Macron n’aime pas l’immobilier (et pourquoi c’est grave)

Marianne

Comment sommes-nous passé, au sortir de la guerre, d'une politique ambitieuse du logement qui visait à mettre un toit sur tous les Français à une crise majeure du secteur et à 4 millions de mal-logés ?  Le magazine Marianne est en kiosques chaque jeudi et disponible en ligne. "Le goût de la  vérité n'empêche pas de prendre parti". Albert Camus Marianne TV : https://tv.marianne.net/ Marianne.net : https://www.marianne.net/ Facebook : https://www.facebook.com/Marianne.magazine/ Twitter : https://twitter.com/MarianneleMag Instagram : https://www.instagram.com/mariannelemag/

Transcript

00:00 Quand le bâtiment va, tout va. On peut juger ce genre de dicton ringard,

00:08 il ne recouvre pas moins une réalité. Surtout dans un pays comme la France,

00:12 où l'immobilier, le logement ont toujours eu un impact économique et psychologique très important.

00:17 Au lendemain de la libération, la reconstruction et la construction de logement ont été le moteur

00:23 de la très forte croissance, tout comme sous la Ve République. On peut critiquer, à juste titre,

00:29 les bar HLM, la multiplication des espaces pavillonnaires, le bétonnage des côtes et des

00:34 montagnes. Reste que globalement, on avait pu loger les français. On avait même pu absorber,

00:40 dans les années 60, un million de rapatriés d'Algérie. Et il y avait, dans chaque gouvernement,

00:45 un ministre du logement qui veillait à ce que les mises en chantier chaque année correspondent

00:50 peu ou prou aux besoins de la croissance démographique. Tout ceci a disparu comme

00:56 par enchantement. Depuis une quinzaine d'années, les mises en chantier, qui étaient voisines de

01:01 500 000 logements par an, se sont effondrées. On est entre 330 000 et 430 000, avec une chute

01:07 régulière et très importante depuis 2017. Or, la population française continue de croître. Résultat,

01:14 le cumul du déficit annuel des mises en chantier se traduit, au bout du compte,

01:19 par un manque de logement pour les français, qu'ils soient locataires ou qu'ils souhaitent

01:23 devenir propriétaires. On estime qu'il faudrait, pour répondre aux besoins, construire 5 millions

01:29 de logements dans les 10 prochaines années. A cette pénurie s'ajoutent les objectifs de la

01:35 transition écologique. Arrow sur les logements passoires, avec cette norme diabolique du DPE,

01:40 le Diagnostic de Performance Énergétique, des dizaines de milliers de petits propriétaires,

01:45 qui louaient souvent leurs logements à des tiers, ont découvert qu'ils n'allaient plus pouvoir le

01:50 faire, sauf à procéder à des investissements très coûteux, dont le résultat n'est pas garanti,

01:56 notamment dans les immeubles collectifs. Bref, à une pénurie de l'offre de logements neufs,

02:01 va s'ajouter une diminution de l'offre de logements anciens. Voilà pour le fond de cette crise du

02:07 logement dans laquelle notre président, Emmanuel Macron, a une part de responsabilité.

02:12 Emmanuel Macron n'aime pas l'immobilier. Il ne s'en est jamais caché. Pour lui,

02:19 les propriétaires sont des rentiers qu'il convient de taxer. Adepte de la Startup Nation,

02:24 ancien banquier d'affaires, il veut que le capital circule et que les investisseurs mettent leur

02:30 argent dans les entreprises, les jeunes poussent technologiques plutôt que dans des mètres carrés.

