Politiques, à table ! - Yves Camdeborde

  • l’année dernière
Un déjeuner partagé avec Yves Camdeborde, chef cuisinier, auteur du livre Ovalix - une histoire gourmande du rugby (Ed: Albin Michel) pour parler du concept de la Bistromie et de l'alimentation autour des joueurs de rugby.

Loin des codes classiques de l´interview, LCP-Assemblée nationale a concocté un nouveau programme aux petits oignons pour croquer la politique autrement.
Avec la complicité de Jean-Pierre Montanay, Brigitte Boucher mettra son grain de sel dans cette cuisine pour passer le politique sur le gril.
« Cuisine et Confidences »... Quel rapport l´invité politique entretient-il avec la
gastronomie ? Sa gourmandise, ses talents ? Les orientations culinaires de ce boulimique de la politique ? Mais aussi « Les pieds dans le plat »... pour aborder les sujets d´actualité.
Et enfin « La face cachée de nos assiettes »... ou comment le contenu de nos assiettes en dit long sur notre société face à ses nouveaux enjeux.

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Transcript
00:00 Générique
00:02 ...
00:16 -Bonjour à tous.
00:17 C'est très heureux de vous retrouver
00:20 pour une nouvelle saison de "Politique à table" sur LCP.
00:23 Toujours autour d'un invité, d'un plat et d'un dessert.
00:27 Nous sommes ensemble pendant une heure.
00:30 Pour bien démarrer cette année gastronomique,
00:33 nous recevons un invité exceptionnel, Yves Candeborde.
00:36 -Bonjour. -Bonjour.
00:37 -Avec moi pour présenter cette émission, Jean-Pierre Montanet.
00:41 -Bonjour. -Bonjour.
00:42 -Yves Candeborde, vous êtes chef cuisinier,
00:45 pionnier de la bistronomie, mi-bistro, mi-gastro.
00:48 Vous vous avez inspiré toute une génération de jeunes chefs
00:51 avec la régalade, puis avec le comptoir du Relais à Saint-Germain.
00:55 Vous avez inventé une cuisine de terroir
00:57 avec des produits frais, de qualité,
01:00 accessibles au plus grand nombre.
01:02 Vous, qui avez pourtant été élevé
01:04 dans les cuisines du Ritz, de la Tour d'Argent et du Crion,
01:07 où vous avez suivi votre mentor Christian Constant.
01:10 Vous avez révolutionné le monde de la restauration parisienne
01:13 en vous focalisant sur le produit, le goût du vrai, de l'authentique.
01:17 Vous étiez à l'avant-garde du local,
01:19 devenu le maître mot des consommateurs avertis.
01:22 Le local, justement, on va le retrouver
01:24 dans le menu qui sent le sud,
01:27 une brandade de morue et en dessert, une crème caramel.
01:30 -Dans le dessous des plats, connaissez-vous la bistronomie
01:34 à l'atout d'un étoilé dans un décor décontracté ?
01:37 Dégustation au matré,
01:39 un restaurant parisien du 18e arrondissement.
01:41 -Comment se nourrissent les joueurs de rugby ?
01:44 De la collation d'avant-match au banquet final.
01:47 Reportage à suivre.
01:48 -Allez, on passe à table.
01:51 Tout de suite, cuisine et confidence.
01:54 Générique
01:56 ...
01:59 -Avec un convive comme vous, Yves, chef et rugbyman à la fente,
02:02 on ne sait pas à quoi s'attendre dans notre assiette.
02:05 Si on mange juste avant, mauvaise pioche,
02:08 c'est pâtes pour les sucrelents et poulet pour les protéines.
02:11 Laissons ça au malabar du 15 de France.
02:13 En revanche, si c'est après match, à en croire votre livre,
02:17 "Ovalix, une histoire gourmande du rugby",
02:19 la 3e mi-temps, c'est la régalade, sans clin d'oeil,
02:22 entre Banquet, Brigitte et Gulleton.
02:25 Avec Brigitte, on s'est mis à rêver.
02:27 Pourquoi pas ripayer ce soir avec un faisan de bohème
02:30 sur croustade, une truite saumonée à la russe ?
02:32 Je n'invente rien.
02:33 Ce sont des plats tirés d'un menu de 1896
02:36 pour un match international de l'Olympique.
02:38 Eh bien non, on n'aura rien de tout ça
02:41 pour sortir de cette mêlée gastronomique.
02:43 Yves, vous avez pris tout le monde à contre-pied
02:46 avec une brandade de morue qui, je vous l'avoue,
02:48 me laisse pantois. Quel désaveu pour votre terroir de peau
02:52 et de club de coeur. La section paloise
02:54 ne va pas comprendre cette oeillade en direction du Arsénime.
02:57 Ca mérite des éclaircissements, cette brandade.
03:00 -Je pense que c'est un plat de saison.
03:02 C'est un plat qui est en mi-chemin entre la fin de l'été
03:05 et le début de l'automne. C'est surtout un plat
03:08 qui a du caractère. Je suis du Sud-Ouest,
03:10 mais j'aime la cuisine de caractère.
03:12 Peu importe d'où elle vient, l'important,
03:15 c'est ne pas y mettre de l'indifférence.
03:17 La brandade de morue, c'est un très joli plat
03:20 et un très joli clin d'oeil au terroir du Sud-Est.
03:23 -C'est un plat que vous proposiez dans vos restaurants ?
03:26 -Oui, j'en avais à la carte.
03:27 Pour la petite histoire, je l'ai apprise avec papa.
03:30 Papa avait travaillé dans les années 50 à Paris
03:33 et c'est à Paris qu'il avait appris à faire la brandade de morue.
03:36 C'est une brandade de morue particulière
03:39 parce qu'elle est un peu parmentière.
03:41 -Racontez-nous. -Il y a plusieurs façons
03:43 de faire la brandade de morue, mais j'ai envie...
03:46 Vous savez, il y a la tradition des grandes classiques français.
03:50 Il y a autant de recettes que nous avons de grand-mères.
03:53 Chaque famille a son secret, chaque famille a sa façon de faire.
03:56 La brandade parmentière, c'est une morue qui a été pochée,
03:59 souvent dans du lait parfumé avec de l'ail, du thym et du laurier,
04:03 qu'on égoutte, qu'on monte à l'huile d'olive
04:05 avec un ail haché et écrasé, et après, on y rajoute
04:08 une purée de pommes de terre pour y amener un peu d'onctuosité.
04:12 -On va appeler Jean-Pierre à la rescousse.
04:14 Y a-t-il de la pomme de terre dans la brandade ?
04:17 -Trois choses à savoir, mais je suis prof d'humilité devant un chef.
04:21 C'est plutôt trois choses à éclaircir.
04:23 Vous avez tout dit. Y a-t-il vraiment des pommes de terre
04:26 dans l'authentique brandade ? -Non.
04:28 -C'est pas l'authentique, mais elle est bonne.
04:31 -C'est la brandade parmentière.
04:33 -Est-ce préférable de faire cuire la morue dans du lait ?
04:36 -On le fait cuire dans du lait parce que le lait va dessaler
04:40 plus pertinemment que l'eau, et surtout, le lait aussi
04:44 va blanchir un peu la morue qu'il peut avoir.
04:47 Elle a été séchée et salée et qui a des couleurs un peu foncées.
04:50 Ca permet d'avoir une brandade avec une couleur un peu plus or.
04:54 -Est-ce que l'ail est indispensable pour faire prendre la brandade ?
04:57 "Brandade", ça vient de "brander", ça veut dire "tourner".
05:01 -Oui, c'est écrasé. L'ail est indispensable.
05:03 Pour mon épouse, non, elle en veut pas, mais moi, j'en veux.
05:07 -C'est une question de modération, non ?
05:09 -C'est une question de modération et de goût.
05:12 Mais l'ail, c'est pour moi indispensable
05:15 parce que l'ail est un exauceur de goût,
05:17 qui va amener de la profondeur
05:20 et qui va permettre de garder un palais
05:22 relativement puissant, mais tellement agréable.
05:25 -On m'a dit que ça favorisait l'émulsion avec l'huile.
05:28 -Ca permet un liant à l'huile de livre.
05:31 Quand on le fait de façon classique,
05:33 on met pas de pommes de terre,
05:35 c'est l'ail qui va amener ce côté crémeux.
05:37 Quand on va mixer l'ail avec l'huile,
05:39 c'est un cremeux qui va s'enrouler autour de la morue pochée.
05:43 Il y a autant de recettes que de grand-mères.
05:46 -Vous aviez deux restaurants à la régalade,
05:48 le comptoir du Relais, que vous n'avez plus aujourd'hui.
05:52 Alors, un chef, aujourd'hui, sans ses cuisines,
05:55 il cuisine toujours à la maison. Comment ça se passe ?
05:58 -Quand j'avais mes cuisines, je cuisinais à la maison.
06:01 Cuisiner, pour moi, c'est vital.
