Ça vous regarde - « Made in France » : comment nous rendre attractifs ?

  • l’année dernière
Grand témoin : Jérémy André, journaliste au Point
GRAND DÉBAT / « Made in France » : comment nous rendre attractifs ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski.

Le salon du « Made in France » se tient Porte de Versailles du 9 au 12 novembre 2023. Plus de 1000 exposants se réunissent pour promouvoir le savoir-faire français. 9 français sur 10 assurent vouloir acheter plus de produits tricolores. Toutefois, l'inflation nuit à cette bonne résolution. Selon un sondage OpinionWay, 80% des Français reconnaissent avoir dû restreindre leurs achats "Made in France" cette année à cause de leurs prix élevés. Selon la Fédération indépendante du Made in France, seuls 5% des jouets achetés par les Français, 3% des vêtements ou 1% des montres sont produits sur notre territoire. Reconquête industrielle, nouveau modèle productif, technologies du futur... Sur quoi faut-il miser pour que le « Made in France » ait de nouveau le vent en poupe ?
Invités :
- Élie Cohen, directeur de recherche au CNRS,
- Yves Jégo, ancien ministre fondateur de la certification Origine France Garantie,
- Olivier Remoissonnet, directeur général de « La brosserie française »,
- Béatrice Mathieu, grand reporter à l'Express.

GRAND ENTRETIEN / Jérémy André : enquête sur un pogrom
Le 7 octobre 2023, le groupe terroriste du Hamas attaque le kibboutz de Kfar Aza en Israël. 1400 personnes ont été assassinées et 240 ont été prises en otage parce qu'elles étaient juives. Les journalistes du Point ont enquêté sur le terrain pour lever le voile sur le plus grand pogrom du XXIème siècle.
Grand témoin : Jérémy André, journaliste au Point.

LES AFFRANCHIS
- Mariette Darrigrand, sémiologue,
- Léa Falco, membre du collectif « Pour un réveil écologique »,
« Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcript
00:00:00 ...
00:00:04 -Bonsoir, bienvenue. Ravie de vous retrouver.
00:00:08 Dans "Ça vous regarde", ce soir,
00:00:10 le jour où Israël a basculé dans l'effroi.
00:00:13 Bonsoir, Jérémy André.
00:00:14 Merci d'être notre grand témoin.
00:00:16 Ce soir, vous revenez de l'Etat hébreu pour "Le Point".
00:00:19 Le Point publie cette semaine un travail remarquable.
00:00:23 Le grand récit sur 30 pages sur ce crime atroce
00:00:26 que vous racontez heure par heure.
00:00:28 1400 personnes assassinées, des femmes, des enfants, des vieillards,
00:00:32 dans une opération terroriste, préparée de longue date
00:00:35 et ultra-coordonnée.
00:00:37 On va en parler dans la deuxième partie.
00:00:39 Notre grand débat ce soir,
00:00:41 le "Made in France" a-t-il toujours la cote ?
00:00:43 Avec l'inflation, les ménages surveillent de près leurs dépenses.
00:00:47 Comment les marques françaises tentent de riposter ?
00:00:50 Le tricolore est-il trop cher ?
00:00:52 Les aides aux entreprises suffisantes ?
00:00:54 Le salon du "Made in France" s'est ouvert.
00:00:57 La porte de Versailles, on en parle dans un instant.
00:01:00 Sur ce plateau, avec mes invités, enfin nos affranchis,
00:01:03 ce soir, le mot de la semaine de Mariette Darry-Grand,
00:01:06 Action Planète, la chronique écolo de Léa Falco
00:01:09 et Bourbon Express, signée Stéphanie Despierre.
00:01:12 Voilà pour le menu.
00:01:13 Ça vous regarde ? Ça commence maintenant.
00:01:15 (Générique)
00:01:17 ---
00:01:26 -Près de 1 000 exposants aux couleurs du drapeau français.
00:01:29 C'est donc ce salon "Made in France"
00:01:31 qui s'est ouvert porte de Versailles à Paris
00:01:33 dans un contexte morose.
00:01:35 L'inflation freine vraiment la consommation de produits français.
00:01:39 Alors, faut-il s'en inquiéter à l'heure de la reconquête industrielle ?
00:01:42 Comment garantir des débouchés aux produits relocalisés ?
00:01:46 Bonsoir, Elie Cohen. -Bonsoir.
00:01:47 -Bienvenue sur ce plateau.
00:01:49 Vous êtes économiste, directeur de recherche au CNRS.
00:01:52 Votre dernier ouvrage est dans notre thème de débat,
00:01:55 "La souveraineté industrielle vers un nouveau modèle productif".
00:01:59 C'était chez Odile Jacob en 2022.
00:02:01 Bonsoir, Béatrice Mathieu. -Bonsoir.
00:02:03 -Ravie de vous retrouver sur ce plateau.
00:02:05 Vous êtes grand reporter à L'Express,
00:02:07 chargée des pages Echo. Bonsoir, Yves Gégaud.
00:02:10 -Bonsoir. -Bienvenue.
00:02:11 Ancien ministre et fondateur de la certification
00:02:14 "Origine France garantie", on en dira un mot.
00:02:16 Bonsoir, Olivier Remoissonnet. -Bonsoir.
00:02:19 -Bienvenue sur ce plateau.
00:02:20 Vous êtes le directeur général de la brosserie française.
00:02:24 On va en voir quelques exemples, on va dire,
00:02:26 très concrètement sur le plateau.
00:02:28 Vous fabriquez des brosses à dents 100 % françaises
00:02:31 et éco-responsables, mais aussi, je crois, des brosses à cheveux.
00:02:34 Vous nous direz comment vous êtes adapté
00:02:37 à ce contexte de hausse des prix.
00:02:39 Vous êtes journaliste, c'est pas votre sujet,
00:02:41 mais n'hésitez pas, pour plus de pédagogie,
00:02:43 à interroger nos invités quand vous le souhaitez.
00:02:46 On commence par planter le décor, état de santé du "Made in France".
00:02:50 C'est dans le chrono de Blaco qu'on accueille.
00:02:53 -Bonsoir, mon cher Stéphane.
00:02:55 -Bonsoir, Myriam. Bonsoir à toutes et tous.
00:02:57 -Comment il va, le produit français ?
00:02:59 -On en parle, ce soir, du "Made in France",
00:03:02 parce que ce week-end à Paris se tient,
00:03:04 regardez, le 11e salon,
00:03:07 la 11e édition du salon du "Made in France".
00:03:10 Ca veut dire que voilà déjà plus de 10 ans
00:03:13 qu'on se soucie du "Made in France" dans notre pays.
00:03:15 Il faut se souvenir, c'était en 2012.
00:03:18 François Hollande venait d'être élu et il avait nommé...
00:03:22 -On le voit, le salon. Ca y est, on y est.
00:03:24 -Voilà. Mais puisque c'était il y a maintenant plus de 10 ans,
00:03:27 la 1re édition, je vous rappelle qu'à l'époque,
00:03:30 François Hollande avait nommé Arnaud Montebourg
00:03:32 ministre du redressement productif
00:03:34 et que le sémillant ministre, justement,
00:03:37 répétait sur tous les tons qu'il était urgent
00:03:39 de à nouveau produire en France. On l'écoute.
00:03:42 -Les consommateurs doivent mettre du "Made in France"
00:03:46 dans leurs chariots.
00:03:48 C'est la marinière d'Armor Lux,
00:03:50 le robot Seb fabriqué à E-sortie, etc.
00:03:55 Tout le monde doit s'y mettre
00:03:57 pour faire renaître l'industrie française.
00:03:59 -Quel entrain pour promouvoir la réindustrialisation
00:04:02 de notre pays. C'était il y a 10 ans,
00:04:04 donc on se demande où on est-on aujourd'hui.
00:04:07 La bonne nouvelle, c'est que les pouvoirs publics
00:04:10 sont toujours soucieux de réindustrialiser.
00:04:12 C'était le candidat Macron, sa promesse de campagne en 2017,
00:04:16 un plan Marshall pour la réindustrialisation.
00:04:18 Il est élu, après avoir été réélu,
00:04:20 son prochain défi, ce sera quoi ?
00:04:22 La réindustrialisation.
00:04:24 Il y a une vraie constance dans la démarche.
00:04:27 Je suis un peu de mauvais esprit,
00:04:29 car la politique du président Macron a donné quelques résultats,
00:04:32 notamment le solde entre ouverture et fermeture d'usines.
00:04:35 A partir de 2017, le solde est devenu positif,
00:04:38 sauf pendant le Covid, alors que ce n'était pas le cas auparavant.
00:04:42 Cela dit, 106 usines créées de plus que celles qui ont fermé,
00:04:45 ce n'est pas énorme.
00:04:47 On compte sur Helicoënt pour nous expliquer
00:04:49 pourquoi c'est si difficile de relocaliser.
00:04:51 Mais quand on demande aux Français,
00:04:53 la réponse est simple.
00:04:55 Vous allez voir, oui, bien sûr,
00:04:57 on voudrait acheter français, 90 % des gens sont prêts à le faire,
00:05:01 mais pourtant, on restreint nos achats en France.
00:05:04 La raison, vous la connaissez,
00:05:05 la première des raisons,
00:05:07 c'est que 70 % des Français pensent que les produits français sont trop chers.
00:05:11 C'est lié au coût de la main-d'oeuvre en France.
00:05:13 Je peux vous donner un exemple.
00:05:15 Bruno Demers avait mis une grosse pression sur Peugeot
00:05:18 pour qu'ils assemblent leurs nouvelles 200 vies électriques en France.
00:05:22 C'était début juillet.
00:05:23 Début octobre, Peugeot annonce que la Peugeot électrique
00:05:26 sera construite en Espagne.
00:05:28 -Et c'est dommage. -C'est dommage.
00:05:30 En Espagne, le SMIC est à 1 000 euros, et il est à 1 500 euros en France.
00:05:34 Ce qui peut expliquer ce choix.
00:05:36 Alors, que faire ?
00:05:37 Peut-être que les pouvoirs publics pourraient donner l'exemple.
00:05:41 Au moment d'acheter du matériel pour l'administration,
00:05:44 ils achètent du matériel français, dans des usines françaises.
00:05:47 Oui, mais il y a un problème.
00:05:49 On appartient à l'Union européenne,
00:05:51 et au sein de l'Union européenne,
00:05:53 le libre-échange est la seule voie possible.
00:05:56 Donc, pas question d'offrir des priorités nationales
00:06:00 au moment de faire des offres de marché public.
00:06:02 Pourtant, ceux qui fabriquent en France réclament ça.