02:34 C'est pour cela qu'il a supprimé les SF et l'a remplacé par l'IFI, un impôt sur le patrimoine

02:40 immobilier. C'est pour cela aussi qu'il a fermé les yeux sur l'explosion des taxes foncières,

02:45 qui ne touchent que les propriétaires. Emmanuel Macron a d'ailleurs mis en application,

02:50 pour lui-même, ses principes. Dans un premier temps, en 2007, il avait acheté un appartement

02:56 de 83 m² dans le 15e arrondissement. Il l'avait payé 935 000 euros et il avait été aidé par son

03:03 mentor Henri Hermant qui lui avait prêté 550 000 euros. Mais cet appartement, il l'a revendu en

03:10 2016 avec une petite plus-value. Depuis, il a été logé par la République, à Bercy, puis à l'Elysée.

03:16 Et son seul patrimoine immobilier est la maison de famille de sa femme, au Touquet. L'immobilier ne

03:23 l'intéresse pas. Et dans un pays de plus en plus monarchique, où tout remonte au sommet,

03:27 si le président monarque ne prend pas à bras-le-corps un dossier, rien ne se passe.

03:32 Or le logement, l'immobilier, est désormais en crise profonde, car au déficit structurel du

03:39 manque de logement s'ajoute l'impact financier de la hausse des taux d'intérêt. Pendant une

03:45 douzaine d'années, le marché immobilier, mais aussi le marché financier, ont été dopés par

03:50 des injections massives des banques centrales et des taux d'intérêt quasiment nuls. Les

03:55 transactions immobilières se sont multipliées grâce au taux zéro et à l'allongement de la

04:00 durée des prêts. Un phénomène qui n'était pas propre à la France, mais à tout l'Occident.

04:06 Face à une forte demande, avec une offre de logement réduite, les prix ont logiquement

04:11 monté. Au passage, les caisses de l'État et des collectivités locales ont amplement profité de

04:17 l'emballement des transactions et de l'envolée des prix. Or la hausse des taux et le serrage

04:22 de vise des banques ont cassé cette mécanique. Aujourd'hui, il devient très difficile de

04:27 financer une acquisition, et cela si vous n'avez pas le cash ou les garanties nécessaires. Du coup,

04:33 c'est toute la chaîne de l'immobilier qui se grippe. Les transactions s'effondrent,

04:37 alors au moins dira-t-on les prix baissent, pas forcément et pas partout, car les vendeurs qui

04:43 n'ont pas le couteau sous la gorge préfèrent attendre. Sur le marché du neuf, les prix auront

04:49 du mal à baisser, car les coûts eux ne baissent pas, bien au contraire. Il y a des pénuries de

04:54 certains composants et de main d'œuvre. La multiplication des normes accroît la facture,

04:58 et en face, les acquéreurs ont de plus en plus de mal à avoir les crédits. Et cette fois,

05:04 contrairement aux crises précédentes, ce sont tous les secteurs de l'immobilier qui sont touchés,

05:09 le logement, le commercial, les bureaux, les infrastructures au sens large. Psychologiquement,

05:15 cette crise va avoir des effets délétères. Non seulement ceux qui étaient mal logés ne verront

05:21 pas leur situation s'améliorer, mais les propriétaires occupants ou bailleurs vont devoir

05:25 faire face à des dépenses à la hausse. Et surtout, l'effet richesse va jouer en sens inverse.

05:32 Quand votre patrimoine augmente, vous êtes incité à investir, à faire bouger ce patrimoine,

05:38 à vendre pour acheter. Mais lorsque la crise est là, les propriétaires vont faire le gros dos.

05:43 L'effet richesse se transforme en effet appauvrissement qui casse le moral. Tout se gèle.

05:49 Et voilà ce que notre président n'a peut-être pas compris. L'immobilier, le logement sont

05:55 un secteur essentiel de l'activité économique et du bien-être social. Il n'y a pas d'un côté les

06:01 bons investisseurs, notamment étrangers, qui investissent dans le CAC 40 et les startups,

06:05 et les ringards qui achètent de la pierre. L'économie est un tout, elle est globale.

06:10 Et c'est cela qu'a oublié ce chantre de globalisation qu'est Emmanuel Macron.

06:15 [Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org]

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