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Musique
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00:00 C'est les 50 ans du hip-hop et on a décidé de vous raconter son évolution
00:02 et ses moments charnières avec une année, une anecdote.
00:05 On commence avec 1973, l'histoire du premier rappeur de l'histoire.
00:08 On dit que le hip-hop a 50 ans mais pourquoi ?
00:12 Parce qu'en fait le 13 août 1973, Clyde et Cindy Campbell, frères et sœurs,
00:15 décident d'organiser une soirée au rez-de-chaussée du 1520 Sidwick Avenue
00:19 en plein milieu du Bronx, New York.
00:21 En fait c'est vraiment Cindy qui a l'idée d'organiser cette soirée
00:23 car elle retourne bientôt à l'école et elle a besoin de force
00:26 pour s'acheter des fournitures et surtout être archi fraîche pour la rentrée.
00:30 Ça tombe bien, son ref a déjà une petite notoriété,
00:32 en tant que DJ dans le coin il se fait appeler Cool Herc.
00:34 Herc comme Hercule, parce que le mec est grand, charismatique
00:37 et a inventé une nouvelle façon d'enchaîner des disques sur ses platines,
00:40 le merry-go-round avec juste des boucles de batterie,
00:43 une façon de faire qui va devenir la source du hip-hop.
00:45 Et Cool Herc a aussi le meilleur système son du quartier,
00:47 des enceintes de malade fabriquées avec son père
00:49 dans la pure tradition des sound-systems jamaïcains.
00:51 Car oui, tout vient de la Jamaïque, même le hip-hop.
00:54 Cool Herc a déjà monté une équipe autour de lui,
00:56 entre système de sécu un peu gang et artistes foutraques.
00:58 Ils s'appellent les Herculoïdes, en mode Avengers du Bronx.
01:01 Parmi eux, il y a le premier rappeur de l'histoire,
01:04 Coq Laroc, qu'on entend pour la première fois ce 13 août 1973.
01:07 Premier rappeur ou disons plutôt premier master of ceremony,
01:10 le fameux titre MC, comme MC Hammer, MC Light ou MC Solar.
01:14 Ouais ça veut dire maître de cérémonie,
01:15 car en fait c'est un animateur de luxe,
01:17 celui qui arronde le public et maintient la soirée en pétard.
01:20 Mais la nouveauté de Coq Laroc,
01:22 c'est d'avoir des petites routines en rythme et en rime,
01:24 comme par exemple "You rock, you rock and you don't stop"
01:27 ou "Oh tell, mo tell, you don't tell, we won't tell"
01:30 qu'on a entendues après absolument partout.
01:33 Et ben c'est Coq Laroc qui les a inventées ces petits gimmicks,
01:35 ces petits mantras en rime qui vont être repris partout dans l'industrie du rap plus tard.
01:38 Mais justement, dès que le rap est devenu une industrie,
01:41 avec des disques, des groupes, des rappeurs,
01:43 Cool Herc et Coq Laroc ont disparu.
01:45 Notamment avec le premier grand succès du rap sur disque,
01:47 Rappers Delight de Sugar and Gang.
01:49 1979, l'histoire du premier morceau du rap de l'histoire.
01:53 A la fin des années 70, le hip-hop est devenu un mouvement culturel énorme,
01:56 surtout à New York.
01:56 Mais pour l'instant, aucun disque n'a réussi à recréer l'ambiance si particulière
02:00 des block parties de couleurs Grandmaster Flash ou Africa Bombata.
02:03 Pourtant, en 1979, Sugar and Gang,
02:05 un groupe monté de toutes pièces par Sylvia Robinson,
02:08 va exploser tout ça avec un tube, Rappers Delight,
02:10 qui reprend le Good Times de Chic, sorti quelques mois plus tôt.
02:13 Et vous connaissez absolument tous ce morceau,
02:15 c'est le premier vrai succès du rap,
02:17 mais ce n'est pas le premier morceau de rap sur disque,
02:20 malgré ce que beaucoup pensent.
02:21 Quelques mois plus tôt, le groupe de disco-funk The Fatback Band
02:24 termine son 12e album et Bill Curtis, le batteur et leader du groupe,
02:28 trouve que c'est peut-être l'album de trop.
02:29 Il n'y a pas de tube.
02:30 Il en parle en studio avec son producteur et bras droit, Jerry Thomas.
02:33 "Mec, il faut qu'on trouve un truc nouveau là,
02:35 tu vois notre instrumental Catch The Beat, et si on faisait un rap dessus ?"
02:38 Jerry répond "Mais un rap ? Mais personne ne sait rappeler dans le groupe,
02:40 comment tu veux qu'on fasse ça ?"
