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Anne Genetet, députée Renaissance des Français établis hors de France

Pékin, Melbourne, Tokyo, Moscou: en campagne électorale, la liste de ses meetings ressemble à une tournée des Rolling Stones. Anne Genetet est députée de la plus grande des 577 circonscriptions. Elle représente une partie des Français installés à l'étranger.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 Ces campagnes électorales ressemblent à une tournée
00:02 des Rolling Stones Pékin, Melbourne, Tokyo
00:05 ou encore Moscou.
00:07 Mon invitée représente une partie des Français établis à l'étranger.
00:11 Elle est députée de la plus grande des 577 circonscriptions.
00:15 Générique
00:29 -Bonjour, Anne Jeanté. -Bonjour.
00:31 -Quand vous étiez petite, vous avez eu une discussion
00:34 avec votre père sur le sens de la vie.
00:37 La réponse qu'il vous a faite ce jour-là
00:39 vous a marquée. Qu'est-ce qu'il vous a dit ?
00:41 -Il m'a dit "je ne sais pas".
00:43 Après, il m'a dit "je pense qu'on est comme un grand mur de briques.
00:47 "Chacun d'entre nous est une brique.
00:49 "Ca soutient les autres, celles qui pourraient être faibles.
00:52 "Si tu as un coup de mou, les autres te soutiendront."
00:55 -C'est une belle image, si l'on peut dire.
00:58 -Ca m'a portée constamment depuis
01:00 et j'espère l'avoir transmise à mes enfants.
01:03 -Si on regarde votre parcours de vie,
01:05 vous n'avez pas été une, mais plusieurs briques différentes.
01:08 Vous avez été pédiatre, journaliste santé,
01:11 consultante en gestion de crise sanitaire,
01:13 blogueuse également. Vous avez un peu la bougeotte,
01:16 vous avez besoin de changer de vie, de métier régulièrement.
01:20 -Quand j'ai fait le tour d'un sujet,
01:22 j'aime bien pouvoir en changer quand l'opportunité se présente.
01:25 J'aime savoir qu'à chaque fois, je peux être utile.
01:28 Quand je bloque en me disant que je suis arrivé au bout de ce que je peux,
01:32 pourquoi pas changer ?
01:33 -Jeune pédiatre, vous avez d'abord travaillé
01:36 dans un service de protection maternelle infantile, de PMI.
01:39 Vous avez ensuite travaillé dans un centre de la Croix-Rouge,
01:43 notamment aux côtés de toxicomanes.
01:45 Plus tard, vous avez suivi votre mari à Singapour
01:47 et là, vous avez aidé des travailleurs migrants
01:50 maltraités par leurs employeurs, sans faire de politique.
01:53 Vous avez toujours eu des engagements assez forts.
01:56 C'est important ?
01:57 -Ah oui. Je reviens à l'image de la brique dans le mur.
02:00 J'ai besoin d'être utile aux autres.
02:02 J'envisageais au départ...
02:04 J'ai fait une préparation aux écoles d'ingénieurs
02:07 et quand j'ai compris qu'ils étaient dans un bureau,
02:09 j'ai dit que c'était pas pour moi.
02:11 J'avais besoin de me sentir directement utile aux autres,
02:15 d'être sur le terrain, d'être auprès de ceux,
02:17 en me disant que depuis toute petite, j'ai eu de la chance.
02:20 Je me dis que je suis dans un pays incroyable,
02:23 dans une famille incroyable, dans un quartier formidable.
02:26 Pourquoi j'ai cette chance ?
02:28 Ca me travaille depuis longtemps.
02:30 -Mais jamais d'engagement politique avant 2017 ?
02:32 Ca vous a jamais attiré ?
02:34 -Je me suis intéressée par la politique en elle-même,
02:37 par le fonctionnement de la société,
02:39 mais je trouvais pas d'offre politique
02:41 qui englobe tout ce à quoi j'aspirais.
02:44 Je me suis jamais engagée politiquement avant.
02:46 -En 2017, vous vous apprêtiez à devenir une autre brique,
02:50 si l'on peut dire. Vous étiez à Paris
02:52 et là, vous suiviez une formation pour devenir médecin urgentiste.
02:56 C'est là que la politique est entrée dans votre vie
02:58 avec Emmanuel Macron.
03:00 Qu'est-ce qui fait que vous vous êtes dit "j'y vais" ?
03:03 -J'ai eu ce souci d'aider les autres.
03:05 En 2002, Le Pen au deuxième tour, ça me frappe énormément.
