• l’année dernière

Visitez notre site :
http://www.france24.com

Rejoignez nous sur Facebook
https://www.facebook.com/FRANCE24

Suivez nous sur Twitter
https://twitter.com/France24_fr#

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Et l'on reparle de cet accord sur les céréales ukrainiennes et plus globalement de la fragilité de l'alimentation mondiale
00:05 avec notre invité ce matin. Bonjour Olia Taieb-Sheriff. Merci d'avoir accepté notre invitation.
00:11 Vous êtes
00:13 agronome de formation, responsable d'études au sein de Farms, c'est la fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde.
00:20 D'abord, donc, je vous propose de revenir sur ce non-renouvellement de l'accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes.
00:26 En gros, les navires qui transportent du blé, du maïs en provenance d'Ukraine pourraient donc rester bloqués, ne pas livrer leur cargaison,
00:32 notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Le secrétaire général des Nations Unies évoque une menace pour des centaines de millions de personnes.
00:38 Pourquoi et où en est la situation aujourd'hui ?
00:41 Alors, tout d'abord, il faut bien comprendre que la suspension de cet accord n'est pas une surprise, on va dire. Ça fait deux mois que
00:50 l'intensification du conflit
00:52 amène à penser que la Russie campe de plus en plus sur ses positions. Le point d'orgue, ça a été la destruction du pipeline
00:59 transportant de l'ammoniaque qui permet à fabriquer des engrais,
01:02 qui était le principal point de négociation des Russes dans l'accord. Et donc, pour l'instant,
01:08 il faut bien voir que ce corridor était au ralenti, en fait, depuis deux mois, puisque on est à la fin de la saison
01:15 de commercialisation des céréales, blé-maïs. Donc, il n'y avait plus grand-chose qui passait par ce corridor.
01:22 Et par ailleurs, ça fait de nombreux mois que l'Union européenne appuie
01:26 pour la montée en puissance du corridor de solidarité, c'est-à-dire le transit par voie terrestre des céréales, par l'Union européenne.
01:33 Oui, ça fait déjà un an que la situation est fragile avec la signature de cet accord.
01:39 Est-ce que des pays peuvent compenser ce manque
01:41 à destination de ceux qui ont besoin de ces céréales ? Vous l'avez dit, il y a les voies
01:48 terrestres, mais il y a d'autres producteurs de blé et de maïs qui peuvent compenser ?
01:52 Alors, justement, là, on parlait à court terme,
01:56 on va attendre de voir ce qui peut se passer. A plus long terme, en fait, le vrai risque
02:00 de la suspension de cet accord, ça va rajouter de l'incertitude aux nombreuses incertitudes qui préexistent sur les marchés de céréales.
02:08 Ça fait bien un an que cette situation, que les céréales ukrainiennes ont du mal, quand même,
02:14 à transiter et à atteindre les pays qui en ont besoin. Et donc, depuis ce temps-là, c'est bien l'Union européenne et la Russie,
02:21 qui sont les principaux exportateurs de céréales vers l'Afrique, le Moyen-Orient,
02:25 qui fournissent ces pays. Ce qui est incroyable avec cette crise, c'est qu'on a vu l'incroyable fragilité
02:31 de l'alimentation mondiale, la façon dont tout cela fonctionne, ça fonctionne à flux tendu.
02:37 Oui, exactement.
02:40 Il faut quand même aussi avoir en tête que là, on est actuellement sur une récolte mondiale de blé, puisqu'on parle de blé, qui est
02:47 abondante. On a d'autre part des inquiétudes sur le plan climatique,
02:51 météorologique, puisque c'est avant tout ce critère-là qui va faire varier l'offre de céréales et qui peut également priver le marché
02:58 de nombreux volumes. On peut se souvenir de la sécheresse de l'année dernière en Argentine, qui a quand même réduit les volumes exportés.
03:05 Et donc pour ça, ça va avoir une influence bien entendu sur la sécurité alimentaire mondiale.
03:10 Alors il faut avoir en tête que ce n'est pas seulement l'Ukraine
03:13 qui va permettre d'approvisionner les populations en alimentation. Les premiers pourvoyeurs d'alimentation pour leur population sont les pays eux-mêmes.
03:23 C'est-à-dire notamment en Afrique, les pays africains.
03:27 Exactement. On a l'Afrique du Nord, qui est fortement dépendante des importations. On peut vraiment citer l'Egypte
03:33 comme gros importateur. Mais en ce qui concerne l'Afrique subsaharienne,
03:37 le blé est une céréale qui est peu consommée.
