Rencontre avec l’écrivain Erik Orsenna, quelques minutes avant son débat aux Amis de l’Humanité avec le directeur de l'Humanité, Fabien Gay, sur la liberté de la presse. « La liberté de la presse est essentielle aujourd’hui car notre monde est compliqué », souligne l’académicien.
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00:00 Éric Orsena, bonjour, écrivain, académicien.
00:04 Vous êtes là pour participer au débat avec Fabien Guay sur la liberté de la presse.
00:10 Nous sommes aux Amis de l'Humanité.
00:12 La liberté de la presse est en danger véritablement aujourd'hui, Éric Orsena.
00:17 D'abord, la liberté de la presse est essentielle, essentielle aujourd'hui parce que notre monde est compliqué.
00:23 Et donc, si notre monde est compliqué, il faut une presse qui soit très précise.
00:29 Et c'est de plus en plus cher d'aboutir à des vérités parce que les vérités sont très difficiles à cerner,
00:38 demandent des analyses, demandent des précisions, demandent plein de compétences.
00:42 Donc, c'est cher. Et comme c'est cher, eh bien, les journaux sont entre les mains de ceux qui ont beaucoup d'argent.
00:49 Et donc, ça, c'est le premier risque, c'est-à-dire d'être entre les mains de ceux qui ont les moyens de financer,
00:54 qui ont trouvé leur argent ailleurs et qui disent « Tiens, c'est pas mal que j'ai un organe de presse, radio, journal ou chaîne de télévision ».
01:06 Et alors, ça, c'est le premier truc parce qu'il y a pire que la censure. Il y a l'autocensure.
01:12 Même s'il y a des gens qu'on peut considérer comme des milliardaires gentils, c'est-à-dire ceux qui, a priori, n'interviennent pas.
01:21 Mais ils n'ont pas besoin d'intervenir parce que les journalistes des organes qu'ils possèdent, jamais n'iront faire une enquête sur eux.
01:30 Jamais. Ce qu'on appelle l'autocensure. Donc l'autocensure, c'est-à-dire de l'ombre, du noir, de la nuit, de tout ce qui dérange.
01:38 Ça, c'est la première chose. La deuxième chose, c'est qu'il y a parmi ces financiers des gens qui ont, en dehors de leurs intérêts économiques,
01:47 une vision politique extrêmement précise et qui peut être totalement redoutable. Donc ils sont des militants.
01:53 Et ils sont des militants – on parle avec la presse de Vincent Bolloré – qui sont des militants de l'extrême-droite.
01:59 On l'a vu, qui donnent vraiment toute la possibilité à quelqu'un comme Zemmour de dire ses contre-vérités en prenant toujours de haine.
02:09 Donc vous voyez, c'est 1) la question « On a besoin de vérité ». 2) La vérité est extrêmement chère, de plus en plus chère à financer.
02:18 Comment est-ce qu'on finance ça ? Et il faut lutter contre l'autocensure et lutter en même temps, je dirais. En même temps.
02:25 Moi, c'est bon. En même temps à moi. Lutter aussi contre ceux qui ont un projet politique. Donc vous voyez, c'est pour ça qu'un des enjeux,
02:33 maintenant, de notre démocratie, c'est de trouver de nouvelles règles du jeu qu'on doit bâtir.
02:41 Et il se trouve que – moi, je ne suis pas seulement écrivain ou économiste, etc. – j'ai été 20 ans conseiller d'État.
02:45 Donc je connais un petit peu les questions de droit. Donc il y a une question de droit qui est absolument centrale.
02:50 Et c'est de ça dont on va parler à ce débat.
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