03:08 Ensuite, je vais à Singapour, loin de la France,
03:11 donc là, j'ai une plus grande impétence
03:14 pour ce qui se passe en France sur le plan politique.
03:17 Je comprends dans les sondages que Le Pen monte.
03:19 Je me dis que je pourrais pas regarder mes enfants dans les yeux
03:23 sans leur avoir dit "j'aurais essayé quelque chose".
03:26 Je me suis dit qu'il fallait m'engager.
03:28 Il y a l'offre d'Emmanuel Macron, qui représentait à la fois
03:32 l'idée d'être au plus proche de ceux qui ont des difficultés,
03:35 ceux qui m'engageaient depuis longtemps,
03:37 et pas être dans un état coercitif,
03:39 car j'avais pas mal voyagé dans les pays de l'Est.
03:42 J'avais des souvenirs du Bloc soviétique.
03:44 Je suis née à l'époque du mur de la guerre froide,
03:47 donc je voulais pas de ça.
03:49 Donc, j'ai trouvé l'offre politique qui correspondait à moi.
03:52 -Le Mouvement En Marche vous a investi
03:54 dans la 11e circonscription des Français de l'étranger.
03:58 C'est la plus vaste de toutes les circonscriptions.
04:01 Il y a 8 pays à cheval sur 3 continents,
04:03 11 fuseaux horaires.
04:05 Comment est-ce qu'on fait... On la voit sur ces images,
04:08 ça représente une zone importante.
04:10 Comment fait-on campagne sur un territoire aussi vaste ?
04:13 -Nous avons la chance d'avoir le fichier e-mail
04:16 de tous nos électeurs. J'ai une base de données de 80 000 e-mails.
04:20 Je pars sur une bonne base.
04:21 J'utilise les outils numériques, qui marchent très bien.
04:24 J'ai eu la surprise de voir des gens
04:26 que je ne connaissais pas,
04:28 et je me suis dit que c'était une bonne application.
04:31 Je me déplace un peu, pas partout.
04:33 Je ne pourrais pas visiter les 40 sur les 49
04:35 dans lesquels on a des communautés françaises.
04:38 Je me déplace toujours quand il y a une vraie raison d'y aller,
04:41 pour faire attention aux dépenses que ça engage,
04:44 à la fatigue que ça génère,
04:46 à l'intérêt que ça peut avoir pour nos communautés.
04:48 J'essaie d'être utile.
04:50 -Ca, c'est depuis que vous êtes élue.
04:52 En campagne, vous avez fait beaucoup de voyages.
04:55 J'ai retrouvé vos affiches de campagne,
04:57 je le disais au début de l'émission.
04:59 On dirait une tournée des Rolling Stones.
05:01 Melbourne aussi, Néchang, Tokyo, Hong Kong, Delhi, Kyoto.
05:05 -C'est tout à fait ça.
05:06 -Mais il faut un sacré budget.
05:08 Avion, notamment, transport, comment vous financez ça ?
05:11 -D'abord, je suis partie de Singapour.
05:13 On est en Asie, il y a des vols low cost,
05:16 ça coûte moins cher, c'est pas des distances énormes.
05:19 Le budget est important, mais il n'est pas considérable.
05:22 Je n'ai jamais dépensé la totalité du budget de campagne.
05:25 -Vous avez un budget pour les campagnes à l'étranger ?
05:28 -Oui, qui est différent de mes collègues en métropole,
05:31 mais je ne l'ai jamais dépensé en totalité,
05:33 ni pour la campagne ni pour ma mission de parlementaire.
05:37 -Vous êtes depuis 2017 l'une des 11 députées
05:39 des Français installés hors de France.
05:41 La taille de votre circonscription
05:43 fait que vous avez dû trouver une façon originale
05:46 d'assurer vos permanences parlementaires.
05:49 On va voir ça en image.
05:50 -Bonjour à tous.
05:51 Je vais attendre les premières connexions
05:54 et je vais vous lancer notre échange,
05:56 puisque nous sommes dans la permanence,
05:58 la permanence virtuelle, que je vous propose tous les mois
06:02 et qui me permet de vous présenter mon travail de parlementaire
06:05 et d'échanger avec vous et de répondre à vos questions.
06:08 Je vois déjà quelques questions qui sont tombées dans le chat.
06:12 -La plupart des échanges que vous avez
06:14 avec vos administrés, vos électeurs,
06:16 c'est comme ça, soit par Facebook Live,
06:19 soit en Zoom, quand c'est en plus petits groupes.
06:22 Est-ce que c'est un peu frustrant, pour vous et peut-être pour eux ?
