Liberia : Georges Weah cède le fauteuil à Joseph Boakai (Ça fait l’actualité)

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Transcript
00:00 (Générique)
00:15 Bonjour à tous et bienvenue. Le nouveau président du Libéria, Joseph Bouakai, a remporté l'élection présidentielle
00:22 et succède ainsi à Georges Ouéa. Décryptage dans Sa Faits d'Actualité.
00:27 (Générique)
00:31 Retour sur l'élection présidentielle au Libéria avec Siaka Kone.
00:36 Le président sortant du Libéria, Georges Ouéa, admet sa défaite face à son opposant Joseph Bouakai.
00:42 Le vendredi 17 novembre dernier, l'ancienne star du football au pouvoir depuis 2017 a reconnu la victoire de son adversaire
00:49 après le second tour de l'élection présidentielle du 14 novembre 2023.
00:53 Le déploiement des votes dans plus de 99% des bureaux donnait déjà 50,89% à Joseph Bouakai et 49,11% à Georges Ouéa.
01:03 Aussitôt, l'ancien président a fait preuve de faiblesse en adressant ses félicitations et encouragements à son adversaire.
01:10 A noter qu'environ 2,4 millions de Libériens étaient appelés aux unes mardi et la participation a dépassé 65%
01:17 selon les chiffres publiés par la commission électorale.
01:20 La coalition pour le changement démocratique, CDC, avec à sa tête Georges Ouéa, cède le pouvoir à Joseph Bouakai pour un mandat de 6 ans.
01:28 Près de 20 ans après la fin de la guerre civile, c'était la première élection présidentielle au Libéria organisée sans l'aide des Nations Unies.
01:39 La commission nationale des élections, la NEC, a proclamé ce lundi la victoire de Joseph Bouakai.
01:46 Comment s'est déroulé ce scrutin ? Que faut-il retenir de ces élections ? Et quelle perspective pour le Libéria ?
01:51 Pour en parler, j'ai le plaisir de recevoir le politologue Sylvain Guessant. Bonjour et bienvenue.
01:58 – Bonjour.
01:59 – Et le journaliste l'ensigné Bakayoko. Bonjour et merci d'être présent.
02:03 – Bonjour, Fatim.
02:05 – Alors messieurs, le Libéria est donc associé, je le disais tantôt, à des années de guerre civile et d'épidémie d'Ebola.
02:12 Dans quel contexte sociopolitique s'est tenue cette élection présidentielle ? Allez-y Bakayoko.
02:19 – Cette élection se déroule dans un contexte de forte tension, de tension sur les questions sociales,
02:26 parce que Georges Ouéa qui avait fait la promesse de venir à bout de la pauvreté, apparemment n'y est pas parvenu.
02:35 Il avait aussi pris d'énormes engagements, notamment sur les questions de corruption.
02:41 C'est vrai qu'il a créé des institutions anticorruption et il s'est inscrit à l'initiative de transparence des institutions extractives.
02:50 Il a mis en place d'autres dispositifs pour venir à bout de cette corruption, mais il n'y est pas parvenu.
02:55 Aujourd'hui le Libéria est 142e, 680, à l'indice de corruption. Il y a aussi que du contexte politique.
03:05 – De manière générale, parce qu'on va faire son bilan après à Georges Ouéa à titre personnel,
03:09 mais déjà de manière plutôt globale, générale, comme je le rappelais, des guerres civiles, des épidémies d'Ebola.
03:18 Voilà, une première élection sans l'appui des Nations Unies.
03:21 Comment se portait ce pays avant ce scrutin ? Indépendamment même du bilan direct de Georges Ouéa.
03:27 – Oui, effectivement, le Libéria avait été stabilisé d'une certaine manière par le prédécesseur de Georges Ouéa,
03:36 Hélène Sirleaf Johnson, qui avait quand même pris le pays dans des conditions difficiles.
03:43 On venait de deux guerres civiles avec Charles Taylor.