00:06:05 On a un fabrique en français ici,
00:06:07 et un autre, celui du slip français, qui fabrique des vêtements...
00:06:11 C'est une marque amusante, mais il fabrique du textile en France.
00:06:14 3 % des produits textiles sont fabriqués en France.
00:06:17 Donc, lui, il aimerait être soutenu par des marchés publics
00:06:21 où il serait privilégié, en Europe ou en France.
00:06:23 -La réalité, c'est que dans notre métier, le textile,
00:06:26 l'immense majorité des marchés publics
00:06:28 sont remportés par des boîtes chinoises
00:06:30 ou des fabrications chinoises ou bangladaises.
00:06:33 Ne voulons pas nous faire de concurrence en nous,
00:06:36 on laisse rentrer sur le marché ces importations
00:06:39 et on serait tous intéressés que ce soit plus local.
00:06:41 -Ah oui, donc relocaliser, tout le monde est d'accord.
00:06:44 En revanche, décomprenons ce mot, protectionnisme.
00:06:47 On a dit un gros mot, je me demande comment j'ai osé dire ça,
00:06:50 mais il y a un débat.
00:06:51 -Merci beaucoup, Stéphane Blakowski.
00:06:54 Olivier Remoissonnais, je commence avec vous.
00:06:56 Déjà, cette baisse des ventes qu'on a constatée,
00:06:59 est-ce que vous, vous l'avez constatée,
00:07:02 à votre entreprise, donc la brosserie ?
00:07:05 Est-ce que vous avez dû vous adapter,
00:07:08 peut-être baisser les prix ?
00:07:09 -Cette baisse n'est pas représentative de tous les marchés.
00:07:13 On voit bien qu'il y a un fléchage de la consommation
00:07:15 sur les produits à plus bas prix.
00:07:17 C'est un vrai débat de savoir s'il est utile d'aller flécher
00:07:21 cette consommation sur les produits made in ailleurs,
00:07:23 car les produits à bas prix sont des produits d'importation.
00:07:27 On aura le débat sur ce qui se cache derrière
00:07:29 et qui contribue à quoi quand on fait du made in ailleurs.
00:07:32 On a démarré il y a 10 ans avec les réseaux spécialisés,
00:07:36 qui souffrent aujourd'hui et qu'il faut soutenir,
00:07:38 car ce sont les plus vertueux.
00:07:40 Mais malgré tout, chaque Français a le droit
00:07:43 d'avoir le choix dans ses brosses à dents.
00:07:45 Donc, être présent aussi en grande distribution,
00:07:48 c'était un vrai enjeu.
00:07:49 Depuis trois ans, on a positionné la brosserie française
00:07:52 sur ces produits-là. -Vous n'avez pas moins vendu ?
00:07:55 -On a moins vendu sur le réseau bio,
00:07:57 mais on a accompagné les consommateurs
00:07:59 qui sont revenus plus majoritairement
00:08:01 sur le réseau de grande distribution
00:08:04 et leur offrir le choix d'un produit français.
00:08:06 -Le made in France ne doit pas être réservé à une élite ?
00:08:10 -Ca doit être ni élitiste ni réservé à certains réseaux.
00:08:13 Chaque Français doit pouvoir avoir le choix
00:08:15 de consommer français.
00:08:17 -La brosse à dents ou le lot de trois en grande surface,
00:08:20 c'est combien ?
00:08:21 -On est à moins de 5 euros le lot de trois en grande surface.
00:08:25 On est entre 3 et 4 euros en magasin bio
00:08:28 sur le produit unitaire,
00:08:31 avec des philosophies complètes sur les boucles de recyclage,
00:08:34 car la brosse à dents pollue le plus,
00:08:36 car c'est un amalgame de différents composants.
00:08:39 Derrière l'outil se cache aussi son impact environnemental.
00:08:42 En made in ailleurs, on ne se préoccupe pas de ça.
00:08:45 -Vous faites vos marges où ? -On les fait.
00:08:47 -Vous serrez la vis où ?
00:08:49 -C'est toujours la question qu'on me pose,
00:08:51 car on n'est pas plus cher que les marques internationales,
00:08:55 et pour autant, on est en prix de revient plus cher.
00:08:57 On a un outil de communication,
00:08:59 un outil de rémunération de l'actionnariat
00:09:02 qui n'a rien à voir avec les majors sur notre réseau,
00:09:05 les grandes marques multinationales.
00:09:07 On a une politique de rémunération
00:09:09 qui est au juste prix.
00:09:10 On rémunère nos réseaux de distribution,
00:09:13 mais on rémunère aussi notre activité et nos salariés
00:09:16 de manière plus équitable que des produits d'importation
00:09:19 sur lesquels on va faire des plus-values
00:09:21 en termes de coût marketing et de rémunération.
00:09:24 -Ca marche, même dans une période difficile
00:09:26 qui peut être que conjoncturelle.
00:09:28 L'exemple des brosses à dents, là, n'est pas représentatif
00:09:32 de ce qui se passe sur le marché des produits "made in France".
00:09:35 Tout le monde ne peut pas s'offrir,
00:09:37 particulièrement dans le textile,
00:09:39 c'était un des secteurs les plus impactés,
00:09:42 un jean à 100 euros, un T-shirt à 40 euros.
00:09:44 Expliquez-nous ce qui se passe.
00:09:46 Plus personne n'achète français dans certains secteurs,
00:09:49 lesquels ? -Non.
00:09:50 Il n'y a pas un refus du "made in France", pas du tout.
00:09:54 D'ailleurs, vous l'avez tout à fait dit
00:09:56 dans les sondages, en fait, année après année,
00:09:59 il y a la volonté des Français d'acheter "made in France"
00:10:02 parce que c'est un gage, ils y voient un gage de qualité,
00:10:05 d'éthique, d'éco-responsabilité.
00:10:07 -Il n'empêche que les ventes baissent.
00:10:09 -Il n'empêche que les ventes baissent,
00:10:11 comme dans le bio, d'ailleurs.
00:10:13 Souvent, quand vous avez du "made in France" bio,
00:10:16 là, c'est la double peine,
00:10:18 car le marché du bio s'est effondré.
00:10:20 Ce qui se passe sur le marché du textile et de l'habillement
00:10:23 est un peu particulier,
00:10:24 parce que tout le secteur du textile et de l'habillement
00:10:27 a énormément souffert, même sans "made in France".
00:10:30 Vous avez une sorte de schizophrénie du consommateur
00:10:33 qui veut acheter "made in France",
00:10:36 qui le dit dans les enquêtes,
00:10:39 et puis, même aussi souvent les jeunes,
00:10:42 qui disent "nous, on promeut ces marques-là",
00:10:45 et qui... -Qui ne traduisent pas ça
00:10:47 dans les actes. -Qui ne traduisent pas ça
00:10:50 complètement dans les actes. On voit bien
00:10:52 le succès incroyable de Shine, par exemple,
00:10:54 pour ne pas les citer. -C'est la fast fashion.
00:10:57 -C'est la fast fashion. -C'est la fast fast fashion.
00:11:00 Ou même, si on replonge de gens deux ans auparavant,
00:11:05 quand on est sortis deux, trois ans du confinement,
00:11:08 on avait les fils, les queues de gens
00:11:12 qui attendaient d'aller chez Zara.
00:11:14 -Certaines entreprises n'ont pas résisté à cette crise.
00:11:17 Est-ce qu'il y a eu des fermetures d'activités,
00:11:20 d'entreprises 100 % tricolores ?
00:11:22 -Quelques-unes, forcément,
00:11:24 mais c'est une espèce de vie des affaires, aussi,
00:11:29 qui est assez inéluctable.
00:11:31 Donc, tout ne souffre pas.
00:11:34 Il y a des modèles qui marchent,
00:11:36 et puis, c'est...
00:11:38 En fait, les modèles qui marchent
00:11:40 sont très réfléchis dans la construction
00:11:42 de leur modèle économique, dans la maîtrise de leurs coûts,
00:11:46 dans aussi beaucoup d'innovations
00:11:48 pour faire baisser les coûts de production,
00:11:51 et c'est pour ça que la construction
00:11:53 du business model est très importante
00:11:55 pour expliquer ça.
00:11:56 -Le signal prix reste quand même important,
00:11:59 quoi qu'on en dise.
00:12:00 Qu'est-ce que c'est, exactement, le "made in France" ?
00:12:03 C'est pas forcément des entreprises françaises.
00:12:06 -Ah non, je pense qu'il y a une grande confusion.
00:12:08 Il y a la confusion entre la marque et l'origine.
00:12:11 Vous achetez une Renault Clio, vous dites "j'achète une voiture française".
00:12:15 Pas de chance, elle est faite en Turquie.
00:12:17 Vous achetez une Toyota Yaris, vous dites "j'achète une voiture japonaise".
00:12:22 C'est la même marque que la Toyota valencienne.
00:12:24 Il faut d'abord distinguer la marque et l'origine,
00:12:27 la nationalité de l'entreprise, ça ne veut plus rien dire,
00:12:30 mais Air France a mis son siège social aux Pays-Bas.
00:12:33 -Toyota, c'est du "made in France".
00:12:35 -Les voitures qui sortent de l'usine de Toyota
00:12:38 sont "made in France", elles sont même "origine France" garantie,
00:12:41 puisque la certification que nous avons créée
00:12:44 avec un certain nombre de chefs d'entreprise,
00:12:46 depuis maintenant 12 ans, à peu près la même opo
00:12:49 que l'arrivée d'Arnaud Montebourg aux affaires,
00:12:52 c'est une certification qui vérifie si le produit est français.
00:12:55 Il y a 35 % des gens qui, dans le sondage, disent
00:12:58 "je voudrais être sûr que ce que j'achète soit français".
00:13:01 On peut le dire tout de suite, si vous voyez du bleu-blanc-rouge
00:13:04 ou une marque française, c'est pas forcément un produit français.
00:13:08 La seule chose qui compte, c'est dans quelle usine le produit a été fabriqué,
00:13:12 peu importe la nationalité des actionnaires.
00:13:14 -Vous l'avez vu, cette transformation de culture,
00:13:17 de consommation, est-ce que c'est profond ?
00:13:20 La crise est conjoncturelle, on va revenir à une consommation
00:13:23 tricolore, ou, au fond, c'est pas si clair que ça ?
00:13:26 -C'est profond. On a vu changer dans les esprits
00:13:28 cette idée que la préoccupation de l'origine
00:13:31 est devenue la deuxième préoccupation des acheteurs.
