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00:00 *Générique*
00:07 Bonjour et bienvenue dans cet entretien de France 24.
00:10 Les images de ces îles de Philippines ravagées par le typhon ne cessent de nous parvenir.
00:14 Les témoignages de nos envoyés spéciaux qui s'enfoncent dans des contrées moins médiatisées que la ville de Tacloban
00:20 rapportent le même désespoir, des cadavres, des maisons totalement détruites
00:25 et des survivants par milliers coupés du monde sans vivre et sans eau potable.
00:30 11 millions de personnes ont été affectées par cette catastrophe selon l'ONU
00:34 et 4 millions et demi d'enfants, c'est le chiffre de l'UNICEF.
00:39 Nous accueillons aujourd'hui sa présidente pour la France, Michelle Barzac. Bonjour.
00:43 Vous avez, vous, UNICEF, une équipe qui est basée en permanence à Manille, en fait, aux Philippines
00:48 et qui s'est rendue immédiatement sur place. Qu'est-ce qu'ils ont pu constater ?
00:52 D'abord, nous avons une équipe comme dans beaucoup de pays, la plupart des pays, un bureau de terrain.
00:57 Il y a 100 personnes et on est là depuis 1947 et donc habitués déjà à intervenir dans ce pays
01:06 sur des catastrophes naturelles, dont certaines très récentes.
01:09 Comme vous savez, il y a eu un tremblement de terre il y a trois semaines.
01:12 Donc, nous sommes présents, habitués à travailler avec un réseau d'ONG local
01:18 et avec même du matériel prédisposé dans la région à Manille, à Mindanao.
01:25 Donc, effectivement, on a une...
01:30 Il faut aussi bien expliquer aux téléspectateurs que c'est ces 6 000 îles.
01:38 Donc, c'est un territoire qui est extrêmement dispersé et pour certaines, complètement inaccessible.
01:44 Et le typhon a traversé les Philippines à peu près en son milieu.
01:49 Et on est évidemment très centré sur Tacloban et personne n'a exactement la connaissance
01:56 de quels sont les autres sites qui ont connu le même typhon et peut-être le même destin.
02:04 6 000 îles, c'est vrai que c'est extraordinaire, avec de l'eau de tous côtés.
02:07 Avec de l'eau de tous côtés, des petites, des plus grandes, des très peuplées, des très peupelées.
02:11 Et donc, ça donne la complexité aussi de la reconnaissance d'une part et de l'accès
02:20 qui est très compliqué, qui n'est pas simple, qui n'est pas régulier.
02:25 Parce que pas de route, pas de moyen d'accès.
02:28 Alors là, les routes sont complètement... Les routes qui existent sont complètement encombrées,
02:32 les zones touchées sont encombrées. Il n'y a plus d'endroit pour atterrir.
02:36 Il n'y a pas de route, il n'y a pas de moyen de communication entre les îles,
02:41 ni très régulier, ni très possible, dans un moment de grande...
02:46 - Désespoir. - Oui, et puis de grandes catastrophes climatiques.
02:52 Et je vous rappelle qu'il y a trois semaines, il y avait un tremblement de terre à Bohol,
02:57 ce qui est juste en dessous de Tacloban, enfin qui est très très près de Tacloban.
03:01 - Et juste pour qu'on se rende compte de l'importance, vous insistiez sur le fait
03:04 qu'il y avait à la fois un typhon et à la fois un tsunami.
03:06 - Voilà, alors à Tacloban en particulier, mais sans doute dans d'autres endroits,
03:10 il y a eu un typhon avec un vent qu'on n'avait jamais vu.
03:13 C'est une catastrophe qu'on n'avait encore jamais vue, avec des vents à 315 km/h.
03:19 Et ça crée un phénomène de tsunami.
03:22 C'est-à-dire donc avec des vagues de 5-6 mètres qui rentrent avec une puissance incroyable
03:26 dans la ville, qui reflue, et c'est ce qui a créé des situations surréalistes
03:34 avec des énormes bateaux qui sont dans la rue, entre les fenêtres, si vous voulez.
03:39 Donc c'est un phénomène qu'on avait déjà connu avec le tsunami en Asie du Sud-Est.
03:44 - La particularité ici, c'est que, j'allais dire comme dans toutes les catastrophes,
03:48 il y a aujourd'hui la nécessité pour les survivants de se nourrir, d'avoir de l'eau,
03:53 d'avoir cet accès à l'eau potable qui vous est si important à l'UNICEF,
03:57 et toujours dans ce contexte, effectivement, d'île, de difficultés pour...
04:00 - Oui, parce que les gens meurent de soif et meurent de faim.