03:49 Et Georges Ouéa prend le pays dans un contexte post-Ebola.
03:58 Et l'Ebola avait décimé l'ensemble de toutes ces régions, la Sierra Leone, la Guinée, le Libéria.
04:05 Et Georges Ouéa prend le pays dans un contexte où l'économie était mise à rue de preuve en raison de ce virus Ebola,
04:12 où le Libéria était en quarantaine par rapport à ses autres partenaires internationaux.
04:17 Alors un pays qui sortait de crise et qui était l'objet de fragilités économiques et politiques, c'était un coup dur.
04:23 Et puis en 2019, Georges Ouéa doit faire face à la crise sanitaire liée au Covid-19.
04:33 Et pendant qu'il faisait face avec l'ensemble du monde entier,
04:38 il y a la crise du riceau ukrainien qui est venu s'ajouter à cet environnement délité, en tout cas économiquement.
04:44 Donc Georges Ouéa exerce son pouvoir dans un contexte extrêmement difficile.
04:50 Les six ans sont passés à faire Sud-Ebres, mais il essaie quand même de relever le pays,
04:57 puisque quand Georges Ouéa prenait le Libéria, le budget de 2017 était d'à peu près de 300 à 400 milliards de francs CFA,
05:07 si je fais la traduction, à peu près 572 millions de dollars.
05:11 Et au moment où il sort, le budget est autour de 500 à 600 milliards de francs CFA.
05:18 Mais la corruption reste très vive et la croissance est aujourd'hui autour de 4,8 points,
05:24 tandis que l'inflation est à 7,66 points.
05:28 C'est énorme, mais c'est quand même resserré par rapport au contexte mondial.
05:32 Mais les Libéria ont mal appréhendé ce bilan et ils viennent de le sanctionner dans les unes au profit de Joseph Bouakai,
05:39 qui a été vice-président et ministre de l'Agriculture.
05:44 – On va revenir sur les deux protagonistes de cette élection.
05:47 Mais au-delà du choix justement de la personne appelée à diriger ce pays,
05:51 ce scrutin était-il attendu selon vous par les populations ?
05:55 – Oui bien sûr.
05:57 Vous savez quand on sort d'un contexte conflictuel comme celui du Libéria,
06:00 qui était une guerre au sens propre du thème, de 1990-1999 à 2003,
06:07 avec peut-être une ou deux années d'accalmie, les attentes de la population sont assez élevées.
06:14 Voilà, avec une population de 80% qui a moins de 25 ans,
06:18 donc des besoins de scolarisation, de santé, des besoins physiologiques, de reconstruction post-crise,
06:25 c'est énorme pour un seul mandat.
06:27 Voilà, malheureusement, à terme de conduite du changement, ça demande au moins une génération de stabilité.
06:34 Donc six ans c'est juste pour jeter la base, pour s'allier des institutions,
06:38 mais le résultat c'est à court terme, il va falloir une stabilité sur un certain terme,
06:44 et que l'État aussi puisse resserrer ses dépenses dans beaucoup de secteurs,
06:49 de sorte à pouvoir voir réellement le capital humain connaître une certaine positivité.
06:57 Bon, six ans, malheureusement, il n'a pas pu atteindre ce objectif,
07:00 ça va dessoirs, ce n'est pas possible, on ne change pas de pays en six ans.
07:03 – Je voudrais juste ajouter, pour corroborer ce que le docteur était en train de dire,
07:07 70% du budget du Libéria est affecté aux charges du personnel et aux services d'achat.
07:15 Vous voyez, un pays qui sort des crises, quand on prend un pays comme la Côte d'Ivoire,
07:19 c'est vrai, à peu près 21% de nos recettes budgétaires étaient orientées vers les infrastructures,
07:24 aujourd'hui nous sommes à peu près à 30-33%, même 35% qui sont orientés vers les infrastructures,
07:29 mais pour un pays comme le Libéria où tout était priorité,
07:33 l'ensemble des ressources a été affecté aux questions de paiement de salaire,
07:38 et ça, un pays ne peut pas se développer uniquement avec le salaire,
07:41 mais il faut des infrastructures, malheureusement, les capacités…
07:44 – Mais il faut bien payer les gens !
