EVA Tutelles est un service mandataire à la protection des majeurs basé en Isère.
Structuré sous forme associative, il agit sur désignation du juge des tutelles, magistrat du tribunal judiciaire. Ses professionnels assistent ou représentent les personnes aux capacités personnelles altérées dans les actes juridiques et administratifs de la vie courante, en leur assurant un suivi personnalisé, respectueux de leurs droits et de leurs besoins. EVA Tutelles développe une approche singulière de ce champ du droit dédié aux grandes vulnérabilités, en alliant expertise, innovation et soutien constant à l’expression et l’accomplissement de la volonté.
Structuré sous forme associative, il agit sur désignation du juge des tutelles, magistrat du tribunal judiciaire. Ses professionnels assistent ou représentent les personnes aux capacités personnelles altérées dans les actes juridiques et administratifs de la vie courante, en leur assurant un suivi personnalisé, respectueux de leurs droits et de leurs besoins. EVA Tutelles développe une approche singulière de ce champ du droit dédié aux grandes vulnérabilités, en alliant expertise, innovation et soutien constant à l’expression et l’accomplissement de la volonté.
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00:00 Le Grand Entretien avec l'association Eva Tuttel.
00:09 Je vous présente tout de suite mes invités.
00:11 Aude Gauthier, la directrice générale, bonjour.
00:14 Bonjour.
00:15 Bienvenue.
00:16 Et Pauline Rao, bonjour, bienvenue.
00:17 Vous êtes mandataire judiciaire à la protection des majeurs au sein d'Eva Tuttel.
00:21 C'est quoi votre mission principale ? De quoi on va parler dans ce Grand Entretien ?
00:25 Oui, bien sûr.
00:26 Notre mission, ça va être de suivre les personnes vulnérables dans les actes administratifs
00:31 et juridiques de la vie courante.
00:32 Donc une personne vulnérable, finalement, ça peut être moi demain, ça peut être
00:36 vous.
00:37 On peut tous être confrontés à rencontrer des problèmes.
00:39 On peut développer une maladie psychique, un handicap physique et ne pas avoir de proches
00:47 pour nous aider.
00:48 Ce que tu soulignes, Pauline, c'est très important.
00:50 Et finalement, ce qui fait la spécificité un petit peu de notre métier, c'est qu'on
00:54 va travailler autour de la volonté des personnes.
00:58 Il ne nous appartient pas de définir ce qui est bon ou ce qui est meilleur pour elles.
01:04 Lorsqu'une personne protégée se détermine, que sa décision est conforme au droit et
01:09 qu'elle est faisable au niveau de son budget, on n'a pas de raison de s'y opposer.
01:13 D'ailleurs, à ce sujet, j'ai un exemple concret qui m'arrive souvent.
01:17 C'est les personnes protégées qui préfèrent s'acheter des cigarettes plutôt que de
01:22 s'acheter à manger, par exemple.
01:23 Ça, c'est quelque chose que je ne peux pas m'y opposer.
01:26 C'est-à-dire que la seule limite, ça va être le danger.
01:30 Et le danger, c'est une menace imminente à sa vie.
01:32 Là, forcément, il faudra alerter.
01:34 Et pour terminer juste sur les missions, j'aimerais ajouter qu'il y a du coup des
01:39 cas où on assiste la personne, où on collabore avec elle.
01:43 Ça, c'est de l'assistance.
01:44 Et dans un autre cas, on va faire à sa place.
01:46 Et là, c'est de la représentation.
01:47 Mais ça veut dire, pour bien comprendre, il y a toujours une décision judiciaire.
01:51 C'est un juge des tutelles qui décide de vous confier ses missions, c'est ça ?
01:56 Oui, c'est ça.
01:57 C'est le juge, anciennement juge des tutelles, qui s'appelle désormais le juge des contentieux
02:02 de la protection.
02:03 D'accord.