02:41 Dans le studio, il y a un roadie du groupe.
02:43 "Moi je connais un gars de mon quartier qui est super chaud en rap."
02:46 Bill dit "Ok, vas-y, ramène-le demain soir."
02:48 Le lendemain, le roadie se pointe avec un jeune gars nommé Timothy Washington.
02:51 Personne ne le connaît.
02:52 Il rentre dans la cabine et enregistre son rap en seulement deux fois.
02:55 Ses paroles sont un mélange entre le style de DJ Hollywood,
02:57 la star de la nuit à Harlem qui a l'habitude de rapper sur ses mix,
03:00 et de blagues un peu salasses que font les DJ à la radio à l'époque.
03:03 Bill Curtis est conquis, il rebaptise le morceau King Tim 3 en hommage aux jeunes rappeurs.
03:07 Un coup d'éclat qui sera le seul, car on ne reverra jamais,
03:10 Timothy Washington dans l'histoire du rap.
03:12 Mais le label n'est pas hyper fan des blagues salasses de King Tim,
03:15 donc le morceau ne sortira qu'en phase B du prochain single de Fatback Ben,
03:18 Bill est déçu.
03:19 Pourtant, ça sera le morceau le plus joué en radio de l'album,
03:22 le premier morceau avec du rap sur disque qui va donner envie à tout le monde de se lancer,
03:26 celui qui va influencer les futurs Run-DMC, Rakim ou Slick Rick.
03:30 1982, l'histoire du premier morceau rap engagé de l'histoire.
03:33 Le hip-hop est à la base une musique festive,
03:35 donc les premiers disques produits au début des années 80
03:38 essayent toujours de retranscrire cette ambiance pour mixer, danser, chanter,
03:41 se mesurer les uns les autres dans une compétition saine.
03:44 A l'époque, c'est vraiment les DJs les stars,
03:45 donc il n'est pas étonnant de voir Sylvia Robinson, encore elle,
03:48 signer rapidement Grandmaster Flash sur son label Sugar Hill Records.
03:51 Car Grandmaster Flash, à l'époque, c'est vraiment le boss des DJs.
03:54 Problème, impossible de retranscrire la science de ses mix et ses scratch sur un disque.
03:58 Donc Flash vient avec son groupe, 5 rappeurs, les Feuilles 5.
04:01 Et ensemble, ils sortent des disques qui retranscrivent l'énergie et la technique de leur soirée,
04:07 leur block parties.
04:09 Mais en 1982, Sylvia Robinson veut un morceau plus dur, moins festif,
04:12 qui décrit vraiment le mode de vie des ghettos new-yorkais.
04:15 Et ça tombe bien, un des auteurs et compositeurs de son label, Duke Bully,
04:18 vient d'écrire un morceau plus réel, composé au piano dans la cave de sa mère,
04:21 avec comme inspiration la grève des transports qui sévit à ce moment-là à New York.
04:25 Son morceau est plus lent, plus dur que le rap de l'époque, il l'appelle In The Jungle.
04:28 Première écoute, Sylvia est enchantée.
04:30 Elle pense que ça peut être le plus gros hit rap jamais conçu
04:33 et elle sait déjà à qui le proposer, son groupe phare, ses héros,
04:36 Grandmaster Flash and The Feuilles 5.
04:38 Problème, les membres du groupe sont pas chauds, mais alors vraiment pas chauds du tout.
04:41 Ils trouvent le morceau trop lent, pas du tout leur délire,
04:43 et eux qui sont habitués à faire danser en soirée,
04:44 ils ont carrément peur que ce morceau détruise leur carrière.
04:47 Sylvia prend alors un des rappeurs du groupe à part, Meli Mel, elle lui dit
04:51 "Fais ce morceau seul et je fais de toi une star".
04:54 Meli Mel accepte, bien sûr, et ajoute un bout d'un enceint coupé à lui
04:57 en plus des paroles écrites par Duke Bully.
04:59 Et bim, c'est ainsi qu'on obtient The Message,
05:01 le plus gros tube de Grandmaster Flash and The Feuilles 5,
05:04 sûrement l'un des plus gros tubes de rap,
05:06 qui est en fait un duo entre Meli Mel, seulement du groupe présent,
05:09 et Duke Bully, un total inconnu qui n'est pas du tout dans le groupe.
05:12 Quant à lui, Grandmaster Flash n'a absolument rien fait sur ce morceau.
05:17 Le pire, c'est que tout le groupe entier apparaît dans le clip,
05:19 et c'est Rahim, un des Feuilles 5, qui lip-sync entièrement les parties de Duke Bully,
05:23 qui lui est totalement absent de la vidéo.
