Extrait de la conférence d'Alain Bauer organisée par le Cercle des Actifs Malouins à Saint-Malo le 13 avril 2018.
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00:15 C'est accéléré d'ailleurs la situation. Le recrutement des analystes est bien meilleur désormais,
00:19 puisque on en recrute. Le problème c'est que ça ne tombe pas des arbres et que ça ne s'achète pas au supermarché.
00:23 Ça se forme. Pour les former, il faut des écoles de renseignement. Jusqu'à 2014, il n'y avait pas d'école de renseignement en France.
00:28 Il y a des écoles d'espions, très efficaces, mais du renseignement, aucune. Un analyse, c'est un cerveau, un outil, un mode opératoire,
00:34 une méthodologie, une culture. Je sais que c'est un gros mot pour certains, mais c'est quand même comme ça que ça marche.
00:39 Le fait de faire rentrer la culture dans un univers qui est celui du confessionnage et pas celui de l'antiterrorisme,
00:46 autant c'est facile à la DGSE et à la DRM parce qu'ils font ça depuis toujours, autant à la DGSI, c'est un travail de titan.
00:54 L'ancien directeur est actuel d'ailleurs s'épuise à faire augmenter les effectifs d'analyste, à recruter à l'extérieur, à faire comprendre que c'est utile,
01:02 mais comme ils le disent, on ne va pas envoyer tous les flics qui sont à l'intérieur pour faire la circulation.
01:07 Vous devez le faire digérer par la maison. Et donc c'est lent. C'est lent à former, c'est lent à recruter, c'est lent à adopter,
01:14 c'est lent à digérer et c'est lent à diffuser. Mais ça arrive. Je suis beaucoup moins critique aujourd'hui que je ne l'étais il y a 2-3 ans
01:22 quand j'ai découvert l'état réel des capacités d'analyse du renseignement intérieur et de l'antiterrorisme.
01:28 Ne pas traiter un sujet va peut-être faire en sorte qu'il vous évite. C'est du wishful thinking. Aux États-Unis on me dit « Non, non, non, non, t'as raison, ça peut arriver, ça va arriver,
01:44 combien ça coûte ? » Et donc au lieu d'avoir un débat intellectuel sur l'existence du futur, de l'avenir, de la fatalité, comme aura dit Chéri Duby,
01:56 aux États-Unis on me dit « Non, il n'y a aucun problème, si tu le dis, c'est que ça va arriver, le problème c'est est-ce que ça coûte plus cher de s'y préparer ou de réparer ? »
02:03 Et puis on a un débat comptable qui est paradoxalement plus facile, pas toujours plus efficace, mais plus facile.
02:10 Et donc le politique aujourd'hui n'a pas anticipé le problème des sortants parce qu'il est focalisé sur les revenants, mais simplement parce qu'il ne l'a pas vu.
02:19 Comme quand Ricard et Brugger disent « Un GSTC c'est plus la même chose que GIA, coco les gars, on n'a plus les mêmes. »
02:28 Et où tout le monde dit « Non, non, mais si, non, mais tu vas raconter n'importe quoi, tu verras, c'est comme d'hab. »
02:33 Aujourd'hui, le hybride par exemple, si vous savez le temps qu'il faut pour faire remonter au cerveau l'idée que désormais les criminels et les terroristes c'est la même chose,
02:41 avec les mêmes process, les mêmes outils, les mêmes modes opératoires que l'État islamique a bouleversé tout ce qui était la nature même de l'opérauteur terroriste,
02:48 vous seriez effaré de la quantité de salive qu'il faut pour arriver vaguement à attirer l'oreille d'un responsable des services de renseignement,
02:59 tellement ils sont focalisés sur, et puis en plus ils sont focalisés sur l'espion, et d'autant plus que les dernières activités de nos amis soviétiques disent « Non mais t'as vu,
03:08 les terroristes, t'as vu, quand même, ils sont là les rouges, donc on va se les reprendre, pas les rouges les russes. »
03:13 C'est un peu la même chose, c'est une sorte de synonyme. Et donc c'est un des problèmes majeurs, c'est qu'on est dans le rétroviseur.
03:21 C'est comme si vous conduisiez votre voiture uniquement avec votre rétroviseur, certes mis à jour régulièrement chaque kilomètre, mais jamais en regardant votre pare-brise.
03:27 Normalement, vous devriez vous prendre un mur. Et le problème, c'est qu'on se prend des murs, ce qui nous permet d'ailleurs de nous rattraper après.
03:35 Nous n'avons pas de capacité proactive, nous avons des capacités réactives. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour nous. La bonne nouvelle, c'est que tous les Occidentaux fonctionnent pareil.
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