00:13:34 La première, c'est ce que je peux me l'offrir,
00:13:36 et vient tout de suite après l'item d'où ça vient,
00:13:39 sur ce sujet. Donc ça, c'est une réalité,
00:13:42 et comme vous le disiez, depuis une dizaine d'années,
00:13:45 on a vu évoluer cette demande de connaissance de l'origine.
00:13:48 -C'est combien d'emplois en France ?
00:13:50 -Déjà, depuis 50 ans, c'est un million d'emplois en moins.
00:13:53 Puisque depuis 50 ans, on est passé de 20 % de la part
00:13:57 de l'industrie dans le PIB à 10 %,
00:14:00 donc on a perdu énormément d'emplois sur ce sujet.
00:14:03 -Et aujourd'hui, il y a combien de salariés d'entreprises
00:14:06 qui travaillent ? -Je laisserai l'économiste
00:14:09 vous donner des chiffres... -J'ai cherché,
00:14:11 et j'ai pas trouvé. -Ils sont peut-être plus précis
00:14:14 que les miens sur ce sujet, mais pour terminer,
00:14:17 sur cette question, je pense que c'est beaucoup plus essentiel
00:14:21 qu'on ne le pense. On prend ça, et merci de nous inviter,
00:14:24 mais le Salon du Made in France, ça peut un peu sourire,
00:14:27 c'est un peu anecdotique. Je pense qu'un pays
00:14:29 qui ne produit plus est un pays qui meurt.
00:14:32 Produire en France, c'est un projet de société.
00:14:35 C'est pas le chapitre d'un programme politique
00:14:37 d'un gouvernant. C'est un projet de société.
00:14:40 Une société doit s'organiser autour de la production.
00:14:43 La production la plus modeste de celui qui fait des salades
00:14:46 dans son jardin... -On a changé.
00:14:48 -La production la plus élaborée.
00:14:50 -La France sans usine, c'est fini.
00:14:52 Même si c'est balbutiant, ça commence.
00:14:54 -Ca a mis du temps. Le patronat a plaidé,
00:14:57 une partie du patronat a plaidé pour les délocalisations
00:15:00 pendant de longues années. On a oublié la noblesse du geste
00:15:03 de produire, qui n'est pas une noblesse surannée,
00:15:06 c'est le moteur de la société. Une société qui ne produit plus
00:15:10 et qui n'a plus d'usine est une société condamnée.
00:15:12 -Eli Cohen, je voulais avoir votre regard
00:15:15 sur une actualité économique de ces derniers jours.
00:15:18 On va parler des moyens de relocaliser,
00:15:20 des politiques économiques,
00:15:22 mais la fin du masque sanitaire français,
00:15:24 ça, c'est quand même quelque chose.
00:15:27 On est trois ans après le début de la pandémie,
00:15:29 on a découvert notre dépendance aux Chinois,
00:15:32 et puis ça marche pas.
00:15:34 Et donc, finalement, à efficacité égale,
00:15:36 mais beaucoup trop chère en France,
00:15:39 on arrête. Qu'est-ce que ça dit, ça,
00:15:41 de cette question du "Made in France" ?
00:15:43 -Ca résume bien la trajectoire de la question industrielle.
00:15:47 C'est-à-dire qu'il y a trois ans, quand il y a eu la crise du Covid,
00:15:50 on a découvert avec effroi que l'accès à des biens
00:15:53 considérés comme aussi importants était devenu impossible,
00:15:57 parce qu'on avait fait le pari que, grâce au libre-échange,
00:16:00 grâce à la division internationale du travail,
00:16:02 grâce à la mondialisation, on aurait toujours accès
00:16:05 aux biens dont on a besoin, et puis on a découvert,
00:16:08 soudain, la pénurie, la dépendance,
00:16:10 et là, comme d'habitude, dans ces cas-là,
00:16:13 on fait appel à l'Etat, on convoque deux ou trois entreprises
00:16:16 et on leur demande de fabriquer des masques rapidement.
00:16:19 On leur demande même de les fabriquer en tissu,
00:16:22 parce qu'à l'époque... -Mais trois ans après,
00:16:24 le marché ne tient pas. -Le marché a repris le dessus
00:16:27 et il n'y a pas de volonté sur la durée d'installer
00:16:30 la consommation de biens produits sur le territoire national.
00:16:33 -Je pense aussi qu'il n'y a pas d'achat massif,
00:16:36 et la question de l'achat public est majeure.
00:16:39 Depuis 1930, les Etats-Unis d'Amérique
00:16:42 achètent 50 % de ce qu'ils achètent en achat public
00:16:45 aux entreprises américaines.
00:16:46 Point à la ligne.
00:16:47 Moi, je pense que tant qu'on n'aura pas pris
00:16:50 une partie de la manne de l'achat public en France,
00:16:53 c'est 120 milliards par an, juste pour la France,
00:16:56 si on prenait 25 % de l'achat public
00:16:58 avec de l'achat obligatoire pour des produits français,
00:17:01 les hôpitaux, les grands acheteurs publics
00:17:04 pourraient donner ces marchés à des usines
00:17:06 qui pourraient investir dans des machines
00:17:09 et faire baisser les prix. -Ca a été dit tout à l'heure,
00:17:12 mais je pense que le grand dessin européen depuis 30 ans,
00:17:15 c'est le marché unique.
00:17:16 Et on a tout fait pour réaliser un grand marché unique européen.
00:17:20 Et marché unique, ça veut dire à la fois
00:17:23 l'abaissement des frontières internes,
00:17:25 ça veut dire le fait que, justement,
00:17:27 la commande publique, c'est une commande publique
00:17:30 qui se fait au niveau européen, et non pas au niveau national.
00:17:33 Donc il n'est pas possible de privilégier...
00:17:36 -Aujourd'hui, on peut changer les choses.
00:17:38 -On peut sortir de l'Europe aussi.
00:17:41 -Non, j'ai dit que... -Ne le caricatirez pas.
00:17:43 -Non, l'idée est essentielle, c'est le marché unique.
00:17:46 Je continue mon raisonnement. On pourrait dire,
00:17:49 à tout le moins, les Européens devraient faire
00:17:52 comme les Américains, c'est-à-dire réserver
00:17:54 à des producteurs européens la production de biens
00:17:58 dont on a besoin au niveau européen.
00:18:00 Aux Etats-Unis, il y a un Buy American Act
00:18:03 qui permet justement à la puissance publique
00:18:06 de faire cette commande publique réservée
00:18:08 aux producteurs sur le sol américain.
00:18:10 On pourrait faire un Buy European Act,
00:18:13 mais on ne peut pas... -Ca me rappelle
00:18:15 quelques promesses présidentielles de précédents candidats.
00:18:18 -Le protectionniste, s'il n'est pas national,
00:18:20 il peut être européen. -On va y venir,
00:18:23 parce que les choses changent.
00:18:24 On va se rendre porte de Versailles.
00:18:27 Quelles sont les motivations pour acheter français
00:18:30 et comment les chefs d'entreprise, très concrètement,
00:18:33 font face à cette crise du "made in France".
00:18:35 Regardez cet apportage de Dario Borgogno
00:18:38 avec Ivana Navion, qui a rencontré un patron
00:18:40 qui produit des jeans 100 % français.
00:18:43 Reportage.
00:18:44 ...
00:18:48 -Des chaussures au cahier.
00:18:50 Ici, tout est fabriqué en France.
00:18:52 Les stands du salon présentent uniquement
00:18:55 des produits garantis origines France.
00:18:57 -La problématique, c'est que le consommateur croit
00:19:00 que sur certaines filières, il n'existe plus de produits français.
00:19:04 C'est une formidable vitrine pour montrer
00:19:06 que ce genre d'activités peuvent être représentées
00:19:09 et que si on le veut, on peut consommer
00:19:11 des produits "made in France".
00:19:13 Les gens ont envie de traçabilité.
00:19:15 Il y a une vraie quête de sens quand vous achetez
00:19:18 un produit français, avec derrière des emplois,
00:19:20 des impôts. Ca donne bonne conscience
00:19:23 d'acheter un produit "made in France".
00:19:25 -Et parmi les succès du salon,
00:19:27 cette marque de jeans, présente depuis la 1re édition.
00:19:30 Mission réussie pour une filière disparue en France.
00:19:33 -La filière du jean était complètement délocalisée
00:19:36 en 2013, quand on a relancé la marque.
00:19:38 Il restait des tisseurs en France.
00:19:40 On allait avoir des tisseurs pour retisser du denim en France.
00:19:43 Il restait des confectionneurs.
00:19:45 On allait les voir pour refaire du jean en France.
00:19:48 Petit à petit, en créant nos propres ateliers,
00:19:51 on a fait grandir la filière.
00:19:52 On est passé de 2, mon petit frère et moi,
00:19:55 à 250 dans la filière.
00:19:56 -Cette année, la marque a délocalisé
00:19:58 un de ses ateliers au sein du salon,
00:20:00 une manière de justifier des prix parfois élevés.
00:20:03 Dans l'espace boutique, les clients acceptent
00:20:06 les plus bas tarifs pour avoir de meilleurs jeans.
00:20:08 -J'ai plus envie d'acheter des produits qui voyagent trop,
00:20:12 qui polluent la planète indirectement,
00:20:14 qui exploitent aussi peut-être des gens à l'autre bout du monde.
00:20:17 J'ai plus envie d'acheter moins d'articles,
00:20:20 mais avec quelque chose qui a plus de sens pour moi.
00:20:23 Il faut des prix pour tout le monde,
00:20:25 mais plus il y a de production en France,
00:20:27 plus on pourra avoir des prix attractifs.
00:20:30 -1083 propose des jeans autour de 130 euros.
00:20:33 Ses concurrents fabricants à l'étranger
00:20:36 sont bien moins chers,
00:20:37 avec une différence parfois de plus de 50 euros.
00:20:40 -Et voilà, la question du prix encore et toujours.
00:20:43 Elie Cohen, il faut travailler quoi
00:20:45 pour avoir des chances sur les marchés du "made in France" ?
00:20:49 L'avantage comparatif des secteurs de l'économie dite d'avenir
00:20:53 ou sur des jeans, comme ça ?
00:20:55 Si c'est de la qualité, il y a des perspectives.
00:20:58 -Il faut bien sûr combiner plusieurs types d'actions.
00:21:01 Le choix qui a été fait par le gouvernement
00:21:03 me semble être un choix judicieux,
00:21:05 c'est-à-dire qu'il est illusoire de penser
00:21:08 qu'on va relocaliser en France ce qui a été délocalisé hier
00:21:11 terme à terme.
00:21:12 Ca n'a pas beaucoup de sens.
00:21:14 Par contre, dans le domaine de l'industrie automobile,
00:21:17 il faut profiter du passage à la mobilité électrique,
00:21:20 qui nécessite d'autres types de moteurs,
00:21:23 d'autres types de batteries, d'autres types d'assemblage...