05:25 D'ailleurs, après quelques autres morceaux, Duke Bully devient aussi totalement absent du rap.
05:29 Peu de temps après, il devient prof au lycée, puis à l'université,
05:32 et finit sa carrière en tant que maître de conférences en communication et pensée critique.
05:35 Pourtant, son nom est associé à un des morceaux les plus importants de l'histoire du hip-hop,
05:39 qui a lancé réellement le rap à tendance plus sociale et contestataire,
05:42 une dizaine d'années après ses débuts.
05:43 The Message va en effet influencer des rappeurs engagés,
05:46 comme KRS-One, Public Enemy, Brand New Bien ou X-Clan.
05:49 C'est aussi le morceau charnière qui va rendre les rappeurs plus importants que les DJs au sein du hip-hop,
05:54 car maintenant, il y a un message.
05:55 En 1984, la guerre des ondes fait rage dans le hip-hop.
06:01 Deux radios, et surtout deux émissions sont en totale concurrence.
06:03 D'un côté, chez WBLS, il y a l'émission Rap Attack,
06:06 avec le déjà légendaire Mister Magic accompagné d'un jeune DJ
06:10 qui va devenir le non moins légendaire producteur Marley Marl.
06:13 Ils représentent tous les deux le quartier de Queensbridge à New York.
06:16 De l'autre côté, sur Kiss FM, on a Cool DJ Red Alert,
06:19 un DJ très renommé dans les clubs,
06:21 affilié à la Zoo Nation, pur produit du Bronx, autre quartier de New York.
06:25 Et pendant des mois, les deux émissions vont s'envoyer les petits pics d'abord gentilliers,
06:29 puis de plus en plus radicaux, ça c'est le décor.
06:32 Maintenant le pitch.
06:32 Un jour, Red Alert reçoit un disque d'un nouveau groupe, UTFO.
06:36 Ils trouvent la face A du disque pas terrible,
06:38 mais jouent directement la face B dans son émission en disant
06:41 "Ce morceau-là, c'est un tube, c'est sûr".
06:43 Le morceau en question, c'est Roxanne Roxanne,
06:45 une chanson où le groupe s'adresse à une femme qui les ignore,
06:47 une femme du nom de Roxanne donc.
06:49 Ni le groupe ni le label ne sont vraiment convaincus de la puissance de ce morceau,
06:52 mais Red Alert a raison, ça devient un tube,
06:55 plutôt affilié à Red Alert, qui le joue très régulièrement dans son émission.
06:58 Un peu agacé, Mister Magic, dans l'autre émission,
07:00 joue Roxanne Roxanne sans trop de conviction.
07:02 UTFO a bientôt un grand concert à New York
07:04 et Mister Magic les invite dans son émission,
07:06 la consécration pour tous les rappeurs du monde à ce moment-là.
07:09 Mais c'est là que ça part en sucette.
07:10 UTFO pose un lapin sans prévenir,
07:13 ils laissent Mister Magic en plan total.
07:15 Mister Magic est fou de rage,
07:16 il demande à Marley Marl de trouver un moyen de se venger de UTFO,
07:20 mais aussi de Red Alert sur les ondes.
07:21 À cette époque, Marley Marl accumule le matos dans son appart de Queensbridge
07:24 et commence à produire des petits remix et des petits émutes.
07:27 Il croit souvent dans son quartier une jeune femme, chantée,
07:30 qu'il voit clasher tout le monde en rime dans la rue.
07:31 En rentrant chez lui, il la croise, lui parle de ce conflit avec UTFO,
07:34 elle répond direct qu'elle peut enregistrer des rimes de clash contre eux.
07:37 Il lui propose des jeans Serge Ovalenté en échange,
07:39 les plus recherchés du moment.
07:40 Chantée accepte et Marley Marl lui dit
07:42 "On va répondre au morceau Roxanne Roxanne de UTFO
07:44 comme si tu étais Roxanne, mais la vraie Roxanne."
07:46 Chantée est d'accord, elle débarque dans l'appart de Marl,
07:49 qui fait office de studio et balance ses rimes assassines
07:51 sur l'instru de UTFO un peu remixé par Marley Marl
07:54 et en freestyle pendant 7 minutes, elle envoie du clash.
07:57 Marley boucle ça, le met sur bande et l'emporte directement à Mister Magic
08:00 pour qu'il le diffuse sur Rap Attack.
08:01 Et là, c'est le rat de marée.
08:03 Le morceau est demandé par tout le monde
08:05 enregistré et diffusé sur cassette, passé de main à main dans la rue.
08:08 Un label de Philadelphie, Pop Art,
08:09 va même enregistrer le morceau directement à la radio
08:12 pour le sortir en disque sous le nom "Roxanne's Revenge",
08:15 la revanche de Roxanne.
