé chez le Serbe
23:33 : Des positions politiques qui font débat
26:16 : Un mot sur Djokovic
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05:25 : Son début de carrière
06:55 : Pourquoi Djokovic est le joueur des années 2010
09:24 : L'aspect mental
13:10 : Témoignages
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00:00 Statistiquement, Novak Djokovic est le meilleur joueur de l'histoire du tennis
00:03 et pourtant il n'égalera jamais la popularité d'un Roger Federer ou d'un Rafael Nadal.
00:08 Dans cette vidéo, on va tenter de déconstruire la personnalité du serbe
00:11 pour comprendre pourquoi c'est un personnage si clivant.
00:14 C'est parti, jingle !
00:16 Je pense que dans un premier temps, c'est important de poser les bases,
00:24 les fondations du palmarès de Novak Djokovic
00:26 parce que comme on le disait en introduction,
00:27 statistiquement, c'est le meilleur joueur de l'histoire du tennis.
00:30 À l'antenne de Roland Garros 2023, c'est 93 titres en simple,
00:34 22 titres en majeur, record détenu avec Rafael Nadal,
00:37 6 titres aux ATP Finals, record avec Roger Federer,
00:40 385 semaines en tant que numéro 1 mondial.
00:43 Il termine 7 fois l'année 1er, donc ça c'est tout simplement monstrueux.
00:48 Il a eu un titre en Coupe Davis en 2010,
00:50 ça a été un peu le déclic de sa carrière, il y a eu un avant et un après 2010.
00:54 Donc là, c'est une vision assez macro du palmarès du Serbe
00:57 et je pense qu'il faut retracer un petit peu toute l'histoire de Novak Djokovic,
01:00 à commencer par son enfance.
01:02 L'enfance est un moment clé en fait dans l'existence,
01:05 c'est un moment où on se construit, on construit nos peurs,
01:07 on construit nos colères, on construit nos rêves.
01:09 Et donc pour Novak, ça va vraiment être un moment clé,
01:13 surtout une enfance finalement hors norme.
01:15 Moi j'ai envie de partir d'un événement qui a eu lieu en 2012
01:18 et en fait en 2012, Novak gagne son 8e de finale
01:22 à Monte Carlo contre Alexander Dolgopolov.
01:25 Et en fait il va fondre en larmes après ce match,
01:29 il lève les bras vers le ciel, il ne va même pas à la convo de presse
01:31 qui est pourtant obligatoire.
01:33 Et pourquoi en fait il lui arrive cette réaction un peu surannée ?
01:38 Et bien en fait c'est parce qu'il vient de perdre Vlado, son grand-père,
01:41 à 83 ans, le matin même.
01:43 Il a une relation très particulière avec son grand-père
01:46 puisqu'il s'est réfugié chez lui en 1999 dans sa cave
01:51 alors que pleuvaient des bombes sur Belgrade.
01:53 Novak il est né en 1987 à Belgrade
01:56 et en fait il est né, c'est horrible, il est né au pire moment en fait.
02:01 Il est né donc en Yougoslavie et la Yougoslavie en fait
02:05 c'est un super état on va dire, composé de l'actuelle Croatie, de la Bosnie.
02:13 Et en fait il va naître au moment où le mythe yougoslav va exploser,
02:19 où on va avoir une vague d'indépendance qui va arriver sur la Yougoslavie.
02:22 Donc la Croatie va faire sécession, la Slovénie va faire sécession.
02:26 Beaucoup de pays en fait vont faire sécession de cette grande entité.
02:29 Et Novak naît à ce moment-là, il naît en 1987.
02:32 Et surtout en 1991 il y a l'arrivée au pouvoir en Serbie,
02:36 donc à l'intérieur de la Yougoslavie de Milošević.
02:40 Milošević je pense que peut-être ça parle à certains,
02:43 c'est un dictateur nationaliste qui va exacerber les tensions d'indépendance
02:47 entre ces différents pays de la Yougoslavie,
02:49 et qui va mener en fait une guerre horrible contre toutes les minorités
02:53 qui menacent les serbes dans les autres pays.
02:55 Novak a conscience de ce qui se passe et il est touché économiquement par ce qui se passe.
03:00 Donc ses parents ont cette petite pizzeria et en fait en face de la pizzeria
03:04 va se construire trois cours de tennis dans un complexe hôtelier.
03:07 Va s'installer sur ces trois cours en tant qu'entraîneuse freelance,
03:13 une dame qui va être très importante dans sa carrière qui s'appelle Jelena Dženčić.
03:18 Et en fait cette Jelena, elle est coach, elle a été coach de Monika Celes,
03:23 et elle est un peu quand même une entité dans le tennis en Serbie qui est déjà assez connue.