06:03 -Vous êtes derrière les fourneaux à la maison.
06:06 -Même si mon épouse cuisine très bien,
06:08 à 80 %, c'est moi qui suis dans les fourneaux,
06:11 parce que j'y prends un réel plaisir.
06:13 -Plus de plaisir, peut-être,
06:15 parce qu'il n'y a pas de client derrière,
06:17 vous avez le temps pour le faire ?
06:19 -C'est plus détendu.
06:20 Je pense que je détends consciemment et sciemment
06:23 la matière première aussi,
06:25 parce que je lui amène pas mon stress
06:27 qui est inhérent à mon métier de cuisine restaurateur.
06:30 Là, je le fais vraiment dans une forme de jovialité,
06:33 de décontraction. Et puis,
06:35 je pense que je cuisine mieux à la maison,
06:38 parce que j'ai moins de réflexion par rapport au visuel.
06:42 Je vais qu'au goût.
06:43 Je vais prendre l'exemple d'un petit pois.
06:46 Un petit pois, au restaurant, restera toujours vert fluo,
06:49 parce qu'il aura été cuit dans de l'eau salée,
06:52 tandis qu'à la maison, je vais le cuire dans le jus du poulet.
06:55 Il va prendre cette couleur marbrée,
06:57 qui n'est pas très jolie.
06:59 -Le client, c'est vous-même,
07:01 donc vous avez moins d'exigence. -Allez, on goûte ?
07:04 -Je trouve ça pas mauvais. -Vous allez nous dire
07:06 ce que vous pensez. C'est la recette de chez Françoise,
07:09 le restaurant des Invalides, avec qui nous travaillons.
07:12 -Ca ressemble à la parmentière.
07:14 -On est entre deux. -On est entre deux.
07:17 On est vraiment entre les deux,
07:19 parce qu'on ressent la puissance de la morue,
07:21 qui est très présente et très agréable.
07:24 La façon dont j'ai appris ça avec papa,
07:26 on est plus sur un petit gratin de pommes de terre à la morue,
07:30 où il y a moins de puissance de morue.
07:32 -D'accord. -Je pense que l'amateur
07:34 de brandade puriste
07:36 va adorer. -Va l'aimer comme ça.
07:37 -Va l'aimer comme ça. -Il y a du poisson.
07:40 Dans le Sud-Ouest, on est plutôt habitué à des gésiers,
07:43 à du canard, etc. Vous, vous consommez comment, aujourd'hui ?
07:46 -Aujourd'hui, j'ai changé mon alimentation,
07:49 il y a une bonne vingtaine d'années,
07:51 parce que le métier a pris conscience
07:53 des problématiques qu'il y avait de la surproduction
07:56 de protéines animales. On a énormément réduit
07:59 notre consommation de protéines animales.
08:01 Je dois consommer deux fois par semaine
08:03 les protéines animales, et après, les protéines végétales
08:07 et énormément de légumes. On peut dire merci à Alain Passart,
08:10 qui a anobli, il y a bon nombre d'années,
08:12 la façon de travailler le légume.
08:14 On y met beaucoup d'intention,
08:16 de précision sur la cuisson des légumes,
08:19 et on arrive à faire des plats succulents,
08:21 des plats qui, gustativement, apportent beaucoup de plaisir.
08:25 -Question impalois, toujours cette question épineuse,
08:28 elle revient souvent sur cette table, Brigitte, c'est le foie gras.
08:32 On continue ? -Oui, bien sûr,
08:33 mais c'est comme tous ces produits qui ont été pris
08:36 par l'industrie agroalimentaire, qui a voulu les produire
08:40 en des quantités énormes, et qui a complètement déstabilisé
08:44 le produit par lui-même.
08:46 Le foie gras qui est fait... -Le petit éleveur gave son canard.
08:49 -Il gave son canard, mais il faut savoir qu'un éleveur
08:52 qui gave son canard, il le gave à la main,
08:54 et pour approcher un canard, il faut que le canard sente
08:58 de l'affection et de l'amour. C'est vraiment fait
09:01 pour éviter la maltraitance de l'animal.
09:03 -Quand c'est des petites exploitations...
09:05 -Revenons à la petite question. Le foie gras,
09:08 on peut parler du saumon. Le saumon fumé,
09:10 c'est une catastrophe totale.
09:12 Les saumons fumés qui sont faits en Norvège,
09:15 c'est une catastrophe. Il faut revenir à ces produits
09:18 de façon artisanale, en petites quantités,
09:20 et respecter la saison. Le foie gras,
09:23 on n'en mangeait qu'à partir du mois d'octobre, novembre,
09:26 décembre, janvier, et on arrêtait d'en manger.
09:29 -La saisonnalité, le bio aussi, vous êtes en défenseur du bio ?
09:32 -Oui, c'est indispensable,
09:34 car on sait que l'entrance chimique,
09:36 quelle qu'elle soit, est dangereuse pour la santé de l'humain.
09:40 Il faut impérativement qu'on arrive à consommer
09:42 que des produits propres. -Ca marche pas, le bio.
09:45 C'est une baisse record. -C'est cher.
09:47 -Les gens n'adhèrent pas, se perdent dans tous les labels.
09:51 C'est pas le bio qui le privilégie.
09:53 -Le bio, aussi, est en train de grandir,
09:55 est en train de se remettre en question.
09:58 -C'est une évolution assez incroyable du bio,
10:01 car tout le monde s'en est emparé.
10:03 Laissons le bio à la petite échelle.
10:05 Ca a un coût un peu plus élevé,
10:08 mais je pense, je crois,
10:09 que je préfère mettre un euro de plus dans une carotte
10:13 et moins acheter de médicaments.
10:15 -Est-ce qu'on peut nourrir toute la population
10:17 avec des petites exploitations ?
10:19 Est-ce qu'il faut pas aussi des plus grandes
10:22 pour pouvoir produire davantage ?
10:24 -On n'y arrivera sans doute pas,
10:26 mais les petites exploitations doivent exister,
10:28 et on doit les respecter.
10:30 La vraie question et la vraie évolution
10:32 passera par une production conventionnelle,
10:35 par l'agroalimentaire,
10:36 mais avec des règles sanitaires très strictes
10:39 pour qu'ils puissent produire,
10:41 pour que tout le monde puisse manger à sa faim,
10:44 mais de façon propre.
10:45 -Un petit mot sur le vin,
10:47 parce que vous nous avez demandé un vin nature.
10:50 Un vin nature, c'est quoi ?
10:51 C'est un vin qui n'a pas de pesticides,
10:54 dont les raisins sont bios, aussi.
10:56 Pas d'herbicides, pas d'engrais chimiques,
10:58 aucun intrant, vous l'avez dit.
11:00 Et puis, surtout, il n'y a pas de sulfite ajouté,
11:04 donc c'est entièrement naturel.
11:07 Le risque, c'est que ça peut repartir
11:09 un peu en fermentation,
11:10 c'est-à-dire qu'il peut être un peu pétillant.
11:13 -Il n'y a pas de risque.
11:14 Quand c'est bien fait, il n'y a aucun risque.
11:17 Il faut que ce soit fait par des vignerons,
11:20 et ça ne se fera pas du jour au lendemain.
11:22 Il faut que le vin nature soit habitué à ce travail,
11:25 et que le raisin soit habitué à vivre sans entrant chimique,
11:28 par rapport au cèpe de vigne.
11:30 Dans les règles de l'art, de façon classique et traditionnelle,
11:34 il n'y a aucun risque.
11:35 Le problème du vin nature, c'est qu'on parle de nature,
11:38 et quand il y a des déviants, on dit que c'est nature.
11:41 Non, c'est pas bon.
11:43 Comme dans le conventionnel. -C'est qu'il est mal fait.
11:46 -Le soufre permet d'éviter cette altération.
11:49 -Voilà. Après, il y a aussi des vins nature
11:51 où un minimum de soufre a été mis,
11:53 parce que pour stabiliser le vin, il ne faut pas être contre ça.
11:57 Il ne faut pas être totalement braqué par rapport aux entrants,
12:01 mais dans l'absolution, on peut le faire sans entrant chimique.
12:05 C'est mieux pour la santé. -Le soufre, c'est pas chimique.
12:08 -C'est mieux pour la santé, c'est mieux pour nous.
12:11 Allons vers ça.
12:12 -J'ai une question à vous poser.
12:14 Un vin nature, c'est plus radical qu'un vin bio ?
12:17 C'est pas la même chose ?
12:18 -C'est un peu plus radical,
12:20 parce qu'il n'y a pas de soufre, en fait.
12:22 -C'est ce qui fait la différence.
12:24 -C'est quand il y a des charges.
12:26 -On est au-delà du vin bio. -Ca va un peu plus loin.
12:29 -Nous ne l'oublions pas,
12:31 si ça doit être bon.
12:32 Peu importe si c'est bio, nature ou conventionnel,
12:35 quand c'est pas bon, c'est pas bon.
