BETOGETHER avec Mohamed Bouhafsi

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Transcript
00:00 Les premiers souvenirs que j'ai, c'est autour de 5-6 ans.
00:02 C'est ma mère qui se fait tabasser, c'est mon père qui me frappe.
00:06 C'est les insultes, c'est les coups, c'est les bagarres à la maison,
00:09 c'est les affaires qui sont jetées, c'est le mobilier, les meubles qui sont cassés.
00:13 Je m'appelle Mohamed Bouafsi, j'ai 31 ans, je suis journaliste
00:24 et je suis le créateur du tournoi des Défenseurs de l'Enfance,
00:27 qui est un collectif pour venir aider les enfants
00:30 et surtout leur donner des moments de bonheur, des moments d'évasion.
00:33 Ce tournoi du collectif des Défenseurs de l'Enfance, c'est la 3ème édition.
00:36 C'est un tournoi assez exceptionnel, depuis 3 ans,
00:39 on permet à 250 enfants et 50 éducateurs,
00:41 mais souvent ils sont un petit peu plus les éducateurs,
00:44 on leur donne du bonheur, un week-end de rêve.
00:45 La 1ère édition a eu lieu au Stade de France.
00:47 La 2ème édition, ils avaient eu la chance, l'honneur, le plaisir, le rêve
00:51 de fouler la pelouse du Parc des Princes,
00:53 la pelouse où il y avait Léo Messi, Neymar
00:56 et surtout pour ces enfants-là, Kylian Mbappé.
00:58 Et cette 3ème édition, elle a lieu dans le stade mythique,
01:02 mon stade préféré, le stade Vélodrome,
01:04 où les enfants, le 18 et 19 novembre, pourront se rendre à Marseille,
01:07 avoir un week-end de rêve.
01:08 Ils vont faire un petit tour à Marseille avec un petit train.
01:12 Le soir, ils iront visiter la Grotte Koskère.
01:14 Ils auront la chance de voir le film Les 3 Mousquetaires Milady en avant-première.
01:18 Et le lendemain, fouler la pelouse mythique du Vélodrome.
01:22 C'est un moment magique pour eux, parce qu'on permet à ces enfants
01:24 de leur donner du rêve et surtout de se dire que ce sont des enfants
01:27 comme les autres, des enfants qui peuvent avoir des moments de bonheur,
01:31 des enfants qui rencontrent des stars,
01:32 des enfants qui jouent avec Big Flo et Oli,
01:34 des enfants qui jouent avec Fianso,
01:36 des enfants qui découvrent Michou et ils n'obstagent leurs idoles
01:40 de YouTube et des réseaux sociaux.
01:42 C'est un moment où les enfants peuvent se reconstruire.
01:44 Les messages qu'on reçoit après cette édition du tournoi
01:47 des défenseurs de l'enfance, c'est des moments de rêve.
01:48 En clair, c'est les gamins qui me disent merci,
01:51 merci de nous avoir permis de se dire qu'on était des enfants comme les autres
01:54 et que nous aussi, pendant un week-end, on avait le droit à du bonheur.
01:57 Il faut savoir que trois semaines avant le tournoi,
02:02 on organise le Train Like a Pro, l'entraînement avec les professionnels.
02:05 Six garçons, six filles et j'insiste beaucoup sur la mixité,
02:08 qui ont environ entre 8 et 11 ans, vont dans leur club de leur ville
02:12 et vont récupérer les équipements, vont récupérer les maillots,
02:15 les shorts et les chaussettes et ça crée un sentiment d'appropriation.
02:19 En clair, ça crée un lien entre les joueurs et la ville et le club.
02:23 L'année dernière, il y a un petit gamin qui s'appelle Adama,
02:26 alors le prénom a été changé.
02:28 Adama, il a vécu des violences psychologiques terribles,
02:31 on l'a retrouvé nu sur l'autoroute A15,
02:33 c'est une autoroute qui est dans le nord de Paris.
02:35 Il avait cinq ans, sa vie, elle était détruite, elle était mal partie,
02:39 ses parents ne voulaient plus de lui.
02:41 Et ce gamin, il a vu Kylian Mbappé et il m'a dit,
02:45 et il l'a dit sur une radio nationale, il a dit "ma vie, elle s'est relancée".
02:50 Il avait sept ans au moment de la rencontre avec Kylian Mbappé,
02:53 c'était l'année dernière, et il a dit "aujourd'hui, j'ai l'impression de revivre
02:56 et j'ai l'impression que ma vie, elle démarre aujourd'hui".
02:58 Juste pour ça, en fait, c'est un moment exceptionnel,
03:00 juste pour ça, ce tournoi, c'est une belle victoire.
03:02 On va atteindre les 900 enfants accompagnés.
03:05 Et quand vous allez voir ces enfants entraînés par Valentin Rongier,
03:09 par Jonathan Klos, entraînés par Marquinhos, entraînés par Lely Douas,
03:13 il y a eu un moment exceptionnel à Lille,
03:14 et je voudrais aussi souligner l'attitude des Niçois,
03:17 ces enfants, ils ont l'impression qu'ils comptent.
03:20 Ils ont l'impression que c'est des enfants comme les autres
03:22 et qu'ils peuvent se relancer dans la vie et se dire
03:24 "j'essaie un peu de mettre les violences sexuelles,
03:26 physiques et psychologiques derrière moi".
03:28 Et je dis souvent que si en arrivant on en sauvait un, au minimum un,
03:31 mais je suis sûr, et c'est ce qu'on me dit depuis deux ans,
03:33 qu'on en sauve beaucoup plus, on aura gagné notre match.