03:27 Et donc voilà, c'est comme ça que ça va se faire.
03:29 Il va commencer à jouer dans cette petite station du ski du sud de la Serbie.
03:35 Et puis finalement elle qui a ses entrées un petit peu partout dans la Serbie,
03:40 dans les clubs de Serbie, elle va le faire jouer à Belgrade au club Partizan.
03:44 Bon alors on va faire une petite ellipse dans le temps.
03:47 On part en 1999 qui va être une année charnière, une année terrible pour Novak et sa famille.
03:52 Puisque à ce moment là, on ne s'attend pas à ce que la guerre reprenne.
03:56 Il y a eu les accords de paix juste avant de Dayton en 1995.
03:59 Mais en fait le Kosovo, une partie indépendantiste du Kosovo va demander l'indépendance.
04:05 Et il y a des minorités en fait, et Milosevic va envoyer des troupes au Kosovo
04:11 pour faire taire cette demande d'indépendance.
04:13 Donc l'OTAN va bombarder Belgrade,
04:16 et Novak Djokovic va évidemment subir de plein fouet ce bombardement.
04:19 Donc ils vont quand même bombarder Belgrade pendant 78 jours et nuits.
04:23 Et je vous parlais, Vlado tout à l'heure qui est mort en 2012,
04:27 et qui a fait pleurer Novak, finalement cette disparation a fait pleurer Novak.
04:30 Et bien ça a un sens puisque durant ces bombardements,
04:34 c'est chez son grand-père que Novak va aller se réfugier dans la cave de son grand-père.
04:38 Ils vont vivre enfermés pendant plusieurs semaines parce que les bombes pleuvent après la guerre,
04:42 ou au sortir de la guerre, Novak Djokovic va exploser ténistiquement, on le sait.
04:46 Mais forcément, il le dira en 2013, il va devoir dire ambassadeur à l'ONU.
04:51 Et en 2013, la tribune de l'ONU dit, en fait nous les serbes,
04:55 on sera toujours, du fait de notre passé, du fait qu'on a joué le rôle des méchants dans la guerre,
05:01 ou en tout cas on nous a donné le rôle des méchants,
05:03 puisque Milosevic était serbe, voilà,
05:05 et bien en fait on devra faire toujours plus pour prouver notre bonne volonté, notre humanité.
05:11 Et donc c'est ce sentiment-là, il dit que cette génération de serbes,
05:15 de toute façon a été marquée par ce sentiment-là,
05:17 par ce sentiment de devoir accomplir plus,
05:21 ou de devoir prouver, de devoir redorer l'image de la Serbie.
05:25 Novak Djokovic, c'est un joueur qui a un petit peu tardé à confirmer son potentiel,
05:28 à l'inverse de Rafael Nadal, qui est tout simplement le meilleur adolescent de l'histoire du tennis.
05:32 Djokovic a mis un petit peu plus de temps, jusqu'en 2010 il avait seulement,
05:36 entre guillemets seulement bien sûr, remporté un grand chelem et cinq master milles.
05:39 C'est un joueur qui a perdu des finales importantes,
05:41 je pense à une finale à l'US Open face à Roger Federer,
05:43 mais qui a tout de même remporté son premier grand chelem à l'US Open en 2008,
05:46 contre Joe Alfred Tsonga, après avoir battu Roger Federer en demi-finale.
05:50 Il avait mis fin à une série fantastique de Federer,
05:52 qui avait atteint les finales de dix grands chelems consécutifs.
05:54 Aussi au début de carrière, Djokovic a eu l'image d'un tricheur,
05:58 dans le sens où c'était un joueur qui abandonnait beaucoup de matchs,
06:00 qui simulait des blessures, on l'a vu, dès qu'il était mené au score,
06:03 surjouait des blessures.
06:04 Il avait vraiment une réputation là-dessus, dès son arrivée sur le tour.
06:07 Je pense à un match très important face à Gaël Monfils à l'US Open en 2005,
06:11 où il a fait semblant de ne pas aller bien pendant tout le match,
06:13 puis il a finalement remporté le match.
06:15 Et il a énervé Gaël Monfils, qui est pourtant l'un des joueurs les plus sympathiques du circuit.
06:18 Et je pense aussi et surtout à une conférence de presse mémorable d'Andy Roddick en 2008,
06:21 juste avant un quart de finale à l'US Open,
06:24 où Andy Roddick, quand il a interrogé sur Novak Djokovic,
06:26 va dire "oui, Djokovic, il est blessé aux pieds, aux oreilles, à l'ongle, au rein, il a le coronavirus".
06:31 Et il se fout un petit peu de sa gueule.