12:38 Il faut l'assumer.
12:39 -On est sur un vin de Loire.
12:41 C'est un chinon.
12:42 J'espère que ça se marie bien avec la brandade de Morue.
12:45 -Quand on parle de brandade de Morue,
12:48 on peut penser de suite au Morue vin blanc,
12:50 tandis que là, c'est un Gabernet Franc, je pense.
12:53 -Gabernet Franc, effectivement.
12:55 -Qui se met à... -Un millésime 2021.
12:57 -Qui tient bien par rapport à la Morue,
13:00 qui a du caractère, qui est salée,
13:02 et avec le côté un peu aillé.
13:04 Il est vraiment en place.
13:05 C'est un joli mariage tout en fraîcheur.
13:08 -On n'est plus sur le fruit, des fruits rouges.
13:11 -On est sur des fruits rouges.
13:13 On croque vraiment dans le côté très fruité
13:16 de la cerise, de la framboise, de la fraise.
13:18 C'est très agréable.
13:19 -Vous êtes très fort, parce que vous êtes chef cuisinier,
13:23 mais on va voir si vous êtes incollable.
13:25 C'est le quiz.
13:26 ...
13:29 -Brigitte l'a rappelé, vous avez fait vos classes
13:32 à la Tour d'Argent, qui vient de rouvrir
13:35 après des mois de travaux titanesques.
13:37 C'était incroyable.
13:38 Alors, sauriez-vous me dire, à propos de cette fameuse
13:41 Tour d'Argent, une institution de la gastronomie française,
13:45 si ces affirmations sont vraies ou fausses ?
13:47 Fondée en 1810, c'est le plus vieux restaurant de France.
13:52 -C'est faux.
13:53 -Bravo. Pourquoi ?
13:55 -Parce que je crois que le plus vieux restaurant de France,
13:58 c'est peut-être le Procope, ou alors, sur les Saint-Louis,
14:01 un petit établissement dont le nom m'échappe.
14:04 -Vous avez raison, mais vous n'avez pas la bonne explication.
14:07 J'ai lu que c'était le plus vieux restaurant de France,
14:11 mais j'ai lu que c'était plus vieux que le Procope.
14:14 -Je pense qu'il y a un établissement
14:16 dans l'île Saint-Louis.
14:17 -C'est présenté comme le plus vieux restaurant de Paris.
14:21 -On va faire un fact-check. -Je vais vous fact-checker.
14:24 -Un fact-quiz.
14:25 Alors, le roi Henri IV,
14:27 il dégustait, à cette table, du heron farci.
14:31 -Euh...
14:34 Il en était bien capable.
14:35 C'était un vrai gastronome, Henri IV.
14:38 C'est mon roi, quand même.
14:39 Il est né à Pau, au château de Pau.
14:41 Je pense que oui, il en était bien capable.
14:44 -Je ne sais pas, mais ce que j'ai trouvé
14:46 dans les menus de l'époque, c'était plutôt du cygne rôti.
14:49 Mais le heron, je ne suis pas sûr qu'on l'ouvre
14:52 et qu'on le farcissait, mais peut-être.
14:54 C'est ici qu'a été inauguré, pour la première fois,
14:58 l'usage, dans cette table, de la fourchette.
15:01 -Oh non, la fourchette, c'est Catherine de Ménicis.
15:04 -En France. -C'est la renaissance.
15:06 C'est elle qui l'a amenée à la renaissance.
15:09 Donc...
15:10 On va dire... Je sais pas.
15:13 Je fais mon joker.
15:14 -Vous avez raison, vous avez bien commencé.
15:17 Catherine de Ménicis, la Toscane, la fourchette vient d'Italie.
15:20 C'est à la Tour d'Argent que, la première fois,
15:23 les clients ont mangé avec cette ustensile.
15:26 -C'était pratique. On l'a gardée.
15:28 -Avant, ils mangeaient avec les doigts.
15:30 -Oui, certainement.
15:31 Les doigts, peut-être aussi avec des couverts en ZQL
15:35 ou des bouchons de bois.
15:36 Cependant, le bois, il devait être beaucoup utilisé.
15:40 -Sa question, pour aussi Brigitte,
15:42 c'est la fave du restaurant.
15:43 A Britt, 80 000 bouteilles.
15:45 -Euh...
15:46 Là, je dis oui, parce que je les ai visitées,
15:49 c'est un labyrinthe.
15:50 Je crois qu'il y a 4 ou 5 sous-sols en dessous de la Seine.
15:54 Raconté par M. Terai, pendant la Deuxième Guerre mondiale,
15:57 ils avaient même, pour pas que les Allemands
16:00 viennent voler les bouteilles,
16:02 carrément muré des couloirs.
16:04 Ils sont pas sûrs de les avoir tous démurés.
16:06 -Il y en a peut-être plus.
16:08 -Les 80 000 bouteilles, ils y sont.
16:10 Vous aviez dû boire un verre,
16:12 car il y en avait 350 000, et vous les avez pas comptées.
16:15 350 000 bouteilles !
16:16 -Je savais que c'était un nombre.
16:18 -On sait pas s'il y en a trop.
16:20 -C'est déjà pas mal.
16:22 -Si vous avez l'occasion d'aller les visiter,
16:24 c'est incroyable à voir, c'est un labyrinthe.
16:27 Il y a 4 ou 5 niveaux en dessous de la Seine.
16:29 -Et quand il y a des inondations, des crues ?
16:32 -Ils ont tout un système de pompes, justement,
16:35 pour éviter les inondations.
16:36 -C'est une catastrophe.
16:38 -C'est fabuleux à visiter.
16:40 -J'imagine.
16:41 -Vous allez pouvoir vous rattraper avec un deuxième quiz.
16:44 De quel pays, parmi les 20 engagés
16:46 dans cette Coupe du monde de rugby,
16:48 le cocoda, plat de poisson cru au lait de coco,
16:52 est-il originaire ?
16:54 Le cocoda.
16:55 A, la Nouvelle-Zélande,
16:58 B, les Fidji,
16:59 C, l'Uruguay
17:01 et D, les îles Tonga.
17:04 -Alors, l'Uruguay, je dis non,
17:07 la Nouvelle-Zélande, je dis non.
17:09 C'est soit les Tonga, soit les Fidji.
17:11 Et dans mon imaginaire,
17:13 je suis jamais allé sur les îles Fidji,
17:15 mais on voit des reportages sur les plages
17:18 des joueurs fidjiens jouant sous les cocotiers.
17:20 -Bravo ! Félicitations.
17:22 C'est exactement ça.
17:23 -Pour l'anecdote,
17:24 les Tonga ont un peu la même recette,
17:27 mais elles s'appellent pas "co-coda".
17:29 -Avec deux "k". -C'est bien.
17:31 Bravo !
17:32 -Alors, c'est souvent autour de la table
17:34 et à l'occasion d'un déjeuner,
17:36 vous le savez mieux que moi,
17:38 que les langues se déliquent,
17:39 qu'il y a les meilleures histoires racontées.
17:42 C'est la brève de comptoir.
17:44 Yves Condeborde, on vous a demandé
17:49 de réfléchir à une anecdote autour d'un repas,
17:52 et si possible en politique.
17:54 Est-ce qu'il y en a une qui vous est revenue à l'esprit ?
17:57 -Oui, il y en a une qui m'est pas revenue
17:59 parce qu'elle est ancrée en moi.
18:01 C'est, je crois, en 1998,
18:03 quand il y avait eu la grève des pilotes d'Air France.
18:06 C'était vraiment une grève qui avait duré
18:09 et qui avait été très engagée.
18:11 Et j'avais Christian Paris, qui était un ami
18:14 et qui était le syndicaliste qui menait cette grève,
18:17 qui était pilote à Air France,
18:19 qui était très engagé contre le ministre de l'époque,
18:22 qui était un ministre de Béziers,
18:24 qui s'appelait... Pardon.
18:25 Qui s'appelait M. Guesso.
18:27 Et c'est Michel Palmier.
18:29 Michel Palmier, ce qu'on appelait "la moumie",
18:31 qui était l'emblématique seconde ligne
18:34 de l'équipe de France de rugby,
18:36 de l'époque de l'équipe de Béziers,
18:38 qui avait 10 titres de champion de France,
18:40 qui connaissait les deux, et qui, à un moment donné,
18:43 me dit, parce qu'il savait que tout le monde venait manger
18:46 à la maison, mais de façon individuelle...
18:49 -A la régalade. -Et qui me dit
18:51 qu'il fallait dénouer ça, préparant une table,
18:53 "je vais les amener, les asseoir face à face à table."
18:56 Il me dit "tu vas voir la table, ça calme tout le monde,
18:59 "ça met tout le monde au même niveau,
19:02 "tu vas leur faire un repas gargantuesque
19:04 "et tu vas leur faire un repas délicat."
