Le profil des terroristes est de plus en plus jeune: alors est-ce qu'ils sont devenus la cible privilégiée de la propagande jihadiste? La professeure en Relations Internationales, Myriam Benraad, était l'invitée de BFMTV.
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00:00 Bonjour Myriam Benrad, vous êtes professeure de relations internationales à l'université internationale Schiller à Paris,
00:05 auteur de Terrorisme, Les affres de la vengeance aux éditions Le Cavalier Bleu.
00:10 Merci d'être en direct avec nous. On voulait vous avoir pour faire un petit état des lieux de la menace terroriste en France
00:15 parce qu'il y a deux ministres qui prennent la parole ce matin dans la presse, Sébastien Lecornu et Gérald Darmanin
00:20 et qui sont tous les deux alarmants, notamment Sébastien Lecornu qui dit
00:26 la situation au Proche-Orient peut relancer une dynamique du côté de l'international djihadiste.
00:32 Est-ce qu'il faut comprendre qu'un nouveau 13 novembre est possible ?
00:35 Alors je ne pense pas parce que le cas du 13 novembre, si on le replace justement dans le contexte géopolitique
00:44 qui est mis en avant dans ces déclarations, c'est la guerre civile syrienne avec des, vous vous en souvenez à l'époque,
00:51 des milliers de combattants qui partent faire le djihad en Syrie et le commandant du 13 novembre est très lié à ce contexte syrien.
00:58 Donc je ne pense pas qu'on reviendra à un terrorisme djihadiste de type commando,
01:03 mais en revanche ce qui est très vrai c'est qu'on reste très dépendant finalement de cette géopolitique explosive
01:09 et notamment des événements entre Israéliens et Palestiniens au Proche-Orient.
01:15 On a très bien vu que les deux attentats à Arras et Bruxelles ont tout de même des liens avec cette géopolitique
01:22 donc c'est important quand même de prendre conscience, de prendre en compte le poids des développements politiques
01:28 dans cette région, la manière dont ça nous affecte et dont ça peut, comme les deux ministres l'indiquent,
01:33 influencer des passages à l'acte terroriste.
01:36 Mais là on a quand même aussi, l'idée n'est pas d'être alarmiste parce qu'on ne sait pas en fait,
01:41 on reste quand même dans l'incertitude quant à la résonance que ces événements vont avoir dans les prochaines semaines et prochains mois.
01:48 La menace intérieure est très forte, ça c'est ce que dit Gérald Darmanin ce matin.
01:53 Quel est le danger le plus important ? Quelle est la forme la plus importante de cette menace ?
01:59 Ce terrorisme aujourd'hui, alors ce n'est pas un terrorisme de loup solitaire comme on a pu l'entendre
02:07 parce que c'est un terrorisme inspiré notamment par une propagande djihadiste qui on le sait,
02:13 circule encore malheureusement très librement en toute impunité sur les réseaux sociaux, sur internet,
02:20 donc qui est assez facilement accessible et qui, une propagande djihadiste, qu'on parle d'Al Qaïda
02:25 ou d'un groupe comme l'État islamique, qui fait de la question israélo-palestinienne un de ses grands points.
02:31 La question israélo-arabe depuis en réalité des décennies est centrale dans le discours djihadiste.
02:38 Donc dans la mesure où des individus qui par ailleurs peuvent être vulnérables, ont accès à ces contenus,
02:46 nourrissent eux-mêmes des griefs envers nos sociétés pour un certain nombre de raisons,
02:52 et bien ils peuvent être inspirés, ils peuvent avoir, comme j'essaie de le montrer dans mes travaux,
02:57 finalement cette velléité de venger les musulmans, c'est le message qui est véhiculé par les djihadistes.
03:04 Mais encore une fois, ça suppose tout de même que ces individus et eux-mêmes,
03:08 au-delà du contexte géopolitique seul, des rancœurs, des griefs, un certain nombre sont identifiés.
03:14 Le problème je pense aujourd'hui pour beaucoup de services de renseignement,
03:18 c'est que toutes les potentielles carrières militantes sont difficilement identifiables.
03:24 On a vu avec d'autres attentats qu'on n'avait pas toujours identifié ces acteurs en amont.
03:29 Un mot juste encore Myriam Benrad sur l'âge. L'âge des personnes interpellées, 15, 16, 17 ans,
03:37 de plus en plus de mineurs interpellés pour des projets d'attentats ou pour des comportements suspects.
03:42 Je dis de plus en plus, justement, c'est la question que j'allais vous poser,
03:45 est-ce que le terrorisme est de plus en plus jeune ?
03:51 Le terrorisme a toujours été jeune en fait. Si on s'intéresse à d'autres mouvances,
03:56 je parlais de vengeance, de passion vengereuse, d'exaltation,
04:00 il y a une forme d'exaltation dans la violence terroriste.
04:02 On a connu ça avec les groupes d'extrême gauche par le passé,
04:05 donc ce n'est pas quelque chose de totalement nouveau.
04:09 Par ailleurs on a des profils d'individus plus âgés, mais comme je l'ai mentionné,
04:13 je pense que le problème c'est que ces mineurs, quand on parle des plus jeunes aujourd'hui,
04:16 ont accès à des contenus extrêmement violents, de propagande sur internet notamment,
04:20 qui devraient être beaucoup plus régulés, parce que je ne pense pas qu'il y ait de fatalité
04:25 à devenir terroriste. Je pense qu'il y a des logiques, des dispositifs d'embrigadement
04:30 qui sont beaucoup trop accessibles, comme je viens de l'évoquer, sur internet,
04:36 et c'est parce qu'on sait que beaucoup se radicalisent aujourd'hui en ligne.
04:39 Donc que faire ? Et on n'a pas vraiment de politique à déterminer définitive sur le sujet, c'est dommage.
04:47 - Merci beaucoup Myriam Benrad d'avoir été avec nous ce matin.