06:32 Et justement, ça montre vraiment que Novak Djokovic avait une étiquette de joueur
06:35 qui surjouait un petit peu ses blessures.
06:39 Aussi, lorsque Novak Djokovic est arrivé sur le circuit,
06:40 il a voulu tout de suite se faire accepter, quitte à en faire trop.
06:43 Je pense surtout à ses imitations quand il est arrivé sur le circuit.
06:45 Il a imité beaucoup de joueurs, comme Nadal, Federer, Sharapova.
06:48 Et ça n'a pas plu aux principaux intéressés.
06:50 Du coup, il s'est fait un petit peu réprimander.
06:52 Il y a eu des déclarations de son père également qui n'ont pas aidé,
06:54 surtout dans sa relation avec Federer.
06:55 Le déclic vient clairement de là, de cette Coupe Davis en 2010,
06:59 qu'il vient remporter avec la Serbie.
07:01 C'est vrai qu'il y a un autre tournant un peu plus tôt dans l'année déjà, à Roland-Garros,
07:06 quand il perd en quart de finale contre Jürgen Melser, alors qu'il mène 2-7 à 0.
07:11 Et cette défaite lui a fait vraiment terriblement mal.
07:14 Il l'a dit après, il a failli arrêter carrément sa carrière,
07:20 étant donné qu'il avait un grand chelem, ce qui est déjà énorme.
07:23 Mais il voyait déjà Nadal en avoir 9, Roger en avoir 16.
07:27 Et lui, il se voyait très très ambitieux.
07:30 Il l'a dit, il voulait être le numéro 1 mondial et n'avoir qu'un grand chelem,
07:33 alors que les deux autres en avaient beaucoup plus.
07:36 Il était vraiment très malheureux de cette situation.
07:39 Mais du coup, la Coupe Davis en 2010 l'a vraiment remis sur patte.
07:44 Il a fait une compétition extraordinaire avec la Serbie.
07:47 Ça lui a permis de gérer la pression beaucoup mieux par la suite sur le circuit
07:52 et de vraiment retourner sur le circuit avec un autre état d'esprit.
07:57 Et si on découle sur ce qui s'est passé ensuite sur la décennie 2010 à 2020,
08:02 même jusqu'à maintenant, c'est vraiment un champion qui est né de cette Coupe Davis.
08:07 Dès 2011, il fait un petit chelem en gagnant l'Open d'Australie où il me le donne,
08:11 et l'US Open.
08:13 Il bat Nadal en finale d'Indian Wells de Miami
08:16 et va le battre chez lui à Madrid et à Rome,
08:18 ce qui est un séisme à l'époque vu que Nadal gagnait tout sur terre battue.
08:23 Il va continuer ainsi, ou presque sur chaque année.
08:27 En 2014, en 2015 et en 2016, il réalise le Sunshine Double,
08:31 ce qui est énormissime.
08:32 En 2015, il fait une année extraordinaire où il réalise un petit chelem encore.
08:38 Il va même faire le grand chelem sur deux années,
08:41 entre Wimbledon 2015 et Roland Garros 2016.
08:44 Il a tout éclaté à partir de 2011.
08:49 Même en 2021, on s'en rappelle qu'il était à un match
08:53 de réaliser le grand chelem sur une année.
08:56 Même s'il a chuté à la dernière marche contre Danil Medvedev en finale de l'US Open,
09:01 ça reste un immense exploit d'aligner 27 victoires d'affilée en grand chelem.
09:07 Aujourd'hui, il accumule 38 Masters 1000.
09:11 Il est le seul à avoir gagné chaque Masters 1000 deux fois,
09:15 ce qui est énormissime.
09:17 Il a 22 titres du grand chelem pour le moment.
09:20 Il a vraiment marché sur cette décennie.
09:23 Ça passe en grande partie par la visualisation et la méditation.
09:26 Ça peut se matérialiser par plusieurs choses,
09:28 notamment par le fait d'imaginer certaines situations défavorables
09:33 avant même de pouvoir les vivre,
09:35 pour essayer de les contrer et de trouver des solutions en amont
09:37 et de ne pas une fois sur le cours mettre un ou deux sets
09:40 à trouver une parade à une situation défavorable.
09:45 Ça peut aussi se matérialiser par le fait de s'imaginer en train de réaliser certains coups,
09:49 le coup droit, le revers, le retour.
09:50 C'est notamment par ce biais qu'il a commencé sa collaboration avec Pépé Imaz,
09:55 dont on connaît le crédo "à mort il passe".
09:58 Mais ça repose sa philosophie.
10:00 Juste pour resituer le contexte avec Pépé Imaz,
10:03 il avait soigné le frère de Djokovic de la dépression.