19:06 -Michel Palmier a réussi à faire venir M. le ministre
19:10 et Christian Paris, ils se sont assis tous les trois,
19:13 la table 9, c'était une table à part,
19:15 ils se sont mis à table à midi, ils en sont sortis...
19:18 -A quelle heure ? -Il était 20h le soir.
19:20 -Avec un accord, alors ? -Oui, avec un accord.
19:23 Ils se sont sortis avec un accord,
19:25 mais surtout, durant le repas, une fois de plus,
19:28 le fait de manger, le fait de partager,
19:30 permet aux gens de s'écouter.
19:32 -Qu'avez-vous leur préparé ? Il devait y avoir
19:35 quelque chose de bon. -A l'époque,
19:37 j'avais fait une tarte de Saint-Jacques,
19:39 une tarte feuilletée avec du lard et des oignons,
19:42 on avait fait un boeuf monguignon,
19:44 un beau fromage de Brebis les Pyrénées
19:47 et le fameux gâteau russe,
19:48 c'était un gâteau, une spécialité de Laurent de Saint-Henri,
19:52 que je recevais de mon ami Michel à Artigarède.
19:54 J'avais fait ce repas, et ça avait apaisé tout le monde.
19:58 Et à la fin de la journée,
19:59 ils s'étaient salués, embrassés,
20:02 et ils avaient dit "c'est fini".
20:04 J'étais très fier d'avoir vécu ce moment-là,
20:07 parce que pour moi, la table a toujours été
20:09 un moyen de discuter, de partager, de m'engager.
20:13 -Mais on peut se disputer aussi à table.
20:15 Les repas de famille, c'est parfois un peu...
20:18 -On est à égalité.
20:20 Moi, j'aurais jamais pu me disputer...
20:23 J'aurais jamais pu me disputer
20:25 avec une personnalité dans la rue en le rencontrant,
20:28 mais une fois que j'étais assis à table,
20:30 je n'avais plus aucun complexe, je libérais ma parole.
20:33 J'avais une franchise naturelle,
20:35 et je crois que ce jour-là, la table a amené la franchise
20:38 et a amené aussi le bon sens.
20:40 Le bon sens de bien manger et de bien comprendre.
20:43 -Avez-vous la modeste prétention
20:45 de penser que ce que vous avez fourni à ces convives,
20:48 les plats, ont permis, diplomatiquement,
20:50 de nouer cet accord ?
20:52 Vous aviez servi quelque chose d'urticant, de clivant,
20:55 ça aurait pas joué le même rôle ?
20:57 -Sans doute, mais c'est surtout un état d'esprit.
21:00 Ca avait été fait avant moi, à Briassavarin.
21:02 Le grand Briassavarin, c'était Taillerand,
21:05 le ministre qui l'avait engagé à son service
21:07 quand il y avait des grandes réunions politiques en France
21:11 pour adoucir tous les autres présidents
21:13 des autres pays qui venaient nous rencontrer.
21:16 Il savait que la gastronomie française
21:18 est respectée, et quand on mange de la gastronomie française,
21:22 on respecte le mouvement.
21:23 -Grâce à vous, on va continuer à mettre en lumière
21:26 la cuisine française. -Briseur de grève.
21:29 -Oui, briseur de grève.
21:30 -Je rends hommage à Michel Palmier, à Christian et à M.Guesso.
21:34 Je pense qu'à tous les quatre, chacun, avec notre savoir,
21:38 on était arrivés à dénouer une situation
21:41 qui paraissait indénouable. -Inextricable.
21:43 -A l'époque, c'était déjà savoir faire bien français,
21:46 la bistronomie, que vous en êtes l'inventeur de cette cuisine,
21:50 mi-bistro, mi-gastro, c'est le dessous des plats.
21:53 Musique rythmée
21:55 ...
21:57 -Une cuisine raffinée et inventive, mais dans un cadre simple.
22:01 Voilà la définition de la bistronomie,
22:03 née dans les années 90.
22:05 Elle a fait florès dans la restauration,
22:07 avec des produits de qualité à des prix exceptionnels.
22:10 Les clients ne s'y trompent pas, ils sont au rendez-vous,
22:13 comme ici, au Matrée, où Maïté Frémont et Raphaël Inzenbach
22:16 sont allés à la rencontre d'un chef que vous connaissez bien.
22:20 Dans ce restaurant, les tables sont simples,
22:23 le style, celui d'un bistro typique.
22:26 Mais ici, le client est bien loin
22:29 d'une nourriture parfois ordinaire.
22:31 -Le produit est hyper important.
22:33 Donner autant d'attention à un filet de mackerel
22:37 qu'à un filet de bar, etc.,
22:39 ou qu'à un homard, etc.,
22:41 pour moi, c'est ça, l'idée de la bistronomie.
22:43 -Du très bon à un prix raisonnable,
22:46 c'est le défi que se sont lancés Lucas, en cuisine,
22:49 et Chloé, en salle.
22:51 Les ingrédients sont ultra frais,
22:53 comme ce thon de 5 kg que le chef cuisine ce matin.
22:57 -C'est un thon qui a été pêché dans l'Atlantique
23:00 par ce qu'on appelle des petits bateaux.
23:02 Il a été pêché à la ligne,
23:04 pas par des gros chaluts qui détruisent tout.
23:07 Tu me demandais ce que c'est, la bistronomie.
23:10 C'est aussi savoir utiliser les choses
23:12 et pas forcément jeter.
23:16 Cette partie-là va être super pour faire du cru,
23:19 des plats, etc.,
23:20 et ça, un chouïa plus de nez, on va le cuire.
23:22 -Au menu, thon snacké à la sauce tomate,
23:25 piment fumé avec des figues, des câpres et de la roquette.
23:28 Une assiette de bistrot,
23:30 travaillée comme dans un restaurant gastronomique.
23:34 28 euros le menu,
23:36 quatre fois moins qu'une table étoilée.
23:38 Moins sélect et plus conviviale,
23:41 une précision décontractée,
23:43 découverte chez vous, Yves Candeborde.
23:45 Lucas a fait ses classes dans vos cuisines
23:48 et voilà ce qu'il en retient.
23:50 -Il m'a appris les pommes dauphines de son grand-père.
23:53 C'est pas forcément ce qu'il m'a appris.
23:55 C'est vraiment une mission de philosophie.
23:58 -Cette cuisine de haut de volée, plus abordable,
24:01 vous en êtes le pilier.
24:03 Retour dans les années 90,
24:06 la régalade, votre restaurant,
24:08 va révéler un nouveau courant, la bistronomie.
24:11 -On peut très bien exister,
24:13 se faire plaisir professionnellement,
24:15 donner du plaisir à ses clients
24:17 et s'identifier à une institution privée
24:20 qui nous casse les pieds.
24:21 -Le concept a un succès fou.
24:23 Le terme "bistronomie" entre même dans le Larousse.
24:26 Définition, cuisine raffinée et inventive,
24:30 de type gastronomique,
24:32 mais servie dans un restaurant simple, non étoilé.
24:35 -Après, tout le monde a cherché à s'approprier cette bistronomie
24:38 qui était une martingale de recettes à succès.
24:41 C'est comme ça qu'aujourd'hui, la bistronomie
24:44 qualifie une réalité extrêmement diverse.
24:47 -Après, vous mettez désormais, sous le terme de "bistronomie",
24:50 un peu tout et n'importe quoi. Elle est là, la réalité.
24:53 -Alors, Yves Candeborde, dans cette bistronomie de 2023,
24:57 y a-t-il vraiment à boire et à manger ?
25:00 -Y a-t-il vraiment à boire et à manger ?
25:04 -Oui, bien sûr qu'il y a à boire et à manger.
25:07 Tout le monde veut s'approprier ce terme
25:09 qui a été inventé, dit la première fois par Sébastien Domorand.
25:13 Moi, j'avais jamais voulu faire ce qu'on m'a dit.
25:17 -Il vous gêne, ce terme ?
25:18 -Il m'a gêné à une époque.
25:20 -Pour ceux qui ne connaissent pas Sébastien Domorand,
25:23 critique gastronomique, qui a disparu,
25:25 mais grand bonhomme... -Un des journalistes
25:27 gastronomiques qui m'a le plus apporté intellectuellement
25:31 de par ses jugements et de par ses critiques.
25:33 Sébastien m'a dit un jour, "Yves, tu fais de la bistronomie."
25:37 J'ai devenu un terme très marketing, très médiatique,
25:40 qui, des fois, frise le ridicule,
25:42 mais le contre-exemple, c'est le matré.
25:44 Le matré, Lucas et Chloé, se sont lancés sans argent.
25:47 C'est eux qui ont peint, ils n'ont pas appelé un architecte,
25:50 ils ont mis de la lumière, ils n'ont pas appelé un designer.
25:54 Ils sont débrouillés avec leurs mains, avec leur coeur,
25:57 mais ils ont pensé qu'une chose, c'est donner de la personnalité,
26:00 de l'amour et faire une assiette d'exception.