07:45 – Les capacités de mobilisation du trésor libérien sont assez faibles,
07:51 et donc le Libéria ne pouvait pas s'attendre à une régénérescence de son outil de production,
07:58 c'est-à-dire les infrastructures, et ça, ça a été quand même un vrai problème,
08:02 et ce problème, comme le docteur l'a dit, on ne le résout pas en 6 ans, mais sur une génération.
08:07 – On va revenir sur le bilan du président sortant,
08:09 mais justement, Jean Jouéa du Congrès pour le changement démocratique, le CDC,
08:14 était arrivé en tête du premier tour, et il se retrouvait,
08:19 il se retrouve là, comme en 2017, en ballotage face à Joseph Bouaké, du parti de l'unité, l'UP.
08:26 Mais cette fois-ci, ce dernier remporte le second tour, comment l'expliquez-vous ?
08:31 Qu'est-ce qui justifie, au-delà du bilan que vous avez plus ou moins dressé de son prédécesseur,
08:36 qu'est-ce qui justifie cette victoire ?
08:39 – La victoire vient de… d'abord, c'est une victoire un peu serrée quand même,
08:43 ça ne prend pas un grand score comme ce qu'on a pu percevoir en 2017,
08:46 donc certainement que l'électorat du président Jouéa est resté un peu déçu de certaines attentes.
08:55 Comme on l'a dit, 80% de la population qui a moins de 25 ans, les attentes sont énormes.
09:00 Un pays qui sort d'un conflit, qui n'a pratiquement pas de grand secteur économique
09:05 pour susciter l'attractivité extérieure, les investissements en dehors du caoutchouc,
09:10 qui a pu avoir quelques bailleurs, internations d'eau, les minéraux, tout ça est un peu lent.
09:15 Sans oublier le contexte dont on a parlé, une guerre,
09:18 donc tout ce qui a été détruit a reconstruit, le système éducatif à Lambeau,
09:22 le système sanitaire à Lambeau qui a subi également les affres de Léboula,
09:26 la guerre de Créne et Vénus s'est ajoutée,
09:31 de l'autre côté le voisin guénien qui n'est pas forcément stable,
09:34 ça fait beaucoup pour le libérer à lui seul.
09:37 Voilà, donc nous sommes dans une démocratie,
09:40 si après il faut remettre la souveraineté au peuple, il faut qu'il choisisse un autre leader,
09:44 donc j'ai choisi.
09:45 – Donc pour vous c'est quoi, un manque de mobilisation du camp de Georges Jouéa,
09:49 et peut-être aussi une déception, une sanction qui s'est traduite dans les urnes ?
09:53 – Non, mais je ne pense pas que M. Jouéa pouvait trouver des éléments de réponse
09:57 aux attentes des populations en 6 ans, je ne pense pas.
10:00 – Là aussi, comment vous expliquez, on est dans la même configuration qu'en 2017,
10:04 mais cette fois-ci le ballottage est favorable à Bouaké ?
10:09 – Moi je pense que la non-reconduction de Georges Jouéa exprime une certaine déception
10:15 de la population vis-à-vis du numéro 10 du Milan C,
10:20 parce que ce garçon est venu d'un quartier difficile, un quartier préquel,
10:27 le quartier Gibraltar-Mondrovia, qui est un quartier sa grand-mère,
10:31 donc c'est un quartier qui n'offre pas toutes les opportunités aux jeunes enfants.
10:36 Donc Georges Jouéa qui avait eu la chance, en tout cas par son talent footballistique,
10:41 à migrer vers le Grand Club, son retour avait été considéré comme son aura international,
10:48 sa stature, les libéraux espéraient bénéficier de cette aura, de cette stature-là.