10:05 C'est aussi comme ça qu'il a appris à connaître Nole.
10:08 Il y a deux principes vraiment primordiaux,
10:10 c'est de faire un câlin au moins 25 secondes à quelqu'un en fin d'entraînement
10:13 parce que pour lui il n'y a que comme ça qu'on peut ressentir quelque chose
10:16 et c'est le fait de rester dans l'instant présent.
10:18 Je pense que c'est vraiment quelque chose que Djokovic a calqué
10:21 sur sa manière de se préparer mentalement.
10:23 Il l'a dit, c'est aussi important qu'une préparation physique ou qu'une préparation technique.
10:26 Je pense que c'est quelque chose qui a commencé à forger le mental de Djokovic.
10:31 Il y a aussi cette capacité à effectuer un reset mental complet.
10:34 On l'a vu notamment à Roland-Garros en 2021 quand il remonte 2 sets contre Muzeti
10:37 ou quand il remonte 2 sets contre Stéphano,
10:39 s'il s'y passe en finale, il va au vestiaire.
10:41 On ne sait pas trop ce qu'il y fait, on sait en tout cas qu'il change de tee-shirt.
10:45 Ça peut paraître anodin, mais du coup ça lui permet de commencer une nouvelle partie,
10:49 de se régénérer complètement et de revenir sur le cours en mettant beaucoup plus d'intensité.
10:54 Il y a aussi cet aspect très important où ça demande tellement d'énergie
10:59 de pouvoir jouer 1, 2, 3, 4, 5 sets face à ces joueurs-là
11:04 que quand tu mènes 2-0, il y a une décompression inconsciente qui s'opère
11:07 et ça permet justement à ces champions d'en mettre beaucoup plus, de breaker immédiatement.
11:10 C'est quelque chose qu'on a beaucoup vu dans les remontadas de Novak Djokovic.
11:13 Il a remonté, il a gagné 7 ou 8 matchs après avoir été mené 2-7-0,
11:16 le dernier en date contre Yannick Sinner à Wimbledon.
11:19 C'est vraiment quelque chose qu'on observe.
11:21 Il fait tout le temps le break immédiatement quand il est mené 2-7-0.
11:23 Il met beaucoup plus d'intensité, beaucoup plus de longueur
11:25 et derrière forcément il joue beaucoup plus à sa main.
11:27 Il a peut-être aussi un peu la peur de gagner chez ses adversaires qui fait que ça l'aide aussi.
11:32 Mais pour revenir à Pepe Di Maza, je pense que quelque chose qu'il a pu lui apporter,
11:35 c'est vraiment ce fait de rester dans l'instant présent.
11:38 Et on sait que quand on joue Novak Djokovic ou Rafael Nadal,
11:41 ça s'est encore matérialisé il y a quelques jours avec Olga Rouno qui rate ce match hyper facile
11:45 sur une balle de break pour Novak Djokovic.
11:47 Tu es constamment sous pression et je pense que mentalement ça pèse un joueur.
11:51 Et en plus, Novak Djokovic qui a une couverture de terrain
11:54 qui est presque inégalée dans l'histoire du tennis,
11:57 quand tu sais qu'il faut jouer 15 voire même 20 coups sur les points importants,
12:03 ça t'oblige d'une certaine manière à surjouer.
12:05 Ça, Nole le sait et évidemment il en joue pour déborder ses adversaires
12:08 et retourner des situations très compliquées.
12:10 Il est capable de se sulimer dans l'adversité.
12:13 Et ça c'est vraiment, encore une fois pour reprendre l'exemple de Wim Bluden avec Roger Federer,
12:16 quand tout le monde parlait, enfin quand tout le monde encourageait Roger Federer avec des "Roger, Roger".
12:21 Il entendait des Nole dans sa tête et ça voilà, c'est vraiment quelque chose de très très fort.
12:25 C'est quelqu'un qui de toute manière, au vu de la construction et du contexte de sa carrière,
12:30 s'est construit en opposition à Rafael Nadal, en opposition à Roger Federer.
12:33 Il a expliqué qu'il ne pouvait même pas être ami avec eux tellement la rivalité était forte.
12:37 Voilà, je pense que c'est quelque chose qu'il a aussi en lui.
12:41 On l'a vu avec Cameron Norrie qui lui smash dans le mollet à Rome, le regard qu'il lui lance.
12:45 Je pense que le moindre petit événement de ce genre-là, ça l'aide en fait à se sublimer
12:50 et à vouloir enfoncer des portes ouvertes et presque abattre l'ennemi si je peux dire.
12:56 Mais voilà, pour moi c'est un peu Pelmez qui construit la force mentale du Joker.
13:02 En fait, il arrive, nous avec Djokovic, à un moment donné où le public a déjà choisi son camp.