26:03 -Qu'est-ce qui vous gêne dans la bistronomie ?
26:05 Quand on dit qu'elle est décriée, c'est parce qu'il y a un joli décor ?
26:09 -Si on prend historiquement, je sors du riz, du crion,
26:13 je quitte ça pour aller dans un endroit, me dire,
26:15 je veux que le plus grand nombre puisse bien manger
26:18 dans un espace totalement décontracté.
26:20 Donc, tout le décor rom, je l'enlève totalement.
26:23 Je pense qu'il y a une chose, c'est que l'assiette.
26:26 Aujourd'hui, on fait encore un nouveau,
26:28 on remet des codes de partout, on remet du décor rom,
26:31 avec, vous voyez, le designer à la mode,
26:33 l'architecte à la mode... -Vous, c'était pour nourrir
26:36 vos copains Rudy Beman ? -C'est pas pour nourrir les gens
26:40 mais pour dire qu'à un moment donné, on est en train de faire des musées,
26:43 que pour aller au restaurant, si on n'a pas les bons comportements,
26:47 on ne peut plus y aller. Un restaurant, ça doit rester
26:50 un lieu de vie. Quand on rentre dans un restaurant,
26:53 on doit pas se prendre la tête à être mal à l'aise.
26:55 -L'ambiance, ça joue beaucoup, aujourd'hui,
26:58 pour se sentir bien dans un lieu. -Oui, il faut aller au musée,
27:01 au théâtre. Le restaurant, avant tout, c'est bien mangé.
27:05 Moi, j'ai pas envie de payer trois fois plus cher
27:07 que les rideaux de Pierre Frey.
27:09 Ça ne m'intéresse pas qu'on me dise que la volaille,
27:12 elle vient de chez Claire Dupontier,
27:14 une volaille d'exception, qui est faite par un personnage
27:18 extraordinaire, qui respecte ses animaux
27:20 et qui, tous les jours, nous amène une matière première
27:23 qui est juste incroyable et qu'on me la fasse déguster.
27:26 Moi, je veux l'émotion du palais,
27:29 l'émotion de toute ma sensibilité olfactive et gustative.
27:32 -Pour vous, les codes de l'abistronomie,
27:34 c'est quoi ? C'est du 100 % foie gras,
27:37 du 100 % français dans l'assiette ?
27:39 -Pas obligatoirement. -C'est du local ?
27:41 La qualité supérieure ? -C'est pas tellement du 100 % français.
27:44 Si on peut faire du français, pourquoi c'est interdire
27:48 de prendre un produit qui est exceptionnel ?
27:50 Et le locavore, aussi, si on peut utiliser
27:52 un maximum de produits locavores.
27:54 Moi, qui suis béarnais, je suis en Béarnes,
27:57 je n'ai pas le droit de faire des endives.
27:59 Je ne sais pas pourquoi je ne pourrais pas faire
28:02 des endives du Nord fait par un artisan.
28:05 Si je prends de l'agneau, si je suis en Béarnes,
28:07 il faut que je prenne l'agneau du Mont-Saint-Michel.
28:10 Après, l'abistronomie, après la définition, pour moi,
28:13 c'est une assiette d'exception à un prix accessible
28:16 dans une très bonne ambiance.
28:18 -C'était la contraction de bistro et de gastronomie.
28:21 -Exactement. -Quels sont les plats
28:23 qui incarnent... Il l'a dit, François-Régis Gondry,
28:26 c'est un peu à boire et à manger, tout et n'importe quoi.
28:29 Quels sont, si tant est que ça existe,
28:32 les plats qui incarnent cette bistronomie ?
28:34 -On peut très bien faire un turbo au caviar
28:37 dans la bistronomie, mais au lieu de le vendre 250 euros,
28:40 on ne le vend que 50 euros. -Vous le vendez à perte.
28:43 C'est l'actualité sur les livres. -Non, on ne le vend pas à perte.
28:46 -Le caviar, c'est un prix. -Je prends peut-être
28:49 un plat exagéré, mais philosophiquement, c'est ça.
28:52 On ne va pas le vendre à perte. On n'est pas obligé
28:54 de faire un coefficient de 10. -C'est pas forcément
28:57 un petit salut au lent. -C'est quand même
28:59 une critique très forte contre les étoilés,
29:02 ce que vous nous dites.
29:03 Ils font des marges énormes sur le dos du client.
29:06 -Ils font des marges énormes,
29:08 parce qu'ils sont obligés de les faire.
29:10 Le verre que je vais vous prendre,
29:12 qui coûte 250, eux, ils vont prendre un zalto
29:14 qui coûte 80 euros.
29:16 -D'accord. -Il y a une logique.
29:17 -C'est pour vous pousser... -Attention, je reviens dessus.
29:21 Je ne dis pas que la haute gastronomie
29:23 vole le client. Ah non, ce n'est pas vrai.
29:25 -Ils ont 45 personnes en salle.
29:27 -Ils gagnent moins d'argent que dans la bistronomie.
29:30 Mais ils sont dans l'excellence de tout.
29:33 -Le prix est dans l'excellence.
29:34 Le même vin qu'on va acheter en bistronomie,
29:37 on va faire un coefficient de 3, eux, un de 4, 5 ou 6.
29:40 -Est-ce qu'il y a la même exigence en cuisine
29:43 que dans un restaurant gastronomique ?
29:45 -C'est la même exigence.
29:46 C'est la différence.
29:48 Si, à la bistronomie, on a, Lucas le dit bien,
29:51 on a la même exigence.
29:52 C'est une obligation.
29:54 Mais attention, on a l'intelligence
29:56 de savoir qu'on n'est pas 15 en cuisine,
29:58 qu'on n'est que 2 en cuisine.
30:00 On va aller à un peu plus de simplicité technique.
30:03 Quand on va prendre un macaroon,
30:05 on va prendre le même qu'on pourrait acheter
30:07 qu'Eric Fréchon au bristol, la même qualité,
30:10 au même prix, mais on va le poêler,
30:12 on va l'agrémenter depuis le garniture.
30:14 Eric va faire un travail totalement différent
30:17 avec plus d'intervention de la main et plus de technique.
30:20 Donc, ça coûtera plus cher.
30:22 Mais gustativement, après, les goûts sont deux goûts d'exception.
30:27 -C'est pas moins ambitieux de vouloir faire de la bistronomie
30:30 au Ritz, dans des très grandes maisons comme vous ?
30:33 -Non, je pense que c'est beaucoup plus humain.
30:36 C'est plus humain parce qu'on est proche de nos clients,
30:39 on aime nos clients, on le voit avec Lucas,
30:42 il a la cuisine ouverte, il a envie d'embrasser tout le monde.
30:45 On a besoin, humainement, de vivre le moment avec intensité,
30:48 surtout dans la haute gastronomie.
30:50 C'est le côté parfait, très rigide,
30:53 très organisé, très structuré,
30:56 où il n'y a pas le droit de transpirer,
30:59 il n'y a pas le droit d'exister hors de l'assiette,
31:02 tandis que le bistronome veut exister hors de l'assiette.
31:05 -C'est pas une façon de renoncer à cette charge mentale ?
31:08 "Je fais bien mon métier,
31:10 "je m'encombre pas de cette charge de l'étoile."
31:12 -C'est là qu'ils sont idiots, ils se sont trompés,
31:15 ils ont loupé un coche.
31:17 Quoi qu'ils disent, dans tous leurs discours,
31:19 quand ils disent "c'est que l'assiette",
31:22 on sait bien que c'est pas vrai.
31:24 Je crois que là-dessus, Michelin fait une énorme erreur
31:27 d'avoir totalement délaissé cette bistronnerie
31:30 pendant des années et des années,
31:32 parce que je les défie de prendre une assiette finie,
31:35 d'un bistrot, qui est bien faite, la déplacer,
31:37 la mettre dans une maison avec le décor home...
31:40 -Et là, il aura son étoile. -Toute la problématique.
31:43 Eric Fréchon, à la verrière, zéro étoile,
31:46 il passe au bristol, l'année après, deux étoiles.
31:48 Eric, c'est un ami, il a pas changé sa cuisine.
31:51 Avec Eric, il a la même philosophie,
31:53 il avait la même précision dans la verrière à l'époque
31:56 qu'il a au bristol.
31:57 -Il y a une dictature des étoiles, aujourd'hui ?
32:00 -Il y a une dictature,
32:01 c'est un organisme privé,
32:04 donc si on a envie de leur dire un gros mot, on peut le leur dire.
32:07 -C'est ce que vous avez fait, finalement.
32:09 -Oui, poliment. -Poliment.
32:11 -Poliment. Non, mais parce que j'ai été déçu de leur part,
32:14 parce que j'ai travaillé dans un 3 étoiles Michelin,
32:17 où c'était une catastrophe,
32:19 un restaurant qu'on a cité tout à l'heure.