02:04 Sur quoi repose votre expertise ? Il y a, je crois, une centaine de salariés au sein
02:08 de l'association.
02:09 C'est quoi votre expertise ? Pauline, continuez.
02:10 Oui.
02:11 Alors, nous, on va permettre aux personnes protégées de payer leurs factures, de remplir
02:18 leur dossier CAF, de les aider dans la réalisation d'un projet de vente ou d'acquisition d'un
02:24 bien immobilier, ou bien encore de réaliser les actes liés à une succession.
02:29 Ça, c'est vraiment notre expertise.
02:32 Et puis, également, dans certains cas, et selon la décision du juge des tutelles, on
02:38 peut être amené à agir en matière de santé.
02:41 Voilà.
02:42 Par contre, j'aimerais insister sur le fait que nous, on n'est pas là pour faire les
02:46 courses à la place de la personne.
02:47 On n'est pas là pour l'accompagner à ses rendez-vous médicaux.
02:51 Vous dites ça parce que ce sont des demandes qui vous ont faites ?
02:54 Exactement.
02:55 Donc, c'est pour ça que j'aimerais insister là-dessus, pour dire que tout ça, ce n'est
03:01 pas nos missions, ce n'est pas surtout le rôle d'une mesure de protection aujourd'hui.
03:05 C'est important ce que souligne Pauline, parce que du coup, ce qui fait la spécificité
03:09 et puis l'expertise, c'est précisément que la mesure s'impose à la personne, qu'elle
03:15 le veuille ou non.
03:16 Elle n'a pas forcément décidé d'avoir une mesure de protection et nous, on doit
03:20 gérer cet aspect émotionnel.
03:22 Et finalement, l'expertise, notamment de Vea Tuttel, c'est ce travail de la confiance
03:28 sur le long terme, c'est de suivre en proximité et de faire finalement adhérer la personne
03:33 à une mesure dont elle ne voulait pas au départ.
03:35 Oui, parce que ça vient des familles, souvent, qui passent par un juge et qui l'imposent
03:41 à la personne.
03:42 C'est un peu comme ça que ça se passe.
03:43 C'est ce que moi, je crois en connaître.
03:45 On va considérer que la personne, elle a un besoin, qu'elle ne peut pas pourvoir seule
03:48 à ses intérêts.
03:49 Effectivement, la famille, des proches, la personne elle-même ou des tiers peuvent aussi
03:54 faire la demande au juge.
03:55 Il faudra quand même un certificat médical circonstancié qui reconnaît une altération
03:59 des facultés physiques ou psychiques.
04:02 Mais effectivement, à partir du moment où on a ces deux facteurs, une requête, un certificat,
04:06 eh bien la personne est placée en protection qu'elle veuille ou non.
04:10 Et je veux bien qu'on insiste là-dessus, parce que ce que j'entends dans vos explications,
04:14 c'est qu'il y a un travail de conviction auprès des personnes que vous aidez d'une
04:20 certaine façon.
04:21 Parfois, ils sont un peu réticents ou hostiles au départ, on peut dire ça.
04:25 Oui, c'est pour ça que véritablement, notre expertise, c'est ce travail autour de la
04:29 volonté de parvenir à la faire adhérer à cette mesure de protection.
04:33 Alors, c'est une tâche difficile, mais c'est notre métier de gérer cet aspect-là en réalité.
04:38 Avec une autre dimension sur laquelle on peut peut-être insister, ils sont aussi...
04:43 Est-ce qu'on peut dire qu'ils sont aussi membres de l'association, enfin, les personnes
04:48 qui sont placées sous tutelle et que vous aidez ? Donc, il y a un équilibre à trouver
04:52 entre ce qui dépend d'eux, ce qui dépend de vous, c'est ça ? Pas totalement les assister,
04:58 ce que vous nous disiez tout à l'heure.
04:59 Bien sûr, exactement.
05:00 On travaille de toute façon avec eux pour les accompagner dans leur projet de vie, prendre
05:04 en compte leurs décisions, leurs volontés.