06:25 -Alors, d'abord, nous-mêmes qui sommes à l'étranger,
06:29 nous avons l'habitude de ces outils-là,
06:31 avec nos amis, nos proches.
06:33 On a l'habitude d'utiliser un écran, de se voir par écran.
06:36 Ca fait pas une grosse différence par rapport à notre quotidien.
06:39 J'ai pas le choix, je peux pas faire autrement,
06:42 mais ça m'empêche pas, sur des situations de crise,
06:45 de proposer un Zoom.
06:46 Parfois, la veille pour le lendemain,
06:49 je propose un Zoom, et le lendemain,
06:51 on échange plus facilement.
06:53 Donc, ça aide. Merci aux outils numériques.
06:55 -Donc, votre point d'attache, je le disais,
06:58 c'est Singapour.
06:59 Comment est-ce que vous répartissez votre temps
07:02 entre le palais Bourbon, quand il faut voter les lois,
07:05 Singapour et le reste de votre circonscription ?
07:07 -Le plus gros du travail d'un parlementaire,
07:10 quel qu'il soit, c'est le palais Bourbon.
07:12 Mes collègues sont là le mardi, le mercredi, le jeudi,
07:16 souvent dès le lundi après-midi,
07:18 parfois le vendredi, quand on siège jusqu'au vendredi.
07:20 Le gros du travail est ici.
07:22 Même quand un administré nous sollicite
07:24 pour un problème qu'il a,
07:26 les questions qu'on va poser,
07:28 les responsables de ces entités sont à Paris,
07:31 pas en province ou à l'étranger.
07:33 Il faut qu'on soit présent.
07:34 Contrairement à eux, je peux pas prendre un RER,
07:37 un TGV pour rentrer le week-end.
07:39 J'y vais pendant les séances de suspension
07:41 des travaux de l'Assemblée.
07:43 Au précédent mandat, je pouvais y aller
07:46 mais j'ai changé mon rythme.
07:47 -C'est ce que j'allais vous demander.
07:50 -Je suis obligée d'y aller.
07:51 J'y vais la semaine de suspension,
07:54 les trois semaines de Noël,
07:55 la semaine de février, les deux semaines d'avril.
07:58 Et puis, je m'octroie un petit faveur,
08:01 c'est qu'au moment de la session extraordinaire,
08:04 nous avons le droit de donner une délégation de vote.
08:07 Je voyage beaucoup en juillet et en septembre.
08:09 -Vous ne pouvez pas déléguer votre vote le reste du temps ?
08:13 -Non. -Il n'y a pas de règle dérogatoire ?
08:15 -Non.
08:16 Ca limite le temps de déplacement.
08:19 Mais cette année, avec ces contraintes-là,
08:21 j'ai fait autant de pays que dans le précédent mandat hors Covid.
08:25 -Le Covid, justement, comment avez-vous géré
08:28 vos allers-retours entre Paris et Singapour ?
08:31 -Eh bien, le hasard faisait...
08:32 L'organisation de mon travail faisait que
08:35 à la suspension des travaux du mois de mars 2020,
08:38 période des élections municipales, je me trouvais en France.
08:41 Quand j'ai compris que l'espace aérien allait fermer,
08:45 il te reste 48 heures maximum pour rentrer,
08:47 sinon, on pourra plus se revoir.
08:49 Il a bien fait d'entrer, sinon, on ne se serait pas vu.
08:52 Je suis restée en France pendant deux ans.
08:54 Mon pays, Singapour, refusait même,
08:56 avec un titre de séjour permanent, que je rentre à Singapour.
09:00 J'avais même pas le droit de rentrer.
09:02 Des pays ont interdit leurs ressortissants.
09:04 -Quand on se promène sur vos réseaux sociaux,
09:07 on vous voit en photo avec des ambassadeurs,
09:10 notamment l'ambassadeur de Chine en France,
09:12 ou avec des officiels dans les pays où vous vous déplacez,
09:16 qui font partie de votre circonscription,
09:18 comme le Parlement de la Corée du Sud, par exemple.
09:21 Vous êtes un peu députée diplomate, on peut dire.
09:24 Il y a une part de diplomatie.
09:26 -Il y a une part de diplomatie liée sur le précédent mandat
09:29 au fait que j'étais membre de la commission des Affaires étrangères.
09:33 Dans ce cadre-là, je jouais mon rôle de diplomate parlementaire.
09:36 Un parlementaire peut dire des choses
09:39 que nos diplomates ne peuvent pas dire.
09:41 Dans chacun des pays, j'ai à coeur de présenter nos communautés
09:44 aux responsables sur place.