00:21:26 -Ca commence dans le nord de la France.
00:21:28 -Pour localiser sur le territoire.
00:21:30 D'où la politique du gouvernement, qui consiste à dire
00:21:34 que dans le passage aux nouvelles générations,
00:21:36 on va produire en France, en faisant en sorte
00:21:39 que les entreprises qui veulent se localiser
00:21:41 sur le territoire national y soient incitées,
00:21:44 financièrement, par la mise à disposition de gens formés,
00:21:47 par la mise à disposition de terrains,
00:21:49 en créant des écosystèmes industriels
00:21:52 pour qu'il y ait des échanges,
00:21:53 pour qu'il y ait une sous-traitance insérée
00:21:56 dans le système productif.
00:21:58 On fait ça dans le domaine de la mobilité électrique,
00:22:01 mais on peut le décliner.
00:22:02 -On va dans le domaine de la pharmaceutique.
00:22:05 -Les semi-conducteurs,
00:22:06 ça, c'est des secteurs d'avenir,
00:22:08 on appelle ça les technologies de rupture.
00:22:11 C'est pas votre credo a priori.
00:22:13 -Je pense que c'est un volet à ne pas oublier
00:22:15 et qui est important de soutenir,
00:22:17 parce que ce sont aussi les emplois de demain,
00:22:20 mais il faut aussi se dire que la consommation en France
00:22:23 repose sur les biens de consommation courants,
00:22:26 et que les biens de consommation courants
00:22:28 sont les premiers vecteurs de création de richesse
00:22:31 et donc ne pas saisir cette opportunité
00:22:33 de produire en France des brosses à dents,
00:22:36 mais aussi des jeans... -Vous attendez de l'aide,
00:22:39 du soutien de l'Etat financier,
00:22:41 d'accompagnement ? -On peut l'espérer,
00:22:43 on peut le solliciter, on peut le demander.
00:22:45 La vérité, c'est qu'il faut qu'on se donne les moyens
00:22:48 en tant qu'entreprise d'accompagner le mouvement.
00:22:51 Il y a une chose certaine,
00:22:53 les consommateurs, même sans les moyens,
00:22:55 ont tous envie de changer leur mode de consommation.
00:22:58 On a tous conscience que la planète ne peut plus vivre
00:23:02 ce qu'elle a vécu sur les 40 ou 50 dernières années
00:23:04 et qu'il appartient aux marques de proposer des solutions.
00:23:08 Attendre des accompagnements, c'est important,
00:23:10 mais il faut que les initiatives viennent aussi des marques.
00:23:14 J'entends mon entreprise qu'elle accompagne ce changement
00:23:17 et qu'elle soit présente dans tous les réseaux
00:23:19 pour que les consommateurs soient éduqués
00:23:22 dans cette pédagogie du changement.
00:23:24 -Peut-être qu'il faudra réfléchir au salaire
00:23:26 pour pouvoir aussi changer les façons de consommer.
00:23:29 -Il se passe quelque chose en France, quand même ?
00:23:32 Le coût du travail a baissé, la France est plus attractive,
00:23:35 mais on part de très loin.
00:23:37 Est-ce qu'on redevient suffisamment attractifs
00:23:40 par rapport à nos voisins et à l'Allemagne,
00:23:42 à qui on se compare toujours ?
00:23:44 -Il y a la question du coût du travail,
00:23:46 la question des impôts de production.
00:23:48 Sur les impôts de production,
00:23:50 il y a des efforts qui ont été faits,
00:23:52 même si aujourd'hui, les écarts d'impôts de production
00:23:56 entre la France et l'Allemagne
00:23:58 sont toujours au désavantage de la France.
00:24:02 Sur le coût du travail dans l'industrie manufacturière,
00:24:06 les écarts entre la France et l'Allemagne
00:24:09 ne sont pas considérables,
00:24:10 donc c'est pas tellement là que se joue la différence.
00:24:14 -La différence se joue d'où ?
00:24:16 Ce sont des choix de politique industrielle plus anciens ?
00:24:19 -Bah, bien sûr. L'Allemagne, depuis,
00:24:21 n'a pas fait, n'a pas vécu
00:24:23 cette terrible désindustrialisation et délocalisation
00:24:27 que l'on avait vécue.
00:24:29 -Donc on part de plus loin ?
00:24:30 -Ils ont gardé tout un écosystème aussi d'industriels,
00:24:33 de sous-traitants, de sous-traitants de second rang,
00:24:36 ce qui fait qu'ils ont une base industrielle
00:24:39 qui n'a rien à voir avec la nôtre,
00:24:41 et donc c'est moins compliqué, en fait,
00:24:45 que nous, ou dans certains secteurs,
00:24:48 le cas du monsieur qui disait qu'il fallait tout reconstruire
00:24:51 pour refaire des jeans, parce qu'il n'y avait plus
00:24:54 de façonniers de toile et même plus de main-d'oeuvre.
00:24:59 Il y a des secteurs où on n'a même plus la main-d'oeuvre
00:25:03 pour travailler dans ces usines-là.
00:25:05 -Comment vous jugez la politique industrielle
00:25:08 d'Emmanuel Macron, qui l'a fait sa grande priorité
00:25:11 sur l'ensemble de ces quinquennats ?
00:25:13 -Je pense qu'Emmanuel Macron a freiné la chute,
00:25:16 qui était une chute vertigineuse.
00:25:18 On voit bien, dans les chiffres,
00:25:20 les courbes qui tombaient sont devenues à plat.
00:25:22 Le défi, c'est de remonter, de ramener de l'industrie.
00:25:25 Ca passe, effectivement, par ce qui a été évoqué
00:25:28 tout au long de ce débat.
00:25:30 Les Allemands, eux, ont gardé une tradition.
00:25:32 Ils ont plus d'entreprises de taille intermédiaire que nous.
00:25:36 Ils ont une organisation capitalistique,
00:25:38 notamment de capitalisme familial,
00:25:40 ce qu'on pourrait appeler le capitalisme rénant,
00:25:43 qui est plus solide.
00:25:44 On s'est donné aux fonds de pension,
00:25:46 aux investisseurs, aux actionnaires
00:25:48 qui cherchaient de la ratabilité absolue.
00:25:51 Ca compte aussi, il y a le travail à faire
00:25:53 sur la productivité.
00:25:55 Quand vous voyez le patron,
00:25:56 et ça m'est arrivé il y a quelques années,
00:25:59 de Toyota Europe, je lui dis "Pourquoi vous avez choisi
00:26:02 "Valenciennes plutôt qu'un pays low cost en Europe ?"
00:26:05 Il me dit "Valenciennes parce que l'Etat m'a accompagné",
00:26:08 c'était avant l'actuel gouvernement.
00:26:11 -Parce qu'on est plus productif, mais attention, ça baisse.
00:26:14 -Et parce qu'on est plus productif et qu'en gros,
00:26:17 il me dit, avec un salarié en France,
00:26:20 je fais ce que je ferais avec deux salariés et demi
00:26:23 dans un pays de l'Est low cost.
00:26:24 Il faut continuer à travailler ça,
00:26:27 il faut continuer à aider à moderniser les usines,
00:26:30 à faire des usines 2.0, 3.0,
00:26:32 on ira jusque... Pour que le digital vienne aider aussi
00:26:35 à trouver cette responsabilité.
00:26:37 C'est un grand défi national. -La politique économique
00:26:40 à l'échelle. -Et pardon de marteler ça,
00:26:42 mais c'est un projet de société. -Jérémie André ?
00:26:45 -Je rêve du président de la République
00:26:47 et mon projet, c'est produire et on va organiser
00:26:50 toute la société autour de la production.
00:26:52 -Vous l'y réagir. -On a parlé des masques,
00:26:55 est-ce que le problème aussi, c'est par une concurrence déloyale
00:26:59 d'un certain nombre d'Etats, dont la Chine,
00:27:01 par des subventions, par un dumping social,
00:27:04 environnemental, éthique,
00:27:06 est-ce qu'on a vraiment une marge de manoeuvre ici
00:27:08 à bloquer certaines importations ?
00:27:11 -Et l'économiste ? -Il va me dire que c'est pas possible,
00:27:14 mais l'Europe devrait faire... -Au niveau européen,
00:27:17 on a décidé de s'attaquer à ce problème chinois.
00:27:20 On ne dit plus qu'on est dans une économie de bouisonnours
00:27:25 où l'idéal, c'est la libre circulation des biens
00:27:27 sans contraintes, sans limites, etc.
00:27:30 L'Europe a pris des mesures, un,
00:27:31 pour la limitation des investissements chinois
00:27:34 en Europe pour éviter qu'ils n'achètent
00:27:36 des entreprises stratégiques, deux,
00:27:38 l'Europe a pris des décisions
00:27:41 pour s'attaquer aux subventions,
00:27:43 aux entreprises chinoises,
00:27:45 et une commission a été mise en place
00:27:47 pour évaluer les aides et prendre des mesures de rétorsion,
00:27:51 trois, l'Europe a décidé de mettre en place
00:27:53 des mécanismes pour qu'il y ait une réciprocité
00:27:56 sur les marchés publics. -On est sortis de la naïveté.
00:27:59 -Le mot "réciprocité", c'est le mot-clé.
00:28:01 Si nous nous imposions aux produits chinois
00:28:04 de respecter les mêmes normes que les produits français,
00:28:07 on aurait gagné la partie. -Olivier Remoissonnet.
00:28:10 -Vous parliez de "Chine" ? C'est de la merde.
00:28:13 On ne peut pas laisser cette merde de textile
00:28:15 être importée en France.
00:28:17 C'est immonde de laisser faire ça.
00:28:19 C'est le mot "réciprocité".
00:28:20 -C'est vrai qu'en matière automobile,
00:28:23 il faut regarder, parce que vous voyez ce bonus électrique,
00:28:26 c'est du protectionnisme qui dit pas son nom
00:28:29 et qui a renchéri les voitures produites à l'étranger,
00:28:32 en Chine, qu'elles soient françaises ou chinoises,
00:28:34 par rapport aux voitures produites en France.
00:28:37 Vous vous attendez qu'on généralise ce genre de dispositif ?
00:28:40 -Il faut que l'on rétablisse les assiettes
00:28:43 de contribution à notre modèle social et économique.
00:28:46 Je prends l'exemple des brosses à dents.
00:28:48 Je fabrique 4 % des parts du marché français
00:28:51 sur un produit de bien de consommation.