05:06 Donc, bien sûr qu'ils sont au cœur de l'association.
05:09 Pourquoi faire appel à vous ?
05:11 J'imagine qu'une famille est en train d'être confrontée à cette décision difficile,
05:15 c'est vraiment une décision difficile, et se dit, tiens, pourquoi faire appel à Evatik
05:19 et à votre association ?
05:20 Alors, oui, mais justement, l'avantage de notre association, pardon, c'est qu'on avance
05:25 vraiment avec une mission qui est celle de donner...
05:29 En fait, on veut que les personnes n'aient plus besoin de nous.
05:32 D'accord ? Donc, vraiment, je vous donne un exemple concret.
05:35 Par exemple, un majeur protégé qui se rend à la CAF et qui demande une attestation,
05:42 alors qu'il a le droit, et on lui répond, eh bien non, allez voir votre curateur, il
05:47 vous l'enverra.
05:48 Alors qu'en fait, nous, on veut lui donner vraiment les outils pour qu'il puisse parvenir
05:53 à récupérer cette attestation seul, parce qu'en fait, c'est son droit, et que nous,
05:58 ce qu'on veut, c'est qu'il puisse faire valoir ses droits, en fait.
06:01 Vous êtes là pour l'aider et en même temps pour pas lui gommer toute son autonomie, c'est
06:05 ce que je comprends.
06:06 Exactement.
06:07 Et ça, c'est vraiment, nous, en fait, on veut donner le pouvoir d'agir à ces personnes-là.
06:11 Ça, c'est vraiment primordial pour nous.
06:13 Et pour compléter ce que dit Pauline, on a deux atouts.
06:16 On avait compris qu'on va quand même gérer le budget de la personne, ses comptes, ses
06:20 placements, donc on va tracer les actions qu'on mène pour pouvoir en rendre compte.
06:25 Donc, un des atouts majeurs quand même de l'association, c'est d'avoir des processus
06:28 de contrôle et de suivi très stricts.
06:30 Et puis, comme tu l'as dit, on va redonner du pouvoir d'agir, on va travailler des outils,
06:34 on va développer des outils avec les personnes, donc on va les associer à nos réflexions.
06:38 Ça, c'est notre deuxième atout.
06:40 C'est essentiel parce qu'il ne faut pas oublier que ce sont les mieux placés pour
06:43 connaître leurs besoins, pour connaître leur quotidien.
06:46 Nous, on va les regarder comme capables pour leur donner ou leur redonner confiance.
06:51 La confiance, ça se nourrit et nous, on a envie de la faire grandir.
06:54 Je disais, là, on est sur ce thème-là, pourquoi faire appel à vous ? Ça veut dire que vous
06:58 n'êtes pas… enfin, il y a beaucoup d'associations comme la vôtre, en fait.
07:02 Il y a des milliers de mandataires judiciaires, il y a un certain nombre de mandataires qui
07:08 exercent sous forme associative, d'autres sous forme individuelle.
07:11 Et le troisième mode d'exercice, c'est les préposés d'établissement.
07:13 Plus ou moins bien structurés, c'est ça ?
07:15 Bien structurés, c'est une profession qui est méconnue.
07:18 D'ailleurs, j'aimerais profiter de cette interview pour rappeler qu'on a des savoir-faires
07:22 spécifiques, qu'on est une profession à part entière, avec des compétences particulières
07:27 qui méritent d'être connues et valorisées, ce qui n'est pas encore suffisamment le cas.
07:30 On va continuer de découvrir vos métiers et l'association EvaTutelle.
07:34 Quelques chiffres clés tout de suite grâce à Virginie Imhas.
07:38 Fondée en 2014, l'association EvaTutelle travaille au quotidien avec 96 salariés,
07:44 tous types de contrats confondus, ce qui représente 86 CDI, 7 CDD et 3 alternants.