04:05 Il n'y a pas d'eau et il n'y a pas, vous le voyez aussi dans les photos,
04:09 il y a un accès restreint à ce qu'il reste de nourriture et parfois rien.
04:15 Et donc on arrive à avoir des bagarres pour trouver quelque chose à manger.
04:20 Alors l'eau, pourquoi c'est si important ? Il n'y a plus d'eau potable.
04:24 Et donc ça veut dire que c'est le véhicule à la fois de maladies hydriques,
04:30 alors les enfants qui sont notre préoccupation, comme vous l'avez dit,
04:34 et qui sont très nombreux, il y a 40% de la population aux Philippines qui sont des enfants.
04:40 - Population très jeune.
04:41 - Très jeune, d'enfants et qui sont... Alors il y en a beaucoup qui sont...
04:48 Et donc quand il n'y a pas d'eau, le risque majeur, c'est la déshydratation pour les enfants,
04:54 les bébés et tout ça, vous savez très bien qu'ils se déshydratent très vite, il fait très chaud.
04:58 Et ensuite c'est porteur de toutes les maladies, des diarrhées,
05:03 qui sont très rapidement mortelles chez les petits-enfants de moins de 5 ans
05:07 et qui sont porteuses d'épidémies.
05:09 Ensuite, il y a, s'il n'y a pas d'eau, il n'y a pas d'assainissement,
05:13 il n'y a plus de toilettes, il n'y a plus d'hygiène.
05:15 Donc il faut apporter, en dehors de l'eau potable,
05:18 alors comme on apporte de l'eau potable aujourd'hui,
05:20 on apporte des comprimés de purificateurs d'eau,
05:23 et puis il faut apporter des générateurs, mais il n'y a pas d'eau, il n'y a plus d'essence non plus.
05:28 Donc il faut trouver, il faut ces générateurs, puis ensuite, ou dessaliner ou purifier l'eau.
05:36 C'est vital, c'est immédiatement vital, parce qu'on meurt de soif,
05:41 et c'est rapidement dramatique du fait des maladies que ça véhicule.
05:47 Juste une parenthèse, vous connaissez parfaitement cette question à l'UNICEF,
05:50 parce que vous, dans le cadre de l'ONU, vous êtes responsable de ce dossier-là.
05:54 Alors nous, nous sommes responsables d'un secteur qui s'appelle WAUSH,
05:58 et qui couvre l'eau potable, l'apport de l'eau potable,
06:01 ou la restitution de l'eau potable, l'hygiène et l'assainissement,
06:05 c'est-à-dire la recréation de latrines, c'est-à-dire ce sont des toilettes.
06:10 Et qui sont indispensables dans une population qui est très touchée.
06:15 Ensuite, nous sommes responsables de la nutrition,
06:19 et alors c'est très important d'abord, parce que quand vous êtes devant une population qui meurt de faim,
06:25 il faut trouver des systèmes, mais encore plus les enfants,
06:28 car vous savez que les enfants tombent très très vite dans une dénutrition, une malnutrition,
06:34 et c'est ce qu'on appelle les famines.
06:36 Alors soit aiguë, et on a 2-3 semaines pour les sauver à ce moment-là,
06:41 il faut leur donner des aliments thérapeutiques, qui sont des, vous savez, des grosses,
06:47 des farines, qui sont, qui leur permettent, très très protéinées, des biscuits protéinés, etc.,
06:54 des nutriments qui couvrent les carences, et donc on retrouve, on leur retrouve un équilibre,
06:59 on les sauve, on leur retrouve un équilibre.
07:01 Alors c'est particulièrement fort chez les enfants qui ont moins de 5 ans,
07:04 et les bébés n'en parlons même pas.
07:06 C'est la même chose chez les femmes enceintes,
07:09 femmes enceintes et allaitantes, qui sont parfaitement vulnérables,
07:13 de la même façon qu'un petit enfant.
07:15 Alors après, avec ça, il y a l'infection, c'est-à-dire qui dit eau sale,
07:20 qui dit pas d'eau, qui dit petites blessures, c'est immédiatement le risque de septicémie,
07:27 et des drames immédiats, parce qu'on n'a rien pour les soigner.
07:32 Donc c'est des kits de santé qui comprennent cet ensemble d'apports
07:37 et qui complètent déjà les carences de l'eau, donc c'est les carences nutritives.
07:44 Après, nous avons un troisième mandat qui est très important,
07:49 c'est celui de la protection de l'enfance et des familles de la mère.
07:53 Le problème est le suivant, la réalité c'est qu'il y a énormément d'orphelins,
08:00 et il y a beaucoup d'enfants de familles séparées, c'est-à-dire les enfants ont perdu leurs parents.