03:41 C'est dans des points spécifiques des centres urbains, certains pays très spécifiques. Mais avant tout,
03:47 c'est le maïs, le mil, le sorgho, enfin d'autres céréales qui sont cultivées sur place, qui alimentent la population.
03:53 Et donc là, il faut bien avoir en tête que le principal risque de cette situation très forte d'incertitude,
03:59 c'est que les prix se remettent à monter, et avec eux, la hausse de l'inflation alimentaire qui vient à nouveau fragiliser
04:05 les populations les moins favorisées et les pays les moins favorisés également.
04:10 Notamment donc en raison des questions climatiques.
04:14 Est-ce que cette vague de chaleur que subit tout l'hémisphère nord en ce moment peut avoir un impact ?
04:18 Alors oui, on est actuellement sur une vague de chaleur dans l'hémisphère nord. On peut citer la péninsule ibérique, on peut citer la Méditerranée.
04:28 Ça va bien entendu contribuer à réduire la quantité et la qualité des céréales produites dans ces zones très précises.
04:34 Pardon, il n'y a pas que les céréales d'ailleurs, il y a les fruits et légumes également.
04:37 Oui, également. En tout cas, quand on parle de
04:39 sécurité alimentaire, on parle de ces gros volumes de
04:44 commodités, ce qu'on appelle les céréales, et qui vont avoir un fort impact sur le marché, même si bien entendu...
04:49 Ce sont les bases alimentaires.
04:50 Exactement, même si bien entendu tous les types de cultures ont leur importance, mais là on parle bien de ces bases-là.
04:56 Et sur le plus long terme, on peut parler également du phénomène El Niño qui pourra avoir un impact
05:00 qu'on ne peut pas encore quantifier autant dans l'hémisphère sud,
05:04 enfin plutôt dans l'hémisphère sud, pardon, dans plusieurs mois.
05:07 Donc le climat est en train de changer sur notre planète, on le sait, ça fait des décennies qu'on en est donné.
05:12 Ça fait quelques années qu'il y a une véritable prise de conscience. Maintenant, qu'est ce qu'on fait ? Comment est-ce qu'on peut adapter
05:18 les agricultures à ces phénomènes climatiques ?
05:21 Alors effectivement, on est aujourd'hui plus que jamais face à des grands enjeux.
05:26 Sur le site de la Fondation Farm, on a
05:30 publié une étude qui parle de ces enjeux, comment faire pour permettre une meilleure résilience des agricultures face aux chocs,
05:38 qui soient géopolitiques ou économiques, qui se multiplient en plus des chocs climatiques.
05:42 Et là on est face à des problématiques assez sérieuses, j'ai envie de dire. D'une part, du côté des agricultures du nord, c'est de
05:49 permettre de les adapter à cet environnement très changeant,
05:52 à les déconnecter un peu de la variabilité éventuellement des marchés
05:57 et du climat. Et pour ce qui est des agricultures du sud, il y a encore un gros travail de développement de ces agricultures qui puissent être
06:04 inclusives et durables, qui puissent prendre en compte la multiplicité
06:08 des formes d'agriculture, qu'elles soient petites agricultures familiales ou agricultures plus spécialisées.
06:14 Pour la question de l'hémisphère nord, ça veut dire quoi ? Repenser nos cultures, arrêter
06:19 les cultures qui demandent beaucoup d'eau, comme le maïs ou le tournesol est passé, par exemple,
06:25 on parle beaucoup de la culture du sorgho ici en Europe.
06:27 Oui, il va falloir effectivement, en tout cas, trouver,
06:31 augmenter la diversité des plantes cultivées, puisqu'on parle seulement de végétaux, mais on peut parler des animaux également,
06:39 parce que c'est cette diversité qui va faire la résilience
06:44 de cette agriculture
06:46 aux événements imprévisibles sur le plan climatique. Il faut bien entendu développer des variétés qui soient plus résistantes, mais c'est vraiment cette diversité
06:54 qui va vraiment permettre cette adaptation de l'agriculture.
06:59 Ça demande une vraie révolution agricole, comme on l'a connue dans les années 50 ici. Il faut repenser la façon de faire l'agriculture.
07:05 Effectivement, il faut penser autant aux techniques
07:08 qu'à l'économie agricole, que la manière dont
07:13 ces grandes filières s'organisent
07:16 et
07:18 dont l'agriculture va vraiment réagir à cette économie.
07:21 Merci beaucoup, Olga Taïeb-Scherif,
07:24 d'avoir été notre invitée ce matin, d'avoir accepté de venir si tôt. Je rappelle que vous êtes responsable d'études au sein de
07:29 FARM, la Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde. Encore merci.

Recommandations