10:53 Et Georges Jouéa, effectivement, avait vendu aussi sa capacité de mobilisation,
10:58 de mettre au profit du libéral son carnet d'adresse,
11:01 qui à la vérité, effectivement, était bien fourni.
11:04 C'est vrai que Joseph Bouaké aussi était un ancien de la Banque mondiale,
11:08 mais il était devenu une sorte, il avait été un peu sédentaire,
11:12 une sorte de sédentarisation, vu qu'il avait été ministre dans le gouvernement précédent,
11:17 et vice-président.
11:19 Donc on avait imaginé qu'il a fait ce qu'il pouvait, puisqu'il était dans l'exécutif.
11:24 Or, au sorti de Sir Leif Johnson,
11:27 les libéraux étaient un peu mitigés sur le bilan aussi de Sir Hélène Johnson.
11:34 Donc Georges Jouéa venait comme une sorte d'espoir,
11:37 une sorte d'épouvantail contre la pauvreté,
11:39 et je pense que les libéraux ont surestimé sa capacité de réajuster…
11:43 – On l'a survendu, vous pensez, sur le papier, de manière théorique,
11:46 on a survendu le fossileur.
11:48 – De façon théorique, ils l'ont survendu.
11:50 Mais on peut comprendre, puisque le Libéria venait d'une crise,
11:54 d'une crise sauvage, donc le Libéria, comme un naufragé,
11:56 essayait de s'accrocher à toutes les branches.
12:00 Malheureusement, Georges Jouéa ne pouvait pas répondre à toutes ses attentes,
12:03 mais il a fait ce qu'il pouvait,
12:07 quoique aujourd'hui il ait été sanctionné dans le Boxer.
12:10 – Mais certains parlent aussi du jeu d'alliance avec justement Joseph Bouaké,
12:16 qui a profité de l'implantation de son parti dans certaines localités,
12:22 et qui aurait fait basculer les choses.
12:24 – Justement dans le nord-est du Libéria, c'est-à-dire la frontière de la Côte d'Ivoire,
12:28 l'alliance avec Presse Johnson,
12:32 M. Jouéa a perdu certains de ses alliés lors de cette élection,
12:36 au contraire M. Bouaké qui paraît un peu en transition,
12:40 il a un certain âge, donc ce n'est pas sûr qu'il ait le même pile en 2029-2030,
12:44 donc c'est une occasion pour le parti qui pense à l'après M. Bouaké de sceller certaines alliances,
12:51 et donc l'équipe de Presse Johnson a choisi l'adversaire de M. Jouéa,
12:57 donc je pense qu'ils auront le poste de vice-président,
13:00 et c'est une manière pour eux aussi de se préparer pour l'année 2029,
13:03 qui, à proprement parler, ne devrait pas avoir M. Bouaké comme candidat.
13:08 Donc il y a ce jeu d'alliance aussi qui a joué, mais ils sont tous des autochtones,
13:12 c'est une remarque, que ce soit M. Jouéa, que ce soit le président élu,
13:16 que ce soit Presse Johnson, c'est tous des autochtones qui essaient de
13:20 assurer la pérennité du pouvoir qu'ils ont rudement acquis à partir de 1980,
13:24 c'est un élément également qui compte maintenant,
13:27 que devient l'élite des esclaves affranchis dans ce jeu d'alliance,
13:31 qu'est-ce qu'ils pèsent aujourd'hui, qu'est-ce qu'ils valent aujourd'hui,
13:34 quels sont leurs attentes, on verra avec le président qui vient d'être élu.
13:39 – On va parler justement de ce profil déjà dans l'exécutif,
13:43 mais pour nos téléspectateurs, qu'est-ce qu'on peut dire de plus
13:46 pour comprendre cette personnalité bien connue des populations libériennes ?
13:50 – Joseph Bouaké ? – Oui, Jean Bouaké.
13:52 – Oui, Joseph Bouaké, si vous voulez,
13:55 représente ce que le docteur a appelé les natifs, les récentes…
13:59 – Les autochtones ?