13:11 C'est soit Nadal, soit Federer.
13:13 Pour la plupart des fans du tennis, c'en est soit Nadal, soit Federer.
13:16 Moi je n'ai jamais été ni Nadal, ni Federer. Moi j'ai trouvé ça extraordinaire d'avoir Nadal et Federer.
13:20 Moi c'était peut-être un peu différent, j'étais joueur.
13:22 Mais lui, il arrive peut-être à ce moment-là où déjà,
13:28 la majorité du public tennis a déjà pris une position.
13:33 Et lui, il arrive derrière.
13:37 Et c'est ça que je trouve encore peut-être plus extraordinaire.
13:40 C'est qu'avec ces deux joueurs qui dominent le tennis mondial de manière assez extraordinaire, incroyable.
13:46 Lui, il arrive et dit "moi je veux être numéro un mondial".
13:48 Peut-être qu'à ce moment-là, quand il dit ça,
13:50 déjà certains se disent "mais pour qui il se prend ? Comment il peut imaginer à un moment donné ?"
13:55 Parce que là, il n'y en a pas un seul à aller chercher, il y en a deux à aller chercher.
13:57 Et puis finalement, il a réussi.
13:59 Il a au minimum réussi à se lisser à leur niveau.
14:02 Et par rapport au moment où il est revenu, parce qu'il est arrivé un petit peu en décalage depuis qu'il est là,
14:05 celui qui en a gagné le plus en tout cas, c'est lui.
14:08 Et beaucoup de gens, en fait, ne sont pas contre Djokovic, je pense.
14:16 Ils sont fans de Federer ou fans de Nadal.
14:18 Et la conséquence à ça, c'est qu'ils sont contre Djokovic.
14:21 Mais s'il y en avait peut-être un, un seul des deux présents,
14:25 peut-être que le camp de Djokovic aurait été plus naturel à aller chercher pour certains.
14:30 Après, le jeu est aussi un petit peu différent.
14:34 Moi, je trouve son jeu d'une telle efficacité, mais peut-être un peu moins spectaculaire.
14:39 La facilité de Federer, le côté athlétique et des forces énergétiques de Nadal,
14:44 lui, pour d'autres raisons, c'est extraordinaire.
14:48 Moi, j'avoue qu'il a d'apprécier les trois à peu près de la même manière.
14:53 Moi, j'adore ce côté simplicité, efficacité qu'il peut avoir.
14:58 Après, il a son caractère qui est différent des autres.
15:03 Peut-être qu'à un certain moment, on ne savait pas bien qui c'était Novak Djokovic,
15:07 parce qu'il avait envie d'être aimé.
15:09 Et du coup, peut-être qu'à une certaine époque, il en avait même perdu son naturel.
15:13 Ce qui a peut-être accentué ce problème avec certains fans de tennis.
15:20 Mais moi, aujourd'hui, j'aime le voir évoluer.
15:23 On voit ses qualités, ses défauts, son naturel, je trouve.
15:26 Et je pense que du crédit auprès des fans de tennis,
15:31 déjà, il ne faut pas oublier qu'il en a énormément,
15:33 mais qu'il en gagne aussi progressivement.
15:37 Et avoir réussi à se construire comme ça,
15:40 en étant quasiment tout le temps en affarioté numérique,
15:43 justement, sur tous les cours du monde, c'est quand même prodigieux aussi.
15:48 Il est clivant parce que ses résultats sont juste monstrueux.
15:52 C'est un joueur, sa manière de jouer me rend dingue.
15:56 J'adore son jeu, vraiment.
15:58 Je trouve que c'est montré avec une puissance relative,
16:01 parce que ce n'est pas un Golgoth.
16:04 Comment on peut jouer aux échecs d'une manière,
16:06 il est d'une précision incroyable,
16:08 et il va dépasser en termes de grand chlème,
16:10 les deux grands Nadal Federer.
16:13 Et puis je pense de loin.
16:15 Donc il y a ce côté, waouh, le joueur en tant qu'athlète,
16:19 et après, il y a le joueur en tant que personne,
16:21 qui n'a rien à voir en termes de personnalité avec Rafa et Roger.
16:26 Et pour moi, je pense qu'il faut qu'on prenne les joueurs dans leur globalité.
16:31 Et un Novak, il a été éduqué pendant la guerre,
16:36 il ne peut pas être comme Roger et Rafa, à un moment donné,
16:40 dans sa manière d'être.
16:42 Et moi ce que je trouve dommage, c'est que parfois,
16:44 il veut tellement avoir cet amour qu'ont les deux autres,
16:48 alors qu'il n'est pas du tout pareil.