32:22 -Ceux qui auscultent les tendances de la cuisine française
32:25 disent que c'est le retour de la cuisine bourgeoise.
32:28 Quelle est la différence entre la cuisine bourgeoise
32:31 et cette bistronomie ?
32:32 La cuisine bourgeoise, c'est aussi une cuisine
32:35 avec des bons produits, des faisans.
32:37 C'est moins d'innovation, moins de création.
32:39 On ressort des vieilles traditions.
32:41 -La cuisine bourgeoise, c'est la cuisine familiale,
32:44 qui était faite de plats très chaleureux.
32:47 -Ca peut être une cuisine de bistronomie.
32:49 -C'est la cuisine familiale. -Oui, mais ça peut être
32:52 aussi une cuisine de gastronomie.
32:54 Si on a une oeuvre bourguignon faite par Jean-François Piège
32:57 dans son 2 étoiles Michelin,
32:59 ça sera merveilleux, c'est sûr.
33:01 -Comment l'usager et les clients s'y retrouvent ?
33:04 C'est de la gastronomie, de la cuisine bourgeoise,
33:07 de la cuisine familiale.
33:08 -Il y a trop d'appellations.
33:10 Aujourd'hui, on a un retour...
33:11 On a eu une période très espagnole,
33:14 avec la tendance espagnole de Ferran Adrià.
33:16 On a eu une tendance très asiatique,
33:18 qui dure encore un peu.
33:20 On a eu une tendance très scandinave,
33:22 avec tout ce qui s'est passé en Scandinavie.
33:24 Aujourd'hui, une fois qu'on a fait le tour,
33:27 on est en train de se dire, en fin de compte,
33:29 le plus beau des voyages, c'est faire le tour de soi-même.
33:33 Quand on a fait le tour de soi-même,
33:35 on se dit que c'est pas si mal que ça.
33:37 Pourquoi on ne ferait pas un saucisse purée
33:40 fait à la perfection ? -Avec de bons produits.
33:42 -Avec du goût. -Pourquoi, en finalité,
33:44 l'émotion du goût, l'émotion que le palais pourrait nous en dégager,
33:49 est pas aussi beau, aussi jouissif qu'une caviar d'exception ?
33:53 -La cuisine française a été copiée.
33:55 La bistronomie est-elle copiée ? On la retrouve à l'étranger ?
33:58 Est-ce qu'ils nous envient, ces petits bistrots,
34:01 avec une cuisine excellente ? -Moi, j'ai toujours...
34:04 Beaucoup... Pas d'émotion du tout, en plus,
34:06 mais toujours très surpris de me balader dans le monde entier
34:10 et de voir le mot "bistronomie" apparaître partout.
34:13 Dans n'importe quel pays, le mot "bistronomie",
34:16 même au Japon, il ne le met pas en japonais.
34:18 Au départ, c'est un phénomène parisien,
34:20 le 14e arrondissement, qui a gagné Paris, la province, le monde.
34:24 -Vous êtes exporté dans le monde entier.
34:26 -Des fois, personne ne sait qui je suis.
34:29 -Brisure de grève, faiseur de tendance.
34:31 -Vous vous rendrez compte que ça a été fait 49 avenues et jambes moulées.
34:35 Un restaurant peint par mes copains de rugby.
34:38 Les tables, on les a achetées au rabais, au puce.
34:40 -Aujourd'hui, vous faites de la résistance.
34:43 -Ils peuvent pas s'imaginer ça.
34:45 On l'a fait avec nos valeurs,
34:47 et surtout, sans savoir ce qu'on faisait.
34:49 La seule chose que j'avais en vie, c'est respecter mon métier,
34:52 tous les maîtres qui m'ont appris à travailler,
34:55 de faire une exception,
34:57 mais le faire dans la jouissance et donner du bonheur à tout le monde.
35:00 Le plaisir de bien manger, c'est pas réservé.
35:03 En France, le malheur, aujourd'hui,
35:05 c'est qu'il y a encore des gens qui, malheureusement,
35:08 mangent mal et n'ont pas de plaisir à manger.
35:11 C'était mon ambition de me dire
35:13 que je vais essayer de faire plaisir au plus grand nombre.
35:16 -Il y en a d'autres qui nous font plaisir.
35:18 C'est les joueurs de l'équipe du monde de rugby.
35:21 Il y a la Coupe du monde,
35:22 alors on verra si elle est équipe du monde,
35:25 on sait pas encore, mais pour l'instant,
35:27 c'est déjà bien parti.
35:29 Vous êtes un amateur du ballon ovale,
35:32 vous avez été un grand joueur aussi,
35:34 et vous êtes capitaine du XV de la gastronomie.
35:37 Vous êtes auteur de ce livre, coauteur,
35:39 "Oval X", on l'a dit, qui mêle les recettes
35:42 et un peu la troisième mi-temps.
35:44 Pour assurer sur le terrain, il faut manger équilibré.
35:47 On en parle et on met les pieds dans le plat.
35:49 -Yves, c'est sans doute lié à leur gabarit hors normes.
35:57 Les rugbymen aiment bien manger.
35:59 On connaît leur passion pour les troisièmes mi-temps.
36:02 Mais avant les matchs, la diététique reprend ses droits.
36:06 Mieux manger pour être performant.
36:08 Pierre-Michel Carniel et Vincent Ferraha
36:11 sont venus à Porteboucq à l'occasion du mondial amateur de rugby.
36:14 -Aujourd'hui, on fait tomber de suite les règles à la française.
36:18 Il faut les jouer comme très des gros.
36:20 On les fait tomber aux jambes.
36:22 Il faut pas qu'ils fassent un mètre.
36:24 Aux jambes, aux jambes, tout au long de la partie.
36:27 -Avant de dévorer ses adversaires, le match se déroule dans les assiettes.
36:31 Les joueurs du rugby club de Digne-les-Bains
36:33 représentent la France.
36:35 Ils mangent trois heures avant le premier match,
36:37 un repas sur mesure.
36:39 Le repas est un repas sportif,
36:41 qui est composé de poulet, de pâtes, de lentilles,
36:45 une mademoine, un yaourt et des couverts.
36:49 Évidemment, de l'eau.
36:51 La bière, on sait après.
36:52 Rires
36:54 -Des glucides, des lipides, mais aussi beaucoup de protéines.
36:58 Le rugby amateur s'inspire des codes nutritieux
37:01 et de la nourriture.
37:02 -Le rugby, c'est un sport qui est très important pour nous.
37:05 -Avec beaucoup de protéines, le rugby amateur s'inspire
37:08 des codes nutritionnels des sportifs de haut niveau.
37:12 -Sans faire de pub, si vous mangez un fast-food avant le match,
37:15 ça va pas être la même chose que si vous mangez des féculaires.
37:18 Après, les professionnels, ils ont des diététiciennes,
37:21 des personnes qui gèrent leur alimentation.
37:24 Après, on essaie de faire attention,
37:26 mais après, ça reste amateur,
37:29 donc on peut pas contraindre les garçons à manger équilibré
37:32 tous les jours avec des menus adaptés.
37:34 -Tout au roi !
37:37 -Ce jour-là,
37:39 les Français affrontent une équipe néo-zélandaise.
37:42 Elle aussi semble avoir faim.
37:43 Et quand les rencontres s'enchaînent,
37:46 les joueurs peuvent perdre jusqu'à 2 litres d'eau par heure,
37:49 alors même la composition de l'eau n'est pas laissée au hasard.
37:53 -On la récupère, les gars ! Allez !
37:55 -En fait, pour la mi-temps, essentiellement,
37:57 on rajoute un petit peu de compléments
37:59 pour la récupération.
38:01 Donc, dedans, il y a du sucre, des sels minéraux,
38:04 plusieurs petites choses.
38:05 -Très important, surtout pour la suite,
38:08 parce qu'on a une accumulation de matchs.
38:10 On a un deuxième match derrière,
38:12 donc il faut que tous les organismes soient toujours prêts.
38:15 -Les All Blacks amateurs l'emportent contre l'équipe des Bleus,
38:19 mais peu importe le score, place à la célèbre 3e mi-temps.
38:22 Toutes les équipes partagent ce qu'elles appellent un gueuleton,
38:25 un repas copieux et festif.
38:27 -Du coup, on mange tous ensemble, religieusement,
38:30 une soupe de poisson bien marseillaise.
38:32 Ca tranche un peu avec le repas de ce midi.
38:34 Ce midi, c'était très asaxé,
38:36 protéines, sucre lent.
38:38 Ce soir, c'est plus l'ambiance à la bonne humeur.
38:41 On a passé une bonne journée.
38:42 -Ca fait un équipe, ouais. -Ca fait un équipe.
38:45 -Et là, surtout, c'est un moment de convivialité, de partage.
38:48 Parce que le rugby amateur, c'est surtout ça.