08:16 Très rapidement, plus de 250 000 exemplaires du disque sont vendus
08:20 et Chantée devient une star, renommée "Roxanne Chantée"
08:22 juste à cause de ce morceau.
08:24 C'est le premier clash sur disque de l'histoire
08:26 qui va la lancer dans une carrière fulgurante,
08:27 notamment avec le Juice Crew de Mister Magic et Marley Marley.
08:30 Par contre, elle n'aura jamais vu la couleur de ses jeans Sergio Valente.
08:34 Quand ils ont enregistré ce morceau, Marley Marley et Roxanne Chantée
08:37 ne savent pas que ce n'est que le début d'une guerre énorme
08:39 qu'on appellera "The Roxanne Wars", la guerre des Roxannes,
08:42 avec des réponses de "The Real Roxanne", lancée par UTFO,
08:45 puis des dizaines et des dizaines de morceaux
08:47 impliquant plus d'une centaine d'artistes et des personnages fictifs
08:50 comme les parents de Roxanne, les frères de Roxanne,
08:53 la soeur de Roxanne et même son docteur.
08:55 Et oui, ça part complètement en sucette.
08:57 Mais c'est le vrai premier crossover de clash dans le rap
09:00 qui va lancer tout le reste.
09:01 Et la rivalité entre Mister Magic et Red Alert
09:03 ne fait que commencer, car bientôt,
09:05 la plus grosse battle entre quartiers va commencer, la Bridge War.
09:08 1985, l'histoire du premier morceau de gangsta rap de l'histoire.
09:11 Au milieu des années 80, un nouveau style de rap se développe,
09:13 notamment en Californie, le gangsta rap.
09:15 Très différent de l'ambiance festive ou engagée de l'époque,
09:17 le gangsta rap met en avant le style de vie des dealers,
09:20 des braqueurs, des arnaqueurs et des gangs.
09:22 Souvent nommé comme un des premiers morceaux du genre,
09:24 "Six in the Morning" de Ice-T
09:25 décrit le quotidien violent et sans concession d'un hors-la-loi
09:28 qui se fait réveiller par une descente de police à 6h du mat' chez lui.
09:31 Sorti en 1986,
09:32 ce morceau aura une fausse suite avec quasiment le même flow
09:35 et la même rythmique quelques mois plus tard.
09:37 "Boys in the Hood" de Eazy-E,
09:38 écrit par Ice Cube et orchestré par Dr Dre,
09:41 ils deviendront N.W.A, le gangsta rap en personne.
09:44 L'impact de "Boys in the Hood" est tel qu'il deviendra même
09:46 le nom d'un film de John Singleton quelques années plus tard,
09:49 un véritable classique.
09:50 Mais "Six in the Morning" et "Boys in the Hood"
09:52 ne sont pas les premiers morceaux de gangsta rap.
09:54 Pire encore, le gangsta rap n'est même pas né à Los Angeles
09:57 ou en Californie, mais à Philadelphie,
09:59 complètement de l'autre côté des Etats-Unis.
10:02 En effet, l'idée de "Six in the Morning" émerge dans le cerveau de Ice-T
10:05 une nuit dans un club de Santa Monica en 1985.
10:08 Les tubes d'électro-rap s'enchaînent et soudain,
10:10 Ice-T prend une déflagration.
10:11 Il entend un écho strident, un rythme qu'il n'a jamais entendu
10:15 et un mec qui rappe dessus d'une façon étrange.
10:17 Ice-T dira
10:17 "J'ai jamais pris de drogue,
10:18 mais j'ai l'impression d'avoir pris de la poudre d'ange en musique,
10:21 du PCP", un hallucinogène très prisé à l'époque.
10:23 Mais ce qui choque encore plus Ice-T que le son,
10:25 c'est les paroles de ce morceau.
10:26 Le rappeur y parle de trois initiales en boucle,
10:28 sans jamais en expliquer la signification.
10:31 Après quelques recherches,
10:32 Ice-T découvre le nom du rappeur de ce morceau,
10:34 Skool E.D.
10:35 et il découvre aussi que PSK désigne les Parkside Killers,
10:38 un gang de Philadelphie dont Skool E.D. est affilé.
10:41 Lui aussi membre de gang,
10:42 Ice-T est totalement subjugué par la façon dont Skool E.D.
10:45 parle ouvertement de cette vie dangereuse et illégale.
10:47 Il prend ça comme le point de départ d'une nouvelle ère du rap
10:50 et écrit "Six in the Morning" avec le même flow
10:53 que PSK.
10:54 Skool E.D. est vraiment un artiste à part dans le rap.
