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00:00 -On en parle avec notre invitée Anne Bringo,
00:02 directrice des programmes au réseau Action Climat.
00:04 Bonsoir. Je suis convaincue
00:06 que nous avons un chemin,
00:07 celui de l'écologie à la française,
00:09 une écologie du progrès,
00:11 qui n'est ni le déni ni la cure,
00:13 qui consiste à dire que ça va être un massacre.
00:15 Est-ce qu'il y a une voie française pour l'écologie ?
00:18 -On espère qu'il peut y avoir une voie française,
00:21 qui soit juste, qui ne laisse personne de côté,
00:24 en même temps qui soit assez ambitieuse et efficace,
00:27 parce que cette accélération doit aller très vite.
00:30 Et une écologie à la française aussi,
00:32 qui s'appuie sur le principe pollueur-payeur,
00:35 qu'on n'a pas beaucoup entendu.
00:37 Ce qu'on a entendu, c'est un peu un accent mis
00:40 sur la sortie du charbon.
00:42 Rappelons que c'était un engagement
00:44 d'Emmanuel Macron en 2017,
00:46 d'une fermeture des centrales à charbon en 2022.
00:48 Ce qu'il nous annonce est un décalage de cinq ans.
00:51 En France, on n'a plus que deux centrales à charbon.
00:55 On aurait bien aimé qu'elles soient fermées en 2022,
00:57 mais le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre,
01:01 c'est les transports.
01:02 Ensuite, sur l'agriculture, qui est le numéro 2 sur le podium.
01:06 Sur ces enjeux-là, il y a eu quelques annonces, mais...
01:09 -Ce n'est pas suffisant.
01:10 Est-ce que l'idée d'une planification écologique
01:13 sous l'égide de la Première ministre ?
01:15 -C'est une excellente idée,
01:17 parce qu'il y avait déjà des planifications
01:19 qui ne portaient pas ce nom-là,
01:21 mais qui étaient faites uniquement
01:24 par le ministère de la Transition écologique.
01:26 Les autres ministères ne se sentaient pas
01:29 complètement impliqués ou engagés dans cette transition.
01:32 Le fait que ça ait été discuté
01:34 au niveau de Matignon en interministériel
01:37 fait que c'est un engagement... -Secteur par secteur.
01:40 -Le ministère de l'Economie était là,
01:42 le ministre de l'Agriculture.
01:44 Normalement, tous les ministres ont pris des engagements.
01:47 Avec le ministre de l'Agriculture, c'est compliqué,
01:50 c'est une sorte de forteresse.
01:52 Au moins, en théorie, c'est une vision du gouvernement
01:56 dans son ensemble.
01:58 -7 milliards d'euros supplémentaires
02:00 ont été alloués à la transition pour 2024.
02:03 Est-ce suffisant ? Le rapport Pisani-Ferry
02:05 parle de 60 milliards d'euros d'investissement nécessaire.
02:09 On est loin de ça ? -On est très loin.
02:11 Dans les 60 milliards, la moitié, ce sont des investissements publics.
02:15 La moitié, c'est des investissements des entreprises,
02:18 des particuliers. Quand vous achetez un véhicule électrique,
02:22 dans les 30 milliards d'argent public,
02:24 il y en a un tiers pour l'Etat, donc 10 milliards.
02:27 On est à 7. Il fallait aller à 10,
02:29 donc on est un peu en dessous, mais c'est une accélération.
02:32 L'important, c'est de donner une visibilité sur plusieurs années.
02:36 Il faut que les acteurs économiques puissent investir
02:39 pour avoir une visibilité,
02:40 et c'est ce qui manque jusqu'à maintenant.
02:43 -Malgré la planification,
02:44 c'était censé donner une visibilité.
02:46 -On a une visibilité sur les leviers d'action,
02:49 on attend les mesures concrètes,
02:51 mais on n'a pas de visibilité sur les financements
02:54 sur plusieurs années.
02:55 -Elle a convié les représentants de la filière des carburants,
02:58 les raffineurs, les distributeurs.
03:01 Elle parle, pour évoquer la vente à prix coûtant,
03:04 annoncée par Emmanuel Macron hier,
03:06 pour alléger la facture des Français.
03:08 Est-ce qu'il y a une contradiction
03:10 entre les objectifs écologiques,
03:12 qui seraient de réduire l'usage des énergies fossiles,
03:15 et en même temps, de baisser la facture du carburant ?
03:18 Là, on est dans ce conflit, c'est toujours le même,
03:21 entre le pouvoir d'achat d'un côté
03:23 et les objectifs climatiques de l'autre.
03:25 -Ce n'est pas un conflit,
03:27 car la vraie solution, c'est de sortir des énergies fossiles.
03:31 On sait depuis les années 70, avec les premiers chocs pétroliers,
03:34 que cette dépendance aux énergies fossiles
03:37 met la France en péril.
03:38 Plus de 100 milliards de coûts
03:40 sur le déficit de la balance commerciale en France,
03:43 c'est énorme, et on savait déjà
03:45 qu'il fallait transformer la mobilité,
03:47 les transports en France,
03:49 premier secteur émetteur.