14:01 – Les natifériens de source multiséculaire, pour paraphraser un peu notre pays.
14:07 Donc Joseph Bouaké, vous savez, par le passé c'était une lutte
14:11 entre ces ressortissants, ces autochtones libériens et ceux venus du Libéria.
14:17 Et vous vous souvenez de l'époque de William Tobman, ensuite William Tolbert,
14:22 qui a été dans cette lutte de pouvoir, Samuel Doué, qui est aussi un autochtone,
14:29 était parvenu à renverser le régime de William Tolbert en 1980.
14:33 Et donc ça, ça consacrait le retour des autochtones au pouvoir.
14:38 Malheureusement, il y a eu plusieurs tentatives,
14:41 ce pouvoir a été mal géré et ça a créé des clivages.
14:44 Vous savez bien que ceux qui avaient pris le pouvoir en 1980,
14:46 en plus de Samuel Doué, il y avait le vieux Thomas Kouyongpa et Harrison Pénou.
14:51 Alors ceux-là aussi étaient considérés comme des autochtones.
14:54 Malheureusement, dans les luttes de pouvoir, ils ont été éliminés par Samuel Doué.
14:58 Donc cela a permis de créer quelques clivages encore davantage,
15:02 même au sein de la population autochtone.
15:04 C'est ainsi que survient la tentative de coup d'état de 1985,
15:08 dans laquelle était, semble-t-il, impliqué Charles Taylor.
15:12 Donc c'est par là que, c'est à partir de ce moment-là que le libéria,
15:16 bon peut-être avant que le libéria bascule vraiment dans la violence,
15:20 et on avait là le début de la prémisse d'une guerre civile qui n'a pas raté en 1989,
15:27 lorsque George Weah, Charles Taylor, réfugié aux États-Unis, revient pour une revanche.
15:32 Donc, George Weah, Samuel, Charles Taylor est considéré comme un ressortissant américain.
15:42 Donc cette lutte a continué et c'est ce qui, ça a été difficile,
15:46 puisque Helen Sirleaf a continué d'exercer le pouvoir,
15:50 elle aussi descendante d'Américains noirs.
15:53 Et le retour de George Weah était considéré comme une revanche des autochtones.
15:58 Et je pense qu'aujourd'hui, nous sommes un peu comme dans le scénario du libéria,
16:03 de l'Afrique du Sud, avec l'ANC, où les autochtones continuent d'exercer le pouvoir,
16:08 mais pour quels résultats ?
16:09 Donc, Joseph Bouakai, si vous voulez,
16:11 représente une sorte de continuité par rapport aux autochtones.
16:15 C'est vrai, une alternance par rapport à George Weah,
16:17 mais une continuité par rapport aux autochtones.
16:19 Donc le symbole est fort, mais ça nous permettra quand même de savoir le bilan,
16:24 et de justifier un peu si ces autochtones avaient des raisons d'évincer les natifs du pouvoir.
16:30 – Mais à l'écouté, il n'y a pas de véritable rupture, vous validez cette théorie ?
16:35 C'est quand même deux programmes, deux visions, deux modèles différents.
16:38 Ou le fait qu'ils soient des autochtones, ça suppose une certaine continuité,
16:43 peut-être la conservation du pouvoir, c'est ce que vous voulez dire ?
16:45 – Bon, on peut dire qu'il soit un conflit à propos d'une guerre
16:48 comme celle que le libéral a connue, c'est un seul programme,
16:51 c'est la reconstruction post-crise.
16:53 Et donc dans un tel contexte, c'est plus la question des leaders
16:58 qui pourraient marquer la différence.
16:59 Aujourd'hui, c'est non plus le président Weah qu'on voit,
17:02 c'est le président Bouakai qu'on voit, mais ça devrait être la continuité,
17:05 la scolarisation de la jeunesse libérienne, la construction d'infrastructures sanitaires,
17:12 les routes, la voie arrière, donc la question de l'employabilité,
17:15 les relations économiques et internationales, etc.