07:50 Dans le cadre de leur programme de formation continue, les équipes opérationnelles de
07:55 l'association ont pu bénéficier de 746 heures de formation pour l'année 2022.
08:00 Enfin, 2151, c'est le nombre de mesures de protection exercées par l'association
08:06 pour trois tribunaux judiciaires sur le département de l'ISER.
08:10 Ce chiffre indique également le nombre de personnes suivies par leur association.
08:14 Plus de 2151 mesures de protection sur le département de l'ISER, c'est quand même
08:19 très important.
08:20 Vous, vous avez quoi, une centaine de personnes qui travaillent avec vous, c'est ça ?
08:24 C'est ça, exactement.
08:25 Donc une centaine de collaborateurs répartis sur l'ensemble du département de l'ISER.
08:29 Nous avons six sites.
08:30 Nous travaillons donc en collaboration avec d'autres acteurs du secteur social et médico-social.
08:36 On essaie de travailler vraiment en partenariat avec l'ensemble des personnes qui sont intéressées
08:40 au parcours de vie des majeurs protégés.
08:43 Est-ce que c'est un secteur où on innove, où on peut créer, travailler un peu différemment ?
08:48 Oui, bien sûr.
08:49 Alors nous, on est ambitieux.
08:50 Théoriquement, ça peut paraître simple, mais pourtant c'est très ambitieux.
08:55 On veut de l'innovation dans le regard des autres.
08:58 On veut que les personnes protégées ne soient plus considérées comme incapables de décider
09:02 et d'agir par elles-mêmes.
09:03 C'est un sacré challenge.
09:04 Sur l'innovation, vous lui avez ajouté quelque chose ?
09:07 Là-dessus, je suis tout à fait d'accord avec Aude.
09:09 Je suis d'accord avec toi là-dessus.
09:11 Et moi, j'aimerais ajouter, comme je l'ai dit précédemment, qu'on peut tous être
09:15 un jour vulnérable.
09:16 On peut tous être victime d'un accident, perdre un proche, perdre son travail encore,
09:22 et bien tomber en dépression, par exemple.
09:24 Ça, c'est des moments difficiles de la vie, mais qui peuvent tous nous toucher.
09:27 Et tous ces événements-là ne font pas de nous des incapables de tout.
09:31 Et ça, c'est vraiment ce qu'on veut montrer aux personnes que l'on suit, aux personnes
09:36 protégées.
09:37 Un dernier mot, Aude Gauthier, peut-être sur les projets.
09:39 Qu'est-ce qui se profile à l'horizon pour les semaines, les mois à venir ?
09:42 Alors, on aimerait, à moyen terme, embaucher une personne qui a une mesure
09:46 de protection ou qui a eu une mesure de protection pour devenir un collaborateur à temps plein.
09:50 On pense que par son vécu concret de ce que c'est qu'être majeure protégée, elle
09:54 va nous aider dans la relation aux personnes, elle va nous aider à reconnaître les émotions,
09:58 à trouver les mots justes et puis à les guider dans cette étape de vie qui est quand
10:02 même très délicate.
10:03 Et puis, c'est une manière aussi de montrer qu'on aligne nos valeurs avec nos actes,
10:09 se faisant on ne sait pas tout, on ne sait pas tout faire, mais le fait de savoir déjà
10:15 ça c'est un début.
10:16 Comme je l'ai dit tout à l'heure, on apprend beaucoup des personnes avec lesquelles on
10:19 travaille, on avance humblement.
10:22 Par contre, on est vraiment convaincus par notre projet, notre philosophie de travail
10:27 qui est de garder toujours à l'esprit que les personnes, même très altérées, même
10:32 très vulnérables, ont des compétences et que leur capacité de décider et d'agir
10:37 doit toujours être préservée et nourrie.
10:39 Merci beaucoup à toutes les deux.
10:41 C'était Eva Tuttel dans Le Grand Entretien.
10:44 [Musique]
10:46 (sonnerie)
10:47 Bismarck.