00:28:53 Sauf que je fabrique 4 % des parts de marché français,
00:28:56 et mes 34 collaborateurs sont les seuls à contribuer
00:28:59 à un modèle social à travers les charges sociales
00:29:02 et les charges patronales,
00:29:03 pour les 96 % des produits qu'on importe en France
00:29:06 sur les brosses à dents.
00:29:08 -Il faudrait taxer, ça s'appelle,
00:29:10 les barrières douanières ? -Ca s'appelle la TVA sociale.
00:29:13 -A partir du moment où on veut bénéficier
00:29:15 d'un confort de vie, d'hôpitaux et de services publics,
00:29:18 les biens de consommation ne doivent pas être chargés
00:29:21 sur ceux qui produisent en France.
00:29:23 Il faut une équité sur la taxation
00:29:25 pour que les produits d'importation...
00:29:27 -Ca s'appelle aussi la taxe carbone aux frontières de l'Europe.
00:29:31 Ca va dans le bon sens, Béatrice Mathieu.
00:29:33 Est-ce qu'on doit voir, au fond, ces règles de concurrence changer
00:29:37 et sortir de la naïveté,
00:29:39 être sur un véritable pied d'égalité
00:29:41 sur les questions éthiques et environnementales ?
00:29:43 -Alors, sur les...
00:29:45 Il y a plein de choses.
00:29:46 Sur la taxe carbone, si on prend...
00:29:49 D'ailleurs, le mot "taxe carbone" n'est pas le bon,
00:29:51 puisque c'est "contribution".
00:29:53 -Contribution carbone. -Aux frontières.
00:29:56 -Il y est sur toutes les importations.
00:29:58 -Pas sur toutes les importations.
00:30:00 C'est sur un certain nombre très réduit de secteurs.
00:30:03 Les brosses à dents qui viennent de Chine ou je ne sais où,
00:30:06 il n'y a pas aujourd'hui, dans les projets de la Commission européenne,
00:30:10 de mettre une contribution carbone sur certains...
00:30:13 -Et pourtant, on devrait,
00:30:15 parce que sur une brosse à dents,
00:30:17 trois à quatre fois moins émetteurs de carbone...
00:30:19 -C'est extrêmement compliqué, en fait,
00:30:22 de voir le contenu en carbone de chaque produit,
00:30:25 sous-produit, etc.
00:30:26 Même avoir, pour un produit qui est même fabriqué en France,
00:30:31 se mettre d'accord sur l'empreinte carbone
00:30:35 du début jusqu'à la fin du produit fabriqué en France,
00:30:38 c'est très compliqué.
00:30:39 Calculer ça sur des produits en Chine,
00:30:42 ça va être très complexe.
00:30:43 -Si on veut faire une taxe carbone honnête,
00:30:46 et fondée sur le carbone, c'est très difficile.
00:30:48 J'avais suggéré, en son temps, de faire une TVA kilométrique,
00:30:52 c'est-à-dire de dire qu'un produit qui sort de Chine
00:30:55 et qui fait X milliers de kilomètres
00:30:57 pour venir être vendu en France,
00:30:59 il devrait payer une partie de TVA plus importante
00:31:02 qu'un produit fait à côté.
00:31:04 -C'est facile à mettre en oeuvre.
00:31:05 L'Union européenne cherche depuis un moment
00:31:08 le moyen de faire payer la protection sociale
00:31:10 par les produits importés sur nos territoires.
00:31:13 -Il faut faire attention quand même.
00:31:15 Il faut faire attention à quelque chose.
00:31:18 Il faut savoir qu'à peu près 60 % de la consommation
00:31:21 de biens courants en France est importée.
00:31:23 Donc, si vous installez un système de taxes à l'entrée,
00:31:28 une forme d'impôt douanier, etc.,
00:31:31 le principal effet, c'est une augmentation des prix
00:31:35 sur 60 % du panier de consommation des Français.
00:31:37 Donc, ça se traduit immédiatement par plus d'inflation
00:31:41 et donc, ça va se traduire immédiatement
00:31:43 par des arbitrages vers le low cost.
00:31:46 -Et la demande, alors ? Et la relance ?
00:31:48 -Non, je continue.
00:31:49 Il faut savoir que depuis 50 ans,
00:31:51 vous parliez de l'Allemagne,
00:31:52 il y a une différence fondamentale
00:31:54 entre les politiques macroéconomiques de la France
00:31:57 et de l'Allemagne.
00:31:59 En Allemagne, c'est défense et promotion
00:32:01 du système productif allemand,
00:32:03 parce qu'on croit que la spécialisation industrielle
00:32:07 est le coeur du modèle économique allemand
00:32:09 et donc, du coup, ça permet de développer
00:32:12 les exportations, ça permet...
00:32:14 Mais du coup, il n'y a pas l'importance
00:32:18 qui est mise sur le soutien de la consommation.
00:32:21 A l'inverse, en France, vous regardez,
00:32:23 depuis 50 ou 60 ans, on ne parle que de plans de relance
00:32:26 de la consommation. Chaque fois qu'il y a un accident
00:32:29 conjoncturel, quel qu'il soit, la réponse,
00:32:31 c'est depuis Giscard d'Estaing, depuis 62,
00:32:34 on soutient la consommation. -Il y a quand même
00:32:36 des plans de relance dans l'investissement.
00:32:39 C'est pas suffisant ? -Non.
00:32:40 Sur la longue durée, non, c'est la consommation.
00:32:43 -C'est la consommation. On a tous en tête le giga-plan
00:32:46 à plusieurs centaines de milliards de Joe Biden.
00:32:49 L'Europe, elle est à la hauteur, justement,
00:32:52 pour soutenir les investissements de demain.
00:32:54 -Sur l'industrie, non, elle est pas...
00:32:56 L'Europe est absente sur ce sujet-là.
00:32:59 -C'est d'ailleurs le fait d'une Europe
00:33:01 qui est au milieu du guet, qui n'est pas intégrée,
00:33:04 qui n'a pas été sur ces logiques-là.
00:33:06 Il faut une Europe qui sache protéger ses frontières,
00:33:09 imposer aux produits importés les mêmes règles que nous,
00:33:12 et une Europe qui sache investir dans le développement européen,
00:33:15 d'une vraie industrie stratégique européenne.
00:33:18 -Il y a encore beaucoup de chemin à faire.
00:33:20 On va s'arrêter là. En tout cas, c'était très clair
00:33:23 et passionnant. Merci d'être venu débattre
00:33:26 sur le plateau d'LCP. Vous restez avec moi,
00:33:28 Jérémy André. Dans une dizaine de minutes,
00:33:30 les parties prix de nos affranchis.
00:33:33 Ce soir, comment faire baisser les prix des produits décarbonés ?
00:33:36 C'est la question que va se poser Léa Falco dans Action Planète.
00:33:39 "Marche", c'est le mot de la semaine
00:33:42 de Mariette Darrigrand.
00:33:43 Et puis, qui n'ira pas à cette marche ?
00:33:45 Vous nous racontez tout, n'est-ce pas,
00:33:47 sur cette marche contre l'antisémitisme
00:33:50 dans Bourbon Express. Stéphanie ?
00:33:52 -Oui, je vous raconte comment l'organisation de cette marche
00:33:55 a été créée. -Et même à ses deux instigateurs,
00:33:58 Yael Broun-Pivet et Gérard Larcher.
00:34:00 -A tout à l'heure, les amis. On va plonger dans l'horreur
00:34:03 du 7 octobre avec vous, Jérémy André,
00:34:05 et avec les envoyés spéciaux du Point en Israël,
00:34:08 un numéro exceptionnel qui reconstitue,
00:34:10 heure par heure, le déroulé de cette journée de massacre
00:34:13 perpétrée par le ramas.
00:34:15 Un travail important, un travail nécessaire
00:34:17 pour mesurer à quel point ce pogrom au XXIe siècle
00:34:20 a été coordonné. C'est dans l'invitation
00:34:23 d'Alain Mondingava, et on en parle juste après.
00:34:25 -Si on vous invite, Jérémy André,
00:34:33 c'est pour ce dossier majeur publié dans votre journal Le Point.
00:34:37 7 octobre 2023,
00:34:40 un pogrom du XXIe siècle.
00:34:42 -On est à la bordure occidentale du kiboutz de Faraza.
00:34:45 -Jérémy André, vous avez été sur les lieux des massacres.
00:34:50 -On est dans une petite maison qui sert, visiblement, d'abri,
00:34:54 et où on peut voir, au sol,
00:34:58 des traces de sang devant les maisons,
00:35:00 des tirs, donc, voilà, des impacts de balles un peu partout.
00:35:04 Celui-ci, c'est particulièrement atroce.
00:35:07 Je pense que là, vous voyez bien,
00:35:10 avec des coussins qui sont couverts de sang.
00:35:13 -Cette semaine, dans votre hebdomadaire,
00:35:15 on retrouve un récit presque minute par minute
00:35:19 des attaques du Hamas du 7 octobre.
00:35:21 -Allez, allez, allez, allez !
00:35:23 -A 6h30, la clôture de sécurité réputée infranchissable
00:35:28 est ouverte à 29 endroits.
00:35:31 Les terroristes des brigades Al-Qassam,
00:35:33 la branche militaire du Hamas,
00:35:35 rentrent sur le territoire israélien.
00:35:38 Le dôme de fer, le système antimissile
00:35:41 censé protéger Israël, est saturé.
00:35:44 Des milliers de roquettes sont tirées.
00:35:47 A 5 km de la bande de Gaza,
00:35:50 les terroristes du Hamas foncent sur le festival Supernova.
00:35:54 Plus de 3 000 fêtards tentent de s'enfuir.
00:35:57 Près de 300 tombent sous les rafales de Kalachnikov.
00:36:02 Les terroristes tuent.
00:36:06 Ils kidnappent aussi plus de 200 personnes
00:36:09 amenées de force à Gaza.
00:36:11 Les terroristes du Hamas prennent d'assaut plusieurs kiboutz,
00:36:15 ces communautés agricoles,
00:36:17 ils massacrent des femmes, des enfants, des vieillards.
00:36:21 Au bout de quelques heures d'une attente interminable,
00:36:27 l'armée libère les kiboutz et découvre l'horreur.
00:36:31 Jérémy André, vous documentez le plus grand massacre de Juifs
00:36:37 depuis la Seconde Guerre mondiale,
00:36:39 et pourtant, vous le dites, certains minimisent ou relativisent.
00:36:46 Alors, pour convaincre, faut-il tout montrer, tout raconter ?
00:36:51 -Réponse, Jérémy André.
00:36:55 -Je pense pas qu'il faille tout montrer.