10:56 Il dessine ses propres pochettes de disques,
10:58 les produit lui-même
10:59 et les vend de main à main dans les rues de Philadelphie en 1985.
11:02 Son titre, "PSK", fait vite référence dans la rue
11:04 et quand Uncle Luke de 2Life Crew découvre l'énorme potentiel,
11:08 il le fait jouer directement dans son club à Miami.
11:10 C'est là que Skool E.D. prend vraiment conscience du succès du disque.
11:14 Et c'est ainsi que le gangsta rap s'est propagé
11:16 pour finir dans un club à Santa Monica
11:17 et influencer Ice-T, puis Ice Cube et NWA.
11:20 Depuis, le gangsta rap est devenu le genre le plus populaire
11:23 dans le rap mondial avec ses stars comme 2Pac,
11:25 Motorus B.I.G, Kool G Rap ou 57.
11:28 Le gangsta rap devient même le plus gros cliché du rap mondial
11:31 avec ses grosses voitures,
11:32 ses chaînes en or,
11:33 ses armes et sa violence verbale.
11:35 1986, l'histoire du premier deal avec une marque de l'histoire.
11:38 Au milieu des années 80,
11:39 un groupe a totalement changé la vision du rap.
11:41 Il s'agit de Run DMC.
11:43 En quelques mois, le trio du Queens a révolutionné les codes
11:46 autant à la production, le flow,
11:48 mais aussi la façon de s'habiller et de se comporter.
11:50 Stop aux déguisements de cow-boy et aux vestes en cuir sans manche,
11:53 bienvenue au bob cangol, basket et survêtement,
11:55 le style des B-Boys.
11:56 Run DMC est plus proche de ce qui se passe dans les rues de New York
11:59 à ce moment-là,
11:59 et ils vont devenir les premières stars planétaires du rap moderne.
12:03 En 1986, ils ont déjà 3 albums à leur actif
12:06 et des énormes succès dont leur collaboration avec Aerosmith
12:09 qui va leur ouvrir un public encore plus large.
12:12 Leur dernier album en date,
12:13 Raising Hell, est le top de leur carrière
12:16 et aussi le premier album de rap à devenir disque de platine.
12:19 Un accomplissement incroyable parmi tous ceux qu'ils ont déjà réalisés.
12:22 Alors en tournée, Run DMC font un stop à New York,
12:24 chez eux, au Madison Square Garden en 1986.
12:28 C'est la consécration totale,
12:29 le public est en feu,
12:30 la cote du groupe n'a jamais été aussi haute.
12:32 Futur boss de Dave Jam puis de Warner,
12:34 Leo Cohen est alors tour manager du groupe
12:37 aux côtés de Russell Simons chez Rush Management.
12:39 Il a alors une idée de génie,
12:41 inviter Angelo Anastasio,
12:42 un représentant de la marque Adidas,
12:44 pour assister au concert aux premières loges.
12:46 Car sur l'album Raising Hell,
12:47 le premier single est Mayadidas,
12:49 une ode à la marque allemande aux trois bandes
12:51 dont Run DMC est très friand,
12:53 niveau chaussures comme survêtements.
12:55 Pendant le show, quand le groupe joue
12:56 "FIRE UP"
12:58 ils demandent au public de mettre leur paire de Adidas en l'air.
13:01 Et là, une multitude de chaussures à trois bandes
13:03 voilent dans les airs.
13:04 Angelo se prend l'image en pleine face
13:06 et voit l'impact possible de la culture hip-hop
13:09 sur le marketing de sa marque
13:10 et les dollars qui peuvent aller avec.
13:12 Il veut alors qu'Adidas s'associe à Run DMC
13:14 et propose un deal d'exclusivité d'un million de dollars
13:17 avec la création de la propre ligne de sneakers pour le groupe.
13:20 Run DMC accepte avec le sentiment qu'il s'agit là
13:22 d'un nouvel accomplissement pour légitimer le hip-hop,
13:24 le rang le plus solide qu'une simple tendance du moment.
13:26 Ainsi, Run DMC ouvre la voie des grandes collaborations
13:29 entre rappeurs et marques,
13:30 allant de Jay-Z à 50 Cent en passant par Puff Daddy.
13:33 Ils sont même à l'origine de ces créations de marques
13:35 qui se multiplient dans l'histoire du rap et du hip-hop ensuite.
13:37 En 1984, Marie Tipper Gore, la femme d'Al Gore à l'époque,
13:45 entend leur fille de 11 ans chanter à fond
13:46 "Darling Mickey" de Prince.
13:47 Problème ? Ça parle de masturbation.
13:49 Tipper Gore est choqué et propose avec son groupe,
13:51 le Parents Music Resource Center,
13:53 une alerte à appliquer sur les disques trop obscènes,
13:55 violents ou orduriers.