17:18 Je pense que ce sera pratiquement le même programme qui va se poursuivre
17:22 pour un pays qui soit dans un conflit armé avec ses nombreux morts,
17:25 donc consolider la paix, et là c'est une grande victoire de M. Georges Weah
17:31 d'avoir accepté la défense.
17:34 – Oui, justement, parce qu'il y a eu des affrontements pendant la campagne.
17:38 – C'est ça, il y a eu des morts d'hommes.
17:39 – Voilà, il y a eu des morts d'hommes ici et là,
17:43 et des incidents ont donc été rapportés entre les deux tours,
17:45 faisant craindre même les lendemains de l'élection.
17:48 On s'attendait à une crise post-électorale,
17:50 surtout à l'issue d'un vote serré, mais c'est le contraire qui s'est passé.
17:55 Déjà, comment l'expliquez-vous, et a-t-on évité le pire dans cette affaire ?
17:59 – Je pense, oui, que le pire a été évité.
18:02 Je pense que c'est vraiment un salut pour le président Georges Weah.
18:05 Déjà, avant la fin des proclamations, on a appelé son adversaire pour le féliciter,
18:10 faire une déclaration publique, on a perdu les élections, félicitations à l'adversaire.
18:14 C'est une leçon quand même dans cette CEDEAO qui a réunie avec le coup d'État.
18:19 Les présidents qui organisent des élections, qu'ils acceptent de perdre,
18:23 il n'y en a pas beaucoup dans l'espace CEDEAO.
18:25 – C'est un salué, son fair play est salutaire.
18:29 – Et six ans, ça passe vite.
18:31 – Dans ce contexte géopolitique.
18:32 – Six ans, ça passe vite, à 2029, Georges Weah pourrait être candidat encore
18:35 contre M. Bouké ou alors celui que le gars Bouké aura choisi.
18:40 – Confirmez ce geste salutaire.
18:43 – Oui, moi je pense que c'est moins la victoire de Joseph Bouakai
18:45 que l'élégance de Georges Weah qui a reconnu aussitôt sa défaite.
18:51 Parce que cette reconnaissance a permis une certaine désescalade
18:56 qui était en train d'être remise en cause par rapport à ses militants.
19:02 – Mais ça nous dit quoi ?
19:03 Que ça dépend des chefs, comme vous le dites, les populations,
19:06 comme on le sait, on a eu des morts quand même.
19:08 Mais il a fallu que le patron du parti dise "on a perdu, on passe à autre chose"
19:13 pour calmer les ardeurs.
19:15 – Oui, mais même si les ardeurs ne sont pas calmées,
19:17 elles sont désormais sans objet.
19:19 Puisque même quand vous vous battez, c'est pourquoi.
19:22 Pour mettre Georges Weah au pouvoir, lui-même a déjà reconnu sa défaite.
19:25 Donc désormais, toute tentative de se maintenir par ses militants
19:31 était désormais sans objet.
19:33 Donc ce qu'il faut saluer ici, c'est l'acceptation des résultats par Georges Weah.
19:39 Et ça, c'est une denrées rare dans notre sous-région.
19:42 Vous savez, l'histoire récente même de la Côte d'Ivoire en dit long
19:45 sur l'inviolabilité des résultats du scrutin qui sont fortement remis en cause,
19:53 généralement, on ne va pas continuer de dire, dans nos jeunes démocraties,
19:57 mais en tout cas dans nos pays.
19:58 Donc la reconnaissance de sa défaite par Georges Weah,
20:02 je pense que ça devait être salué à sa juste valeur.
20:06 Parce qu'en réalité, ce n'est que parti remis.
20:08 Georges Weah savait déjà qu'il n'avait pas d'autre alternative que de partir,
20:14 mais en réalité, en reconnaissant cette défaite,
20:17 il se recule pour mieux sauter.