00:36:57 Il faut raconter le maximum,
00:37:00 et il faut bien choisir ses mots,
00:37:03 et les détails qu'on raconte, il faut les vérifier
00:37:06 très précisément. C'est le travail qu'on a fait,
00:37:08 c'est un travail d'équipe,
00:37:10 avec une dizaine de journalistes,
00:37:12 cinq sur place,
00:37:14 et en essayant de collecter au maximum
00:37:17 des témoignages directs, vérifier, recroiser,
00:37:21 pour vraiment, en fait, comprendre la mécanique
00:37:25 dans cette journée qui a mené à plus de 1 400 morts
00:37:29 du côté israélien. -On va rembobiner.
00:37:31 Le 7 octobre, c'est un vendredi, jour de shabbat,
00:37:34 fête religieuse en Israël, et pourtant,
00:37:36 tout le monde n'a pas baissé la garde,
00:37:38 on l'apprend en vous lisant.
00:37:40 A 3h du matin, le directeur général du Shin Bet,
00:37:43 du service de renseignement intérieur israélien,
00:37:45 remarque une agitation inhabituelle
00:37:48 dans la bande de Gaza.
00:37:49 Et là ?
00:37:50 -Alors... -Une tentative...
00:37:53 -Il y avait eu des alertes. -...d'envoyer, mais non.
00:37:56 -Il y avait eu des alertes, pas seulement celle-ci,
00:37:59 à la dernière minute, mais en fait, plusieurs semaines auparavant,
00:38:03 entre autres, par exemple, de jeunes femmes
00:38:06 qui observaient la frontière, qui sont des conscrits,
00:38:09 qu'on appelle les yeux de Tzahal,
00:38:11 le long de la bordure de sécurité,
00:38:13 donc plusieurs semaines avant,
00:38:15 et on ne le sait pas encore, il y aura une enquête,
00:38:19 d'ailleurs, l'armée l'a assurée à la presse internationale,
00:38:23 il y aura une enquête interne
00:38:24 pour savoir les raisons de ces défaillances.
00:38:27 Le jour même, à 3h du matin,
00:38:30 effectivement, les renseignements israéliens ont...
00:38:34 -Des doutes ? -Non, quelques heures avant,
00:38:37 ils ont eu des informations précises
00:38:41 sur le branle-bas de combat du côté du Hamas.
00:38:45 Ils ont envoyé des unités sur place,
00:38:48 mais c'était beaucoup trop tard, beaucoup trop peu.
00:38:51 Il aurait fallu renforcer la défense
00:38:53 de l'ensemble de cette frontière.
00:38:56 -On va le voir sur la carte,
00:38:58 à la fois par le nord et par le sud de la bande de Gaza.
00:39:01 La barrière de sécurité, il faut bien montrer,
00:39:04 c'est six mètres de haut,
00:39:06 65 kilomètres de longueur.
00:39:09 Elle est franchie, 29 points sont franchis,
00:39:12 c'est énorme, et il y a eu des reconnaissances
00:39:15 au petit matin, point de passage,
00:39:17 par des militants du Hamas déguisés en agriculteurs.
00:39:20 -C'était le cas, encore une fois, depuis des semaines,
00:39:23 ces yeux de salles qui ont été, d'ailleurs, massacrés.
00:39:26 On avait interviewé...
00:39:28 une tante d'une de ses conscrites,
00:39:34 et en fait, sa mort a été annoncée ce matin.
00:39:37 Donc, ces yeux de salles
00:39:40 avaient averti leur hiérarchie
00:39:42 et en vain.
00:39:44 Ce matin-là, encore une fois,
00:39:47 elles ont vu l'attaque arriver,
00:39:50 mais en fait, plusieurs personnes,
00:39:52 parmi ceux qu'on a interviewés,
00:39:54 ont parlé de lignes maginaux.
00:39:56 Cette barrière de sécurité était en réalité inadaptée
00:39:59 à ce type d'attaque, et même,
00:40:02 donc, certains militaires disent aujourd'hui
00:40:04 que la défense autour de Gaza
00:40:07 avait été négligée au profit, en fait,
00:40:10 de la Cisjordanie et de l'occupation.
00:40:13 -Il y a eu aussi la diversion par cette pluie de roquettes,
00:40:17 et puis ces drones qui larguent des grenades
00:40:20 pour neutraliser les caméras et les canons automatiques
00:40:23 sur la barrière de sécurité.
00:40:25 Il y a même des plongeurs qui passent par la mer
00:40:27 pour attaquer certains kibouts.
00:40:31 Et là, avec des engins,
00:40:32 les commandos du Hamas entrent.
00:40:35 Et quelles armes, précisément, ont-ils ?
00:40:37 -Alors, finalement, ils ont un arsenal très abondant,
00:40:40 mais qui n'est absolument pas surprenant.
00:40:43 Un arsenal de groupes armés,
00:40:45 donc de Kalashnikovs,
00:40:48 parfois vétustes,
00:40:50 de mitrailleuses,
00:40:52 donc PK,
00:40:53 de fabrication soviétique ou des imitations,
00:40:56 et donc de...
00:40:59 -De tuyaux d'arrosage aussi,
00:41:01 capables de fracturer les portes blindées.
00:41:03 -Effectivement, d'explosifs.
00:41:05 -Tout est préparé minutieusement.
00:41:07 -Minutieusement préparé, et donc de lances roquettes.
00:41:10 Donc ce qui est spécifique,
00:41:14 c'est d'avoir tourné ces armes,
00:41:16 non pas d'abord sur des bases militaires,
00:41:18 voilà, il y a quatre, cinq bases militaires
00:41:21 qui ont été attaquées, mais en fait,
00:41:23 c'est surtout une vingtaine de localités civiles
00:41:26 qui ont été visées par ces armes,
00:41:28 et donc, voilà,
00:41:29 l'utilisation d'armes lourdes sur des personnes civiles désarmées.
00:41:33 -Ce qui s'idère aussi,
00:41:35 ce sont ces caméras,
00:41:36 ces mini-caméras, les fameuses GoPro,
00:41:39 que ces terroristes ont décidées d'emmener
00:41:43 pour filmer leurs atrocités.
00:41:46 -Alors, je suis pas certain
00:41:48 que le but initial était de filmer, en fait,
00:41:51 la partie "atrocité",
00:41:53 c'est-à-dire que, en fait,
00:41:54 depuis une dizaine d'années,
00:41:56 les groupes armés, les groupes terroristes
00:41:59 comme l'État islamique,
00:42:00 filment de plus en plus, embarquent
00:42:03 des services de médias
00:42:07 de ces groupes terroristes,
00:42:08 voilà, qui filment leurs actions,
00:42:10 et normalement, en fait,
00:42:12 ces vidéos auraient dû être montées et diffusées,
00:42:15 je pense, à la gloire du Hamas
00:42:18 et des autres groupes armés palestiniens,
00:42:20 en coupant, en fait, les parties horribles,
00:42:23 ce qu'ils font toujours,
00:42:25 en retenant uniquement celles qui envoient
00:42:27 un message de choc, d'effroi
00:42:29 à l'égard de la société israélienne.
00:42:31 Là, la différence, c'est que la plupart
00:42:34 de ces terroristes ont été tués au combat,
00:42:38 et donc, l'armée israélienne
00:42:40 a récupéré énormément de ces images
00:42:43 et en a diffusé le contenu,
00:42:44 dont des contenus qui sont abominables,
00:42:48 où ils tuent des civils.
00:42:49 -6h29, la Rave Party,
00:42:51 Supernova, qui bat son plein dans le Néguev,
00:42:54 c'est l'un des massacres les plus insoutenables.
00:42:56 281 morts, et vous racontez
00:42:58 de la jeune Milet Benahim, qui comprend
00:43:00 qu'il ne s'agit pas d'une fusillade du Hamas,
00:43:03 mais d'une battue, une battue dont les festivaliers
00:43:06 sont le gibier et qui va durer des heures.
00:43:08 -Cette jeune femme, c'est quand même
00:43:11 assez incroyable, c'est la capitaine de soirée.
00:43:13 Elle est avec ses amis, c'est celle qui a,
00:43:16 on va dire, le moins consommé de produits,
00:43:18 parce qu'il faut être très clair, c'est une Rave Party,
00:43:22 les gens prennent de la MDMA
00:43:23 ou d'autres drogues hallucinogènes,
00:43:26 et elle, elle est plutôt nette,
00:43:30 et en fait, elle va emmener ses amis,
00:43:32 c'est pour ça qu'on l'a utilisé comme fil rouge,
00:43:35 elle a sauvé ses amis en trouvant une cache.
00:43:38 Son témoignage, ainsi que celui de la dizaine de personnes
00:43:44 qu'on a interrogées sur ce festival,
00:43:46 sont très importants, parce qu'ils montrent
00:43:49 un acharnement sur les corps,
00:43:51 une volonté de tuer sur des gens
00:43:53 qui sont complètement désarmés,
00:43:55 et aussi, et alors là, c'est un énorme problème,
00:43:58 je pense, dans ce que nous, on a trouvé,
00:44:01 ce qui émerge de certaines images,
00:44:03 c'est la participation de civils palestiniens,
00:44:05 des gens qui ne sont pas en tenue de combat
00:44:08 et qui se sont joints, parfois,
00:44:11 dans une deuxième vague,
00:44:13 à ces massacres,
00:44:16 et ça, ça pose vraiment des questions centrales
00:44:20 sur ce qui s'est passé ce jour-là.
00:44:22 -Par sympathie pour ce qui se passait ?
00:44:24 -Il est possible qu'un certain nombre de ces gens
00:44:27 soient des combattants qui n'ont pas eu le temps
00:44:30 de se préparer et se sont joints au massacre.
00:44:32 -Il n'y a pas que ça,
00:44:33 parce qu'on va parler aussi des héros,
00:44:36 des Arabes israéliens qui ont sauvé des Juifs.
00:44:38 Je voudrais qu'on dise un mot sur Omri Landler,
00:44:41 27 ans, rescapé du festival,
00:44:43 qui se souvient du sourire sur le visage
00:44:46 d'un terroriste poignardant une jeune fille
00:44:48 qui a perdu la poitrine, les corps perforés par les couteaux,
00:44:52 des morceaux de cerveau éparpillés,
00:44:54 des corps tellement carbonisés qu'ils ressemblent à un squelette.
00:44:58 Il vous dit "l'air sentait le fer tellement il y avait de sang".