38:51 C'est le rugby, c'est l'Ovalie, c'est les copains.
38:54 Et là, on est tous ensemble,
38:55 on partage un beau moment de convivialité.
38:58 -Et on se permet même quelques excès.
39:00 -Moi, je préfère l'eau rouge.
39:02 -Dans un verre, quand même.
39:04 -Il y a au moins de...
39:06 De...
39:07 De vin, genre. -Là !
39:08 -Alors, j'ai lu ça, et vous avez dû connaître cette époque.
39:12 Dans les années 80, on disait que l'équipe de France,
39:15 avant un match, dévorait un pantagruéli cassoulet.
39:17 Ca, c'est plus possible, aujourd'hui ?
39:20 -Avant un match, oui, c'est plus possible.
39:22 Dans les années 80, le rugby était encore un sport totalement amateur.
39:26 Ca a simplement changé. -C'était l'équipe de France.
39:29 -Oui, mais l'équipe de France, c'était aussi des amateurs.
39:32 Ils avaient le comportement d'un jeu amateur.
39:34 -Aujourd'hui, il faut manger vraiment équilibré
39:37 pour être un grand sportif.
39:39 -Oui, ils sont obligés. -Il faut pas se permettre...
39:42 -On voit déjà, par rapport au corps des joueurs de rugby,
39:45 qu'ils sont des athlètes.
39:46 Moi, je dis toujours, ils ressemblent tous à des decathoniens.
39:50 Ils sont magnifiques.
39:51 Donc, l'alimentation est très importante,
39:54 primordiale, et ils y font très attention.
39:56 Mais ce qui empêche pas, par exemple,
39:58 après la Coupe du monde, il y aura un joli banquet,
40:01 un joli barquet. -Il y a toujours
40:03 des 3e. mi-temps. -Oui, parce que c'est
40:05 des 3e. mi-temps, ils font partie de la culture de rugby.
40:09 C'est un moment de fraternité. C'est ce que j'ai vécu,
40:12 moi, avec M. Gousseau, M. Palmier et M. Paris.
40:14 C'est que la table fait qu'il y a un partage,
40:17 qu'il y a de l'amour qui s'instaure et qui amène beaucoup de liens,
40:21 et cette fameuse fraternité qui fait partie, vraiment,
40:24 de l'ADN du rugby.
40:26 -Vous faisiez vivre cette table avec vos copains du rugby
40:29 quand vous étiez joueurs ? -Oui, on perpétuait
40:31 ces traditions, et c'était très important.
40:34 -Vous cuisinez pour les copains ? -Oui, c'était un club
40:37 très amateur de 3e. division. Il y avait toujours un barbecue,
40:40 quelqu'un en grillade, et souvent, moi, en tant que cuisinier,
40:44 je me retrouvais au grillade. -Vous connaissez
40:47 Ève Thiolier, la nutritionniste du 15 de France.
40:49 Vous avez des contacts avec elle, vous l'aidez à discuter,
40:53 parce que vous aimez la bouffe-plaisir.
40:55 Qu'est-ce qu'ils mangent le 15 de France ?
40:57 Qu'est-ce qu'ils vont manger avant le match contre l'Italie ?
41:01 -Je ne l'aide pas du tout, parce que je ne suis pas
41:04 un diététicien pour accompagner le 15 de France.
41:06 Je suis plutôt intervenant sur l'après-match.
41:09 -Sur l'après-match. -Ils vont manger équilibré.
41:12 -Est-ce que tout est pesé ? Le moindre gramme de protéines ?
41:15 -Pesé, peut-être pas, quand même,
41:17 mais l'équilibre nutritionnel, c'est sûr qu'il est là,
41:21 et surtout, il y a un équilibre nutritionnel
41:23 en fonction de chaque individu. -Du gabarit.
41:26 -Quand on nourrit un joueur comme Antonio,
41:30 qui fait 150 kg, et qu'on nourrit à côté de ça
41:33 un Thomas Ramos, c'est pas du tout la même...
41:37 Il n'y a pas besoin de la même quantité,
41:39 ni même, sans doute, du même équilibre nutritionnel.
41:43 Donc, chacun a un équilibre nutritionnel.
41:46 -Il y a ce livre, "Ovalix", que vous avez coécrit.
41:49 Il y a beaucoup de recettes.
41:51 Qu'est-ce que c'est, ces recettes, avec, finalement, le 15 ?
41:55 -Alors, "Ovalix", on l'a écrit,
41:57 je l'ai coécrit avec Olivier Margot,
41:59 qui est l'ancien rédacteur en chef pendant 25 ans
42:02 du journal "L'équipe est amoureux de rugby",
42:04 ancien joueur de rugby.
42:06 L'idée, c'est que le banquet est très important,
42:08 et il faut le mettre en valeur.
42:10 Alors qu'on est allé rechercher des vieux menus de banquets,
42:15 souvent pour des matchs assez historiques
42:17 dans l'histoire de la gastronomie,
42:19 de la rugby française.
42:21 -Il y a les menus, les photos...
42:22 -Dans chaque menu, Olivier raconte...
42:25 -Du siècle dernier. -Oui, il raconte l'histoire
42:28 du match. Moi, j'en raconte aussi certaines
42:30 que j'ai vécues.
42:31 J'y raconte l'histoire du banquet.
42:33 Systématiquement, par rapport à chaque menu,
42:36 je retire une matière première du menu
42:38 et je m'amuse à faire une recette,
42:40 une recette facile à faire,
42:42 en me disant que si j'ai des copains
42:44 qui vont venir voir le match rugby,
42:46 qu'est-ce que je peux leur faire assez facilement.
42:49 -C'est plutôt à picorer ?
42:51 -C'est plus à picorer.
42:52 -Devant la télé pour regarder le match.
42:54 -Devant la télé, mais des recettes engagées,
42:57 comme au rugby, des recettes qui ont du caractère,
43:00 où il n'y a pas d'indifférence, qui vont être surprenantes,
43:03 mais des recettes plaisir et accessibles à tout le monde.
43:06 -Pas qu'à picorer, Brigitte,
43:08 parce que le magret de canard en carpaccio...
43:11 -Ca, c'est à picorer. -On peut picorer ?
43:13 -Oui, picorer, je dis avec une fourchette.
43:16 -Brigitte peut penser peut-être au snacking.
43:18 -Non, c'est pas du tout. -La tarte au Saint-Jacques.
43:21 -Les oeufs pochés au saumon gelé, ça, ça se partage.
43:24 -Ca donne des idées, aussi,
43:26 peut-être, aux personnes qui nous regardent.
43:28 -Le riche coffee et cette huile salée,
43:31 ça se partage moins. -Il peut y avoir trois pailles.
43:34 -Après, chaque plat a aussi une petite histoire
43:36 par rapport au match.
43:38 Vous parliez de la tarte au chocolat.
43:40 Elle a été créée par Christian Constant
43:42 quand on était à l'Hôtel Crion.
43:44 Pour les joueurs de l'équipe de France
43:46 qui étaient au sein des années 80,
43:48 dont Pascal Ondars, Grégoire Lascubé,
43:50 parce qu'ils étaient gourmands, fanatiques du chocolat,
43:54 et capitale du chocolat en France, c'est Bayonne.
43:56 On a voulu rendre hommage à tous ces joueurs
43:59 qui arrivaient du Pays Basque en leur créant cette tarte au chocolat.
44:03 -Vous êtes aussi capitaine du XV de la gastronomie.
44:06 Racontez-nous cette histoire,
44:08 parce que vous intervenez aussi sur cette Coupe du monde de rugby.
44:11 -Oui, j'interviens sur la Coupe du monde de rugby.
44:14 C'est Claude Haché qui m'a contacté pour me dire
44:17 que ce serait bien, pour une fois,
44:19 une Coupe du monde de rugby, surtout en France.
44:22 On met en valeur la haute gastronomie,
44:24 car le rugby est reconnu, mais la gastronomie,
44:27 la plus belle au monde, c'est la gastronomie française.
44:30 Claude m'a demandé d'accompagner tous les traiteurs de France
44:33 qui interviennent dans les neuf stades.
44:36 On est 23 cuisiniers.
44:38 -C'est un 15 à 23.
44:40 Il y a aussi le bande-touche.
44:42 -On est 23, on est 15 qui jouent, avec les huit remplaçants.
44:46 On a accompagné les traiteurs, on a choisi avec eux les menus,
44:50 on a imposé un cahier des charges,
44:52 qui est un cahier des charges recettes régionales,
44:55 recettes de saison et un maximum de produits locavores.
44:58 Ca a été fait en amont depuis deux ans.
45:01 On a travaillé main dans la main avec tous les traiteurs.
45:04 Aujourd'hui, on est trois par stade, par match.
45:07 Il y a trois membres du XV de la gastronomie.
45:09 -On mange pas la même chose à Marseille qu'à Lille.
45:12 -C'est exactement ce qu'on voulait.