13:56 Après de multiples remous au congrès,
13:58 ils atteignent leur but avec un premier label
14:00 à mettre derrière la pochette,
14:01 Parental Guidance Explicit Lyrics.
14:03 Pendant ce temps, à Miami,
14:04 Luther Campbell est un jeune promoteur de concerts
14:07 et animateur radio.
14:07 Il découvre un groupe californien nommé 2Live Crew
14:10 et décide de le faire jouer dans ses soirées.
14:12 Le contact passe hyper bien et Luther devient leur manager,
14:15 puis mentor, leader, membre à part entière,
14:17 sous le nom de Luke Skywalker.
14:19 Oui, oui, vous avez capté une référence à Star Wars.
14:21 Rapidement, le style de 2Live Crew devient extrêmement électrique,
14:24 caustique et tourné vers les clubs.
14:25 En gros, ça parle de sexe,
14:27 avec des blagues sur des rythmes super speed.
14:28 C'est ce qu'on appelle la Miami Bass.
14:30 Et ça cartonne !
14:31 Rapidement, Luke et ses amis deviennent des stars en Floride,
14:34 puis dans les États-Limitrophes.
14:35 Mais voilà, Tipper Gore et ses amis, les parents de la morale,
14:38 ne voient pas d'un très bon œil la musique salace de 2Live Crew.
14:40 En 1988, un disquaire est carrément arrêté par un policier en civil
14:44 parce qu'il lui avait vendu un album de 2Live Crew.
14:46 Pourtant, le groupe réitère en 1989 avec le classique
14:50 As Nasty As They Wanna Be,
14:51 sur lequel on retrouve leur tube Me So Horny, très explicite.
14:55 L'album cartonne et devient leur premier disque de platine.
14:57 Et là, c'est la goutte qui fait déborder la piscine.
14:59 La Cour fédérale de Floride condamne l'album pour obscénité.
15:02 Il est censuré, interdit de vente en Floride.
15:04 C'est le premier album de l'histoire à être jugé obscène et censuré.
15:07 Le jugement sera cassé plus tard,
15:08 mais 2Live Crew reste dans le viseur des censeurs,
15:11 notamment de Tipper Gore et son groupe de parents pas contents.
15:14 Tout ça pour des blagues de cul en gros.
15:16 En 1990, Luke et 2Live Crew reviennent avec un album au nom très provoque,
15:20 Banned In The USA.
15:21 Et les parents pas contents en profitent pour lui lancer le nouveau concept,
15:24 un gros panneau noir et blanc obligatoire sur la pochette,
15:27 Parental Advisory Explicit Lyrics.
15:29 À partir de Banned In The USA,
15:30 tous les albums avec des paroles obscènes, violentes ou trop crues
15:33 auront le droit à leur petit logo noir et blanc.
15:35 En deux ans, plus de 200 albums se voient apposer
15:37 le Parental Advisory Explicit Lyrics
15:39 et la plupart sont des albums de rap.
15:41 Il va même devenir rapidement le symbole du rap hardcore
15:44 et du gangsta rap dans toutes les années 90.
15:46 Au final, il va sûrement devenir un argument de vente,
15:48 celui d'une musique provoque et sans concession.
15:50 1991, l'histoire du sample qui a changé l'histoire du rap.
15:54 À la fin des années 80, le Juice Crew est sûrement
15:56 le groupe le plus important du monde du rap.
15:58 Orchestré par Marley Marl, il accueille les meilleurs rappeurs du moment
16:01 comme Kool G Rap, Big Daddy Kane, Masta A$$,
16:03 Roxanne Shante et Biz Markie.
16:05 Chacun avait son rôle et celui de Biz était l'humour du loser magnifique
16:09 et la passion de la musique, comme sur son tube Just A Friend,
16:12 sorti en 1989.
16:13 You, you got what I need
16:18 But you say he's just a friend
16:21 Deux ans plus tard, Biz Markie veut réitérer l'exploit de Just A Friend
16:24 avec son morceau Alone Again.
16:25 I'm alone again, naturally
16:29 Un thème et une boucle de piano très similaires.
16:32 Et c'est le morceau qui va absolument tout changer
16:34 dans le business de la musique et on vous explique pourquoi.
16:36 À partir du milieu des années 80,
16:38 des nouvelles machines se démocratisent dans le milieu de la production musicale,
16:41 des samplers.
16:42 Leur but, utiliser des échantillons musicaux enregistrés de véritables disques
16:46 pour les réutiliser en boucle.
16:47 C'est le fondement même de la production rap
16:49 et de la musique électronique depuis.