00:45:02 -Alors, je pense que son témoignage est essentiel,
00:45:07 parce que c'est quelqu'un qui a aussi traversé tout ce massacre,
00:45:11 qui a été dans plusieurs endroits, qui a vu, en fait,
00:45:15 quelque chose qui a peu été documenté,
00:45:18 c'est-à-dire le final vraiment barbare, en fait,
00:45:22 de ce massacre, pour lequel 280 personnes
00:45:25 ont été tuées. Si on compare, par exemple,
00:45:27 à ce qui s'était passé au Kenya en 2015,
00:45:29 avec des étudiants, où il y avait eu 150 morts,
00:45:32 à ce qui s'était passé à Bombay, donc, en 2008,
00:45:36 on est probablement, rien que sur ce festival,
00:45:40 sur l'une des tueries de masse les plus importantes
00:45:43 de l'histoire récente. -Avec, et là,
00:45:46 on le voit grâce au témoignage des survivants,
00:45:48 des kibbutz, des communications permanentes.
00:45:52 Et ça, c'est incroyable, parce que les groupes WhatsApp fonctionnent,
00:45:56 tout le monde se prévient, parfois, on s'appelle,
00:45:59 parfois même les terroristes, et ça, c'est le cas
00:46:02 pour la Rêve Party, appellent les parents
00:46:05 des otages qui vont être emmenés vers Gaza
00:46:08 en leur disant tout simplement
00:46:10 "Vous ne reverrez jamais vos fils ou vos filles."
00:46:13 -C'est un massacre virtuel, aussi,
00:46:16 où tout le monde communique, enfin, c'est un massacre réel,
00:46:19 mais où tout le monde communique. -Oui, c'est vraiment...
00:46:23 On est arrivé dans une ère où l'Internet est omniprésent
00:46:28 et les applications sont omniprésentes.
00:46:31 WhatsApp, effectivement, de tous les côtés,
00:46:33 a eu un rôle majeur.
00:46:35 On a, en fait, effectivement, ces groupes WhatsApp
00:46:40 où les gens, en live, comprennent les éléments
00:46:43 de la situation. On a, par exemple,
00:46:45 ce cas dont on parle, c'est la famille de Keren
00:46:48 et Avidor Schwartzman, qui boutent Kfar Aza,
00:46:53 et, en fait, ils perdent le contact vers 17h
00:46:56 avec les grands-parents, donc, qui vivent
00:46:59 quelques maisons plus loin, et, en fait,
00:47:03 sur le moment, le père, donc, Avidor,
00:47:06 comprend ce qui se passe, mais il le dit pas à sa femme,
00:47:09 donc, ce sont ses beaux-parents, les parents de sa femme,
00:47:13 et, voilà, en fait, il y a quelque chose
00:47:16 de beaucoup plus instantané, aujourd'hui,
00:47:18 à cause ou grâce à ces applications.
00:47:21 -Vous racontez aussi, Yossi Landau,
00:47:23 l'ambulancier qu'on va voir à l'écran,
00:47:26 qui fond en larmes quand il évoque le corps d'une femme enceinte
00:47:30 et vôtrée lors de la conférence de presse,
00:47:32 et ventrée dont on a arraché le foetus,
00:47:34 on le voit. Je voudrais que vous disiez
00:47:37 aussi sur les résistants, sur les héros,
00:47:39 Rami Avidan qui sauve des dizaines de jeunes
00:47:42 et Youssef Ziadnei, le Bédouin arabe-israélien
00:47:46 qui a secouru les festivaliers.
00:47:48 Racontez-nous.
00:47:49 -Alors, c'est quelque chose qui était peut-être passé inaperçu
00:47:53 dans le week-end d'horreur,
00:47:55 donc, du 7 octobre.
00:47:57 Il y a eu des actes de bravoure exceptionnels.
00:48:01 Donc, d'une part, il y a eu des kiboutz
00:48:05 qui ont réussi à tenir en respect
00:48:09 les assaillants.
00:48:10 On parle d'un de ces kiboutz,
00:48:13 donc, Mefalcim,
00:48:14 où une dizaine de personnes armées
00:48:18 ont réussi à tenir en respect les dizaines,
00:48:21 peut-être les centaines de personnes
00:48:23 qui tentaient d'investir le kiboutz.
00:48:25 -Et cet homme aussi. -Oui, et donc, aussi,
00:48:28 ses sauveteurs,
00:48:29 comme Youssef,
00:48:31 comme Rami Davidian,
00:48:33 dont je parle aussi dans l'article,
00:48:35 comme Léon Barre,
00:48:37 qui a sauvé Milet Benrahim
00:48:40 et qui est mort pendant un sauvetage après...
00:48:44 Donc...
00:48:46 C'est ce que me disait Milet,
00:48:48 c'est qu'on insiste sur le bilan,
00:48:51 mais s'il n'y avait pas eu cette solidarité profonde
00:48:54 dans la société israélienne,
00:48:56 le bilan aurait été beaucoup plus lourd.
00:48:58 -Merci beaucoup. Merci, Jérémy André.
00:49:02 Et à toutes les équipes du Point des Envoyés Spéciaux en Israël
00:49:05 et les équipes de journalistes à Paris,
00:49:09 je voudrais qu'on termine par cette image,
00:49:12 le mémorial d'Aaretz, que vous reprenez sur deux pages
00:49:15 à la fin de ce très long papier.
00:49:17 C'est aujourd'hui
00:49:19 les 1 128 noms de victimes,
00:49:22 on le voit ici s'afficher,
00:49:24 officiellement identifiés.
00:49:26 C'est important aussi de tous les nommer.
00:49:29 Merci beaucoup, Jérémy André.
00:49:31 On n'a donc qu'à lire dans le point
00:49:33 un pogrom au XXIe siècle sur 30 pages,
00:49:35 à ne pas manquer, parce qu'il faut la regarder en face,
00:49:38 cette réalité. C'est l'heure de retrouver nos affranchis
00:49:42 pour leur parti pris. On les accueille tout de suite.
00:49:45 Léa Falco pour sa chronique écolo du vendredi.
00:49:48 Mariette d'Arrigance, en mot de la semaine.
00:49:51 Allez, on respire et on s'installe.
00:49:54 On va commencer par Stéphanie Despierre,
00:49:56 Bourbon Express, l'histoire du jour à l'Assemblée.
00:50:00 C'est cette marche qui suscite la polémique,
00:50:02 mais qui aura bien lieu ce dimanche.
00:50:05 -Oui, une polémique qui ne faiblit pas.
00:50:07 Faut-il marcher aux côtés de la quarantaine de députés RN
00:50:11 dimanche entre l'Assemblée et le Sénat ?
00:50:14 Ca dérange la gauche,
00:50:15 ça dérange aussi une partie du camp présidentiel.
00:50:18 Toutes les deux initiateurs,
00:50:19 Yael Broun-Pivet et Gérard Larcher,
00:50:21 ont tenté d'éteindre l'incendie
00:50:23 et plaider pour une unité nationale introuvable
00:50:26 à l'heure qu'il est.
00:50:27 Les deux présidents martèlent que c'est une marche civique
00:50:30 pour un sursaut républicain,
00:50:32 que les partis politiques ne sont pas invités,
00:50:35 que le rappel s'adresse aux Français,
00:50:37 que ce n'est pas un meeting et qu'il n'y aura qu'une seule banderole
00:50:41 pour la République contre l'antisémitisme,
00:50:43 comme ils l'ont expliqué mercredi soir sur le Plateau du 20h.
00:50:47 Hier soir, ils ont publié un communiqué
00:50:49 pour enfoncer le clou.
00:50:50 "Les polémiques inutiles doivent cesser",
00:50:53 écrivent-ils. "Marcher dimanche est une démarche individuelle
00:50:56 "et c'est une démarche de la République."
00:50:58 -Quelles sont les partis qui iront et ceux qui n'iront pas
00:51:01 marcher contre l'antisémitisme ?
00:51:03 -D'abord, Yael Brone-Pivet voudrait que les chefs de partis
00:51:07 soient à l'arrière du cortège et pas en tête.
00:51:09 Écologistes et communistes et socialistes
00:51:12 ont finalement décidé d'y participer.
00:51:14 Ils l'ont dit dans un communiqué commun,
00:51:16 mais ils appellent à créer un cordon républicain,
00:51:19 à ne pas se mêler aux élus d'extrême droite.
00:51:22 En pratique, ça risque de ne pas être simple.
00:51:24 -C'est la France insoumise. Jean-Luc Mélenchon
00:51:27 fustige à la fois la participation du RN
00:51:29 et le soutien inconditionnel de Yael Brone-Pivet,
00:51:32 comme il l'écrit à Israël.
00:51:34 Plusieurs députés insoumis ont donc préféré participer,
00:51:37 hier soir, à des hommages aux victimes
00:51:39 de la nuit cristale perpétrée par les nazis en 1938.
00:51:43 Et puis d'autres insoumis manifesteront dimanche,
00:51:46 mais pas à Paris.
00:51:47 Pour éviter de se retrouver avec des députés
00:51:49 du Rassemblement national, François Ruffin,
00:51:52 lui, a choisi Strasbourg, ville de naissance d'un de ses héros.
00:51:56 Il explique que là-bas, un appel clair des organisateurs,
00:51:59 non le Rassemblement national, l'extrême droite,
00:52:02 ne sont pas les bienvenus.
00:52:03 C'est la LICRA qui organise le rassemblement
00:52:06 et qui l'a dit, le RN n'est pas invité.
00:52:08 Il y aura aussi avec François Ruffin,
00:52:10 Alexis Corbière et Raquel Garrido,
00:52:12 deux autres contestataires de la ligne Mélenchon.
00:52:15 -Quelles seront les ministres présentes ?
00:52:17 -Elisabeth Borne sera en tête de cortège,
00:52:20 et Gérard Larcher.
00:52:21 La présence du RN a fait débat au sein du gouvernement.
00:52:24 Mercredi, le porte-parole Olivier Véran disait
00:52:26 que le RN n'avait pas sa place.
00:52:28 Il défilera, lui, mais dans son fief, à Grenoble.
00:52:31 Olivier Dussopt, lui, par exemple, marchera à Paris.
00:52:34 Au moins 25 ministres seront dans le défilé parisien,
00:52:37 comme les anciens présidents, Nicolas Sarkozy et François Hollande.
00:52:41 Pour l'instant, on ne sait pas si Emmanuel Macron sera présent.
00:52:44 -Merci, Stéphanie Dupierre.
00:52:46 Jérémy André, vous pensez que sa présence serait utile
00:52:49 et qu'il faut qu'il y aille ?
00:52:51 -Il y a un message d'unité nationale à apporter.
00:52:54 Il y a quand même neuf de nos ressortissants
00:52:57 qui sont entre les mains des groupes terroristes,
00:53:01 des groupes armés qui ont commis ces crimes.