45:14 On voulait pas une effondrumenté globale de l'ensemble du territoire.
45:18 On voulait que chaque région, chaque stade transpire
45:21 et sente la gastronomie.
45:23 -Ce sont des traiteurs locaux, pas les grands chefs.
45:26 -C'est que des traiteurs locaux.
45:28 Dans les grands chefs, il y a Alain Ducasse, Jean-François Piège,
45:32 Alexandre Gauthier, Stéphanie Le Quelec,
45:34 Amandine Chéniot, Christelle Bruat.
45:37 Tous des amoureux de ce sport et de la gastronomie.
45:40 On s'est mis au service,
45:41 totalement bénévolement,
45:43 de ce magnifique événement qui se passe en France.
45:46 On est très fiers, parce que quand on rentre dans les stades,
45:49 on voit cette bouille réjouie de l'ensemble des spectateurs
45:53 en train de consommer un sandwich,
45:55 ou dans une loge ou dans un salon.
45:57 -C'est pour tout le monde.
45:59 -On a intervenu sur l'ensemble de tous les produits
46:02 qui sont servis dans les stades.
46:04 -On va bien manger au stade.
46:06 -On va bien manger au stade, c'est une bonne nouvelle.
46:09 On a fini, on va passer au dessert, le pêché mignon.
46:12 -Il est temps de passer au sucré.
46:17 Yves est déjà passé à la crème caramel.
46:19 -J'ai goûté. -Vous avez raison.
46:21 Un dessert connu dès le Moyen Âge en France.
46:24 Plus tard, cette friandise est appelée "flaon".
46:27 C'est un dessert qui va se populariser au fil des siècles,
46:30 jusqu'à cette version moderne, avec du caramel sur le dessus,
46:34 mentionné pour la première fois dans un livre "La Cuisine provençale".
46:38 J'ai une question, Yves.
46:39 Est-ce bien votre dessert préféré ?
46:42 Ou alors, un message subliminal envoyé au Rudy Bimène,
46:45 "Soyez des crèmes dans la vie, mais sur le terrain, allez-y,
46:48 "mettez des caramels aux adversaires."
46:51 -C'est mon dessert préféré. J'adore les crèmes.
46:53 D'ailleurs, elle est très bonne, très équilibrée,
46:56 très peu collée avec des oeufs, elle garde ce côté soyeux.
47:00 C'est une belle réussite. -Digne de la bistronomie.
47:03 -Digne de la gastronomie. -Ah, pardon.
47:05 -Je vais me fâcher. -Vous la faites aussi ?
47:07 -Une superbe crème caramel servie en fin d'un repas,
47:10 ça peut être un dessert merveilleux.
47:12 -Vous, vous la faites comment ? -Je fais pas mieux que ça,
47:16 pour être franc. La seule chose que je fais,
47:18 je m'amuse à mettre des feuilles de laurier dans le lait.
47:22 Quand je fais bouillir mon lait, j'infuse des feuilles de laurier dedans
47:26 et je trouve que ça amène un twist très agréable,
47:29 totalement différent, parce que le laurier en pâtisserie,
47:32 on l'utilise très peu, c'est plus souvent avec le poisson,
47:35 et j'adore ce côté du laurier qui amène beaucoup de fraîcheur
47:38 et peut-être une âme supplémentaire.
47:41 -C'est votre astuce. La feuille de laurier dans la crème caramel,
47:44 je vais essayer. -Testez pour moi.
47:46 Est-ce qu'on peut être aussi bon en salé qu'en sucré ?
47:49 Est-ce que vous êtes aussi à l'aise
47:51 quand vous faites de la pâtisserie que quand vous faites un plat...
47:55 -Oui, je suis aussi à l'aise en sucré qu'en salé,
47:58 mais ma spécialité, ça reste quand même le salé.
48:01 On dit, nous, on fait des desserts de cuisiniers.
48:04 La crème caramel, c'est vraiment typiquement
48:06 un dessert de cuisiniers.
48:08 Je vais pas concurrencer un Christophe Michalak
48:11 ou un Felder ou un Pierre Armet,
48:14 qui sont des purs pâtissiers et qui font des desserts techniques
48:18 et pratiquement aujourd'hui, c'est tous des oeuvres d'art.
48:21 Nous, les cuisiniers, on va à l'essentiel.
48:24 -C'est quoi, les desserts de cuisiniers ?
48:26 -C'est la crème caramel, une mousse au chocolat,
48:29 une crêpe suzette, un soufflé chaud au Grand Marnier,
48:33 une norméenne norvégienne, une tarte fine aux pommes.
48:36 On est plus sur des classiques de cuisiniers
48:38 que la pâtisserie qu'on voit aujourd'hui,
48:41 qui est très artistique avec beaucoup de techniques.
48:44 -Il y a le duel Beatles-Rolling Stone,
48:47 et le duel crème caramel-crème brûlée.
48:49 Vous êtes crème brûlée ou crème caramel ?
48:51 -Je mettrai pas de duel, car les deux sont très bonnes.
48:54 -Il faut choisir.
48:56 -Euh... -Crème caramel.
48:57 -Pourquoi il faut toujours choisir ?
48:59 -Votre choix, là.
49:01 -Pourquoi vous le savez ?
49:02 Vous le faites d'évolu,
49:03 vos clients sont obligés de choisir.
49:05 C'est vous qui proposez le choix.
49:07 -C'est difficile. -C'est moi qui choisis.
49:10 Par exemple, je vais faire crème caramel l'hiver
49:13 et je vais faire crème brûlée l'été.
49:15 Pourquoi ? Parce que la crème caramel,
49:17 c'est plus rond, c'est plus chaleureux,
49:20 et le côté crème brûlée, c'est un genre de chaud-froid
49:23 qui est différent.
49:24 C'est deux choses différentes,
49:26 mais elles sont bien faites.
49:27 Il faut arrêter de vouloir choisir. Je veux les deux.
49:30 -Je veux tout.
49:31 Rires
49:33 Alors, puisque vous voulez tout,
49:34 eh bien, on va écouter à présent une musique
49:37 que vous avez choisie.
49:38 Vous allez nous dire pourquoi. On l'écoute ensemble.
49:41 Musique douce
49:43 ...
49:52 -Dans son vieux par-dessus, rappé,
49:54 il s'en allait l'hiver, l'été,
49:56 dans le petit matin frileux.
49:59 Musique douce
50:00 Mon vieux, mon vieux.
50:02 -Alors, cette chanson, vous avez l'air ému, non ?
50:05 Pourquoi vous l'avez choisie ? C'est Daniel Guichard.
50:08 -Oui, c'est Daniel Guichard, mon vieux,
50:11 parce que je vois mon papa qui a 92 ans et qui est pas bien du tout,
50:14 qui est en train, tout doucement, de partir dans le delà.
50:18 -C'était un petit hommage.
50:19 -Oui, parce que c'est quelqu'un d'important.
50:22 Je pense que, comme tous les papas, il faut tout le monde.
50:25 Quand c'est son papa qui m'a accompagné toute ma vie,
50:28 c'est particulier.
50:29 Il va me faire pleurer.
50:31 -Votre papa, il vous a donné envie de faire ce métier ?
50:34 -Oui, il m'a donné envie de faire ce métier.
50:36 -Il avait une ferme ? -Oui, et surtout de vivre.
50:39 C'est pas tellement de faire ce métier,
50:41 mais de faire ce que vous aimiez.
50:43 -De vivre heureux.
50:44 De ne pas avoir de complexe,
50:46 même si c'est pas bien ce qu'on fait,
50:48 si ça fait plaisir, fais-le.
50:50 -C'était l'exemple quand on se faisait attraper
50:53 quand on était jeunes, quand on avait fait des bêtises.
50:56 On se faisait gronder, mais il nous disait
50:58 "soyez intelligents, ne vous faites pas attraper."
51:01 -Il doit être fier, aujourd'hui.
51:03 -Oui, monsieur, il est fier.
51:05 Je suis surtout très fier d'être son fils.
51:07 -Ce papa qui vous a appris à faire la bandane.
51:10 -Oui, comme tous les papas qui apprendent.
51:12 Je pense qu'il m'a donné une philosophie
51:15 et une façon de me comporter, une façon de vivre.
51:17 -On lui dédie cette émission, alors.
51:20 -Je vous remercie.
51:21 -On vous remercie infiniment d'avoir partagé cette table avec nous.
51:24 -Merci, Yves. Merci beaucoup.
51:26 -Merci à Chef-François, qui nous a servi ces très bons plats.
51:30 -C'était très bon.
51:31 -Allez-y. Merci à vous tous de nous avoir suivis.
51:33 On se retrouve la semaine prochaine
51:35 pour un nouveau numéro de "Politique à table".
51:38 -Chez nous, y avait pas la télé
51:41 ...
51:43 C'est dehors que j'allais chercher
51:47 Pendant quelques heures l'évasion
51:50 [Musique]

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