03:36 Je dis que c'est le projet de ma vie parce que j'ai l'impression de servir à quelque chose.
03:44 Je voudrais par exemple citer Alexandre Domagala,
03:46 qui est l'éducateur de Lille et qui a créé un héritage
03:48 et qui a créé un partenariat avec le LOSC.
03:50 Alexandre me dit "parfois la vie, elle est difficile,
03:52 parfois on s'embrouille avec les enfants,
03:53 parfois on s'embrouille aussi avec les parents
03:54 parce qu'on est obligés d'extraire les enfants de situations très difficiles
03:58 de leurs parents qui ne comprennent pas que ces enfants sont malheureux".
04:00 On a l'impression qu'on est les bêchants,
04:02 on ne gagne pas très bien notre vie et on est là pour tout donner pour les enfants.
04:05 Et sur un week-end, vous nous redonnez de l'espoir Mohamed.
04:08 Moi j'ai le souvenir de l'éducatrice de Marseille qui m'a dit
04:11 "c'est la première fois en 20 ans où j'ai l'impression de servir à quelque chose".
04:14 Moi je suis très ému en parlant d'eux parce que sans les éducateurs,
04:17 ces enfants, on les perdrait.
04:20 Et en fait, si on n'investit pas du temps sur ces enfants,
04:22 si on n'investit pas de l'argent sur ces enfants maintenant,
04:25 ils vont reproduire les violences.
04:26 Il faut casser les chaînes de violences,
04:28 il faut casser le déterminisme à la violence.
04:31 Moi je dis que la violence, elle n'est pas naturelle,
04:34 c'est-à-dire qu'on n'est pas né violent et on ne va pas devenir naturellement violent.
04:39 Mais si on continue de laisser ces enfants dans des espaces violents,
04:43 on a beaucoup plus de chances de reproduire la violence.
04:45 Alors c'est à 4-5 ans, c'est à 6 ans qu'on peut leur donner du bonheur.
04:48 Si en leur disant "non, viens chez ton grand-père, viens chez ta grand-mère,
04:52 viens chez celui qui ne t'a pas fait du mal, que tu vas pouvoir te relancer".
04:55 Et ce week-end-là, quand on me dit "aujourd'hui Maëlle,
04:58 elle est capable de parler à un adulte,
05:01 Samuel, il est capable de faire ses devoirs,
05:04 Mickaël, il est capable de se relancer dans la vie".
05:06 Quand on leur dit "si vous travaillez bien à l'école,
05:08 vous pourrez avoir une meilleure vie, vous pourrez revenir dans ce tournoi
05:10 et vous pouvez reprofiter des moments de bonheur",
05:13 eh bien moi c'est ma plus belle réussite.
05:14 Et quand je reçois des messages sur Instagram de gamins qui me disent
05:16 "je ne fais plus de bêtises, je ne fugue plus, je ne touche plus à la drogue,
05:19 je ne touche plus au shit, je ne touche plus au cannabis,
05:21 je veux juste revenir sur le tournoi
05:22 ou je veux juste reconnaître des moments de bonheur comme ceux que j'ai vécus",
05:25 pour moi c'est la plus belle réussite, c'est mon plus beau match
05:28 et c'est pour l'instant la plus belle victoire et c'est pour ça que c'est le projet de ma vie.
05:31 On peut aider juste en écoutant ces enfants-là.
05:36 Déjà en appelant le 119, ce numéro des violences faites aux enfants,
05:40 en ayant conscience qu'on est un collectif.
05:43 Moi je répète souvent qu'il y a 27 cm de mur
05:46 entre deux appartements.
05:47 Si vous entendez des violences, moi mon combat il est parti d'une chose,
05:50 il est parti d'un voisin que j'ai entendu sur une chaîne d'information en continu
05:53 qui a parlé d'un enfant qui était mort de 6 ans et demi d'audia
05:56 parce qu'il n'avait pas fait ses devoirs.
05:58 Et cet enfant, et ce voisin il a dit "aujourd'hui toute ma vie
06:01 j'aurai les cris de cet enfant et du fait que je n'ai pas appelé la police".
06:05 Moi je n'ai pas envie qu'il y ait des voisins qui vivent avec ça sur la conscience.
06:08 Je n'ai pas envie qu'il y ait des parents qui vivent avec ça sur la conscience.
06:12 Soyez là pour les autres, dites-vous qu'on forme un collectif
06:15 et que parfois si vous-même vous avez peur,
06:17 je peux comprendre qu'on ait peur d'appeler le 119, de dénoncer,
06:19 juste d'appeler le 17.
06:20 Vaut mieux un policier qui tape à une porte
06:23 et qui regarde si tout va bien que plutôt un enfant qui meurt.
06:26 On n'a pas forcément besoin de donner de l'argent,
06:28 on donne déjà beaucoup, les Français donnent déjà beaucoup à des causes difficiles.
06:31 Si vous pouvez donner de l'argent à des confédérations nationales
06:33 comme l'Association de protection de l'enfance, la CNAP, comme l'Enfant Bleu,
06:36 donnez de l'argent.
06:37 Et si vous ne pouvez pas donner de l'argent, donnez du temps, écoutez les autres,
06:40 allez voir des assos, faites ce que vous pouvez,
06:43 mais ayez conscience qu'on est un collectif
06:45 et c'est comme ça que la société ira mieux
06:47 parce qu'on est toujours en train de se regarder le nombril et moins les autres.
06:50 [Musique]

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