00:53:05 Il y a 40 ressortissants français qui ont été tués,
00:53:09 et la communauté juive de France est assez naturellement très inquiète.
00:53:13 Alors...
00:53:14 Voilà.
00:53:15 Je pense que, dès le début,
00:53:17 ce n'était pas le moment de manifester
00:53:19 pour les Palestiniens bombardés,
00:53:21 même si c'est terrible, ce qui leur arrive.
00:53:24 Aujourd'hui, avoir un débat sur s'il faut manifester
00:53:27 contre l'antisémitisme alors que vient de se produire
00:53:30 l'acte antisémite le plus violent...
00:53:33 -Ça vous choque ?
00:53:34 -... des 71 années,
00:53:36 ça me semble absurde.
00:53:38 -Je précise que la chaîne parlementaire
00:53:41 va retransmettre en direct une émission spéciale,
00:53:44 à la fois dans le cortège avec de nombreux invités,
00:53:47 et d'autres invités en plateau.
00:53:48 Ce sera à suivre à partir de 14h30 sur LCP.
00:53:51 Léa, on a parlé vêtements dans notre premier débat,
00:53:54 sur la fast fashion, notamment.
00:53:56 Vous nous parlez habillement, mais seconde main, plutôt.
00:53:59 -Vêtements de seconde main, c'est ça dont on parle.
00:54:02 Vous l'avez peut-être entendu, ces derniers jours,
00:54:05 le gouvernement a mis en place une subvention
00:54:07 pour faire repriser vos vêtements.
00:54:09 Vous pouvez amener vos T-shirts troués
00:54:11 ou vos chaussures avec une petite accroche
00:54:14 chez un réparateur agréé,
00:54:16 et vous avez une réduction sur le prix,
00:54:18 qui va être financée par une éco-taxe de quelques centimes
00:54:21 sur les produits neufs.
00:54:22 Un Français moyen consomme à peu près 9,5 kg de vêtements neufs par an.
00:54:26 C'est plutôt une mesure qui va dans le bon sens
00:54:29 ou qui envoie un bon signal, même si elle est complexe
00:54:32 et qu'il y a le risque qu'elle fasse monter
00:54:35 les prix initiaux des réparateurs.
00:54:37 Derrière cette mesure, il y a des questions plus complexes
00:54:40 et des réponses à trouver.
00:54:42 Pourquoi on achète autant de vêtements ?
00:54:44 Pourquoi on ne peut pas acheter
00:54:46 tous les vêtements qu'on a et qui sont abîmés ?
00:54:49 On peut citer le fait que ce soit socialement valorisé
00:54:52 d'avoir beaucoup de vêtements, y compris si on ne les porte pas,
00:54:55 le fait qu'on ait parfois du mal à trouver le temps
00:54:58 après une journée de travail de transport
00:55:01 à aller faire réparer des chaussettes.
00:55:03 Le fait qu'on ne sait pas toujours le faire,
00:55:05 que la qualité des vêtements s'est progressivement dégradée,
00:55:09 puisque c'est plus intéressant pour les industriels
00:55:12 qui font que c'est une mesure qui pourrait aller dans le bon sens.
00:55:16 -Ces raisons, ce sont autant d'excuses ?
00:55:19 -Sinon, excuses, au moins, on peut s'accorder
00:55:21 sur le fait qu'on vit sous contrainte,
00:55:24 des contraintes économiques, financières, d'espace.
00:55:27 Et à côté, on a pourtant l'injonction
00:55:29 à la consommation en permanence.
00:55:31 Cette contradiction fait que la plupart du temps,
00:55:34 on va se tourner vers la solution la plus simple pour nous.
00:55:37 Le choix le plus simple, le plus économique, le plus rapide,
00:55:41 le plus socialement valorisé, nous fait perdre le moins de temps,
00:55:44 c'est très rarement le choix écolo.
00:55:46 Celui-là demande beaucoup d'abnégation.
00:55:49 Si j'ai un trou dans mon jean et que ça me coûte moins cher
00:55:52 d'en acheter un autre, et que ça me fait perdre du temps
00:55:55 pour aller au réparateur, je ne veux pas perdre ce temps-là.
00:55:58 Le système qu'il faut construire, c'est un système
00:56:01 dans lequel ça coûte plus cher d'aller acheter un nouveau jean
00:56:05 que de faire réparer celui qu'on a déjà.
00:56:07 On parle même pas seulement de coût économique,
00:56:10 mais de subvention de réparation.
00:56:12 Cette mesure-là peut contribuer à la création
00:56:15 d'un nouveau système vestimentaire, presque,
00:56:18 à la condition de se souvenir qu'elle n'est pas suffisante
00:56:21 et qu'il va falloir des modifications plus structurelles
00:56:24 et qui dépassent les individus pour faire en sorte
00:56:27 que le choix par défaut, ce soit un choix écolo.
00:56:30 -Merci. Merci beaucoup.
00:56:31 On avance, on chemine. Doucement, peut-être un peu trop lentement.
00:56:35 -On l'espère sûrement. -Merci.
00:56:37 -On enchaîne avec le mot "marche".
00:56:39 C'est votre mot, forcément, de la semaine, Mariette Darré-Grand.
00:56:43 -Un mot inévitable cette semaine, un mot très simple,
00:56:46 tout le monde sait ce que ça veut dire.
00:56:48 C'est un mot instinctif.
00:56:50 Si on prend le test de la marche qu'on fait passer au bébé,
00:56:53 c'est très amusant, parce qu'il a ses petites jambes
00:56:56 qui ne feront pas le geste tout de suite,
00:56:58 ça va être un an ou un an et demi après,
00:57:01 mais il faut voir si le petit homo arrivant au monde
00:57:03 est capable de faire ce qu'a fait l'homo erectus,
00:57:06 c'est-à-dire se mettre sur ses pattes arrière
00:57:09 et activer son cerveau.
00:57:10 C'est comme ça qu'il s'est passé.
00:57:12 Tous les grands penseurs ont raconté quelque chose autour de ça,
00:57:16 de Socrate à Nietzsche, en passant par Rousseau.
00:57:19 Faire agir en même temps notre tête et nos jambes,
00:57:21 c'est quelque chose de remarquable que les neurosciences,
00:57:25 aujourd'hui, vantent,
00:57:26 et donc c'est devenu très tendance de marcher
00:57:29 dans la rue, dans la ville ou dans la nature.
00:57:31 -Ca sera aussi ça, cette démarche de la marche, dimanche ?
00:57:35 -C'est sportif, mais ça va être plutôt...
00:57:37 Il y a l'idée que ça va être une marche civique.
00:57:39 Je trouvais ça intéressant, cette alliance,
00:57:42 parce que ça nous fait penser aux années Martin Luther King,
00:57:45 où les Américains n'ont pas dit "walk",
00:57:48 ils n'ont pas marché tranquillement,
00:57:50 c'était pas la petite balade, ils ont repris le mot européen,
00:57:53 le mot latin, si on veut, de la marche,
00:57:56 la longue marche des droits civiques,
00:57:58 et là, on a la dimension combative de la marche.
00:58:01 Chez nous aussi, c'est arrivé en politique,
00:58:03 sur un degré, disons, mineur, mais qui a été très efficace.
00:58:06 -C'est qui ? -En 2017, Emmanuel Macron.
00:58:10 -Ah bah oui, bien sûr !
00:58:11 Son mouvement s'appelait "En marche",
00:58:13 et ses partisans, les marcheurs. -Il a repris, d'ailleurs,
00:58:17 ce que Nicolas Sarkozy avait fait,
00:58:19 contre l'immobilisme à la française,
00:58:21 mais le fait d'avoir pris le concept de marche
00:58:23 a été très efficace. C'est très bien pour partir,
00:58:26 des concepts comme ça, cette métaphore,
00:58:28 c'est beaucoup moins bien pour continuer,
00:58:31 pour filer la métaphore.
00:58:33 Je vais prendre un petit exemple que j'aime beaucoup.
00:58:35 Vous savez, l'expression "ça marche".
00:58:38 Vous commandiez un café, il y a quelques années,
00:58:40 dans un bistro, et on vous disait "oui",
00:58:43 et maintenant, le jeune serveur ou la jeune serveuse
00:58:46 va vous dire "ça marche".
00:58:47 Souvent, il revient deux minutes après.
00:58:49 C'était quoi, déjà, que vous vouliez ?
00:58:52 Je prends cet exemple, parce que certains jeunes diplômés
00:58:55 dans notre pays n'ont pas trouvé l'emploi
00:58:57 qui correspond à leur diplôme, et du coup, ça, pour moi,
00:59:01 c'est la partie de la longue marche du politique.
00:59:03 C'est long, ça va prendre des années.
00:59:05 Léa nous l'explique souvent.
00:59:07 -Marie Ettend, quelques mots pour conclure.
00:59:09 Ca va marcher, dimanche ?
00:59:11 -Je l'espère fortement.
00:59:12 J'espère que la France va se rappeler
00:59:15 qu'elle a su réhabiliter l'honneur du capitaine Dreyfus,
00:59:18 mais je crois qu'elle doit aussi regarder cette marche
00:59:21 comme le premier pas vers son avenir,
00:59:23 mais là, ce sera pas pour dimanche, ce sera pour lundi,
00:59:26 parce qu'on marche toujours vers quelque chose.
00:59:29 C'est la nouvelle démocratie contre l'athéocratie ?
00:59:33 Est-ce que c'est l'humanisme à l'européenne
00:59:36 qu'il faut reprendre, réinventer ?
00:59:39 Quel va être le but des gens qui vont marcher dimanche dans Paris,
00:59:43 en plus, évidemment, du socle fondamental
00:59:45 de s'inscrire contre l'antisémitisme ?
00:59:48 -Merci beaucoup.
00:59:49 En tout cas, rendez-vous, 14h30, sur LCP,
00:59:52 pour suivre en direct cette marche.
00:59:54 Ce sera la marche parisienne de l'Assemblée nationale au Sénat.
00:59:58 Merci beaucoup, Jérémy André. -Merci.
01:00:00 -Le 7 octobre 2023, minute par minute,
01:00:03 c'est-à-dire dans les colonnes du Point 7 semaine,
01:00:07 avec tout le service des envoyés spéciaux,
01:00:09 mais aussi des journalistes à Paris,
01:00:12 pour le Point. Merci, les Affranchis.
01:00:15 A très vite, Stéphanie Despierre. C'est le week-end.
01:00:18 Merci à tous ceux qui, derrière la caméra,
01:00:20 m'accompagnent fidèlement.
01:00:22 Très bon week-end et à la semaine prochaine.
01:00:24 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
01:00:26 ...
01:00:38 [Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org]

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