08:07 Alors soit parce qu'il y avait un tsunami, soit c'est les vagues et la violence qui séparent,
08:13 soit ils sont non accompagnés, ils sont perdus.
08:16 Donc notre mission c'est évidemment de les protéger d'abord,
08:19 et je vais vous reparler de la protection, mais aussi c'est de tout faire,
08:25 et c'est aussi notre mandat de retrouver, de rapprocher les familles,
08:29 c'est-à-dire de permettre aux familles de retrouver leurs enfants, et aux enfants de retrouver.
08:33 Ça c'est tout un processus qui est très compliqué.
08:35 Et même d'aider aussi les parents quand par exemple ils se trouvent tout seuls à charge d'enfants
08:39 parce qu'il faut qu'ils assurent la survivance de la famille ?
08:41 Bien sûr, et aussi les parents, pour survivre, il faut qu'ils aillent chercher à manger,
08:48 c'est le struggle for life, et donc c'est aussi à ce moment-là de pouvoir protéger les enfants pour libérer les parents.
08:56 Mais la protection de la violence c'est aussi les violences.
08:59 Alors déjà l'ambiance, vous l'avez vu, est très violente.
09:03 On l'a vu, on a des images qu'on a vues maintenant avec l'armée qui se passe.
09:05 Elle est sauvage, parce que c'est une question vitale pour tout le monde, c'est la bataille pour la survie.
09:12 Elle est sauvage parce que c'est souvent une course contre la mort qui doit être résolue très très vite.
09:22 Et ensuite il y a les violences de base, et il y a tous les abus.
09:27 C'est la protection aussi contre les abus sexuels, contre les abus d'utilisation des enfants
09:32 à des fins qui ne sont pas toujours celles qui leur est destinée.
09:36 Et donc c'est dans ces moments de conflit, dans ces moments de crise aussi quelque chose qui est parfaitement important.
09:42 Alors une chose évidemment qui vous accompagne, vous avez expliqué tous les chantiers que vous devez relever aujourd'hui.
09:48 Ceux qui vous accompagnent, ce sont les dons. L'ONU demande 225 millions d'euros à tout le monde pour aider les Philippines.
09:56 L'ONU c'est toutes les branches de l'ONU. Nous sommes l'UNICEF, une branche, et nous avons évalué les besoins aujourd'hui,
10:04 qui sont réévaluables si nécessaire, à 26 millions d'euros, dont 70% sont consacrés à la question de l'eau.
10:13 Et tout ce qui environne l'eau, l'assainissement, etc.
10:16 Donc aujourd'hui, si on veut vous aider, si on a bien entendu les thèmes que vous avez abordés, il faut participer.
10:22 On a besoin d'une mobilisation vraiment très importante de nos donateurs,
10:26 avec donc les dons qui peuvent être faits sur le web, à l'unicef.fr, et qui peuvent être faits par voie postale,
10:36 à des adresses qui apparaissent peut-être là.
10:38 Alors vous avez vu beaucoup de crises. Aujourd'hui, est-ce qu'on arrive à redistribuer bien l'argent ?
10:43 Est-ce qu'on sait aujourd'hui aller dans différents domaines pour aider justement toute la population ?
10:48 Alors, si on veut bien faire, il y a plusieurs étapes qui sont absolument indispensables.
10:53 La première, c'est l'évaluation. Il faut évaluer le besoin. C'est ce que maintenant nous faisons très clairement.
10:59 Ensuite, il faut coordonner, c'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait une coordination pour la répartition de tous les savoirs.
11:07 Ensuite, il faut surveiller. Et ensuite, pour nous, c'est très facile parce que c'est très concret.
11:13 C'est des kits, c'est du matériel. On sait complètement quantifier le besoin, mais il y a des choses qui sont plus difficiles.
11:19 Nous avons aussi une responsabilité de coordination de l'ensemble des branches de l'ONU,
11:25 mais aussi des organisations des autres ONG sur ces thématiques-là.
11:30 Et donc, si vous voulez, maintenant, on connaît bien les étapes, la méthodologie, les procédures qu'il faut suivre
11:37 pour être sûr qu'on est tout de suite là, on peut tout de suite l'utiliser. C'est le cas depuis deux jours.
11:43 On a livré des latrines, des kits de santé, tout ce qu'il faut d'urgence.
11:48 Merci beaucoup, Michel Barzac, pour toute cette explication sur ce qui est en train de se passer aux Philippines.
11:55 Merci d'avoir suivi cet entretien et bonne continuation sur France 24.
11:59 [Musique]

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