20:18 Et puis on a l'impression qu'il part à la tête haute
20:21 et qu'on parle plus de sa rénonciation au pouvoir
20:26 qu'à la célébration de la victoire de Macron.
20:28 Qu'est-ce qui lui a marqué ce scrutin ?
20:30 C'est l'image qui se culte dans l'imaginaire collectif.
20:33 Un président qui organise les élections,
20:35 une élection qui s'est organisée sans l'appui,
20:38 pour la première fois, du système des Nations Unies.
20:40 Et il n'y a pas eu trop de grands scandales de tricheries,
20:42 on n'a pas eu les 115% de votants, on n'a pas eu les 150% d'électeurs.
20:46 Et donc tout le monde a accepté le résultat,
20:49 et haut les mains, le monsieur a accepté de perdre l'élection qu'il a organisée.
20:54 Il part et je pense que dans six ans, il reviendra
20:58 et il a toutes ses chances de gagner pour l'image qu'il laisse
21:01 à la postérité, à l'histoire politique de la sous-région.
21:04 Mais quels sont les défis, vous l'avez dit, d'un pays en construction ?
21:07 C'est d'abord un chantier économique qui attend son successeur.
21:12 Je pense que Joseph Bouakai, en tout cas si je m'en tiens à sa déclaration de bonne foi,
21:18 a le meilleur profil.
21:19 C'est un ancien de la Banque mondiale, ça veut dire qu'il a les clés.
21:22 Il est censé être un expert de la question économique.
21:26 Aujourd'hui, le Libéria a 7,6% d'inflation, comme je l'ai dit,
21:29 et la croissance est autour de 4,8 points.
21:32 C'est complètement disproportionné, parce qu'un pays comme le Libéria,
21:35 il faut au minimum une croissance à deux chiffres.
21:38 Et Joseph Bouakai, qui a été ministre de l'Agriculture, sait que l'économie du Libéria
21:43 repose en réalité sur l'agriculture.
21:45 C'est vrai, c'est une zone diamantifère, une zone où il y a du fer, où il y a de l'or,
21:50 mais en réalité, l'économie libérienne continue de reposer sur du caoutchouc naturel,
21:55 sur le bois, sur l'exploitation agricole.
21:58 Donc, je pense que le défi aujourd'hui, c'est de moderniser cette agriculture
22:03 et de mettre les Libériens au travail.
22:04 C'est vrai que je ne suis pas tout à fait optimiste quant à la capacité de Joseph Bouakai
22:09 de relever ce défi, mais je pense qu'aujourd'hui, il a toutes les cartes en main,
22:13 il a la légitimité populaire, il a bénéficié d'alliances de chefs de guerre,
22:19 ça dit notamment, tu prends Johnson, donc il n'y a pas de menace de déstabilisation a priori,
22:24 donc il devrait pouvoir mener à bien sa politique et mettre les jeunes au travail.
22:29 En tout cas, l'un des principaux défis également, c'est la question de la pauvreté,
22:34 la pauvreté et de la lutte contre la corruption, parce que n'oubliez pas que le sortant,
22:40 son régime avait été gangrené par cette corruption, d'ailleurs, trois de ses proches,
22:43 notamment son chef de cabinet, il avait été contraint de le mettre à l'écart de son système.
22:49 – Quelle leçon faut-il retenir déjà, vous le disiez, par rapport,
22:53 comparaison n'est pas raison, mais par rapport à ce qui se passe dans l'espace de la CEDAO,
22:56 vous me disiez que c'est des élections, on va dire, dont le résultat est positif,
23:01 puisque on reconnaît sa défaite, quelle leçon ?
23:05 Aussi, par rapport au profil de Jérôme Joa, ça veut dire quoi ?
23:07 Que malgré tout un réseau, tout un cardé d'adresses,
23:11 on n'est pas forcément le meilleur candidat à une élection présidentielle ?