16:50 Et moi je pense qu'il aurait été tout autant aimé en étant peut-être lui.
16:55 Juste lui, si à un moment, il doit péter un plomb,
16:58 et qu'il pète un plomb, en fait, on ne sait pas qui il est.
17:01 On se dit, mais il est hyper sympa,
17:02 ou alors il est hyper colérique et pas très sympa.
17:06 Parce qu'il nous montre les deux.
17:07 Et je pense qu'à un moment, les gens ne savent plus sur quel pied danser
17:11 en termes de personnalité, parce qu'encore une fois,
17:13 on est tous par terre par rapport à ce qui produit tennistiquement.
17:16 C'est énorme.
17:18 Donc il est clivant parce que lui propose quelque chose d'assez clivant
17:21 en termes de personnalité.
17:23 Et après, c'est lui qui gère sa com' comme il l'entend.
17:29 Et c'est vrai que c'est juste pour ça.
17:32 Et à mon avis, peut-être que sur la fin,
17:34 il va se relâcher en disant il va être tout seul et il va être juste lui.
17:38 Peut-être qu'il sera plus relax et peut-être plus sympa.
17:41 Et parce que parfois, il est, mais parfois on voit que clairement,
17:45 il n'est pas forcément très agréable et même lui aussi, parfois, le reconnaît.
17:51 Donc, à voir sur la fin de carrière, comment il va, comment il va évoluer.
17:55 Et comme l'a très bien dit Camille Pain,
17:56 on a du mal à savoir sur quel pied danser avec Novak Djokovic,
17:59 parce qu'il y a ce Djokovic gentil qui applaudit
18:03 les beaux points de ses adversaires, qui dans la défaite est très souriant.
18:06 On a même vu des images où il tient le parapluie à un ramasseur de balles.
18:09 Donc, franchement, on a l'impression que c'est un ange, c'est le gentil.
18:12 Mais de l'autre côté, c'est une légende qui a été disqualifiée
18:15 dans un tournoi du Grand Chelem à l'US Open en 2020.
18:17 On n'a jamais vu ça quand même.
18:19 Ou qui est capable de crier sur son clan, de dire à son frère de sortir,
18:22 de casser des raquettes.
18:23 C'est assez ambivalent ce comportement chez le Serbe.
18:26 Et on se demande finalement, quelle est la vraie nature de Novak Djokovic ?
18:29 Est-ce que c'est ce côté ange ? Est-ce que c'est ce côté démon ?
18:31 D'autant plus qu'il n'a pas forcément l'amour du public.
18:34 Et qu'est-ce que t'as un petit peu faux de cette personne
18:36 qui va vouloir chercher à tout prix à se faire aimer ?
18:38 Il parle énormément de langue dans chaque pays où il passe.
18:42 Il apprend la langue pour justement pouvoir communiquer avec les spectateurs.
18:45 Derrière, il y a cette célébration en chœur
18:48 où ça fait vraiment un peu "aimez-moi, aimez-moi, aimez-moi".
18:50 Alors d'un côté, il est compréhensible.
18:52 D'un autre côté, il est injustifié.
18:55 En fait, on a eu cette relation fédérale-nadale
18:58 où il y a eu beaucoup d'alchimie.
18:59 Le grand public était ravi.
19:01 Il y a eu ce petit diable qui est venu se rajouter
19:03 et qui a tout cassé, comme dans une relation amoureuse.
19:07 Novak Djokovic est arrivé et a tout cassé d'un point de vue ténistique.
19:11 Et ça a posé problème au grand public.
19:14 Et la presse en a profité pour en rajouter.
19:17 Et Novak s'est finalement retrouvé un peu le bouc émissaire dans toute cette histoire.
19:21 Cependant, au fur et à mesure des années,
19:23 il n'a pas amélioré son cas.
19:25 Il y a plusieurs épisodes.
19:27 L'Adriatour.
19:28 Mais on peut aussi penser à l'épisode qui s'est passé à Bercy l'année dernière,
19:33 avec l'épisode de la bouteille.
19:35 Cette bouteille, on ne sait pas trop quelles substances
19:37 ils ont ingurgité dans cette bouteille.
19:40 Au niveau du clan de Novak pendant Bercy,
19:42 où tout le clan fait en sorte que personne ne voit ce qu'on met dans cette bouteille.
19:46 Et après, en conférence de presse, on ne donne pas de réponse.
19:49 En fait, il y a beaucoup d'incertitudes, d'incompréhensions.
19:51 Il y a une communication qui n'est pas très claire
19:53 et qui n'améliore pas son cas au niveau de la presse.
19:55 Et la presse en joue et en rajoute.
19:57 Et maintenant, il y a cette relation de Bad Boy,
19:59 cette étiquette de Bad Boy qui lui est affichée par le grand public.