16:51 On appelle ça le sampling.
16:52 À cette époque, tout est possible,
16:54 tout le monde sample tout le monde
16:55 car il n'y a aucun précédent juridique sur le sujet.
16:57 Sur Alone Again, Biz Markie a samplé et interpolé
17:00 le tube de Gilbert O'Sullivan du même nom.
17:03 We're a little while from now
17:05 I'm not feeling any lesser
17:07 Problème, le label de Biz avait demandé l'autorisation à Gilbert
17:10 et il avait dit non.
17:12 Mais le label a décidé de sortir le morceau quand même,
17:14 en single et sur l'album I Need a Haircut.
17:16 Et là, tout s'enchaîne.
17:18 Gilbert O'Sullivan va passer l'affaire en justice
17:20 et il va obtenir plus encore qu'il ne voulait.
17:22 Une amende de 250 000 dollars pour Biz Markie et son label
17:25 et surtout le retrait total de tous les disques de Biz Markie sur le marché
17:30 avec son morceau, donc les singles et les albums.
17:33 Pire encore, le juge va lancer l'affaire au pénal
17:35 accusant Biz Markie de vol, tout simplement.
17:38 Ce premier procès pour sampling non autorisé va faire date.
17:41 Depuis, chaque label a développé une cellule spéciale
17:43 pour ce qu'on appelle "clearer les samples",
17:45 c'est à dire chercher les ayants droit des morceaux utilisés en sample
17:48 pour leur demander l'autorisation et les payer en amont de la sortie du disque.
17:52 Une économie entière se crée autour du sampling.
17:54 Tout ça à cause de ce bon vieux Gilbert O'Sullivan.
17:57 Peu de temps après, par exemple, le groupe The Turtles
17:59 récupère 1,7 million de dollars auprès du groupe De La Sol
18:03 pour l'utilisation d'un extrait de quelques secondes dans une interlude.
18:06 Le sample devient une arme dissuasive, son utilisation va changer.
18:10 De son côté, Biz Markie revient en 1993 avec un album ironique
18:14 où il pose en juge, sur la pochette, et dont le nom est un pied de nez à l'industrie,
18:17 All Samples Cleared.
18:18 Il pousse même la blague en utilisant un seul morceau samplé sur la moitié de l'album.
18:23 Malheureusement, le succès n'est plus au rendez-vous,
18:25 l'ère du Juice Crew est passée,
18:26 le procès a un peu cassé la carrière de Biz Markie, c'est son dernier rire.
18:29 Depuis tout ça, les producteurs de rap vont chercher des disques de plus en plus obscurs
18:33 et ainsi ouvrir un champ des possibles de plus en plus large.
18:36 Le sample est devenu autant une liberté qu'une contrainte.
18:38 1995, l'histoire des Source Words, qui a changé l'histoire du rap à tout jamais.
18:44 A la fin des années 80, un groupe californien attire toutes les attentions, N.W.A.
18:48 Tout le monde du rap a les yeux rivés sur Los Angeles, sur la West Coast, c'est totalement nouveau.
18:52 Et la East Coast, notamment les rappeurs originaires de New York, commence à prendre le sien.
18:56 En 1991, Tim Dogg lance les hostilités avec son violent "Fuck Compton"
19:01 qui attaque N.W.A. en citant Eazy ou Dr. Dre, membres du groupe.
19:05 Le même Dr. Dre quitte N.W.A. quelques mois plus tard pour créer Death Row avec Sudge Knight,
19:09 un garde du corps, membre du gang des Bloods, devenu force d'intimidation dans l'industrie musicale.
19:14 Death Row lance The Chronic, l'album classique de Dr. Dre en 1992 avec une réponse à Tim Dogg au passage,
19:20 puis Doggystyle, le premier album de Snoop Doggy Dogg en 1993, un nouveau classique.
19:26 Death Row débarque en trombe dans la musique et la West Coast n'a jamais été aussi haute.
19:30 Du côté Est, Puff Daddy, un jeune producteur qui a fait ses armes dans le R&B et la New Jack du label Uptown,
19:36 crée son propre label, Bad Boy Records, en 1993 avec deux artistes, Craig Mack et Notorious B.I.G.
19:43 En 1994, le premier album de Biggie sort, Ready to Die, avec quelques sonorités proches des sorties de Death Row.
19:50 La East Coast reprend ses droits, la guerre des idées est lancée.
19:53 Notorious B.I.G. est proche d'un rappeur né à New York mais devenu totalement californien, Tupac.
19:58 Tupac n'est pas un tendre, il dérange pas mal de monde mais reste proche de New York et ses rappeurs.
20:02 Malheureusement, le 30 novembre 1994, Tupac se fait tirer dessus dans l'ascenseur d'un studio d'enregistrement à New York.