09:46 Sachez que vous avez une communauté de 3000 Français,
09:49 10 000, 5 000. Parfois, ils ne se rendent pas compte.
09:52 -Les difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés.
09:55 -Moi, je vends la France très positivement.
09:58 Vous avez des entreprises qui font ci, qui font ça,
10:01 un artisan qui fait ci, un chocolatier français,
10:03 un marchand de vin français. J'aime bien vendre notre pays
10:07 à mes interlocuteurs sur place.
10:09 -La diplomatie, c'était le cas notamment en 2021,
10:11 quand l'Australie a annulé le fameux contrat géant
10:14 où il s'agissait de construire 12 sous-marins
10:17 pour 50 milliards de dollars.
10:19 Vous avez fait une confidence que je trouve surprenante.
10:22 On va revoir ça en image.
10:23 -J'ai rencontré un député de la majorité de Scott Morrison,
10:27 Premier ministre actuel, qui m'a dit
10:29 "J'en veux pas de votre contrat, il est trop cher,
10:32 "je ferai tout pour le déchirer."
10:34 Il était très agressif avec ce contrat.
10:36 J'étais tellement stupéfaite que je m'en suis ouverte
10:39 à la mairie française.
10:40 Il m'a dit "Oui, on sait."
10:42 -Ca donne l'impression que vous n'êtes plus de diplomate,
10:45 c'est presque du renseignement que vous faites.
10:48 Vous avez accès à des informations...
10:50 -Pas seulement moi, mais tous les Français installés à l'étranger
10:54 que j'ai à coeur de défendre,
10:56 par les contacts avec les autorités locales,
10:58 les entreprises, les institutionnels,
11:01 on a accès à des informations dont la France a besoin.
11:04 -Vous travaillez en coordination avec le Quai d'Orsay
11:07 sur certains sujets ? -Toujours.
11:09 C'est très important de se coordonner,
11:11 s'assurer que j'ai les bons messages,
11:13 qu'inversement, eux peuvent m'orienter en disant
11:16 "C'est sur ce sujet-là qu'on voudrait plutôt avancer."
11:19 Chaque fois que j'ai une information que je juge pertinente,
11:22 je la leur apporte.
11:23 -L'Ukraine fait partie de votre circonscription.
11:26 Vous avez rencontré Volodymyr Zelensky à Kiev
11:29 puisque vous avez accompagné la présidente de l'Assemblée
11:32 dans son voyage sur place.
11:34 Avez-vous pu vous rendre utile sous une forme ou une autre
11:37 quand la guerre s'est déclarée ?
11:39 -J'ai eu beaucoup de contacts avec les Français sur place,
11:42 qui étaient importants, notamment sur la position française,
11:45 sur le soutien. Au rendez-vous avec Volodymyr Zelensky,
11:48 le sujet que j'ai voulu lui poser et sur lequel je continue à travailler,
11:52 j'ai voulu l'alerter sur le risque que les opinions publiques
11:56 nous lâchent à un moment ou un autre.
11:58 Notre travail, et à lui et à nous, citoyens et parlementaires,
12:02 c'est d'animer cette opinion publique
12:04 et de dire "n'oublions jamais l'Ukraine".
12:06 J'espère être utile en faisant vivre l'Ukraine,
12:09 le sujet ukrainien, pour que jamais les opinions publiques
12:12 ne nous lâchent. -On va passer à notre quiz.
12:14 Je vous explique le principe. Je vais commencer une phrase.
12:18 Ca va être à vous de la compléter.
12:21 On commence.
12:22 Vu de Singapour, les débats dans l'hémicycle sont parfois...
12:25 -Particulièrement animés et irrespectueux.
12:28 -Ca se passe pas du tout comme ça ? -Pas du tout.
12:31 Mes collègues au Palais Bourbon pensent souvent que...
12:34 -S'agissant de moi ?
12:37 -De vous et du fait d'être députée de l'étranger.
12:41 -Curieux, interrogatif,
12:43 mais je pense que je suis souvent vue comme une députée souriante
12:47 et soucieuse du consensus.
12:49 -Enfin, la prochaine brique dans ma vie sera,
12:52 après celle de députée ?
12:54 -Oh ! Alors, comme j'ai encore quatre ans de mandat,
12:57 à deux ans, je ne sais pas ce que je vais faire.
13:00 Mais les envies de faire plein de choses,
13:02 d'être utile au pays, oui.
13:03 -Merci beaucoup, Anne Genté, d'être venue dans "La Politique et moi".
13:07 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
13:10 Générique
13:13 ...

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