20:02 On peut repenser à la finale de l'US Open contre Danil,
20:06 où Novak est en train de pleurer à un changement de côté.
20:10 Et l'équipe qui met en une ses larmes, sont-elles vraies ?
20:14 Ça en dit long.
20:15 On parle quand même d'un joueur qui a gagné 22 titres du Grand Chlem,
20:18 qui est une légende de son sport,
20:20 et qui est d'un point de vue tennistique et d'un point de vue statistique le meilleur.
20:24 Et malgré cela, on continue à marcher sur son image,
20:30 même après autant d'exploits et d'efforts de sa part.
20:33 En 2010, quand il gagne la Coupe Davis avec la Serbie,
20:38 c'est le moment aussi où il entame un régime alimentaire,
20:42 étant donné qu'il a été diagnostiqué avec une sensibilité au gluten.
20:48 Donc il décide de se nourrir d'aliments biologiques,
20:53 d'aliments vraiment très sains avec un régime strict,
20:56 où il ne peut plus, il supprime de ses plats le blé, l'orge et le seigle,
21:04 ce qui lui permet vraiment de se construire un physique hors du commun,
21:07 ce qui lui a permis de réaliser tous ses exploits.
21:10 Il y a cette histoire de la chambre à oxygène,
21:14 où il a été amené à l'utiliser plusieurs fois dans un tournoi du Grand Chlem,
21:20 pour se régénérer plus rapidement,
21:22 pour permettre à son corps de se récupérer plus rapidement,
21:25 suite aux efforts de ses matchs.
21:27 Alors il y a quelques clichés qui sont apparus de lui,
21:32 mais il faut savoir que cette pratique est complètement autorisée
21:35 par l'Agence mondiale d'antidopage.
21:38 C'est une pratique que même dans la natation Michael Phelps avait utilisée.
21:43 Il faut juste préciser que c'est autorisé, controversé,
21:46 étant donné que certains scientifiques ne sont pas en total accord
21:51 avec les bienfaits de cette technique,
21:54 mais ça lui incombe à lui-même au final de prendre le risque ou non de l'utiliser.
21:58 Au final, c'est ce qu'il a fait.
22:00 On peut imaginer que ça lui a été favorable,
22:03 dans la mesure où il a vraiment très bien géré ses blessures et l'état de son corps.
22:09 Il a réussi à aller sur le territoire en Australie.
22:13 Il a même réussi à aller s'entraîner sur la Road Lever Arena
22:17 avant le tournoi, ce qui est quand même énorme.
22:20 L'Australie a vraiment été très stricte au niveau du Covid,
22:25 elle avait une politique zéro Covid,
22:27 donc c'était déjà énorme d'avoir quelqu'un qui n'était pas vacciné en Australie
22:31 et pratiquer son métier.
22:35 Maintenant, est-ce qu'il a raison, est-ce qu'il a tort ?
22:37 La décision lui incombe.
22:39 A lui, personnellement, il avait le droit de se faire vacciner
22:45 ou de ne pas se faire vacciner, il a choisi la deuxième option.
22:47 Maintenant, il faut tout simplement savoir qu'il a juste à assumer les conséquences.
22:52 Il y a eu cette déchirure aux abdominaux en 2021,
22:56 ça a été dit comme ça.
22:57 Il y a eu ce documentaire, il a effectivement dit
23:00 qu'il allait nous dévoiler les dessous de cette histoire.
23:04 Maintenant, ça fait partie du personnage Novak Djokovic
23:09 et de tous les épisodes un peu hasardeux qu'on a eu de lui,
23:17 avec effectivement ce paradoxe,
23:20 mais ça n'enlève rien sur l'immense champion qu'il est.
23:24 Novak Djokovic entretient quand même des amitiés qui posent question.
23:29 Alors en fait, on est en 2021 après l'US Open,
23:33 donc il a perdu contre Medvedev, une défaite assez douloureuse,
23:37 et puis il rentre se ressourcer en Serbie,
23:40 et là il va être photographié avec Milan Jolovic.
23:43 Alors Milan Jolovic, c'est pas n'importe qui.
23:46 Milan Jolovic, c'est un ancien chef paramilitaire
23:49 d'un groupement militaire qui s'appelle les Loups de l'Adrena.
23:54 Alors là, pour expliquer, les Loups de l'Adrena,
23:56 ils ont joué un rôle, j'ai parlé de Milosevic il n'y a pas longtemps,
24:00 Milosevic, nationaliste,
24:01 il a envoyé des groupes paramilitaires un peu dans toute la Yougoslavie
24:05 pour un peu semer la terreur quand même,
24:06 et en 1995, les Loups de l'Adrena, ils vont faire un massacre,
24:10 ça s'appelle le massacre de Sebreninka,
24:13 contre des musulmans, des milliers de musulmans vont être tués.