23:15 – Non, développer un pays, apporter des éléments de réponse
23:19 à la vie de 6 millions de populations comme au Libéria,
23:22 ce n'est pas une affaire de leadership individuel, c'est toute une équipe,
23:25 c'est une vision holistique qui demande beaucoup de personnes de bonne volonté,
23:30 qu'on n'a pas toujours, c'est un saluage pour M. Georges Rouya
23:33 qui a accepté de sanctionner trois de ses proches, c'est rare dans l'espace CEDAO,
23:37 dans les siècles restreints de nos dirigeants, de voir un président qui accepte
23:41 de laisser ses proches collaborer au milieu de la justice,
23:43 on n'en trouvera pas, on en trouve assez rarement,
23:46 donc tout cela pour moi, c'est l'affaire de M. Georges Rouya,
23:49 un président exceptionnel, qui a un bilan qui a fait passer le taux de croissance
23:53 à 4,8% en contexte post-conflictuel, c'est immense pour un pays comme le Libéria,
23:57 surtout que ce n'est pas un pays qui dispose de grandes ressources,
24:01 même pas d'université, selon les normes sur les journaux, la guerre n'est pas passée là,
24:06 et la guerre du Libéria ce n'est pas une guerre qui s'est passée ailleurs,
24:09 donc pour moi M. Georges Rouya est vraiment le plus grand vainqueur de cette histoire,
24:16 avec le résultat qui a été assez sérieux, ses électeurs étaient à la hauteur de leurs besoins,
24:20 leurs besoins sont énormes, il ne pouvait pas y répondre en 6 ans,
24:23 il a compris la leçon, il s'est héritié, M. Bouké vient, et puis bon, on ne verra pas la suite.
24:27 – Mais l'un l'autre dit, oui, 6 ans ce n'est pas long, il peut se représenter,
24:31 vous pensez qu'il va, et il peut, poursuivre une carrière politique, Georges Rouya ?
24:35 – À mon avis, a priori, en tout cas l'État actuel de la Constitution libérienne,
24:40 rien ne le contraint à rester dans le starting block,
24:45 il peut se régénérer à partir de 2029,
24:49 et aujourd'hui quand tu vois la texture du message qu'il adresse après sa défaite électorale,
24:54 on sent bien qu'il est en train de faire les yeux doux au peuple libéré,
24:59 en tout cas essayer de peaufiner son image, se donner l'image d'un démocrate,
25:02 de quelqu'un qui met les intérêts de l'État, de la République au devant de ses propres,
25:08 donc je pense que ce message-là, c'est un message subliminal
25:12 en direction de la population libérale pour leur dire "je reviens bientôt".
25:16 – C'est pareil, vous pensez que ce n'est pas un adieu, c'est juste un au revoir politique ?
25:21 – Bon, on verra par la suite, je pense que pour un homme politique,
25:27 quand on a déjà eu à assumer ce genre de responsabilités,
25:29 et qu'on a des secrets encore illisibles, c'est difficile de se retirer,
25:34 mais en 6 ans il peut avoir d'autres leaderships.
25:36 – On peut imaginer une coalition ?
25:37 On peut imaginer peut-être une nomination de Georges Rouya à un poste éminent ?
25:41 – Oui, oui, oui, je pense, j'y songe, Fondation Moïbrahim, l'Union africaine, l'ONU,
25:47 de plus en plus, c'est d'occuper les présidents qui sortent, qui ont perdu des élections,
25:51 ou alors qui ont fini leur mandat, de sorte à laisser les prédécesseurs gouverner en toute tranquillité.
25:56 Je pense que Georges Rouya devrait passer moins de temps,
25:59 en tout cas les 2-3 prochaines années au Libérat, ça je le pense.
26:02 – Allez, ce sera le mot de la fin, messieurs, merci infiniment,
26:04 c'est déjà la fin de cette émission, merci à vous de nous avoir suivis,
26:08 restez sur RTI 1 et à la réalisation, Fofana Mamedou.
26:13 [Musique]

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