03:51 -On aime la bagnole, les Français aiment leur bagnole,
03:54 car certains ne peuvent pas aller au travail avec leur voiture.
03:57 -Ce qu'il faut à court terme,
03:59 puisqu'on a pris du retard sur les alternatives à la voiture
04:02 et sur le développement du véhicule électrique,
04:05 autant que possible léger,
04:07 il faut aider les ménages au bas revenu.
04:09 Il y a une aide pour les ménages des premiers déciles,
04:12 comme annoncé hier, c'est plutôt une bonne chose.
04:16 Il faut accélérer sur les alternatives,
04:18 donner accès à un véhicule électrique aux ménages modestes.
04:21 Il y a des annonces qui concernent très peu de véhicules en 2024,
04:25 donc très peu de ménages.
04:26 -Il devrait y avoir, quand vous dites "accès",
04:29 il faut les produire en France et en Europe ?
04:32 C'est ce que dit le président hier, c'est le côté souveraineté.
04:35 Il faut produire des véhicules électriques en France
04:38 et les batteries qui vont avec.
04:40 -Il faut produire des véhicules électriques en France,
04:44 mais il y a des véhicules neufs à exploser en France,
04:47 car les constructeurs automobiles font des gros véhicules,
04:50 des SUV, qui sont des hauts de gamme,
04:52 car c'est là-dessus qu'ils margent le plus.
04:55 Ce dont les Français ont besoin, c'est de petits véhicules
04:59 accessibles financièrement.
05:00 -Il y a une vraie consommation de ces gros véhicules.
05:04 C'est une tendance pour le SUV vert.
05:06 -Quand vous regardez qui achète ces gros véhicules neufs,
05:09 ce sont des gens plutôt âgés et qui ont des moyens financiers.
05:13 Les Français aimeraient bien acheter des petits véhicules
05:16 moins chers. C'est la publicité qui incite à aller
05:19 vers ces gros véhicules.
05:21 Ce n'est pas le souhait de quelqu'un qui habite en ville
05:24 qui n'a pas besoin d'un SUV réaliste.
05:27 -Faut-il plus de contraintes pour remplir les conditions ?
05:30 -Il faudra plus de contraintes sur les entreprises.
05:33 On voit que les entreprises n'ont pas fait leur transformation,
05:37 notamment l'industrie automobile.
05:39 On pourrait parler de la production d'acier en France
05:42 et de la production de ciment.
05:44 Ils ont touché beaucoup d'argent public,
05:46 comme on l'avait montré dans un rapport du Réseau Action Climat,
05:50 notamment avec des quotas gratuits sur le marché carbone européen.
05:54 Ils n'ont pas engagé cette décarbonation.
05:57 Il faut que l'argent public soit réellement écoconditionné
06:00 à des engagements et des actions très concrètes des entreprises
06:04 pour aller vers cette décarbonation.
06:06 -Il n'en est pas question, de ce type de contraintes ?
06:09 -Peu de contraintes.
06:11 Il y a eu des incitations, ce qui est souvent le terme utilisé,
06:14 compétitivité, etc.
06:16 On n'était pas vraiment sur la contrainte
06:18 pour les entreprises.
06:20 -Comment concilier les deux ?
06:22 Vous dites plus de contraintes sur les entreprises
06:25 et sur le consommateur.
06:26 -Le consommateur, il faut lui donner accès aux solutions,
06:30 notamment les consommateurs qui ont des bas revenus.
06:33 Il faut qu'ils puissent isoler leur logement
06:36 avec, pour les plus modestes, 0 reste à charge,
06:39 parce qu'ils n'ont pas le 1er euro à mettre pour isoler leur logement.
06:43 Il faut leur donner accès à un véhicule électrique,
06:46 avec ce leasing à 100 euros, leur donner accès au train,
06:49 qui est trop cher.
06:50 100 milliards pour le train,
06:52 annoncé d'investissement sur plusieurs années.
06:55 Ca peut permettre de développer des lignes
06:58 et d'avoir un train plus accessible.
07:01 Les consommateurs, ils aimeraient bien voyager en polluant moins,
07:05 avoir des logements bien isolés et une alimentation plus saine.
07:09 -Cette milliard d'euros, a priori ?
07:11 -Il faut orienter les financements publics vers là où on en a besoin.
07:15 Pas les entreprises qui ont la capacité,
07:17 surtout les grandes entreprises,
07:20 à faire ces transformations,
07:21 mais vers les ménages aux bas revenus
07:24 qui n'ont pas les moyens de faire ces investissements.
07:27 L'argent public est rare.
07:29 Il faut le prélever sur la pollution,
07:31 la fiscalité sur l'aviation, un secteur pas taxé,
07:34 et le flécher vers les ménages aux bas revenus
07:37 qui sont en difficulté par rapport à cette transition.
07:40 -Merci, Anne Bringo, d'avoir été avec nous.