24:16 Donc c'est un massacre important qui fait date dans l'histoire,
24:19 qui est enseigné dans tous les livres d'histoire,
24:21 qui est extrêmement documenté,
24:23 et donc ce chef-là, avec lequel Novak a été photographié,
24:27 a participé à ce massacre.
24:29 Donc forcément, une fois qu'on sait ça,
24:32 on peut se dire, voilà, est-ce que Novak cautionne tout ça ?
24:35 Est-ce qu'il a été conscient de ce qu'a fait cet homme dans l'histoire ?
24:40 Ça c'est des questions où on n'a pas la réponse,
24:42 nous on a juste les photos, voilà, où il était à un banquier avec lui.
24:46 Bon, ça c'est les premiers éléments.
24:49 Après, sa famille et Novak lui-même
24:51 entretiennent de toute façon des bonnes relations, on peut dire,
24:54 avec les nationalistes, notamment un autre nationaliste,
24:57 lui qui est serbe, mais qui est en Bosnie,
25:00 parce que la Bosnie est coupée en trois, donc il y a trois présidents,
25:04 et Milorad Dodik fait partie de cette présidence tripartite en fait,
25:09 et lui c'est un nationaliste aussi.
25:11 C'est un nationaliste, c'est un sécessionniste,
25:13 et c'est même un négationniste sur les crimes de guerre
25:16 que je viens d'évoquer, donc le massacre de Sévrenica.
25:19 Donc on voit un peu le tissu idéologique
25:22 dans lequel se trouvent tous ces personnages-là,
25:24 et Novak a été aussi photographié avec lui,
25:26 et puis de toute façon sa famille entretient de très bons rapports avec lui,
25:30 c'est pas tellement caché d'ailleurs en Serbie tout ça.
25:33 Donc voilà un petit peu les appointances de Novak
25:36 en matière de politique en Serbie,
25:38 et en fait ça nous montre quelque chose,
25:40 c'est qu'il est sur une ligne de crête au niveau de sa communication.
25:43 En dehors de la Serbie, quand il va sur les tournois,
25:45 forcément il ne parle jamais de politique,
25:47 en tout cas il est très neutre sur ses sujets,
25:49 il essaye de préserver un petit peu tous les avis,
25:52 mais quand il rentre, effectivement on a eu ces épisodes
25:55 qui le marquent évidemment très politiquement.
25:58 Et donc comment faire pour lier une image qu'il voudrait peut-être lisse,
26:02 et en même temps ses affinités avec des milieux assez nationalistes.
26:08 Quand on me dit Novak Djokovic, je pense à une légende tout simplement,
26:11 même tout sport confondu.
26:13 Il faut savoir qu'il est venu dans une ère qui était vraiment très ancrée,
26:18 entre fédérère, l'élégance, le style,
26:22 un style incroyable, un Adal,
26:25 qui est beaucoup plus dans le combat, dans la résilience.
26:28 Je pense que les deux, comme vous l'avez si bien dit,
26:31 les gens ont fait leur choix en fin des années 2000.
26:36 Le venir, le voir, et tout éclater à ce point-là,
26:41 je pense que ça a vraiment surpris plus d'une personne et plus d'un fan de tennis.
26:46 Même avec ce désamour entre guillemets du public,
26:50 il a su marquer son histoire dans des grandes finales de grand chelem.
26:54 Je pense à l'US Open 2015.
26:56 Il y a effectivement cette finale à Wimbledon en 2019
26:59 que j'ai pu raconter tellement le scénario est exceptionnel.
27:04 Ça démontre un mental hors du commun.
27:07 Et pour faire un pont avec Scaddy Maxime,
27:09 ça doit remonter à tout ce qu'il a vécu dans son enfance,
27:12 à ses événements tragiques.
27:14 C'est un personnage rempli de paradoxes,
27:17 mais aussi d'une histoire exceptionnelle.
27:21 Tout cela fait qu'on se souviendra de Novak Djokovic
27:25 dans 20, 50 ans, dans un siècle.
27:28 C'est un des plus grands, pour finir,
27:30 je pense un des plus grands sportifs de l'histoire.
27:33 Tout sport confondu, toute époque confondue,
27:37 je pense qu'il faut mettre beaucoup de respect sur la personne de Novak Djokovic,
27:41 mais sur l'homme et sur le joueur.
27:43 L'homme forcément a ses failles, mais il a aussi ses qualités.
27:47 Je pense que l'humain n'est pas à mettre en cause.
27:50 [Musique]