20:09 Il accuse Biggie, Puff Daddy et Bad Boy Records d'être derrière tout ça.
20:13 La tension monte entre les deux côtes, ça c'est le décor.
20:16 Si t'es un homme, tu viens ici, et là tu vas repartir mal mon copain !
20:20 En 1995, le magazine The Source est la référence absolue en matière de rap.
20:24 Ses chroniques d'albums notées avec 5 micros deviennent le véritable graal de tous les artistes.
20:28 Pour continuer cette omniprésence culturelle, The Source lance ses Awards en 1994,
20:34 des récompenses spécifiques au rap.
20:36 Le 3 août 1995, a donc lieu la deuxième édition au Paramount Theater de New York.
20:41 Alors que ce n'était vraiment pas prévu, cet événement devient le pic de la rivalité entre East Coast et West Coast.
20:47 Le label Death Row est venu en force à cet événement, fort des succès de Dr. Dre et Snoop Dogg.
20:51 De l'autre côté, Puff Daddy et son label Bad Boy marquent les rangs avec le succès fulgurant
20:56 le Nutrius B.I.G sur les derniers mois.
20:58 Alors que la récompense du meilleur groupe de l'année est attribuée au Wu-Tang Clan,
21:01 la tension monte car la plupart des autres récompenses sont données
21:04 soit aux artistes Death Row, soit aux artistes Bad Boy,
21:07 et chaque discours rajoute de l'huile sur le feu.
21:10 Quand Suge Knight monte pour accepter la bande originale de Fin de l'année,
21:13 il propose dans son discours aux artistes intègres de venir dans son label
21:17 car il leur promet que lui ne dansera pas bêtement dans leur clip vidéo.
21:20 Aïe !
21:21 Attaque directe à Puff Daddy, réputée pour faire ce genre de mouv'.
21:24 Problème, on est à New York, toute l'assistance le Wu.
21:27 Alors que Dr. Dre récupère la récompense de Producteur de l'année,
21:30 Snoop Dogg se fait huer aussi en disant la phrase légendaire
21:33 "Alors la East Coast n'aime pas Dr. Dre et Snoop Dogg ?"
21:35 - Wait, wait, wait !
21:36 - The East Coast don't love Dr. Dre et Snoop Dogg !
21:38 L'ambiance est lourde, violente, le mouvement hip-hop n'existe plus, le rap est mortel.
21:43 Plus tard, alors que Biggie récupère la plupart des autres récompenses,
21:46 Puff Daddy fait un discours d'apaisement.
21:48 Snoop essaye aussi, mais rien n'y fait.
21:50 Le monde entier du rap a été témoin de la violence,
21:53 de la guerre fratricide qui se mettait en place.
21:55 Le hip-hop avait été créé pour stopper la violence,
21:57 elle lui revenait en pleine face.
21:59 Après cette déclaration de guerre au vu de tous,
22:01 Such Nightsine 2 packs sur Zestro quelques semaines plus tard,
22:04 et l'artiste va tirer à boulet rouge sur Biggie, Puff Daddy et Bad Boy
22:08 dans une lutte quasi-suicidaire jusqu'à sa mort par balle le 13 septembre 1996.
22:13 Quelques mois plus tard, le 9 mars 1997,
22:15 Biggie meurt lui aussi par balle lors d'une fusillade à Los Angeles.
22:19 Si deux meurtres et plein d'autres à côté,
22:20 comme celui de Big Jack ou de Stretch,
22:23 font suite à l'escalade des Source Awards de 1995.
22:26 Pendant ces mêmes Source Awards,
22:27 un jeune duo obtient la récompense de meilleur nouveau groupe.
22:30 Il s'agit de Big Boy et André Streetsazen du groupe Outkast.
22:33 Et Outkast ne sont pas East Coast, Outkast ne sont pas West Coast.
22:37 Alors qu'il est hué par la foule,
22:39 André Streetsazen donne un discours fort en disant juste
22:42 "Le Sud a quelque chose à dire".
22:43 En effet, quelques années plus tard,
22:45 le Sud des Etats-Unis va devenir le centre du rap
22:48 avec des groupes comme La Nouvelle Orléans,
22:50 Houston et surtout Atlanta, dont son issue Outkast.
22:53 Les Source Awards de 1995 marquent aussi la lente fin
22:56 de l'hégémonie de Los Angeles et New York sur le rap.
22:59 Bientôt, le Sud va prendre le pouvoir,
23:01 mais ça, c'est une autre histoire.
23:04 - Combiné !
23:04 (Générique)
23:06 (Générique)
23:08 (Générique)
23:08 *musique*

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